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BIBLIOTHÈaUE
s^
DES HAUTES ÉTUDES
DU M1NIS1KRE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE
SCIENCES PHILOLOGIQUES ET HISTORIQUES
CEIfT-DOUZltKE nSCIGliLI
QUATR1ÈUE PAItTIE DE r,A CHRONIQUE SYRIAQUE
DE DENÏS DE TELL-MAimÉ
PUBLIÉE d"apBÈS le manuscrit CLXII DE LA BIBLIOTHÈQUE VATICANE
AVEC UNE TRADUCriON FRANÇAISE
UNE INTRODUCTION ET DF9 NOTES HISTORIQL'ES ET PHII.OI.OCIQIES
PAR M. J,-B. CHABOT.
PARIS
IJBRAIHIE EMILE BOUILLON, ÉDITEUR
67. RUE DK IIKHKLIKU, AU PRFMIKR
1895
K
i Ô9057
CHALON-SUR-SAONE, IMP. FRANÇAISE ET ORIENTALE DE L. MARCEAU
<• » •
CHRONIQUE
DE
DENYS DE TELL-MAHRÉ
QUATRIKMF? PARTIE
CHALON-SUR-SAONE, IMP. FRANÇAISE BT ORIENTALE DE L. MARCEAU
CHRONIQUE
DE
DENYS DE TELL-MAHRÉ
QUATRIÈME PARTIE
PUBLIÉE ET TRADUITE PAR
J.-B. eH*BOT
TRADUCTION FHAXÇAISE
PARIS
IJBUAIlilE EMILE BOUILLON, ftniTKLK
67, RUK DE RtUMEI.IKl', AU PHKMIER
1895
Sur Tavis de M. Ch. Clbrmont-Ganneau, directeur de la
Conférence d'Archéologie orientale, et de MM. A. Carrière et
H. Derenbourg, commissaires responsables, le présent mémoire
a valu à M. Jean-Baptiste Chabot le titre à! Élève diplômé de la
Section d'histoire et de philologie de C École pratique des Hautes
Études,
Paris, le 7 janvier 1894.
Le Directeur de la Conférence
Les Commissaire» responsables^ d'archéologie orientale.
Signé: A. Carrière, Signé : Ch. Clkrmont-Ganneau,
H. Derenbourg.
Le Président de la Section,
Signé : G. Paris.
««
J
A MONSIEUR
CLERMONT-GANNEAU
MEMBRE DE l'iNSTITUT
DIRECTEUR d'ÉTUDES A L'kCOLE DES HAUTES ÉTUDES
HOMMAGE RESPECTUEUX DE SON ÉLÈVE
INTRODUCTION
DENYS DE TELL-MAHRÉ
SA VIE. — SES ÉCRITS
/
I
Denys, patriarche des Syriens jacobites', auteur de l'ou-
vrage que nous publions aujourd'hui, figure au premier rang
parmi les écrivains de sa secte qui florissaient au ix® siècle.
Ses écrits, — du moins ceux qui sont parvenus jusqu'à
nous^ — ne fournissent aucun renseignement sur sa vie.
Mais sa biographie nous a été conservée avec assez de dé-
tails dans la Chronique ecclésiastique de Bar HébréusV
Denys naquit en Mésopotamie, au petit village de Tell-
Mahré, situé près de la rivière du Balikh, entre les localités
actuelles de Er-Rakkah, l'ancienne Callinice, et de Hins-
Maslamab*. Nous ne connaissons ni le nom ni la condition
de ses parents^ ni même l'année de sa naissance que nous
devons placer, par conjecture, vers la fin du vin® siècle.
Il fit son noviciat dans la vie religieuse au monastère de
Qen-Nésrê*. Ce couvent, fameux dans l'histoire des Jaco-
1. C'est-à-dire des Syriens monopby sites. Cf. Assbmani, Dissert, de Syris
monophysitis^ passim.
2. Bar HsBRiBi Chronicon ecclesiaslicum, éd. Abbeloos et Lamy. Loyanii,
1S72. t. ], coll. 343-386. — C'est toujours à cette édition que se rapportent nos
citations de la Chronique ecclésiastique de Bar Hébréiis.
3. Cl. HOPPMANN. Z. D. M, b., t. XXXII (1878), p. 742, n. 2.
4. Ce monastère est aussi appelé couvent de Bar Aphtonius (Bar Hbbr.,
Chron. eccles,, 1, 259).
X DENYS DE TBLL-MAHRÉ
bites, était situé près de la ville de ce nom, cité très
florissante au moment de la conquête musulmane, qui
n'est plus aujourd'hui qu'une misérable bourgade sur les
bords du Covaïc, à une bonne journée de marche au sud
d'Alep'.
Le monastère était, à cette époque troublée, un véritable
centre de culture intellectuelle. Les lettres grecques surtout
y étaient enseignées avec succès. C'est là que furent initiés
aux connaissances helléniques deux des hommes qui firentle
plus grand honneur à la littérature syriaque : Thomas
d'Héracloe, auteur de la recension du Nouveau Testament
qui porte son nom, et Jacques d'Édesse, l'auteur le plus uni-
versel qui ait écrit en langue syriaque*.
Nous ne savons pas combien de temps Denys put jouir en
paix des loisirs de l'étude à Qen-Nésrê. Le couvent fut
détruit par un incendie, en 815, et cet accident amena forcé-
ment la dispersion des moines.
Denys se retira alors au couvent de Mar Yaqoub, à
Kaisoum, entre Alep et Édcsse', dans le district de Sa-
mosate, autre monastère célèbre qui devint même plus tard
momentanément le lieu de résidence du patriarche jacobite*.
Quelques auteurs ont cru, à la suite d'Assemani', que
Denys avait aussi mené la vie religieuse dans le monastère
de Zouqcnin, près d'Amida. Mais, comme Ta fait observer
Wright •, la phrase qui a donné lieu à cette supposition
parait devoir s'entendre dans un tout autre sens. L'expres-
sion de notre auteur qui appelle ce couvent « notre monas-
1. AssEMANi, Dissert, de Syris monophys,, p. 85. Rittbr, Erdhunde
WesUAsien, XVl Th., V Abth., pp. 1592, 1597.
2. Ou lit aussi dans la vie du patriarche Julien (1595) qu'il avait appris le
grec à Qen-Nésrô, et dans celle du patriarche Georges (f 790) qu'il y avait
étudié les saintes écritures dans les livres syriaques et grecs. — Cfr. Assb-
MANi, lUbl. or. A. I, p. 267, 290, 295 et 326.
3. AssEMANi, Dissert, de Syris monophys,, p. 75.
4. Bar HvAMiAiUS, Chron. écries.^ 1, 486.
5. Bibl, orient.^ t. 11, p. 98.
6. Syriac Literature, nouv. éd., p. 196.
INTRODUCTION XI
tère », signifie très vraisemblablement a notre monastère à
nous jacobites », sans la moindre allusion à une relation
personnelle entre l'auteur et ce lieu\
C'est donc à Qen-Nésrô et ensuite à Kaisoum, que Denys
s'adonna aux études historiques.
Des troubles religieux le firent sortir de sa retraite et
amenèrent son élection au patriarcat.
Le patriarche jacobite, Cyriaque, était engagé dans une
vive controverse avec les moines de Cyrrhus et de Goubba-
Barraya au sujet de l'emploi des mots pain céleste usités
dans la liturgie. Les moines mécontents refusaient obstiné-
ment de reconnaître son autorité et s'étaient choisi un pa-
triarche dans la personne d'Abraham, moine du célèbre cou-
vent de Qartamin, situé près de Mardin, en Mésopotamie*.
Cyriaque mourut en 817.
Selon Bar Hébréus* les moines de Cyrrhus et de Goubba,
qui n'avaient pas réussi à entraîner de nombreux partisans,
désiraienteux-mômesprofiter de cetévénementpourse réunir
au reste de la secte. Ils allèrent trouver Tanti-patriarche
Abraham et lui dirent : « Jusqu'à quand demeurerons-nous
dans le schisme? Le patriarche Cyriaque qui voulait faire
supprimer les paroles à propos desquelles nous nous sommes
séparés, est mort. Il faut maintenant nous réconcilier avec
rÉglise. » Abraham leur répondit : « N'ai- je pas moi-môme
souffert l'ignominie à cause de vous? Attendons jusqu'après
l'élection du nouveau patriarche. Si on choisit (juelqu'un qui
emploie ces paroles, ne fût-ce qu'une seule fois, que je sois
anathème si je n'abdique aussitôt ma dignité pour rentrer
dans le silence. » Cet homme rusé et astucieux espérait que
les évoques, dans la crainte de voir les dissensions se pro-
longer, le choisiraient lui-môme pour patriarche.
Au mois de juin de Tannée 818, un synode de quarante-
1. Voir ci -dessous, p. 54.
2. Cfr. AssBMANi, Dissert, de Syris monophys.f p. 76.
3. Chron. eecL, col. 346.
XII DENYS DE TELL-MAHRÉ
cinq évoques se réunit à Callinice pour procéder à l'élection
du patriarche, sous la présidence du maphrian Basile I*"".
Le maphrian, qui avait son siège à Tagrit, était une sorte de
métropolitain suprême qui exerçait sur les diocèses jacobites
de la Mésopotamie et de la Syrie une autorité analogue à
celle du patriarche sur les diocèses de l'Occident, et presque
indépendante de ce dernier* . Abraham y vint lui-môme avec
une bande de moines qui commencèrent à exciter de vives
discussions au sujet des moU pain céleste.
Le synode s'occupa d'abord de cette question et finit par
décider que chacun serait libre de réciter ou d'omettre ces
paroles, selon son bon plaisir, sans qu'il pût être inquiété au
sujet de sa conduite à cet égard.
On rétablit ensuite la paix entre le maphrian et les moines
du couvent de Mar Mattaî, qui étaient aussi engagés dans
une autre controverse dont nous parlerons plus bas.
Quand ces affaires furent réglées, on songea à procéder à
l'élection du patriarche. Chacun des évêques prit la parole à
son tour. Beaucoup d'entre eux déclarèrent qu'ils ne connais-
saient personne dans les monastères de leur juridiction qui
fût digne d'être élu. Quelques-uns proposèrent des per-
sonnages célèbres, entre autres un certain Mar Euthonius,
qualifié de Docteur et Interprète. L'évêque de Kaisoum,
Théodore, prit la parole à son tour : « Il y a chez nous, dit-il,
un frère du nom deDenys qui est venu du monastère de Mar
Jean Bar Aphtonius, de Qen-Nésrô. Il y a deux ans qu'il est
près de nous et nous savons qu'il est digne d'être choisi pour
patriarche. » L'avis de Théodore prévalut. Les évêques
souscrivirent à l'élection de Denys et donnèrent leur con-
sentement par écrit, à commencer par le maphrian Basile
qui présidait le synode.
Denys n'avait point été consulté. Il était simple moine
et n'avait pas reçu les ordres. Théodore avait peut-être
quelque soupçon des répugnances avec lesquelles le religieux
1. Cfr. ci-dessous, p. 8, n. S.
INTRODUCTION Xltl
accepterait la nouvelle de son élection. Toujours est-il qu'on
prit les précautions nécessaires pour éviter un refus de sa
part et l'obliger à accepter la dignité que le synode voulait
lui conférer.
Denys nous avait retracé lui-même, dans ses Annales, le
récit de son ordination. Le fragment a été conservé par Bar
Hébréus*. En voici la traduction : « Jusqu'à ce jour je m'étais
appliqué à l'histoire. Je n'ai loué ni blâmé quelqu'un en
faisant acception de personne. Je cherchais un autre écrivain
qui pût corriger mes erreurs et transmettre lui-même à la
postérité ce qu'il aurait jugé bon dans mes écrits. Personne
ne me connaît mieux que moi-même ; sans vouloir faire de
la fausse humilité, je reconnais et confesse ma faiblesse et mon
incapacité. J'étais le moindre et le plus méprisable des
hommes. Cependant, je ne sais comment, les vénérables
Pères furent prévenus, ou plutôt trompés, dans leur jugement
sur moi. Comme des hommes simples, ajoutant foi à des
rapports étrangers, ils envoyèrent deux moines courageux au
monastère de Mar Yaqoub, où je résidais, car les moines de
Qen-Nésré étaient dispersés. Ceux-ci étant donc venus vers
moi, s'emparèrent de ma personne et me gardèrent à vue,
comme un malfaiteur, jusqu'à l'arrivée des évoques qui me
parurent encore plus durs et tout à fait sans pitié. Je fus
conduit malgré moi au milieu du synode, et, tandis que je
protestais, en pleurant et en me prosternant, de ma faiblesse
et de mon incapacité, ils se jetèrent violemment sur moi^ et
se levant de leurs sièges, ils se précipitèrent à mes pieds,
bien que je proclamasse que le sacerdoce était chose diâScile
à accepter, non seulement pour moi, homme vil et mépri-
sable, mais môme pour ceux qui sont parvenus au sommet
de la vertu. Il y avait à craindre que je ne persévérasse dans
mon refus. Le vendredi ils m'ordonnèrent diacre dans le
monastère du Pilier* ; le samedi ils me firent pi être dans le
1. Chron. eccL^ col. 340-351.
2. Ou couTeat de Bizooa, près de Callinice.
XIV DENYS DE TELL-MAHRÉ
couvent de Mar Zachéo ; enfin le dimanche l*'*'août 1129 (818)
ils me promurent à l'ordre parfait du souverain sacer-
doce, dans IVglise métropolitaine de la ville de ('allinice, et
m'établirent héritier et possesseur des sièges, comme ils
disent, moi qui ne suis pas môme digne de dénouer les
cordons des souliers. »
Ce fut Théodore, évoque de Callinice, qui lui imposa les
mains.
L'anti-patriarche Abraham devint furieux en voyant ses
espérances trompées. S'adressant aux évécjues de Goubba-
Barraya qu'il avait amenés avec lui : « Voyez, leur dit-il, ce
qu'ont fait lesévêques; ils se sont choisi un patriarche dans
un couvent où la formule pain céleste a été abolie. Mainte-
nant donc, par la parole de Dieu, je vous prescris de laisser
mon corps sans sépulture jusqu'à ce que vous ayez établi un
autre patriarche pour me remplacer, et je vous défends de
vous réconcilier avec ceux-ci. »
Comme on le voit, les débuts du nouveau patriarche ne
s'annonçaient pas sous des auspices favorables.
Denys, plein de zèle et de bonne volonté, entreprit,
aussitôt après son élection, la visite du territoire soumis à sa
juridiction et commença par la région septentrionale. Il
essaya de ramener à l'obéissance les habitants de la Cyrrhes-
tique qui avaient suivi dans le schisme les moines de la
capitale. Ces derniers paraissaient d'ailleurs beaucoup moins
attachés à leur opinion que ceux de Goubba-Barraya.
Il se rendit donc àCyrrhus où le peuple s'assembla avec les
prêtres et les diacres. Ayant appris qu'il ne défendait pas
l'usage des paroles : pain céleste, ils s'attachèrent à lui.
Ce premier succès ne fut pas de longue durée. L'antipa-
triarche Abraham ayant lancé une sentence d'excommuni-
cation contre les habitants de Cyrrhus, ceux-ci se séparèrent
de Denys.
Le patriarche quitta Cyrrhus pour aller à Antioche, lieu
du siège patriarcal, avec l'intention de se rendre ensuite à
Bagdad en traversant la Mésopotamie. Il lui fallait en effet
INTRODUCTION XV
obtenir du pouvoir civil un diplôme de confirmation de son
autorité. Depuis l'invasion musulmane, ces diplômes étaient
indispensables aux patriarches de toutes les confessions. Ce
n'était pas une simple approbation de Tëlection déjà faite,
mais en même temps une reconnaissance, ou plutôt une sorte
de délégation de l'autorité judiciaire que les évêques con-
tinuaient d'exercer, avec l'agrément de la puissance civile,
dans les affaires litigieuses des chrétiens soumis à leur juri-
diction. Ces diplômes n'étaient accordés le plus souvent qu'au
prix de fortes sommes \
Le khalife était alors Âl-Ma*moun\ aussi connu sous le
nom de ^Abdallah III ; ce prince était bon et tolérant, protec-
teur éclairé des lettres et des arts. Il accorda sans difficulté
le diplôme d'usage, et le patriarche reprit le chemin de la
Syrie.
Les habitants deTagrit avaient invité le patriarche, lors de
son retour, à passer chez eux la fête de Pâques; mais le
maphrian Basile avait, de son côté, écrit à Denys pour le dis-
suader d'accepter les offres bienveillantes de ses diocésains,
lui disant « que le moment présent, où les chrétiens venaient
d'être opprimés par un récent édit de l'autorité civile, était
inopportun». Le patriarche abandonnant donc la route de
Tagrit etde Mossoul, prit le chemin de l'Euphrate, gagna
Circesium, séjourna quelque temps dans les villages de la
région du fleuve Haboura, et remontant ce cours d'eau,
visita la célèbre ville de Nisibe et la florissante cité, aujour-
d'hui ruinée, de Dara. Du village de Kepher-Touta, il
regagna Callinice, pour saluer l'émir *Otman, gouverneur de
la région. Il obtint de celui-ci l'autorisation de faire recons-
truire le couvent de Qen-Nésrê, détruit par un incendie,
comme nous l'avons dit plus haut.
Près de Téléda, aujourd'hui Hasya ou ïJassieh, dans le
1. Cfr. Éloge de Mar Ùenha, par le moine Jean, publié par nous dans le
Journ, Asiatique^ IX* série, t. V, p. 131, n.
2. Cfr. Wbil, Geschichte der Chaliphen, II, pp. 200-294.
XVI DENYS DE TELL-MAHRÉ
désert de Syrie, sur la route de IJonis à Damas, se trouvait
un couvent imporUint connu sous le nom de monastère
d'Eusebona, qui devait surtout sa réputation au séjour
qu'avait fait dans son enceinte le célèbre stylite saint
Siméon. Les moines de ce couvent avaient embrassé le parti
d'Abraham. Le patriarche, en regagnant Antioche, les visita
et les ramena à l'obéissance.
A cette nouvelle inattendue, Abraham se rendit à Callinice
près de Témir 'Abdallah Ibn Tahir dans le but de s'assurer
la protection de ce dernier. Denys, averti du fait, se rendit
de son côté près de 'Abdallah. Les deux adversaires furent
introduits en présence de l'émir et admis à faire valoir leurs
arguments.
Bar Hébréus raconte ainsi l'issue de cette entrevue' :
« Après beaucoup de discours de part et d'autre, l'émir com-
manda à l'un des siens de sortir et d'interroger les chrétiens
qui se tenaient à la porte, pour savoir quel était leur pa-
triarche. La multitude s'écria: « Abraham n'est point notre
patriarche, il n'est pas même chrétien. » L'émir s'emportant
alors contre Abraham : «Je vois bien, lui dit-il, que tu n'es
qu'un menteur et un imposteur. » Il ordonna en outre de le
dépouiller des ornements patriarcaux et le chassa en lui
disant: « Que je ne t'entende plus appeler patriarche. Va,
retourne à ta solitude, et congédie les moines qui sont avec
toi. » Denys rentra à Antioche, heureux de son succès. Mais
les partisans d'Abraham ne se tinrent pas pour battus.
L'antipatriarche avait un frère nommé Siméon, homme
très audacieux, qui se chargea de rétablir les affaires des
dissidents, fort compromises par le jugement de *Abdallah.
•Ali, le gendre du Prophète, avait, disait-on, autrefois
octroyé un diplôme au monastère de Goubba-Barraya, con-
cédant certains privilèges à ce couvent*. On tira le vénérable
1. Chron, eccL, col. 356.
2. Les prétendues concessions de diplômes faites par *Ali sont très nom-
breuses. Voir une communication à ce sujet dans les Mémoires du Congrès
des Orientalistes de Genèce (1894).
INTRODUCTION XVII
parchemin des archives et on le confiai Siméonqui se rendit
à Bagdad, muni du précieux document.
Il manœuvra si bien dans la capitale, et les partisans
de *Ali furent, paraîtril, si touchés en voyant l'écriture de
leur ancêtre, qu'ils lui obtinrent de Ma'moun un diplôme
annulant la décision de Témir* Abdallah.
Siméon revint en hâte à Callinice, où il réunit un grand
nombre de moines. Denys, prévenu des agissements de ses
adversaires, y accourut aussi et plaida chaleureusement sa
cause auprès de l'émir. Cependant, 'Abdallah, en voyant
le diplôme du khalife rapporté par Siméon, hésita quelque
temps sur le parti qu'il devait prendre. Il se décida enfin à
expédier lui-môme un messager à Bagdad. L'envoyé revint
au bout de vingt jours apportant un nouvel édit de Ma*moun
annulant le diplôme accordé à Siméon.
^Abdallah livra Abraham à la discrétion du patriarche.
Selon l'ujage des jacobites, le patriarche ne peut sortir de sa
demeure sans être coiffé de la coussila, sorte de tiare somi-
sphérique, considérée comme insigne de sa dignité. Denys
se contenta d'arracher la coussita qui recouvrait la tête
d'Abraham et chassa celui-ci de sa présence.
L'an ti patriarche retourna à Cyrrhus. Bientôt il excita
de nouveaux troubles parmi les chrétiens de cette ville. La
nouvelle en parvint aux oreilles de l'émir 'Abdallah qui le
fit amener, enchaîné comme un malfaiteur, et le fit dépouiller
de ses vêtements en sa présence et en celle de ses familiers,
afin de le couvrir de confusion, dans l'espoir qu'il cesserait
de fomenter la division. Malheureusement pour Denys, il
n'en fut rien.
En 825, 'Abdallah fut envoyé en Egypte pour apaiser la
rébellion de *Obaidallah Ibn as-Sarl\ Il resta dans ce pays en
qualité de gouverneur jusqu'en 827. Son frère, Mohammed
Ibn Tahir, avait été nommé à sa place gouverneur de la
1. Cfr. WÛ8TENFELD. Die Statthalter oon yEgypten, l Ablb., p. 32 sqq.
De Sacy, Relation de C Egypte, par Abd-Allatif, pp. 501-508, 552^57.
XVIII DENYS DE TBLL-MAHRÉ
Mésopotamie. Loin d'imiter ^Abdallah dans sa modération,
il sipnala son arrivée par une violente persécution contre les
chrétiens. Les Édosseniens surtout curent à souffrir de sa
part. La plupart des édifices religieux qu'ils avaient cons-
truits avec l'autorisation des khalifes furent détruits ou con-
vertis en mosquées. En présence des maux qui affligeaient
son peuple, Denys se décida à entreprendre le voyage
d'Egypte, pour prier 'Abdallah d'intervenir près de son
frère et de faire cesser la persécution.
La traversée ne fut pas heureuse. Une violente tempête
jeta le navire dans le port de la ville de Tanis « qui est
comme une île au milieu d'un lac formé par les branches du
Nil et la Méditerranée ». Les chrétiens de la ville, au nombre
d'environ trente mille, l'accueillirent avec empressement.
Le patriarche jacobite d'Alexandrie, Jacques', vint aussi
avec des évêques le visiter en cet endroit. Ils se réjouissaient
de le voir, car depuis le temps de Sévère le Grand (f 617),
aucun patriarche d'Antioche n'était venu en Égyptô.
Denys rappela à Jacques un pacte d'union, conclu autrefois
entre les églises d'Antioche et d'Alexandrie, par les pa-
triarches de ces deux sièges. Il avait été convenu que les
lettres synodiques du patriarche d'Antioche seraient lues
dans les églises soumises à la juridiction de celui d'Alexan-
drie, et réciproquement.
Mais, observe Denys : « Nous avons constaté que chez
eux on omettait ces lectures, parce que la science des
livres était négligée. » Ce qui veut probablement dire qu'à
cette époque les Alexandrins négligeaient complètement
l'étude du syriaque, langue dans laquelle étaient rédigées les
lettres du patriarche d'Antioche.
De ce lieu, Denys se rendit auprès de 'Abdallah Ibn Tahir,
dans un endroit appelé le Camp des Perses. L'émir, qui le
tenait en grande estime, l'accueillit favorablement : « Qu'a-
vais-tu besoin, lui dit-il, d'entreprendre ce voyage fatigant,
1. Cfr. Rbnaudot, Hist. pair. Alexandr.^ p. 266 et suiv.
INTRODUCTION XIX
puisque tu pouvais t'adresser à moi par lettre? » Le patriar-
che lui répondit par les compliments d'usage et lui exposa
ensuite la triste situation faite aux chrétiens par son frère.
L'émir, consentant à ses désirs, écrivit de sa propre main à
Mohammed^ le blâmant de sa conduite et lui défendant de
molester le patriarche ou de léser les privilèges des églises.
Encouragé par cette bienveillance, Denys voulut témoi-
gner sa reconnaissance aux habitants de Tanis qui l'avaient
si bien accueilli, en leur obtenant une diminution et une
répartition plus équitable dos impôts. Chaque habitant riche
ou pauvre était taxé pour cinq dinars, sans égard à sa
condition. 'Abdallah statua qu'à l'avenir les riches payeraient
quarante-huit zouzé, ceux de condition moyenne vingt, et
les pauvres seulement douze.
Nous avons dit que les habitants d'Édesse surtout avaient
eu à souffrir de la persécution excitée par Mohammed. Or,
levèque d'Édesse, Théodose\ était le propre frère de Denys.
Il avait accompagné ce dernier en Egypte, pour présenter à
l'émir les doléances de ses ouailles. « Il est étonnant, dit Bar
Hébréus*, qu'on ne trouve, dans les ouvrages de Denys,
aucune mention de cet homme, qui fut pourtant un savant
distingué. Il avait traduit du grec en syriaque les composi-
tions poétiques du Tliéolo(]ien*,2i\i témoignage du moine
Antoine le Rhéteur, dans son cinquième discours intitulé
Rhétorique à Philoponos, où il vante sa connaissance éten-
due de plusieurs langues. »
Le patriarche quitta l'Egypte et revint en Syrie, heureux
du succès de ses démarches. Il espérait sans doute jouir enfin
d'un peu de calme. Il n'en fut rien.
Les jacobites de Nisibe avaient alors pour évoque un
intrigant nommé Philoxène. L'archidiacre Nonnus*, homme
d'une grande piété et très considéré, l'accusa de crimes
1. Cfr. Wright, Syriac Literattuv, p. 203.
2. Chron. eccl.^coX, 362.
3. Saint Grégoire de Nazianzc.
4. Cfr. Wrigut, Syriac Literature, p. 205.
XX DENYS DE TELL-MAHRÉ
abominables, devant un synode de quarante évoques, réuni
dans la petite ville de Ris*aln. Philoxène fut déposé.
Il se tourna dès lors du côté de Tan ti patriarche Abraham
qui, on le conçoit, accueillit avec empressement cette nou-
velle recrue. Une partie des chrétiens de Nisibe demeurèrent
attachés à Philoxène : de là la division et le trouble dans
cette église.
Au commencement de l'année 829, le patriarche se mit en
route pour Bagdad, afin de conférer avec le sultan Al-
Ma*moun au sujet d'un 6dit motivé par les dissensions sur-
venues entre les Juifs à propos de l'élection de leur chef, édit
dans lequel les chrétiens se trouvaient impliqués indirec-
tement.
Les Juifs avaient eu à élire leur chef de la dispersion.
Ceux de Tibériade avaient choisi un certain David; ceux de
Babylone avaient donné leurs suffrages à un nommé Daniel,
de la secte des 'Ânanites, qui profanaient le sabbat et obser-
vaient le repos du quatrième jour de la semaine. L'affaire fut
portée au tribunal de Ma*moun. Le khalife rendit un édit
déclarant « que si dix hommes appartenant à la môme con-
fession, réunis ensemble, voulaient se constituer un chef
religieux, personne ne devait les en empêcher, quelle que
fût leur religion; fussent-ils juifs, chrétiens ou mages ».
On voit combien ce décret favorisait le schisme et l'insu-
bordination. Ce fut un des principaux motifs qui décidèrent
le patriarche à entreprendre le long et dispendieux voyage
de Bagdad.
Il y avait alors pour évèque jacobite dans cette ville un
certain Lazare Bar Sabhtha, aussi connu sous les noms de
Philoxène et de Basile, selon Assemani'. La plus grande par-
tie des diocésains étaient hostiles à cet évèque. Dès l'arrivée
du patriarche, avant même que celui-ci eût pu obtenir une
audience du khalife, ils déposèrent entre ses mains une
accusation contre Lazare. Le patriarche promit d'examiner
1. Cfr. Wright, Syriac Literature, p. 204.
INTRODUCTION XXI
TaSaire lorsqu'il serait de retour à Tagrit, afin que ces dis-
cussions entre les chrétiens ne devinssent pas un sujet de
dérision pour les païens, et peut-être aussi pour témoigner sa
déférence au maphrian.
Le peuple impatient ne voulut rien entendre. On multplia
les accusations et les preuves contre Lazare, et le patriarche
fut contraint de le déposer. Mais Tévéque avait ses partisans;
il s'ensuivit des troubles parmi les chrétiens et la chose
parvint aux oreilles du khalife. Naturellement, les défen-
seurs de Lazare rendirent le patriarche responsable de ces
divisions. «Cependant, dit Bar Hébréus^ qui nous a conservé
le récit détaillé de l'entrevue du patriarche et du khalife, —
tiré probablement des écrits mêmes de Denys, — cependant,
Ma^moun, en homme prudent, ne voulutpas molester un prélat
venu de loin pour le saluer et lui offrir des présents. Quelque
temps après, il accorda une audience au patriarche qui eut
la permission de venir seul, sans les évéques de sa suite,
trouver le khalife pendant que celui-ci faisait sa promenade
à cheval dans son jardin. Le khalife tendit la main à Denys
et lui dit : « Comment vas-tu? Comment vont tes affaires? »
Le patriarche, après les compliments d'usage, commença par
parler de l'affaire de Lazare qui, bien que jugé légalement,
condamné et déposé, osait dire : « Il y a un édit qui permet à
dix hommes d'entre nous de se choisir un chef. » Le khalife
reprit : « Nous avons rendu cet édit pour les Juifs et nous
n'avons pas l'intention de vous imposer de force un prélat. »
Le patriarche reprit : « Ta prudence n'ignore pas que depuis
le temps où nos pères vous ont livré un grand nombre de
cités, il existe entre nous et vous des promesses et des
traités assurant que nos lois ne seraient point modifiées en
un sens défavorable. La loi ne peut exister sans législateur.
Or, nous avons une loi touchant l'épiscopat. »
Le patriarche parla longuement. Le khalife l'interrompit
enfin en lui disant : « Les chrétiens, et surtout vous autres
1. Chron. eecl, eol. 36&>872.
XXII DENYS DE TELL-MAHRÉ
jacobites, vous nous causez beaucoup d'ennuis. Va-t-en pour
aujourd'hui et reviens un autre jour. »
Une dizaine de jours après le patriarche aborda un des
familiers de Ma'moun, un certain Lazare, qui se chargea de
rappeler au khalife sa promesse. Le khalife répondit : « Qu'il
vienne demain. » Il convoqua en môme temps ses juristes.
Ceux-ci vinrent avec empressement. Ma*mouû les interrogea :
« Devons-nous autant qu'il est en notre pouvoir protéger les
évoques des chrétiens? Que vous en semble? w Les légistes
ré[)ondirent : « Non, nous devons seulement ne pas les con-
traindre par force à changer leur religion et leurs coutumes,
pourvu toutefois qu'ils gardent l'obéissance et qu'ils vivent
tranquilles, contents de la paix dont ils jouissent sous notre
gouvernement. » Quand ceux-ci furent partis, le patriarche
dit au khalife : « Tes ancêtres, d'heureuse mémoire, ont
reconnu notre patriarcat et nous ont donné des diplômes,
comme tu m'en as donné toi-môme. Qu'on ne porte donc pas
maintenant une nouvelle loi contre nous. » Le khalife lui
demanda : « Mais pourquoi donc cette loi est-elle plus oné-
reuse pour les chrétiens que pour ceux qui professent
d'autres religions? » Le patriarche répondit : « Les autres
se plaignent aussi; mais, en outre, le pouvoir des juifs et
des mages est un pouvoir temporel, le nôtre est un pouvoir
spirituel. Chez eux, quand il est lésé, sa perte peut se com-
penser au prix de l'or; chez nous, c'est notre foi même qui
est atteinte. La preuve, c'est que les peines que nous pro-
nonçons contre les coupables ne sont point la mort ou la
spoliation des biens; mais s'il s'agit d'un évêque ou d'un
prêtre, il est déposé; s'il s'agit d'un laïque, il est excommu-
nié. » Le khalife reprit : « Nous ne vous empêchons point
de déposer un coupable ni de le priver de sa dignité; mais
nous pensons que vous n'avez pas le droit d'excommunier
quelqu'un, ni de l'empêcher de venir à la prière, car ce
sont surtout les pêcheurs qui doivent prier Dieu et lui de-
mander pardon de leurs fautes. »
Le khalife finit cependant par reconnaître le bon droit du
INTRODUCTION XXIII
patriarche. Il donna ses ordres à un juge nommé Lazare :
« Examine Taffaire, lui dit-il, et si Tévêque Lazare est vrai-
ment selon sa profession de foi le sujet du patriarche, qu'on
exécute la sentence de ce dernier. »
Le patriarche quitta ainsi le khalife après avoir obtenu
gain de cause et mérité des éloges pour sa constance.
Ces choses se passaient au mois de mars de Tan 829.
Denys demeura à Bagdad jusqu'au mois d'octobre. A cette
époque il ordonna un évoque pour succéder à Lazare; puis il
reprît le chemin d'Antioche. Il passa par Tagrit et par
Mossoul. Sur ces entrefaites, le maphrian Basile étant mort
dans le monastère de Anikia, près de Balada, ville située sur
leTigre à une quinzaine de lieues de Mossoul, Denys ordonna
pour lui succéder un moine nommé Daniel, du monastère de
Bir-Koum, dans la même région. Au mois de décembre, il
gagna la Syrie.
L'année suivante (830), le patriarche ayant appris que le
khalife se trouvait à Kaisoum, se rendit dans cette ville pour
lui présenter ses hommages. Mais il ne l'y rencontra point.
Ma'moun était parti subitement pour Damas. Le patriarche
prit le parti d'aller le rejoindre dans cette ville. Il lui fît
remettre les présents qu'il avait apportés avec lui. Le khalife,
satisfait, accueillit favorablement Denys. Il se disposait alors
à descendre en Egypte et donna ordre au patriarche de
l'accompagner dans ce pays.
L'expédition de Ma*moui> était motivée par la révolte des
chrétiens de la basse Egypte, connus sous le nom de Basmou-
riks'. Ils appartenaient à la secte des Jacobites. Le dessein
du khalife était de leur envoyer Denys comme négociateur.
Il espérait que le patriarche d'Antioche aurait assez de
crédit pour amener les rebelles à la soumission. Mais les
bonnes intentions du khalife et les efforts du patriarche
1. PocKOKB dans la version d'Eutychius (t. II, p. 429) les appeUe Bya-
miUs, Bimaie, Byrmades; Lbquibn, Oriens christ,, t. II, p. 1373, les
nomme Baammyrites,
XXIV DENYS DB TELL-MAÇRÉ
furent stérilisés par le mauvais vouloir du général Aphsin\
Celui-ci fit la guerre à outrance. Il détruisit lesvillages des
chrétiens, brûla leurs vignes et leurs jardins, tua un grand
nombre d'entre eux et envoya les autres chargés de fers à
Antioche, d'où ils furent expédiés à Bagdad.
Le patriarche jacobite d'Alexandrie, Joseph*, s'était joint à
Denys pour le seconder dans sa mission pacifique. Ces deux
hommes voyant leurs efforts inutiles retournèrent près de
Ma'moun. Denys déclara à celui-ci que les chrétiens avaient
été injustement maltraités, et, avec la permission du khalife,
il quitta l'Egypte pour se rendre à Damas.
Denys avait inséré dans ses écrits le récit de son voyage.
Bar Hébréus nous en a conservé quelques fragments'. Ces
extraits intéressants ne peuvent que nous faire regretter
davantage la disparition des ouvrages de notre auteur.
Parlant du patriarche et des évoques égyptiens il s'exprime
ainsi : a Nous les avons trouvés chastes, sincères, humbles,
et pleins de Tamour de Dieu. Ils nous reçurent avec tant
d'empressement qu'ils nous rendirent tous les honneurs
réservés à leur patriarche, aussi longtemps que nous demeu-
râmes parmi eux. Nous avons cependant observé chez eux
des usages indignes de leur vertu. Ils n'étudient point les
saintes Écritures; les moines surtout manquent de cette
science. Ceux qui aspirent aux fonctions sacrées ne se préoccu-
pent nullement d'acquérir les connaissances nécessaires, mais
bien de recueillir la somme suffisante, car, à moins de deux
ou trois cents dariques, personne ne peut parvenir à Tépis-
copat. Nous les blâmâmes au sujet de ces choses. Le patriar-
che nous répondit pour s'excuser qu'il avait trouvé établi
cet usage coupable. Nous les avons aussi blâmés de ce qu'ils
ne baptisent point les garçons avant le quarantième, ni les
T. Cfr. Wbil, Geschichte der Chaliphen y\ll, 246; Wûstbnpbld, op. cit.,
I Abth., pp. 40-43.
2. Cfr. Renaudot, Hist. patriarch. Alexandr,, p. 279 et siiiv.
3. Ghron. eccl,, coll. 375-3S2.
INTRODUCTION XXV
filles avant le quatre- vingtième jour aprè§ leur naissance; ce
qui est cause que beaucoup d'enfants meurent sans avoir
reçu le baptême. )>
Denys ne décrivait pas seulement les mœurs des régions
qu'il traversa, mais au.^si les monuments.
« Nous vîmes là, dit-il, les obélisques d'Héliopolis, la
capitale des Égyptiens, dont Putiphar, le beau-père de
Joseph, était prêtre. Chaque obélisque est formé d'une seule
pierre, haute de soixante coudées, large et épaisse de six;
non pas d'une pierre tendre, mais d'une espèce de marbre.
(Les trilithes de l'autre Héliopolis, c'est-à-dire de Baalbeck,
ont seulement quarante coudées de hauteur.) Au sommet de
chacun d'eux, il y a comme une sorte de casque de soldat
en airain blanc. Chaque casque pèse plus de mille livres.
C'est pourquoi les Arabes, malgré leur avarice, n'ont pu
monter et les enlever, comme ils ont enlevé le colosse de l'île
de Rhodes, dont ils ont retiré, après l'avoir renversé et brisé,
trois mille charges d'airain. Jérémie avait prophétisé du
Christ « qu'il briserait les colonnes du temple du soleil ». Il
faut peut-être entendre cette destruction de rabolitîon du
culte, puisque les colonnes ne sont pas brisées.
» Nous avons vu en Egypte ces pyramides dont parle le
Théologien dans ses chants. Ce ne sont pas les greniers de
Joseph, comme quelques-uns l'ont pensé, mais d'admirables
édifices bâtis au-dessus des tombeaux des anciens rois. Ils
sont massifs et pleins, et non pas creux et vides. Nous avons
examiné l'ouverture qui existe sur le côté de l'une de ces
pyramides : elle a environ quarante coudées de profondeur.
Nous avons constaté que ces pyramides sont formées de
pierres taillées superposées, de manière à former une basede
cinq cents coudées de long sur autant de large, et dont les
assises vont en diminuant, de sorte que le sommet n'a plus
qu'une coudée. Elles ont deux cent cinquante coudées de
hauteur. Chaque pierre mesure de dix à quinze coudées en
tous sens. Elles apparaissent de loin comme de hautes mon-
tagnes.
•«
XXVI DENYS DE TELL-MAHRÉ
» J'ai vu aussi une construction bâtie sur le Nil, à un
endroit où le fleuve coule encore dans son plein avant de se
diviser en quatre branches. Cet édifice est comme une piscine
carrée. Au milieu se dresse une colonne de pierre sur laquelle
sont marqués des degrés et des mesures. Quand le fleuve
déborde, au mois de septembre, et que les eaux entrent dans
rédifice, les préfets de la ville viennent chaque jour pour,
observer combien les eaux ont monté sur la colonne. Si elles
restent au-dessous du quatorzième degré, il n'y a qu'une
petite partie de l'Egypte inondée : on ne sème pas de blé,
on ne perçoit pas d'impôt. Si elles atteignent le quinzième
degré, il y a une récolte moyenne et l'impôt est en propor-
tion. Quand elles arrivent à dix-sept ou dix-huit degrés les
moissons et le tribut sont complets; mais si elles vont jus-
qu'au vingtième degré elles causept la ruine, et il n'y a pas
de moisson cette année-là. »
De nouvelles difficultés attendaient le patriarche en Syrie,
à son retour de l'Egypte.
A quelques lieues au nord-ouest de Mpssoul se trouve
un monastère jacobite, connu sous le nom de couvent de Mar
Mattal. L'histoire de ce couvent, le plus célèbre de tous les
monastères de la Mésopotamie, est intimement liée à tous
les événements de l'histoire ecclésiastique qui se passèrent
dans cette région. Fondé au iv* siècle, par un solitaire du
nom de Matthieu (en syriaque Mar Mattai), il acquit promp-
tement une très grande importance \ Lors des luttes et des
divisions religieuses qui signalèrent le v« et le vi« siècle,
après diverses vicissitudes le couvent demeura aux mains
des jacobites. L'évéque de Mossoul ou de Ninive était,
d'ordinaire, le supérieur du couvent et y faisait sa résidence.
Or, nous avons dit que le maphrian résidait àTagrit. Les
moines de Tagrit avaient une église à Mossoul. Comme ils
1 . La vie de Mar Mattal est insérée dans la vie de Mar Behnam publiée par
Bbdjan [Acta martyr, et Sanct.y II. p. 397 sq.). Nous l'avons résumée dans
notre dissertation : De S. laaaci Nininitae oita, scripiis et doctrina^ pp. 4-5.
INTRODUCTION XXVII
relevaient directement du maphrian, bien que demeurant
dans le diocèse du métropolitain de Mossoul, ils refusaient
de nommer ce dernier dans les prières publiques. De là une
querelle violente entre les moines de Mar Mattaî et ceux de
Tagrit. Le patriarche fut obligé de venir en Mésopotamie
pour mettre fin à ces discordes. Il se rendit à Mossoul, en
835. Il s'efforça de satisfaire les religieux de Mossoul, qui
avaient pour eux les canons ecclésiastiques,5ans offenser ceux
de Tagrit, qui paraissaient résolus à ne pas s'y soumettre. Il
décréta donc que ces derniers ne seraient tenusde nommer le
métropolitain de Mossoul que deux fois par an: le dimanche
des Rameaux et le jeudi saint.
Le maphrian David étant mort à cette époque, Denys se
rendit à Tagrit, ordonna Thomas, son successeur, et retourna,
en Syrie.
Peu après, il entreprit de nouveau le voyage de Bagdad.
En 833, le khalife Ma'moun mourut en Cilicie, pendant une
guerre contre l'empereur de Constantinople \ Son fils
al-Mou*ta.sim lui avait succédé et venait de faire son entrée à
Bagdad. Le patriarche jugea prudent d'aller offrir ses félici-
tations au nouveau souverain. Il trouva à la cour de ce der-
nier le fils du roi de Nubie qui était venu dans le même but.
L'anti patriarche Abraham mourut en 837. Sa mort ne
mit pas fin au schisme. Les évêques, ses partisans, fidèles à
a proûiesse qu'ils lui avaient faite, se réunirent pour lui
donner un successeur. Leur choix s'arrêta sur Siméon, frère
d'Abraham, qui s'était signalé parson habileté etson dévoue-
ment à la secte, ainsi que nous l'avons vu plus haut. Le
peuple, dit Bar Hébréus, aurait voulu revenir à l'unité et se
ranger sous l'autorité de Denys, mais ses chefs Tentrainè-
rent. Philoxène, l'évéque déposé de Nisibe, imposa les mains
à Siméon qui se mit à la tête des dissidents.
Denys mourut sans avoir eu la satisfaction de voir rentrer
au bercail les brebis égarées.
1. Wbil, op. cit., II, p. 293.
XXYIII DENYS DE TELL-MAHRÉ
Ses dernières années furent abreuvées d'amertumes cau-
sées tant par les dissensions religieuses qui divisaient les
chrétiens soumis à sa juridiction, que par les vexations de
l'autorité musulmane.
Une vie si agitée avait engendré dans l'&me sensible et
compatissante de Denys une profonde mélancolie. Il en était
venu à désirer la mort qu'il regardait comme un bienfait et
une délivrance. S'adressant à Jean de Dara^ à qui il avait
dédié ses Annales, il lui écrivait en achevant son ouvrage":
(( Il n'est pas nécessaire de fatiguer ton esprit par le récit des
calamités au milieu desquelles je passe les nuits sans
sommeil et les journées sans repos. Je tairai les autres
angoisses et la multitude des souffrances qui brisent mon
.cœur et tourmentent mon corps : car un cœur attristé est un
ver rongeur qui dévore les os. Je pleure et je m'afflige d'avoir
été laissé, à cause de mes péchés, pour boire ce calice, pour
souffrir et pour avoir le cœur brisé de douleur à la vue des
peines et des calamités que supportent les enfants de l'Église.
Chaque jour nos maux s'accroissent. Il ne me reste plus
qu'une délivrance: la mort, que je souhaite comme un bien-
fait et un bonheur. » Telles étaient les dernières paroles de
son ouvrage. Il écrivait ces lignes vers l'an 844.
La mort qu'il désirait ne tarda pas avenir. Il rendit le
dernier soupir le 22 août 845. Son corps fut déposé dans le
monastère deQen-Nésré où il avait passé les premières années
de sa vie religieuse, et qu'il avait fait reconstruire. Il avait
occupé le siège patriarcal pendant vingt-sept ans et ordonné
une centaine d'évéques. Après sa mort, le siège demeura
vacant plus d'une année.
Les évêques, réunis dans le monastère de Mar Sila, situé
dans les environs de Saroug. lui donnèrent pour successeur
Mar Jean, du monastère de Mar Zachée, à Callinice. Celui-ci
reçut la consécration le 21 novembre 846.
1. Cfr. sur cet auteur Wright, Syriac Literature, p. 204.
2. Apud Bar HEBR^eus, Chron. eecL, coll. 384-386.
INTRODUCTION XXIX
II
Denys s'était appliqué de préférence aux études histo-
riques. Il écrivit, sous le titre à! Annales, un vaste ouvrage
qui embrassait la période entière de l'histoire du monde
depuis la Création jusqu'à son temps, c'est-à-dire jusque vers
l'année 837, et peut-être môme un peu plus tard^ .
Il y avait deux rédactions différentes de cet ouvrage;
l'une plus longue, dédiée à Jean, évéque de Dara, semble
avoir été disposée en une série de courts chapitres portant
des titresparticuliers.il ne nous en reste que les nombreuses
citations de Grégoire Bar Hébréus et un fragment conservé
dans le cod. cxliv de la Bibliothèque Vaticane, publié par
Assémani*.
La rédaction plus courte a obtenu le nom de Chronique.
Elle nous est parvenue dans un manuscrit, unique jusqu'à ce
jour, conservé à la Bibliothèque Vaticane. Assémani le
décrit dans son Catalogua Bibliothecœ Vaticanœ sous le
n^CLxii, en ces termes': « Codex in-folio, membranaceus,
pervetustus, foliis constans 174, Syracis Stronghylis litteris
exaratusV » Plus loin, il ajoute: « Unus ex codicibus, quos
Moyses Nisibenus, cœnobiarcha, e Mesopotamia in Sce-
tense S. Marias Syrorum monasteriumintulit*, » et il termine
en disant: (ds codex, initio et fine mutilas, ante annum
GraBCorum 1S43, Christi 932, exaratus. » Mais comme l'a
1. Bar Hbbr., CAro/i. eccl,, 1, 383-385.
2. BM. Or., II, 72-74.— Cfr. Cat. Bibl. Vat,, III, 232.
3. Tom. III, p. 328. Cfr. BibL Or., t. II, pp. 98-99.
4. Tallberg (p. 11) fait cette remarque : « Liiterae atronghylaeyiie quodam
eerte nomiDari possunt; ad morem tamen aetatum posteriorum ita sunt
accommodatae, utperpaucaetantum modo formam vere antiquam ostendant. »
5. C'est en Tan 932 qae Moyse fit une ample collection de manuscrits
pour la Bibliothèque du couvent de Scété. La plupart de ces volumes sont
aujourd'hui au British Muséum. V. Wright, Cat. o/syr. ms., préface.
XXX DENYS DE TELL-MAHRÉ
fait observer Wright \ aucune note du manuscrit ne justifie
ces dernières assertions*.
Cette Chronique, beaucoup plus courte que les Annales,
est disposée par années, à la manière du Chronicon d'Eusèbe.
Denys l'avait dédiée à Georges, chorévéque d'Amida', à
Eutélius, archimandrite*, au périodeute Lazare, au moine
Anastase, et aux autres frères du couvent.
D'après le témoignage de Tauteur lui-même, dans la
préface qui se trouve au commencement de la quatrième
partie*, la Chronique s'étendait depuis le commencement du
monde jusqu'à l'année 1086 des Grecs (774-775 de notre ère).
Cette même préface explique la distribution de l'ouvrage en
quatre sections distinctes.
La première va depuis l'origine du monde jusqu'à Cons-
tantin le Grand. L'auteur suit, comme autorité principale, le
Chronicorum Canonum Liber d'Eusèbe, mais il a aussi fait
appel à d'autres documents et y a incorporé des extraits de
V Histoire ecclésiastique du même auteur, de la Chrono-
graphie de Jules Africain, du Chronicon Edessenum^ , de la
Me^arYath Gassê ou Caverne des Trésors \ du Roman
d* Alexandre* , de VHistoire des Sept Dormants*, de la
Guerre juive de Josèphe.
Le texte de cette première partie a été publié de 1848 à
1851, par les soins de TuUberg, sous la forme, chez nous
insolite, de trente-deux thèses inaugurales soutenues par
1. Syriac Literature, p. 200| n. S.
2. Voir de plus amples détails sur ce ms., dans notre préface du texte
syriaque.
3. Cf. ci-dessous, p. %.
4. Probablement du couvent de Zouqenin. C'est sans doute ce Mar Eutal
dont il est question dans la Chronique. Cf. ci-dessous, p. 86.
5. Voir ci-dessous, pp. 1-2.
6. Cf. sur cet ouvrage Wright. Syriac LiteraturCy p. 101.
7. Ouvrage traduit en allemand par Bezold, Die SchaUhôhle, 1883. Le texte
Syriaque a paru seulement en 1888. Cfr. Syriac Literature, p. 98.
8. Publié et traduit en anglais par Budge, The Hiftory of Alewander,
Cambridge, 1889. — Cfr. Syriac Lit., p. 139.
9. Cfr. GuiDi. Testi Orientali inediti ëopra i Sette Dormienti di Efeêo (Reale
Accad. dei Lincei, ISSdj.—Cf. Syr, Lit., p. 34, n. 3.
INTRODUCTION XXXI
autant de ses élèves. La collection de ces thèses a été ensuite
réunie eu volume sous ce titre : Dionysii Tellmahhrensis
Chronici liber primus, e codice vaticano edidit, illustravit
O. F. Tullberg\ — Les extraits d'Eusèbe ont été traduits et
comparés, autant que faire se pouvait, avec l'original grec, la
version latine de saint Jérôme et la version arménienne, par
Siegfried et Gelzer, dans l'ouvrage intitulé : Eusebii Cano-
num Epitome ex Dionysii Telmahvensis Chronico petita*.
Pour la seconde partie, qui va de Constantin à Théodose
le Jeune (374-408), Denys s'est surtout servi de Socrate.
Cette partie ne présente pas beaucoup d'intérêt, et pourrait
tout au plus servir à contrôler quelques leçons douteuses du
texte original de l'historien grec.
La partie la plus intéressante del'ouvrageestcertainement
la troisième. Elle embrasse la période qui s'étend de Théo-
dose le Jeune à Justin II (408-565). L'auteur y a suivi prin-
cipalement Jean d'Asie ou d'Éphèse, son compatriote. Il y a
inséré en entier la précieuse Chronique de Josué le Stylite et
la Lettre de Siméon de Beit Arsam sur les martyrs Hymia-
rites. Ces différents ouvrages ont été édités et leur publi-
cation rend à peu près inutile celle du texte de DenysV
1. UpsalsB. 1851, 4«. — Cf. Land, Johannes BLschof con Ephesos. pp. 39-
41. — La Bibliothèque de l'Ecole des langues orientales vivantes, à Paris,
possède un exemplaire de cet ouvrage formé de la collection même des
thèses. Voici, à titre de curiosité bibliographique,les noms de ceux qui ont con-
tribué delà sorte à la publication de ce volume : J. Rosell; J. E. Ligner;
F- G. Ligner; G. F. Koraen; S. A. LeflQer; A. F. Rosengren; A. W.
Ekman; S. Brandell; L. A. Wadner; S. A. l^ffler; H. L Rydin; A. J.
Nordenstam; G. F. Koraen; O. F. Bursie; C A. Lindstrôm: V. E.
SchuUz; S. D. Fougberg;J. L. Carlberg;! U. Sôrensson;C. F. Lind-
gren; M. A. Wendbladh; A. M. Rydberg; A. F. Rosengren; A. L. Moss-
bcrg; J. I Brodén; F. VVallin (1848); G. C Carlberg; G V. Engeibrecht
(1849); S. S. Forsgàrd (1850) ; C. H. Bergman; C. V. Charleville; C. J.
Sandberg (1851).
2. Berlin, 1884. — Cfr. Gutschmid, Untersuchungen ûber d. syrische
Epitome der Euacbischen Canonca (1886) . Le texte n'a pas été toujours
fidèlement traduit.
3. Tfie third ftart of the ecclesiastical history ofJohn bÎAhop of Ephesus
now firsi eded b. W. Cuurton (Oxford, 1853). Il y a une traduction anglaise
de Payne Smith (1860) et une allemande de Schônfelder(lS62).— Johannis,
episcop. Ephes., scripta historica quotquot adhuc inedita supersunt.
XXXIl DENYS DE TELL-MAHRÉ
Enfin, la quatrième partie, qui forme l'œuvre originale de
l'auteur, va depuis la mort de Justin II jusqu'à l'année 1086
des Séleucides (774-775 de notre ère). C'est l'objet de notre
publication. Le manuscrit incomplet s'arrête à l'année 1085.
Assurément, cet ouvrage n'a pas l'importance de la Chro-
nique de Jean d'Asie, et l'analyse assez complète qui en a
été donnée par Assémani* diminue encore l'intérêt histo-
rique qui s'attache à ce texte. Cependant, comme on le
verra, bien des détails, qui ne pouvaient entrer dans le cadre
d'un résumé, méritaient d'être connus et publiés.
Si les historiens n'ont pas l'occasion de faire une ample
moisson dans ce champ assez vaste, il n'en sera pas de même
des philologues. En eflEet, dans le texte de Denys, outre des
constructions de phrases particulières à l'époque de déca-
dence littéraire où il vivait et dans lesquelles l'influence de
la syntaxe arabe se fait trop sentir, on trouve aussi un
assez grand nombre de formes jusqu'ici sans exemple, et
plusieurs mots usités avec des significations nouvelles ou
dont l'emploi justifie des acceptions regardées encore comme
douteuses'.
Pour ces motifs nous n'avons pas cru devoir supprimer
les longues et fastidieuses digressions de l'auteur ni les inter-
minables lamentations auxquelles il se laisse aller en parlant
des malheurs qui accablèrent la Syrie pendant les dernières
années.
syriace edidit J. P. N. Landi {Anecd. ayr,, t. II). Cfr. Syr. Literat., p. 108
sqq. — Chronique de Josué le StylUe, éditée par P. Martin, 1876 (dans le
vol. VI des Abhandlungen fur die Kunde der Morgenlandes); The Chronicle
ofJoshua the Stylite, by Wright, 1882. Cf. Syr. Liter., p. 78.— Guidi. La
Lettera diSimeone Vcscoro di Bet/i-Aredm eopra i Martiri Omen tt. (Reale
Ace. dei Lincei; Roma, 1881).
1. Bibl. Or,, II. pp. 98-116.
2. Voir la préface du texte syriaque.
INTRODUCTION XXXIII
III
Il nous faut dire un mot, en terminant, des principes dont
nous nous sommes inspiré dans cette publication.
Nous avons réuni dans la courte introduction qui précède
le texte syriaque un certain nombre d'observations philo-
logiques destinées à compléter celles de Tullberg\
Nous nous sommes efforce de donner une traduction aussi
littérale que possible, sacrifiant volontiers l'élégance à la
fidélité. Les notes sont peu nombreuses. Nous nous sommes
borné le plus souvent à renvoyer aux historiens qui ont traité
les mêmes sujets. Pour donner un commentaire du texte de
Denys, vu la concision de ses notices et l'étendue des matières
qu'il traite, il faudrait écrire une histoire complète de l'Orient
aux vi«-vii« siècles de notre ère. Tel n'était pas notre but.
Nous nous sommes simplement proposé de procurer à ceux
qui voudront à l'avenir traiter cette matière un document
nouveau et complet, en mettant au jour un ouvrage im-
portant pour l'histoire de la littérature syriaque.
Les données chronologiques de Denys sont pour la plupart
fautives*. Pour éviter de multiplier les notes, nous avons
préféré les redresser d'une manière générale dans les tableaux
synoptiques qui font suite à cette Introduction'. Nous ferons
aussi remarquer à ce sujet que notre auteur ne suit pas tou-
1. Dans la préface mise en tète de Touvrage cité plus haut.
2 Denys se sert dans le cours de son ouvrage de trois époques : 1* de
l'époque du monde, depuis l'origine jusqu'à Abraham; 2* de l'époque de la
vocation d*Abrabam jusqu'à Constantin; 3° de Tëre des Séleucides depuis
Constantin jusqu'à la fin. — Assémaui fait observer {BibL Or., II, 101) que
dans cette dernière chronologie, beaucoup de faits sont placés dix ans trop
tard, ce qui pourrait donner à penser que l'auteur se servait d'une ère spé-
ciale. Nous ne le croyons pas. Nous pensons qu'il faut attribuer ces erreurs,
soit aux indications erronées des sources auxquelles l'auteur a puisé, soit
au peu d'importance qu'il attribuait, comme il le déclare lui-même (cf.
p. 2, s. f.), à la date des événements, soit à la difficulté qu'il avait d'établir
une concordance exacte entre les dates des différentes ères (cf. pp. 11-12).
3. Ces tables permettront au lecteur de redresser les erreurs qui se rencon-
XXXIV DENYS DE TELL-MAHRÉ
jours, dans son récit, Tordre chronologique et que certains
faits, dont Tannée est déterminée avec précision, sont rap-
portés antérieurement ou postérieurement*. Assémani, dans
son analyse, a transposé ces données, comme il Tavait fait
pour le texte même du Chronicon Edessenum*. Nous avons
cru préférable de suivre le texte du manuscrit'.
Les chiffres en caractères gras insérés entre crochets dans
la traduction indiquent la correspondance des pages du texte
syriaque. — Les citations bibliques sont indiquées d'après
Tédition de la Pesitta^ donnée par Lée*. (Londres, 1826.)
Nous remercions sincèrement tous ceux qui ont bien
voulu nous aider de leurs conseils dans notre travail, et en
particulier M. le professeur L Guidi, qui a eu Tobligeance
de mettre à notre disposition sa propre copie du manuscrit
du Vatican*, et qui de plus a pris la peine de coUationner
nos épreuves sur ce dernier pour tous les points douteux et
spécialement pour les noms propres.
trent dans la quatrième partie de la Chronique. Comme Denys rapporte un
certain nombre d'événements qui se sont passés en Armônie, nous avons
cru bon de joindre à la liste des empereurs de Constantinople et à celle des
khalifes un tableau chronologique des princes arméniens, que nous avons
emprunté aux Mémoires historiques et géographiques de Saint-Martin
(t. I, p. 474) en conservant Torthographe des noms propres donnée par cet
auteur. Nous y ajoutons un tableau comparatif des dates fournies par Denys
et Bar Hébréus relativement aux patriarches jacobites d'Antioche.
1. Voir par exemple, pp. 10 et 11: 66 et 67.
2. Cf. Hallikr, Untcrsuchungen ûber die edessenische Chronik; Leip-
zig, 1892.
' 3. La méthode d'Assémani a l'inconvénient de faire disparaître des élé-
ments d'information sur les sources des écrivains. Nous avons donc reproduit
le texte tel qu'il se présente dans le manuscrit, en tenant compte toutefois de
la transposition d'un cahier entier et de quelques feuillets séparés, due à
Vinatlention du relieur (V. la préface du texie syriaque).
4. Nous avons préparé notre travail à l'aide du ms. 285 de la Bibl. Natio-
nale. C'est une copie du msc. du Vatican exécutée à Rome, en 1867, par
l'abbé P. Martin. Elle s'arrête au fol. 153 b du ms. de Rome et renferme
beaucoup d'inexactitudes. Nous avons eu aussi à notre disposition, pour la
partie qui va du fol. 153 & à la fin du ms., une autre copie que M. l'abbé
Graffln avait fait jadis exécuter à Rome, et qu'il nous a communiquée avec
beaucoup d'obligeance. Même avec le secours de cette double copie, il
nous eût été impossible d'éditer le texte sans la nouvelle collation que
M. Guidi a eu la bonté de nous faire.
TABLES CHRONOLOGIQUES
'[Voir ci-dessus t p, XXXIII, n, 3.]
I. — Empereurs de CSonstantinople
LISTE ET DATES*
VÉRITABLES
Jnstinien 1 527
Justin II 565
Tibère II 578
Maurice 582
Phocas 602
Héraclius 610
Héraclius-Constantin. . 641
Héracléonas-Constantin 641
Constant II 641
Constantin 1 1 1 Pogonat 668
Juslinien II (l^) 685
Léonce 695
Tibère [III] Apsimare. 698
Juslinien II (2o) 705
Philippique 711
Anastase II 713
Théodose III 716
Léon III, Vlèaurien.., 717
Constantin IV, Copro-
nyme 741
Léon IV, /c Khazare, . 775
liste et dates*
d'après denys
Justinien
Justinien IV [avec Ti-
bère 587
Tibère (seul] 590
Maurice 594
Maurice [aliani] et Théo-
dose son fils 601
Phocas 612
Héraclius 622
Constantin le Jeune . . . 654
Constantin 655
Constantin [alian] 681
Justinien 697
Léonce 707
Tibère- Apsimare 711
Justinien [aliiis]
Philippique
Anastase
Théodose- Constantin. .
Léon 717»
Constantin 741
(Léon IV) 775»
1. Les dates sont ceUes de ravènement.
i. Cf. p. U. — 3. Cf. p. 14 et p. 28. — 4. Cf. p. 2S.
XXXVI
DENYS DB TELL-MAHRÉ
U. - Khaliles.
LISTE ET DATES*
COMMUNÉMENT ADMISES
Abou-Beckr 632
Omar 1 634
Otman 644
*Ali 656
Hassan 660
LISTE ET DATES*
DONNÉES PAR DENYS
Mohammed
Abou-Beckr,
Omar(I)...
Otman . ...
620'
627
632
644
*Abbas 656
Omiades,
Mo'awia I . . .
YézidI
Mo'awiall. ..
Merwan I . . . .
Abdel -Mélik
Walid I
Soliman
Omar II
Yézidll
Hiâam.
Walid II ... .
YézidlII....
Ibrabim
Merwan II.. .
• . . .
661
680
683
684
685
705
715
717
720
724
743
744
744
744
Mo'awia 662
Yézid(I) 677
Merwan (I) 681
*Abd el-Malik 683
Walid (I) 703
Soliman 712
Omar (II) 721»
Yézid(II) 723
Hiâam 727
Walid (II) 744
Yézid(III) 744
Ibrahim 745
Merwan (II) 746
Abbaaaides.
Aboul-'Abbas alSaffah 750
Abou-Djaffar al-Man-
sour 754
* Abdallah Ibn Moham-
med 749*
^Abdallah Ibn Moham-
med» 754
1. Les dates sont celles de ravènement.
2. Cf. p. 5, U. 21 et 32. —3. V. pp. 14 et 17; cf. p. 11. 1. 20.— 4. Cf. p. 43.
- 5. Cf. pp. 55 et 62.
TABLES CHRONOLOGIQUES XXXVII
III. — Princes ▲rméniens.
Marzbans
[ou Gouverneurs notnmôs par les rois de Perse.]
571. Vartan, surnommé P'hok'hr (le Petit) prince de Daron, de
la race des Mamigonéans, prince indépendant, soutenu par
les Grecs, qui à la fin fut chassé par les Persans.
578. Mihran-Djihrveghon, Persan, nommé par Chosroèsle Grand.
593. Sempad, surnommé Pazmalaghth (le Victorieux) de la race
des Pagratides, nommé par Chosroès II.
601 . David, de la race des Saharhouniens, nommé par Chosroès II.
625. Varazdirots, fils de Sempad, nommé par Chosroès II.
Gouoerneura
[nommas par les Empereurs de Coustautinople et par les Khalifes de
Damas et de Baghdad. appelés par les Arméniens Osdigans, et décorés
par les Empereurs des titres de Patrice et de Curopalate.]
632. David, ancien marzban, nommé par Héraclius.
635. Troubles pendant une année.
636. Théodore, prince des Rheschdouniens, nommé par Héraclius.
643. Varazdirots, ancien marzban, nommé par Constant II.
644 . Sempad, fils de Varazdirots.
654 . Hamazasb, de la race des Mamigonéans, 61s de David, prince
de Daron, nommé par le patriarche et les grands du pays ;
tributaire de l'empereur et du khalife.
659. Grégoire, frère de Hamazasb, nommé par Mo'awia.
683. Troubles pendant deux ans.
685. Aschod, 6Is de Piourad, de la race des Pagratides, patrice
tributaire de l'empereur et du khalife.
690. Nerseh, prince de Schirag, de la race des Gamsaragans,
nommé par Justinien II.
693. Abd- Allah, premier gouverneur Musulman, envoyé par
AbdAlmélik.
695. Sempad, de la race des Pagratides, frère d'Aschod, fils de
Piourad; curopalate, nommé par Léonce.
704. Kasem, gouverneur envoyé par Abd-Almélik.
717. Walid, envoyé par le khalife Omar.
727. Mohammed, fils du khalife Merwan I, envoyé par Yézid II.
732. Abd-Alaziz, envoyé par Hescham.
xxxvni
DENYS DE TELL-MAHRÉ
737. Merwan (depuis lors khalife), envoyé par Hescham.
743. Aschod, fils de Sahag [Vasag?] (Pagratide), nommé prince
des princes de l'Arménie et patrice par Merwan II.
758. Yézid, nommé par Abou-Djafar-Almansour.
760. Sahag, fils de Pakarad, de la race des Pagratides, nommé
par Yézidy déposé par Almansour.
766. Souleîman, envoyé par Almansour.
769. Bekir, envoyé par le même khalife.
778. Hasan, envoyé par le khalife Mohammed-Mahady.
781. Les princes Arméniens sont indépendants et sans chef
pendant cinq ans.
IV. — Patriarches d'Jjitioche.
DATE* DE LA MORT
d*après
Denyt.
Pierre de Callinice 902
Julien I (omitt.)
Athanase le Chamellier 955
Jean 1 961
Théodore 976
Sévère Bar-Maâka 994
Athanase II 1015
Julien II 1019
Elias 1040
Athanase III
Jean II
Isaac 1066
Athanase (IV) Sandalaja
Georges
Joseph
Cyriaque
Denys de Tell-Mahré
Barfaébréoi.
902
906
942
960
978
991
998
1019
1034
1051
1066
1067
1069
1101
1103
1128
1156
1. Les années sont celles de l'ère des Séleucides.
CITATIONS BIBLIQUES
[Cette table comprend l'indication des citations textuelles et des
passages auxquels il est manifestement fait allusion. Comme l'au-
teur semble souvent citer de mémoire, on ne peut malheureuse-
ment pas, d'après son texte, conjecturer l'état de la recension des
Écritures dont il faisait usage. Tout ce qu'on peut affirmer, c'est
qu'elle s'écartait peu du texte ordinaire de la PeSitta. — On remar-
quera qu'il cite V Ecclésiastique et Tobie.]
Ancien Testament.
GBNÈSB
I. s, 14 73
I, 22-24 18
m, 6 51
IV 150
XTiii, 17-20 149
XLX, 24 71
EXODB
▼.9 98
XX, 12-17 150
LÉVITIQUB
XXV, 37 91,151
DEUTÉRONOME
▼,16-21 150
XXIII, 19 92
XXVIII, 61 143
XXXII, 7 2, 110
XXXII, 15 83, 98
XXXII, 16. 17. . . . 73
xxxii, 22, 24 128
XXXII» 46 2
JOB
111,24 76.164
111.25 59, 164
XIII, 27 142
XXXIX, 29 112
I SAMUEL
IV 71
XVI 91
II ROIS
II 21
XII 57
I CHRONIQUES
XXVllI, 9 147
PSAUMES
X.7 151
XII, 2-3 151
XV, 4-5 151
XVII, 4 150
xviu, 15 112
xviii, 38, 39, 42. 43 91
XXXV, 10 77
XXXVI, 6 35
xxxvii. 1-2 93
XXXVII, 21 153
Lv. 21 133
Lv, 22 152
Lviii, 2 151
Lix, 6 155
Lx, 3 163
LXiv, 3-7 155
LXiv. 79 112
Lxviii, 22 77
LXXVI, 10, 11 ... . 142
LXXVIll, 30 20
Lxxviii, 46 53
LXXVIll, 48-49 ... 98
ijcxix, 1.. . 116, 141
Lxxix, 1-2 114
Lxxix, 3-7,9, 10.. 116
LXXXll, 5 19
LXXXIV, 7 171
xcii, 6 19
c, 5 150
civ, 22-23 45
cvi, 40-43 116
XL
DENYS DE TELL-MAHRÉ
cvii, 27 40
cix. 16 79
cix. 17 155
cxviii, 24 57
PROVERBES
XV. 25 93
XIX, 25. . . . 116, 141
XXVI, 11 117
XXIX, 12. 91,141,164
ECCLÉSIASTE
1,15 130
II, 14 ..•••••••• i,X^
v,9 125
XIII, 23 113
[ecclésiastique
XIX, 26
I9A1E
86]
I, 11-15 115
I, 21-23 155
I, 23-24. 84, 110, 165
m, 4 155
III. 4-5 46
111,9 157
m, 12 153
111,1724 132
V, 25 116
VI, 13 76
VII, 18-19 43
VIII, 15 163
IX, 17 100
IX, 21 148
x,5 43, 142
X, 5-6 2, 100
X, Uf 14 • . • ■ • • • XvAJ
X, 23 171
X, 24-25 132
X, 28 100, 108
X, 32 100
XIII, 7 38
XIII, 14, 21, 22. . . 168
XIV, 17 91
XV, 2 38
XXI, •'•• •••••• f t7
XXIV, 1-11. 166
XXIV, 4 37
XXIV, 7 169
XXIV, 16-20 165
XXIV, 18 173
XXIV, 19 34, 42
XXIV, 20 64
XXVI, 20 132
XXVIII, 10 171
XXVIII, 16 163
xxiz, 9 34
XXIX, 14 139
XXXVII, 29, 34. . . . 75
xu,25 40
Lvi, 8 27
OSÉE
IX, 7-8. . .
XIII, 8, 15.
XIV, 1.. . .
167
109
109
JOËL
I, 2-4 53. 106
1,3 110
1,5,6,7 109
1,9 169
1,13,15 33, 132
II, 2-7 44
AM03
IV, 7-8 146
IV, 9 52
IV, 10 37, 67
VIII, 4-7, 10 145
VIII, 8 33
IX, 2 163
ABDIAS
4.
6
163, 167
.... 167
MICHÉB
11,1,2 155
v,9 67
VI, 12-15 155
VI, 15 145
VII, 2-3 154
VII.6 96
VII, 15 155
NAHUM
IL 4, 11 44
III. 16 168
HABACUC
1,6....
L 10 . . .
II, 15, 16
45
46
163
SOPHONIB
I. 8, 9, 13, 15, 17. 139
11,10 139
111,3-5 155
111,4 115
AGGÉB
I, 9-11 145
ZACHARIE
XIV, 6 (t) 159
JÉRÉMIE
1.14 40
IV, 22-23... 1.57, 168
V, 5-6 157
VI, 21-25 39
VII, 33-34 158
VIII, 1-3. 158
VIII, 21. 33
IX, 1. 10 32
IX, 15 54,144
IX, 15-16. 142,168,176
IX, 17 33
IX, 18, 20-22 32
IX, 45 136
XII, 13 51
XIV, 2-6 31
XV, 1-4 31,171
XXIII, 15 176
XXIV, 10 ... . 34, 176
XXV, 15 144
XXV, 15-17 162
XXV, 27,29-31 162
XXIX, 17 146
XXXVIII, 16 163
XLVUi, 43-44 79
Li, 46 171
Li, 58 56
CITATIONS BIBLIQUES
XLI
LAMENTATIONS
I, 4.6.9, 10 175
1.8,10 140
"»6»7 140
11,8 56
11,15.17 143
m» 49-54 173
v,2.
V, 12
EZECHIEL
h 12...
VII, 17
XII, 8.
XII, 28.
175
143
133
38
98
119
DANIEL
[tobie
XII, 7
97
15]
Nouveau Testament.
s. MATTHIEU
VII. 15-19 85
VII, 5 117
X. 14 19
XXII, 37, 39,40... 149
XXIV, 6 68
XXIV. u 158
XXIV. 16, 19-21... 68
XXIV, 23. 24, 26. . . 117
XXIV, 29 68
S. MARC
XIII. 24 68
8. LUC
IX, 5
19
IX. 23
99
X, 10
19
XXI, 25
68
S. JEAN
XI, 34
16
ACTES
IL 19 112
11,20 68
XII, 23 175
XX, 29 70,85
I CORINTHIENS
1,19 139
1 TLMOTHÉE
VI. 10 125, 147
HÉBREUX
L 1, 2 131
XI, 13 92
APOCALYPSE
XIX, 20 124
XX. 4 104
•»»
ERRATA
Page IX, 1. 12; après Tell-Mahré, ajoutez : « aujourd'hui Tell
el-Menahir, »
Page 80, 1. 9; au lieu de a Callinice », lisez : (( Qaliqala ».
CHRONIQUE
DE
DENYS DE TELL-MAHRÉ
QUATRIÈME PARTIE
[Préface']
Cette Chronique commence à l'origine du monde et court jusqu'à
la naissance d'Abraham et au royaume de Ninus qui fonda Ninive
et y régna cinquante-deux ans. Or, le patriarche Abraham est né
la quarante-deuxième année du règne de Ninus, au témoignage
d'Eusèbe à qui nous avons emprunté les matériaux de cette his-
toire jusqu'au temps du fidèle empereur Constantin.
Depuis cette époque, jusqu'à Théodose le Jeune, nous avons
suivi le novatien Socrate*.
Depuis Théodose jusqu'à l'empereur Justinien *, c'est-à-dire
jusqu'à l'an 885 des Grecs, nous avons eu pour guide saint Jean,
évèque d'Asie *.
Depuis ce temps, jusqu'à l'année dans laquelle nous sommes
actuellement, c'est-à-dire l'an 1086 d'Alexandre, 158 de l'Hégire,
nous n'avons trouvé personne qui, à l'exemple des anciens écri-
vains, ait décrit soigneusement l'histoire et les cruelles calamités
qui sont survenues du temps de nos pères ou du nôtre, notamment
cette tempête de tribulations [2] que nous avons soufferte à cause
de nos péchés quand nous avons été livrés entre les mains des
Assyriens et des Barbares.
1. Cette préface mise par Denys en tête de la partie originale de son
œuvre fait suite au rôcit précédent, dans le msc, sans aucune interruption.
2. Lire Justin II. -> Voir page 3, note 1.
.3. La question de savoir si l'historien Socrate appartenait à la secte des
Novatiens n'est pas élucidée. Le témoignage de Denys a donc quelque
importance.
4. Sur Jean d'Asie ou d'Éphèse voir Wright, Syriac Literature, nou-
velle édition, 1894, pp. 102-107. — Ouchbsne, Jean d'Asie^ historien
ecclésiastique, lecture faite à la réunion annuelle de l'Institut (25 oct. Id92).
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2 CHRONIQUE
Or, afin de conserver la mémoire de ces temps calamiteux et de
la cruelle affliction que la terre a soufferte de nos jours de la part
des Assyriens, — que le Prophète désigne quand il dit * : « Assur
est la verge de ma fureur, le bâton de mon indignation est dans leurs
mains; je les enverrai vers une nation trompeuse et je leur donne-
rai des ordres touchant le peuple de ma vengeance, » — nous
avons voulu faire connaître la verge, le bâton du Seigneur, qu'il a
livré à Assur pour châtier la terre, et qui est même apparu au ciel
pendant plusieurs jours *. Peut-être ceux qui viendront après nous
trembleront-ils, craindront le Seigneur, et marcheront devant lui
dans la justice, de peur qu'eux-mêmes ne soient livrés comme nous
aux mains de ce loup rapace.
Il est écrit ' : a Transmettez à vos fils, » et encore * : « Inter-
roge ton père et il t'instruira; demande à tes ancêtres et ils te racon-
teront. » Or, ayant parcouru nous-mêmes beaucoup de pays et
n'ayant point trouvé une histoire exacte des événements, mais
seulement l'annotation de quelques faits particuliers, nous avons
formé le dessein de réunir par ordre dans un seul livre, les choses
que nous avons apprises des vieillards témoins oculaires ou que
nous avons vues nous-mêmes. Quiconque trouvera [ce livre] et le
regardera avec mépris doit savoir que ces événements si divers ne
se sont pas passés dans un seul lieu, ni dans un seul royaume, ni
dans une seule région. Si donc il rencontre une autre chronique qui
ne s'accorde pas avec celle-ci, qu'il se souvienne que les écrivains
antérieurs eux-mêmes ne sont pas d'accord entre eux ; mais l'un
diminue, l'autre exagère, l'un écrit sur l'histoire ecclésiastique,
[3J l'autre sur d'autres sujets.
Il importe peu aux hommes sages et craignant Dieu [de savoir]
si un événement s'est passé un an ou deux ans plus tôt ou plus
tard; mais il leur suffit de connaître les châtiments des générations
passées pour qu'ils s'éloignent eux-mêmes de l'iniquité dans la
crainte d'attirer sur eux les mêmes fléaux.
Prends donc garde à toi et crains le Seigneur ton Dieu, de peur
qu'il n'envoie sur toi ces afflictions.
Nous commençons à l'année 898*.
1. Is., X, 5-6.
2. Allusion aux phénomènes météorologiques (com<>tes, étoiles filantes,
etc.) que l'auteur enregistrera plus loin.
3. Deut , XXXII, 46.
4. Deut., XXXII, 7.
5. De l'ère des Séleucides. Cette année commençait au 1" octobre 5d6de
notre ère.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ
[4] L'an 898, mourut l'empereur Justinien * et Justinien IV
régna avec Tibère-César.
L'an 901 (589-590), Justinien mourut et Tibère régna seuL
L'an 902 (590-591), mourut le saint patriarche d'Antioche,
Pierre •.
L'an 905 (593-594), mourut Tibère. Il eut pour successeur Mau-
rice qui régna huit ans.
L'an 912 (600-601), il y eut au milieudu jour de grandes ténèbres :
les étoiles s'élevèrent et apparurent comme pendant la nuit. Elles
restèrent environ trois heures, après quoi les ténèbres se dissipèrent
et le jour brilla comme auparavant. — Cette année mourut Mau-
rice. Un autre Maurice et Théodose régnèrent pendant douze ans'.
L'an 914 (602-603), Narsès, général des Perses *, s'empara
d'Ëdesse \ Étant entré dans la ville, il fit saisir et lapider l'évèque
Sévère* qui mourut dans ce supplice.
L'an 915(603-604), saint Athanase fut fait patriarche d'Antiochç ^
L'an 916 (604-605). Édesse fut prise •.
1. Il s'agit de Justin II. La confusion entre les noms de Justin et Justi-
niea est chose habituelle chez les écrivains syriens. Le Justinien IV dont
il est question ici. n*a jamais existé. Denys a adopté Tau née 893 comme
date de la mort de Justin sur la foi de la chronique de Jean d'Asie, qu'il a
suivie dans sa troisième partie. Nous avons dit dans notre introduction ce
qu'il fallait penser de la chronologie de l'auteur. Pour la rectification des
dates le lecteur est prié de se reporter aux tableaux synoptiques que nous
avons donnés à la suite de cette introduction.
i. Pierre de Callinice. — Voir Bar HiiBR.*:us, Cfiron, ceci., t. I, pp. 250
sqq. — Wright, Syr. Lit., pp. 113-114.
3. Il n'y a eu qu'un Maurice qui régna vingt ans. Théodose son fils, qui
avait été associé à l'Empire, fuUassassiné avec sos frères par ordre de Phocas,
mais Khosroès II exploita habilement la rumeur populaire qui voulait que
le jeune prince eût échappé au massacre. Cfr. Thbophane, Chronogr., ad
aun. muadi 6095; Patr. graec. t. CVIII, coL 614. Théo pu y lacté, lib. VIII,
cap. ult.
4. Narsès était le général romain. Khosroès II devait son trône à Maurice,
et voulut venger son bienfaiteur. Narsès, s'allia avec le roi de Perse contre
Phocas, s'enferma dans Édesse et fit lapider Sévère qui lui était hostile.
5. Voir RuBBNS Duval, Histoire cTÉdèsfte, pp. 222-223, note 1.
6. Voir R. Duval, Histoire d* Édesse, pp. 237-238.
7. Athanase ne succéda pas immédiatement à Pierre (ci-dessus ad ann.
90g), mais à Julien. Cf. Assbmani, Bibl, or., II, 333; Bar Hbbr.cus. Chron.
eccL, I, 259-260, note.
8. Sot la vraie date de la prise d'Édesse (probablement 609), cf. R. Duval,
Histoire d^ Édesse, p. 223, note 2.
4 CHRONIQUE
L'an 923 (611-612), Maurice fut mis à mort avec Théodose, son
fils, et Phoeas régna huit ans.
L'an 928 (616-617). Tempereur Phoeas ordonna que tous les Juifs
placés sous sa domination reçussent le baptême ^ Il envoya le
préfet Georges* à Jérusalem et dans toute la Palestine pour les con-
traindre à [5] recevoir le baptême. Celui-ci descendit [dans ce pays]
et réunit tous les Juifs de Jérusalem et des environs. Les princi-
paux d'entre eux étant entrés en sa présence, il les interpella :
« Êles-vous les serviteurs de l'empereur? » — « Oui, » répondirent
ceux-ci. — Il reprit : « Le Seigneur de la terre 'ordonne que vous
soyez baptisés. » — Usgardèriint le silence et ne répondirent pas un
mot. Le préfet leur demanda : « Pourquoi ne dites -vous rien? w
L'un des principaux d'entre eux, du nom de Jonas, répondit en
disant : « Nous consentons à faire tout ce qu'ordonnera le Seigneur
de la terre ; mais pour la chose présente nous ne pouvons la faire,
parce que le temps du saint baptême n'est pas encore venu. » Le
préfet, en entendant ces paroles, entra dans une violente colère; il
se leva, frappa Jonas au visage, et leur dit : « Si vous êtes servi-
teurs, pourquoi n'obéissez-vous pas à votre maître? » Puis il or-
donna qu'ils fussent baptisés et les força tous, bon gré, mal gré, à
recevoir le baptême.
A cett« époque brillèrent Jacques le Juif *, Athanase, patriarche
d'Antioche% Jean, évêque des Arabes*, Siméon, [évêque] de
Harran ', et Cyriaque [évêque] d'Amida V
L'an 932(620-621) les Arabes s'emparèrent de la Palestine et [de
1. Plusieurs auteurs attribuent l'édit dont il est ici question à Héraclius.
— Cfr. Baronius, Ann. ercL, ad ann. 614. l^ nature de cette persécution
s'accorde mieux avec le caractère de Phoeas,
2. Il y eut un préfet de prétoire de ce nom sous le règne de Phoeas. Un
gouverneur de Cappadoce du même nom fut mis à mort lors de la cons-
piration qui coûta la vie à la veuve de Maurice et à ses filles. S'il s'agissait
de ce personnage, l'édit dont il est question devrait être rapporté aux pre
raiers temps du règne de Phoeas.
3. Titre qui faisait partie du protocole des empereurs de Byzance.
4. Peut-être faudrait-il corriger le texte et lire Jacques d'Édesse ?
5. Cfr. plus haut, p. 3, n. 7.
6. « Arabiae episcopatus duplex fuit, altor Arabum absolute dictus, alter
Taalabensium seu Sunitarum. Prior sedem habuit in Akula, aliquaodo
etiam in l$alada; posterior in Hirta Naamensis. » Assbmani, Disnert. de
Syris monoph . , p 65.
7. Les Jacobites le regardent comme un saint et célèbrent sa fête le 3 janvier.
8. Cyriaque fut consacré évêque d'Amida en 578 et mourut en 6:i3. il
rédigea des Canons que Bar Hebrseus cite souvent dans son Nornocanon.
Cfr. Bibl. or., II, 90.
DE DENYS DE TELL-MAHRE 5
toute la région] jusqu'au grand fleuve de TEuphrate. Les Romains se
retirèrent, et passèrent dans la région orientale de TEuphrate dont
les Arabes se rendirent aussi maîtres.
Ceux-ci eurent pour premier roi l'un d'entre eux du nom de
Mohammed, celui qu'ils appelaient le Prophète, parce qu'il les
avait détournés de cultes divers, leur avait enseigné l'existence
d'un seul Dieu, créateur de l'Univers et leur avait donné des lois,
tandis qu'ils étaient adonnés au culte des démons et à l'adoration
des idoles, surtout des arbres. Parce qu'il leur enseigna l'unité de
Dieu, que sous sa conduite ils triomphèrent des Romains, et qu'il
[6] leur donna des lois selon leurs désirs, ils l'appelèrent Prophète,
et aussi Envoyé de Dieu. Ce peuple était très sensuel et charnel.
Ils méprisèrent et rejetèrent toute loi qui n'avait point pour but la
satisfaction de leurs désirs, qu'elle leur eût été donnée soit par
Mohammed, soit par tout autre homme craignant Dieu ; mais ils
recurent celle qui avait pour but la satisfaction de leur volonté et
de leurs convoitises, lors même qu'elle leur était imposée par le
plus vil d'entre eux. Ils disaient: « Cela a été établi par le Prophète
et l'Envoyé de Dieu, » et même : « Ainsi Dieu le lui avait pres-
crit. »
Mohammed les gouverna pendant sept ans.
L'an 933 (621-622), l'empereur des Romains, Phocas, mourut, et
Héraclius régna à sa place pendant trente et un ans^
L'an 934 (622-623), mourut Mar Cyriaque, évoque d'Amida, il
eut pour successeur Mar Thomas.
L'an 937 (625-626), les étoiles du ciel filèrent et se dirigèrent
vers le Nord^ semblables à des traits. Elles donnaient aux Romains
un présage terrible de leur défaite et de l'envahissement de leurs
terres par les Arabes, ce qui en effet leur arriva très peu de temps
après, et ne tarda pas'.
L'an 938 (626-627), mourut le roi des Arabes, c'est-à-dire leur
Prophète, Mohammed, et Aboubekr régna sur eux pendant cinq
ans'.
L'an 940 (628-629), l'empereur des Romains, Héraclius, com-
mença à construire la grande église d'Amida *.
1. Hist, du Bas-Empire, t. XI, p. 2.
2. A ssemani rapproche ce texte du phénomène dont parle Théophane à
Tan 23 d'Héraclius, mais à tort. Théophane parle d'une comète, tandis qu'il
s'agit ici d*une pluie d'étoiles filantes.
3. Pour la chronologie des khalifes, voir la table, à la fin de l'introduc-
tion.
4. Cfr. Hist. du Baë-Empire, t. XI, p. 158.
I
6 CHRONIQUE
L'an 943 (631-632), le roi des Arabes, Aboubekr, mourut et eut
pour successeur 'Omar qui régna douze ans\
[7] L'an 944 (632-633), l'empereur des Romains, Héraclius, des-
cendit à Édesse. Un combat fut engagé à Gabita* et les Perses mis
en pièces se retirèrent de la Mésopotamie.
L'an 948 (636-637), les Arabes envahirent la Mésopotamie^ et,
après avoir taillé en pièces les Romarns, leur chef Yâdh* parvint à
Édesse.
L'an 952 (640-6411, les Arabes mirent le siège devant Dara et
attaquèrent cette ville. Il y eut de nombreux morts des deux côtés,
mais surtout de celui des Arabes. Enfin, un traité ayant été conclu,
la ville ouvrit ses portes et dès lors personne ne fut plus tué*.
Cette même année, ils assiégèrent Adabin% oii une grande
multitude fut mise à mort : jusqu'à douze mille Arméniens [pé-
rirent'].
L'an 953 (641-642), les Arabes s'emparèrent de Césarée de
Palestine*.
L'an 955 (643-644), le patrice Valentin', général des Romains,
vint pour combattre les Arabes. Il fut saisi de crainte en leur prè-
1. HUt, du Bas-Empire, l. XI, pp. 217 et 220.
2. raëiBôc. Cedrbnus, ad ann. 24 Heracl. (Patr. gr., t. CXXl, col. 815).
ra6r,e5. Theoph., Chronogr, (ibid., t. CVIII, col. 691. — Cfr. Histoire du
Bas-Empire, XI, 206, d. 1). Bien que Tissue de la campagne ait été favo-
rable aux Romains, cependant Théodore, frère d'Héraclius, fut défait dans
ce combat.
3. Tbéopbane, au lieu de Djairehy qui signifie proprement tle^ et désigne
la Mésopotamie, écrit constamment Arménie.
4< ^Lc Assemani lit As. Mais il n*y a pas de doute possible sur l'identité du
personnage. D'ailleurs la traduction du Jo par le X surmonté d'un point
est chose habituelle en syriaque.
5. Cfr. Hist, du Bas-Empire, t. X, p. 442. n. 1; t. XI, p. 2, n. 1, et
p. 269.
6. Denys désigne sous ce nom Dovin, capitale de l'Armônie et résidence
du patriarche. Cfr. Hist. du Bas-Empire, t. XI, p. 334. Saint-Martin,
Mém, sur l' Arménie, t. I, pp. 119-120; 1I,31>5.
7. Les historiens arabes ont recueilli d'après la tradition courante les
faits qui ont signalé la conqucue de la Mésopotamie, et les conditions de la
paix conclue avec les principalf-s villes. Voir \e Licrc da* conquêtes des pays
de Beladhoki (éd. de Goeje, Leyde, I5i66 ; pp. 172 sqq.). Cet auteur a servi de
base à Ibn al-Athir (IT, pp. 414-417) et à Yâkout (sous le mot DJcsireh). Les
principaux passages sont reproduits et traduits dans Duvai,, Hist. d'Êdcsse,
pp. 229 sqq.
8. ,Hi8t. du Bas-Empire, t. XI, p. 266.
9. Cfr. Thkoph., Chronogr,, ad ann. m. 6136.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 7
sence et prit la fuite en abandonnant toutes les richesses qu'il avait
avec lui, dont les Arabes s*emparèrent.
Cette même année, Procope et Théodore' firent une excursion
impétueuse jusqu'à Batna-Saroug*. Ils dévastèrent et pillèrent cette
ville et, s'étant emparés de tout ce qu'ils voulurent, ils retournèrent
dans leur pays.
Le patriarche Athanase eut pour successeur saint Jean, son dis-
ciple* •
A cette époque s'illustrèrent saint Jean, patriarche d'Antioche ;
Jean, évèque des Arabes; Siméon [évèque] d'Édesse; Matthieu,
évéque d'Alep', du saint monastère de Zouqenin', et Mar Thomas,
évèque d*Amida, du même monastère.
[8] L'an 956 (643-644), mourut 'Omar, roi des Arabes. Il eut pour
successeur Othman qui régna douze ans.
L'an 960 (648^9), Mo awia envahit Chypre, et la même année,
Arade • fut prise.
L'an 961 (649*650), mourut Mar Jean, le saint patriarche d'An-
tioche. Il fut enseveli à Amida et déposé dans l'église de Saint-
Mar- Zo ara'.
La même année, mourut saint Mar Jean, évèque des Arabes,
qui fut déposé à Amida dans l'église de Saint-Jean-Baptiste.
Cette même année, mourut encore à Amida saint Mar Siméon,
évèque d'Édesse*, qui fut également enseveli dans l'église de Mar-
Zo*ara.
1. Théodore le Reâdounien. Cfr. Hiêt du Bas-Empire, t. XI, pp. 332 sqq. ;
Hist. des guerres et des conquêtes des Arabes en Arménie, par Ghbvond,
trad. fr./pp. 5 sqq.; Saint-Martin, Mém. sur l'Arménie^ II, p. 336.
2. La Bizrri de Procope. Cette ville était située au sud de Hiérapolis
(Maboug), à Touest de TEuphrate. Voir Assbmani, Diss. de monoph., p. 107.
3. Cfr. Bar HEBRiEUS, Chron. eccL, I, 275.
4. Cfr. Bar HBBRiBUS, Chron. eecL, I, 276.
5. Couvent situé près d' Amida, aujourd'hui Diarbekir. Cfr. Assbmani,
Bibl. or.,I, 130.
6. "Apa^oc. —Histoire du Bas- Empire, t. XI, pp. 338,339.
7. Sur ce célèbre stylite de l'Église jacobite, voir Bar HRORiEus, Chron.
ecel.^ I, 206, et surtout Land, Anecdota syr., t. II, pp. 12-22, où son histoire
est rapportée d'après Jean d'Asie .
8. Siméon ne succéda pas immédiatement à Sévère (ci-dessus, ad ann.
603). Deux autres évoques, au moins, occupèrent le siège épiscopal entre ces
personnages, sans parler des évéques nestoriens imposés à la ville par les
Perses. Cfr. Du val. Histoire d'Édesse, pp. 237-239. Assbmani range â tort
Siméon et ses successeurs, Cyriaque et Jacques, parmi les évéques ortho-
doxes. M . Duval dit que « l'assertion peut être fondée en ce qui concerne
Siméon «. Je ne le crois pas. Les Jacobites n'auraient jamais permis qu'on
enterrât un orthodoxe dans un des plus célèbres de leurs couvents.
i
8 CHRONIQUE
L'an 962 (650-651), Mar Théodore* devint patriarche d'Antioche.
Ëdesse eut pour évoque [Cyriaque*].
L'an 063 (651-652), les Arabes et les Romains livrèrent bataille à
Tripoli".
L'an 964 (652-653), Habib* envahit la Mésopotamie, et Procope*
vint pour conclure la paix avec les Arabes.
L'an 965 (653-654), lempereur des Romains, Héraclius, mourut
après un règne de trente et un ans^; il eut pour successeur Cons-
tantin le Jeune qui régna un an.
L'an 966 (654-655), ce Constantin mourut et fut remplacé par un
autre Constantin' qui régna vingt-sept ans.
L'an 967 (655-656), mourut 'Othman, roi des Arabes.
La discorde s'éleva entre eux, la région fut agitée et le peuple
arabe rempli de confusion. Les maux se multiplièrent sur la terre,
il y eut du sang répandu en abondance parmi eux et par eux-
mêmes, car ils ne voulaient pas se soumettre à un seul prince;
mais chacun s'empara du pouvoir, tous désirant régner. Un géné-
ral du nom de Mo'awia, qui était dans la région occidentale", ambi-
tionnait le pouvoir. Les Occidentaux l'aimaient, le choisirent [9] et
se soumirent à lui ; mais la région orientale et la Mésopotamie le re-
jetèrent et élirent un autre général, appelé 'Abbas% qu'ils établirent
1. Cfr. Bar Hbur.i^us. Chron. ercl., !, 280.
2. Ce nom est ajouté à la marge dans le manuscrit. — Sur Mar Cyriaque,
cfr. Du VAL, Ht st. dlidense, p. 240.
3. Hist, du Bas-Empire, t. XI, p. 368.
4. Hist, du Bas-Empire^ t. XI, pp. 319, 334.
5. Cfr. Thëophanb, Chronogr., ad ann. m. 6142.
6. Hist, du Bas-Empire, t. XI, p. 283.
7. Lire Constant. L'auteur passe sous silence Héracléonas. Cfr. His^t. du
Bas-Empire, i. XI, p. 288, 290, 292.
8. La région occidentale : c.-tVd. la Syrie et l'Egypte, par opposition à
la Mésopotamie et à l'Assyrie qui formaient la région orientale. Ces termes
chez les écrivains jacobites font ordinairement allusion à la division de cette
secte en deux grandes proviuce.s ecclésiastiques, dont l'une était soumise au
patriarche d*An(iocbe et l'autre au maphrian de Tagrii.
9. C'est évidemment *Ali, qui est appelé ici *Abbas. — Assemani {Bibl,
or., t. II, p. 103) explique ainsi cette substitution de nom : « Verum quia
Dionysiusin Syria scribehat, Syri autem Maviae, ut supra dixi, adbserentes,
memoriam Ali ejusque filiorum exosam habebant, ex illius nationis geoio
tam Ali quam ejus filiorum nomina e numéro Chalipbarum ejçpunxere
eorumque annos ad Maviae principatum retulerunt. Abbasi autem meminit
Dionysius, tum quia hoc nomine loUi Ali familia apud Syros appellabatur,
tum quia unus ex flliis Ali. Haseni et Hosaini frater, fuit Abbasus, quem
una cum Hosaino, anno Hegirse 60, a Jazido Maviae filio, int«rfectum
fuisse testatur Abulvalidus. »
DE DENYS DE TEL! -MAHRÉ 9
roi. Dès lors commencèrent parmi eux les luttes et TeSusion du
sang. Ils rassasièrent mutuellement la terre de leur sang. Ils se
livrèrent de nombreux combats en tous lieux, et un laps d'environ
cinq ans s'écoula au milieu de ces discordes et de ces luttes.
L'an 968 (656-657), une grande bataille fut engagée à Çofa^ , entre
'Abbas et Mo'awia, et le sang coula en abondance de part et d'autre.
L'an 973 (661-662), 'Abbas fut perfidement 'mis à mort par ses
grands, un vendredi, tandis qu'il était agenouillé pour la prière.
Dès lors Mo'awia occupa seul le pouvoir et régna vingt et un ans,
y compris les cinq ans que durèrent la discorde et la lutte entre lui
et 'Abbas.
L'an 976 (664-665), mourut saint Mar Théodore, patriarche
d'Antioche. Il eut pour successeur saint Mar Sévère Bar-Maska*.
[A Édesse, Tévêque Mar Jacob succéda à Cyriaque *.]
A cette époque brilla le Perse Aaron, surnommé l'Interprète
perse.
L'an 988 (676-677), Mo'awia, roi des Arabes, mourut et eut pour
successeur Yézid qui régna trois ans et demi.
[10] L'an 990 (678-679), le dimanche trois du moisde\nisan
(avril), eut lieu un grand et violent tremblement de terre qui ren-
versa Batna-Saroug, ainsi que Téglise Ancienne d'Édesse. dans
laquelle une foule nombreuse périt.
L'an 992 (680-681), mourut Yézid, roi des Arabes, et Merwan
régna à sa place pendant un an*.
La même année mourut Constantin, empereur des Romains, au-
quel succéda un autre Constantin pendant seize ans\
L'an 993 (682-683), mourut Merwan, roi des Arabes; il eut pour
successeur 'Abd el-Malik qui régna vingt et un ans. Sous ce règne
eut lieu une dissension qui dura neuf ans pendant lesquels les
Arabes, refusant d'obéir à un seul chef, ne cessèrent de se faire la
guerre et de répandre les maux.
1. C'est le lieu appelé par les Arabes Si fin ou SifTin. Tbéophane transcrit
Sair^piv. Voir HUt. du Das-Em/nre, t. XI, p. 373, n. 3. pour le site exact
de ce lieu.
2. Cfr. BarHkbrvKUS. Chron. ercL.l, 282-288.
3. Cette mention est ajoutée à la marge du ms. Elle doit se lire ici. Cfr.
Beeue Critique, 19 juin 1803. p. 485. — Entre Cyriaque et Jacques, il faut
placer un certain Daniel. Cfr. Hist, d'Édesse, p. 241.
4. a Maviam Jazidi et .•Vbdallam Zobairi filios omittit Dlonysius eorumque
imperii annos ad Mervani principatnm refert. Vide Tbeophanem ad ann.
CoDst. Pogonati 15, ubi ortos inter Arabes post Jazidi obitum tumultus
narrât. » Assbmani, Bibl. or. ,11, 104.
3. Hist. du Bas- Empire, t. XI, p. 404.
10 CHRONIQUE
I/an994 (682-683), saint Mar Sévère Bar-Maèka mourut et le
siège patriarcal resta vacant pendant cinq ans, à cause de la dis-
corde des évèques.
L'an 999 (687-688), saint Athanase fut élu patriarche'.
L*an 1002 (690-691), la paix régna, et toute la région consentant
à reconnaître 'Abd el-Malik pour souverain, il monta sur le
trône.
L'an 1003 (691-692), Abd el-Malik fit le ra'fl?i7S c est-à-dire im-
posa les Syriens. Il fit paraître un édit sévère pour que chacun
allât dans son pays, à son village d'origine, y faire inscrire son
nom, le nom de son père, sa vigne, ses oliviers, ses biens, ses en-
fants et tout ce qu*il possédait. Telle fut l'origine du tribut de
capitation ; telle fut l'origine [ 1 1 J de tous les maux répandus sur les
chrétiens. Jusqu'alors, en effet, les rois prenaient le tribut de la
terre, mais non des hommes. Dès lors les enfants de Hagar
commencèrent à imposer la servitude égyptienne aux fils d'Aram.
Mais, malheur à nous 1 parce que nous avons péché les esclaves
régnent sur nous. — Ce fut là le premier cens que firent les
Arabes •.
L'an 1014 (702-703). mourut Abd el-Malik, roi des Arabes, après
un règne de vingt et un ans, y compris les neuf années de discorde.
Walid régna à sa place pendant neuf ans..
L'an 1015 (703-704), mourut saint Athanase, patriarche d'An-
tioche, auquel succéda saint Mar Julien *.
L'an 1016 (704-705), il y eut une grande et violente peste sur la
terre, de sorte que les hommes ne pouvaient suf&re à enterrer les
morts. Elle sévit surtout dans la région de Saroug. Dans ce fléau
soixante-douze hommes moururent dans le seul monastère de
Mar Silas \
1. Bar HBBKiBUS, Chron, eccles., I, 288.
2. « Ta*dil qnod œquationem sigoiflcat ...nuoc charagium appellant. »
Absbmani, Bihl. or,, II, 104.
3. L'assertion de Denys ne parait pas exacte. Cfr. Hist. d'Édease, p. 228,
n. 2. — C'est *Omar qui établit dans les provinces conquises Timpôt de
c-apitation. Bar HEBR£ua Taffirme {Chron. syr., p. 103). Cbdrbnus et
Théophane sont d'accord avec lui sur ce point. Assemami {Bibl, or,^ II, 104)
et Lebbau [HLst, du Bas-Empire, t. XII, p. 23) ont donc tort de mettre
le fait en doute. On a quelques exemples de villes ou de provinces dans
lesquelles les chrétiens furent exemptés de cet impôt. C'est sans doute ce
qui aura induit Denys en erreur.
4. Bar Hrbrj«:us, Chron, eccL, I, 294.
5. Ce monastère était situé dans les environs de Saroug. Cfr. ci-dessus,
p. 7, n. 2.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 11
L'an 1008 (696-697), mourut Constantin, empereur des Romains ;
il eut pour successeur Justinien qui régna dix ans *.
L'an 1017 (705-706), un synode se réunit dans \e monastère de
Mar Silas. Les principaux membres de ce synode sont connus : le
patriarche Julien; Thomas, évêque d'Amida. et Jacques [évoque]
d'Édesse, l'Interprète des livres. Ce saint Mar Jacques, évèque
d'Édesse, est célèbre *.
L'an 1018 (706-707), mourut Justinien, empereur des Romains;
il eut pour successeur Léonce qui régna trois ans '.
L'an 1019 (707-708), saint Mar Julien, patriarche d'Antioche,
mourut; Mar Elias lui succéda*.
[12] L'an 1020 (708-709), eut lieu un nouveau cens qui fut ajouté
au premier, ce qui augmenta beaucoup les maux.
L'an 1021 (709-710), mourut saint Mar Jacques, évèque d'Édesse,
auquel succéda Ma^ n^^i^"'
En ce temps florissait saint Mar Thomas le Stylite, de Tela •.
L'an 1022 (710-711), mourut Léonce, empereur des Romains, à
la place duquel régna, pendant sept ans, Tibère-Apsimare^
L'an 1023 (711-712), mourut Walid, roi des Arabes; il eut pour
successeur Soliman qui régna deux ans et demi.
L'an 1024 (712-713), mourut saint Mar Thomas, évèque d'Amida;
Mar Théodote lui succéda.
Après Apsimare, empereur des Romains, Justinien régna six
ans; après lui Philippique régna trois ans; ensuite Anastase deux
ans, enfin Théodose-Constantin un an. Ce dernier occupait le
trône lorsque Maslamah envahit le territoire des Romains. Les
années de règne de ces empereurs romains additionnées ensemble
1. Hiat. du Bas-Empire, t. XI, p 460.
2. Tout ce qui concerne ce célèbre écrivain a été très bien résumé par
Wright, Syr. Lit., pp. 141-154. — Duval, Histoire cCÉdesse, pp. 241-251, a
complété cette notice. On trouvera dans ce dernier la bibliographie très
complète de Jacques d'Édesse.
3. Hist. du Bas-Empire, X. XII, p. 34-38.
4. Bar Hkbr.cus, Chron, ecc.l,^ I, 298.
5. En réalité Habib' ne succéda pas à Jacques. Ce dernier ayant été obligé
de quitter Tépiscopat pendant vingt ans, en 638, il fut remplacé par hiabib,
et à la mort de celui-ci, en 708, il revint à Édesse, en qualité d'évêque et
mourut quelques mois après. Il eut pour successeur Gabriel. Cfr. Duval,
op. cit., pp. 245 et 253.
6. « Tela vel Tela Mauzalct urbs erat Mesopotamiae aequali fere itinere
ad orientem a Nisibi. ab Amida ad septentrionem distans. » Assëmani, Diss.
de Syris monoph,, p. 114. Plus exactement entre Nisibe et Édesse. C'est
Tancienne A n^o/imo/)o//s Constantina .
7. Hist, du Bas-Empire, t. XII, p. 47.
12 CHRONIQUE
forment la somme de douze ans; cette supputation est faite à une
année près, en plus ou en moins. Les Arabes ne comptent que
les lunes et non point les mois comme les Syriens; même la
plupart des écrivains ne font point de chronologie intégrale, mais
comptant seulement les années de règne, ils omettent les temps
de discorde entre deux règnes. Quanta moi, j'ai agi de même dans
ce chapitre, pour que l'esprit du lecteur ne soit point troublé *-
[13] Lan 1028 (716-717), Maslamah pénétra dans l'Empire
romain. Les troupes innombrables des Arabes se réunirent et com-
mencèrent à envahir le territoire des Romains. Tous les pays de
l'Asie et de la Cappadoce prirent la fuite devant eux, ainsi que
toute la région du littoral.
Ils pénétrèrent dans le mont Maurus * et le Liban, jusqu'à Méli-
tène, et sur le fleuve Arsanias*, et jusqu'à l'Arménie intérieure*.
Toute cette région était remarquable parle nombre de ses habitants
et Tabondance de ses vignes, de ses céréales, de ses magnifiques
arbres de toute espèce. Depuis lors elle est dévastée, et ces contrées
ne sont plus habitées.
Quand l'empereur vit cette multitude qui venait contre lui et
qu'il apprit que son général, Léon, avait fait un pacte avec eux,
son cœur trembla et ses mains faiblirent. 11 abdiqua le trône, dé-
posa la couronne et se fit raser la tête. C'est en effet l'usage que si
un empereur romain abdique, il se fasse raser la tête et habite en-
suite dans sa maison sans avoir de cour. Ainsi fit celui-ci. Léon lui
ayant mandé : « Prends courage et ne crains pas, » il ne se laissa
pas convaincre, mais il s'obstina à abdiquer l'empire.
Or, ce Léon était un homme de cœur, fort et belliqueux. Il
était Syrien de race et originaire de ces confins. A cause de sa va-
leur on l'avait fait général. Par son habileté, il empêcha que la
terre bût le sang des hommes. Il fit un pacte avec Maslamah, lui
promettant de le faire entrer sans combat à Constantinople. Celui-
ci, confiant dans la promesse de Léon, ne combattit plus, ne fit
aucun captif, se dirigea vigoureusement vers Constantinople et vint
mettre le siège devant cette cité. Léon étant entré dans fl4] la
1. Cfr. Hist. du Bas-Empire, t. XII, p. 60, 83, 91, 102.
2. Le mont Mauru.s ou Montagne Noire répond à l'ancien Amauusau
nord d'Antiocbe (Sacimu, Zur /i<>t. Geogr. ron Nord-Syrien, p. 13).
3. Les anciens appelaient ainsi m une grande rivic^requi se jetle dansTEu-
phrate »; c'est en réalitô la partie orientale du fleuve, le Mourad-U-hait
que les Arméniens nommaient Aradzani.
4. Sur les divisions géographiques de l'Arménie, cfr. Saint* Martin,
Mèm,^ I, 17, 23 sqq.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 13
villeet voyant que les Romains étaient désespérés etque l'empereur
avait abdiqué, il excita leur courage : « Ne craignez point, » leur
dit-il. Ceux-ci considérant sa bravoure et craignant qu'il ne leur
reprochât ce qu'ils avaient fait au précédent empereur, le prirent
lui-même pour le faire empereur \
En ceignant la couronne impériale, il revêtit aussi la force et le
courage. Il consolida le mur de la ville. Il envoya une armée pour
couper les routes pouvant livrer passage à une armée venant de
Syrie; il fit aussi détruire le pont de bateaux et le coupa.
Les Arabes et toute leur armée se trouvèrent ainsi enfermés comme
des prisonniers. Maslamah ordonna de planter de la vigne, mais
une grande et violente famine sévit parmi eux, à tel points que
le pain manquait dans tout le camp et qu'ils mangeaient leurs
bêtes de somme et leurs chevaux. Quand Maslamah demandait
à Léon : « Où est le serment que tu m'as fait de me faire entrer dans
Constantinople sans combat? » celui-ci répondait tranquillement :
(( Attends quelques jours jusqu'à ce que les grands de l'Empire
me soient soumis.» Ils restèrent ainsi sans combattre dans leurs
positions respectives, les uns à l'intérieur, les autres à l'extérieur,
pendant environ trois ans*. La famine s'accrut tellement chez
les Arabes qu'ils mangeaient leurs souliers et les cadavres des
morts, et qu'ils s'attaquaient mutuellement, au point que personne
n*osait aller seul.
Tandis que Maslamah pressait constamment Léon : « Tiens ta pro-
messe, ou je combattrai,» la nouvelle arriva que le roi des Arabes,
Soliman, était mort et que Omar [II] lui avait succédé. Or, 'Omar
leur envoya une lettre: a Sortez de là, de peur que vous ne périssiez
par la famine, vous et tout ce qui est avec vous. » Maslamah, après
avoir reçu [15] cette lettre, demanda à Léon de pénétrer dans la
ville pour la visiter. Il y entra avec trente cavaliers, y circula trois
jours et admira les œuvres royales. Les Arabes se retirèrent ainsi
de là et s en retournèrent sans avoir rien fait. Ils parvinrent à une
certaine ville nommée Tounou ^; le préfet de la ville les voyant
affamés, émaciés, affaiblis, conçut du mépris pour eux et fit dire à
1. Sur l'abdication de Théodose et ravènemeiit de Lôod. v. Hist. du
Bas-Empire, l. XII. p. 108.
2. Le siège ne dura qu'un an et (ut levé le 15 août 718. Cfr. Hist. du
Bas Empire, t. XII, p. 123.
3. Vraisemblablement Tyane, en Cappadoce. V. Thés, syr. ad h. v. ~
Denvs parait rapporter ici des événements qui se sont passés au moment
de rinvasion des Musulmans. Leur retraite fut au contraire on ne peut plus
désastreuse. Cf. Histoire du Bas-Empire, t. XII, pp. 65 et 123.
14 CHRONIQUE
Léon: « Envoie-moi une armée et je les attaquerai en cachette. »
Mais ce dessein ne leur échappa point. Quand ils apprirent qu'une
armée venait derrière eux, un des chefs des troupes arabes, un des
principaux d'entre eux, appelé 'Abbas, dit à Maslamah : « Donne-
moi une armée, que j'aille au-devant d'eux avant qu'ils arrivent,
de peur qu'ils nous enveloppent et nous fassent disparaître de la
terre, et que notre Bn soit pire que tout ce qui nous est arrivé dans
cette route. » — Il prit donc une armée considérable et alla au-de-
vant d'eux. Ceux-ci marchaient en groupes séparés, n'étaient point
encore préparés au combat et ne savaient rien de cette armée des
Arabes qui venait au-devant d'eux. 'Abbas descendit avant eux
dans un grand pré, dans lequel eux-mêmes se disposaient à cam-
per ce jour-là. Il plaça l'armée entière en embuscade, dans des
fossés et des îlots de roseaux qui se trouvaient là.
Les Romains vinrent à leur tour, et descendirent dans le pré, ne
sachant rien et ne s'apercevant pas même de ce qui avait été fait
par les Arabes. Ils établirent leur camp et chacun envoya sa mon-
ture au pâturage, comme c'est l'usage dans l'armée. Alors les
Arabes sortirent de leurs embuscades et des creux dans lesquels
ils se tenaient enfermés autour du pré. Au signal convenu entre
eux, ils se précipitèrent sur les Romains qu'ils cernèrent, et ils les
firent tous passer au fil de Tépée. Aucun de ceux-ci ne leur
échappa. Or, les Romains étaient environ soixante mille. Après
avoir dépouillé les morts, les Arabes retournèrent vers leurs com-
pagnons.
[16] Une autre armée romaine qui venait par derrière, ayant
appris ce qui était arrivéà la première, fut saisie de terreur et s'en
retourna. Quant aux Arabes, après avoir pillé et butiné tout ce
qui se trouvait à leur portée, ils sortirent de cette contrée et vinrent
en Syrie.
L'an 1032 (720-721), qui était la première année de Omar, roi des
Arabes, et la quatrième de Léon, empereur des Romains, Maslamah
sortit du territoire de ces derniers, après avoir pillé et dévasté toute
cette région qu'il changea en un désert aride.
J'omets plusieurs faits qui arrivèrent dans cette campagne pour
ne pas trop allonger cette histoire.
A cette époque florissaient le patriarche Elias, Mar nabib,[évôque]
d'Édesse, Siméon de Harrau et Théodote d'Amida.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 15
Du signe prodigieux opéré par saint Mar Habib, évêque
d'Édesse.
« Dans le temps présent il est bon de cacher le secret du roi,
mais il convient en tout temps de publier et de faire connaître à
tout le monde les merveilles du Seigneur \ »
Il ne sera point étrange, et les oreilles des auditeurs ne seront
point froissées, si je rapporte ici un prodige que la puissance de
Dieu a opéré de nos jours par un de ses apôtres.
Il y avait dans cette armée un Arabe, qui, lorsque ceux-ci vou-
lurent envahir le territoire des Romains, vint loger au saint
monastère de Mar HabiP, dans la région d'Édesse. Voyant que le
portier de ce couvent était un homme craignant Dieu, humble,
bienveillant et orné de toutes les vertus divines, il lui confia une
somme d'or considérable en lui disant: [17] « Garde-moi cela; si je
reviens vivant, je reprendrai mon bien; si tu apprends que je suis
mort, distribue-le aux indigents. )) Il quitta ensuite ce lieu.
Le moine accepta le dépôt, et ayant pris le trésor, il creusa la
terre pour l'y enfouir, sans faire connaître la chose à qui que ce
fût. Les Arabes restèrent longtemps, et après un espace d'environ
trois ans, il arriva* par la permission du Créateur, qu**avant que
les Arabes sortissent du territoire des Romains^ le portier sortît
de ce monde troublé. Mais il ne fit pas même alors connaître son
secret.
Or, le propriétaire du dépôt revint et s'informa de cet homme.
On lui dit qu'il était mort. « Donnez-moi, reprit-il, ce que j'ai laissé
entre ses mains. )) — « Nous ne savons absolument rien de ce dont
«
tu parles, dirent les moines ; il n'a jamais parlé de cela ni fait de
recommandation à quelqu'un de nous en disant: J'ai quelque chose
qui appartient à autrui. »
Or, cet homme était puissant et il pressait vivement les
moines : « Donnez-moi mon bien, sinon je dévaste votre monas-
tère. » Comme il s'agissait d'une somme considérable, ils étaient
fort embarrassés. Le gouverneur les força de vendre tout ce
qu'ils possédaient et d'en livrer le prix à cet homme. Et si
cette somme ne suffisait pas pour les libérer, les moines eux-mêmes
1. TOBIK, XII, 7.
2. U y avait plusieurs monastères de ce nom en Mésopotamie. Le site
exact de celui dont il est ici question est difficile à déterminer, car il n'en
est pas parlé ailleurs.
18 CHRONIQUE
son bon plaisir, en s'efforçant d'anéantir Tordre du Créateur et
d'empêcher le monde de marcher selon les lois qui lui ont été
imposées par son auteur.
Il ordonna encore de mettre à mort tous les hommes [20] blonds ^ .
Mais ce projet avorta grâce au soin d'hommes craignant Dieu« et
il ne causa la mort de personne.
Il prescrivit aussi qu'on ne reçût point le témoignage d'un Syrien
contre un Arabe. Il fixa le prix [du sang] d'un Arabe à douze mille
[dinars] et celui d'un Syrien à six mille *. C'est là l'origine de ces
lois perverses.
Il commanda de couper aux voleurs la manche au lieu du
poignet. Les Arabes le méprisèrent, lui et ses préceptes.
L'an 1038 (726-727), mourut Yézid. Il eut pour émirs en Méso-
potamie d'abord Abourin, qu'il chassa, et ensuite Mardas. Celui-ci
ayant été disgracié à son tour, Abourin revint.
L'an 1039 (727-728), Hisam, fils de 'Abd el-Malik, régna sur
les Arabes pendant dix-neuf ans et quatre mois.
L'an 1040 (728-729), saint Mar Habib, évoque d'Édesse, mourut ;
Constantin lui succéda'.
A cette époque brillaient saint Mar Elias le patriarche, Siméon,
évêque de Harran, Constantin d'Édesse, et Théodote d'Amida *.
Sur saint Théodote, éoègue d*Amida.
Ce saint Théodote, évoque d'Amida, avait grandi dans la soli-
tude et dans les humbles labeurs du monachisme auxquels il s'était
constamment adonné, et qu'il aimait : c'était un homme pacifique,
bénin, et orné de toutes les vertus divines : aussi abdiqua-t-il
l'épiscopat de la ville. Il se retira donc de son siège et, quittiint la
cité, il descendit dans la région de Dara, entre Dara et Amida.
Marchant sur les traces de Mar [21] Thomas, de Téla, il se cons-
truisit là une colonne sur laquelle il monta. Il bâtit aussi dans ce
môme lieu un grand monastère : celui même qui existe encore à
côté du village appelé Qalouq*; c'est là qu'il finit sa vie.
Après lui saint Mar Cosme reçut l'épiscopat.
1. Littéralement: les hommes aux yeiue bleus.
2. Théophane (ad ano. 1 Léon. Is.) rapporte ces éditsà 'Omar.
1^. Cfr. Du VAL. fffst. d'Édesse, p. 254.
4. C'est un des saints les plus célèbres des Jacobites. Ils honorent sa
mémoire le 16 août.
5. AssBMANi [Bibl. or,, 11,106, 228) transcrit Coluc.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 19
Sur saint Mar Cosme, éoêque cTAmida.
Ce saint Mar Cosme était aussi un grand cénobite appliqué à
toutes les vertus : aussi Bt-il des prodiges et des miracles comme
Élie le Tesbite et comme les premiers apôtres. Mais parce qu'il
était zélé et reprenait les grands aussi bien que les petits, il n'était
pas aimé des seigneurs de la ville, car il leur reprochait vi-
vement, sans dissimulation et sans faire acception de personne,
les œuvres perverses qu'ils opéraient continuellement; et ils crai-
gnaient qu'il ouvrît la bouche pour les maudire, car c'était un
homme austère. Ils n'osaient pas s'insurger ouvertement contre
lui; c'est pourquoi ils excitèrent les habitants des villages à
ne point le recevoir lorsqu'il irait les visiter, pour avoir par là
un motif de le chasser de leur ville. Mais cela ne leur pro-
fita en rien, pas plus qu'à ceux qui suivirent leur conseil.
Lors donc que, selon la règle établie par les anciens, il partit vi-
siter la région, ne sachant rien des embûches qu'on lui dressait, il
parvint à un village nommé Tell-Dakoum', dont les habitants
étaient des contempteurs. Quand il sonna la cloche, selon l'usage,
ceux-ci se réunirent et ne voulurent point le recevoir ; ils ne le jugè-
rent pas môme digne de la parole d'un homme, mais ils lui en-
voyèrent dire par une [22] vieille femme : (( Va- t'en honorablement
et passe ton chemin, sinon tu ne sortiras pas d'ici sans avoir été
maltraité. » Ces hommes pervers « ne savaient pas et ne compre-
naient pas, car ils marchaient dans les ténèbres M), que la parole
de Notre- Seigneur à ses Apôtres ne peut rester sans effet : « Celui
qui vous reçoit, me reçoit. Si quelqu'un ne vous reçoit pas, secouez
la poussière de vos pieds en témoignage contre lui. On sera plus
indulgent pour Sodome, au jour du jugement, que pour ce lieu'. ))
Le saint, instruit de leur malice par cette vieille, ordonna à son
disciple de changer la direction du char sur lequel il se trouvait et
de le faire passer au sud du village. La parole prophétique * : « Le
fou ne sait pas et l'insensé ne comprend pas, » s'accomplit sur ces
misérables.
Ce premier péché ne leur suffit pas ; mais ils montèrent à la porte
1. ThUaticomum dans V Itinéraire d'Antonio.
2. P«., Lxxxn, 5.
3. Cfr. Matth., X, 14 ; Luc, ix, 5 ; x, 10.
4. Ps., xcii, 6,
SO CHRONIQUE
de leur église qui était placée sur la hauteur pour se moquer du
saint et voir ce qu'il allait faire.
L'homme courageux, en voyant tout leur mépris, ne fut point
troublé; mais, ceint de la foi et de la confiance en son Seigneur, il
continua sa route et passa outre. Arrivé à la limite orientale du
village, il fit arrêter son char, tira ses souliers, et les élevant dans
la direction du bourg, les secoua sur lui en disant : « Puisque tu
ne reçois point ton évêque, attends, idole, la colère de Dieu t'attein-
dra bientôt et saas tarder. )) Puis, continuant rapidement sa route,
il passa au village qui se trouve à l'Orient et qui s'appelle Tarmil-
Raba^; il venait en effet de l'Occident.
C'était au temps de la moisson des orges et aucune apparence
de nuage ne couvrait le ciel ce jour-là.
La colère divine s*empara subitement et sans tarder du malheu-
reux village qui avait voulu être un instrument d'iniquité entre les
mains des grands delà ville, [23 J afin qu'il devint un sujet de crainte
et de terreur pour la contrée et pour tous ceux qui oseat mé-
priser leurs évêques, et qu'il servît d'avertissement aux générations
futures.
Il entra dans Tarmil. Et voici que les nuées montèrent sur le
village. Pendant que les habitants s'empressaient çà et là, une
tempête et un souffle de vents violents à renverser les montagnes
s'éleva contre lui. Il tomba une grêle semblable à des pierres, qui
frappa leurs vignes et leurs figuiers, brisa les arbres de leur terri-
toire et détruisit dans leurs champs tout ce qui était vert, réduisit
leurs récoltes en poussière, au point qu'on ne reconnaissait pas
leur place, et dispersa aussi leurs meules, de sorte qu'ils ne purent
les recueillir et que tout espoir de vivre fut perdu pour eux.
Les contempteurs, en voyant ce qui leur était arrivé : « Leurs
paroles étaient encore sur leurs lèvres et la colère de Dieu monta
sur eux*, » comprirent que la colère de Dieu pesait aussi sur eux, et
ils s'éveillèrent comme d'un profond sommeil, comme un ivrogne
qui a cuvé son vin ; ils se rappelèrent ce qu'ils avaient fait à leur
évêque et reconnurent que ce fléau leur arrivait parce qu'ils
l'avaient méprisé. Us furent d'autant mieux confirmés dans cette
opinion que le fléau n^avait pas dépassé les limites de leur village.
C'est pourquoi ils sortirent tous, petits et grands, et s'en allèrent
1. Il y avait un monastère dans un lieu appelé Tarmel, situé à deux
stades de Data (Assbmani, Blbl. or., II. 61;. Mais ce lieu parait trop éloigné
d'Amida pour pouvoir être identifié avec celui dont il est question.
2. Cfr. P«., Lxxviii, 30.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 21
pieds DUS, humblement^ pleurant amèrement et couverts de honte,
jusqu'au village où se trouvait Tévèque. Le saint en les voyant,
comme autrefois Elisée en présence des enfants que les ours dévo-
rèrent \ fut profondément affligé, surtout de ce que le fléau avait
détruit tout ce qu'ils possédaient. Il s'en revint avec eux et pria
pour eux.
De cette manière Dieu répandit sa crainte et sa terreur sur toute
la contrée et sur les grands de la ville, de sorte que, quand l'évèque
quittait le village [24] où il résidait, les habitants des autres villages
venaient tous, grands et petits, humblement au-<levant de lui.
A saint Mar Élie, patriarche d'Antioche, succéda saint Atha-
nase*.
L'an 1048 (730-731), Maslamah franchit la Porte des Turcs».
Parce que les Huns, c'est-à-dire les Turcs *, étant sortis de leur pays,
firent un mal immense dans l'Arménie et dans toute la contrée
septentrionale, Maslamah marcha contre eux avec une armée
innombrable. Chaque année ils sortaient ainsi et causaient de
grands dommages. Il s'avança donc vers eux et eux vinrent au-
devant de lui. Il leur livra bataille et en détruisit un grand
nombre. Ceux-ci furent effrayés, et vinrent à ses pieds lui de-
mander la paix. Il la leur accorda, pensant qu'ils gardaient leur
parole.
La même année, Maslamah détruisit cette Porte qui se trouvait
à l'entrée du territoire des Turcs, parce que, enfermés dedans, ils
lui avaient livré un combat; mais il craignit de s'aventurer dans
1. // Reg,t II-
3. Bar Hebr^ub, Chron. eccl., I, 299.
3. Il s'agit da célèbre défilé de Derbend, aussi appelé la Porte de/er, et
la Porte des portes et Porte des Alains par les Arabes. Les ArménieDs
rappellent Porte de Djor ou de Tsour. Le nom de Portes caspiennes
que lui donnent beaucoup d'auteurs ne lui convient pas; il désigne proprement
le grand défilé de l'ibérie qui traverse la chaîne du Caucase, des sources
du Térek à Tiflis.
4. Plus exactement les Khazares ou Alains. Dans le récit de cette
expédition que Denys raconte aux années 1042 et 1043, Tauteur parait avoir
confondu divers événements et il a certainement interverti l'ordre chronolo>
gique de plusieurs faits. On trouvera le récit de ces campagnes très bien
résumé par Saint-Martin [Hist. du Bas-Empire, t. Xll, pp. 165-169).
22 CHRONIQUE
la région inconnue qui appartenait aux Turcs, de peur qu'ils ne se
réunissent contre eux et ne les fissent disparaître de la terre. C'est
un peuple sans Dieu et ils sont mages. A cause de cela, Maslamah
fut contraint d'ordonner la destruction de cette Porte des Turcs qui
avait été construite par Alexandre le Macédonien \ Ils déta-
chèrent et firent sortir d'abord tous les chameaux, puis les ânes,
ensuite les ouvriers, enfin ils sortirent eux-mêmes, en jetant
des ronces derrière eux dans tout le défilé.
L'an 1043 (731-732), Maslamah rassembla une grande multitude
[25] d'artisans, de charpentiers et d'ouvriers, fittous les préparatifs
nécessaires pour une construction, et alla réédifier la Porte des Turcs
qu'il avait détruite Tannée précédente. Après l'avoir rebâtie, il fit
avec ceux-ci un traité confirmé par serment, d'après lequel il était
convenu que personne d'entre eux ne franchirait la frontière de son
allié. 11 revint ensuite: mais les Turcs qui ne connaissent point
Dieu, qui ne comprennent pas qu'ils sont ses créatures, qui n'ad-
mettent point qu'il y a un Dieu au ciel, ne tinrent pas leur pro-
messe. Ils méprisèrent Dieu, se moquèrent du serment, passèrent
la frontière et firent beaucoup de mal dans la contrée qui était
hors leur territoire.
Hi5am envoya contre eux son général Girah ' avec un grand
nombre de cavaliers.
Celui-ci entra dans le pays au temps de la moisson et fit par
son passage beaucoup de tort dans cette région, car c'était un homme
déréglé. Se sentant fort, il n'était pas juste; il dévasta les récoltes
des paysans et causa beaucoup d autres maux aux pauvres sur sa
route.. Les habitants vinrent se plaindre à lui, mais personne
ne rencontra de soulagement près de lui ; et ainsi, comme tout le
monde avait à souffrir de son passage, tous faisaient également des
vœux pour qu'il lui arrivât ce qu'il méritait. Quand il livra bataille
aux Turcs, ces derniers tuèrent une grande partie de ses soldats et
emmenèrent un grand nombre de captifs dans leur pays. Après
cela, il manda à Hisam de lui envoyer du secours. Maslamah
accourut derrière lui avec une armée immense, mais avant qu'il
eût pu pénétrer jusqu'à lui, Girah et toute son armée avaient été
exterminés par le glaive ; car les Turcs s'assemblèrent de tous
côtés contre eux en très grand nombre et les passèrent tous au
1. Cfr. Bau Hebr.«U8, Chron, syr., p. 36.
2. Djarrah, Ibu 'Abdallah. Théopbane l'appelle ràpz^^oç, et mentionne
sa défaite. — Cf. sur ces campagnes Weil, Gesch. d. Chali/en, t. ï, pp. 634
sqq.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 23
fil de l'épée. Personne n'échappa. Le Seigneur rendit au mal-
faiteur le mal qu'il avait fait et punit les torts qu'il avait causés,
[26] lui et son armée, aux paysans sur son passage. Tout ce qu'ils
avaient commis pendant la route fut accumulé à la fois sur leur
tète».
A rarrivée de Maslamah, les Turcs furent troublés et remplis
de frayeur, car ils craignaient sa renommée plus que son aspect.
Celui-ci leur livra bataille, répandit leur sang comme l'eau à la
surface de la terre, et rassasia de leur chair les oiseaux du ciel et
les bêtes de la terre.
Après les avoir taillés en pièces*, il établit sur l'Arménie Merwan
Ibn Mohammed, — celui-là même qui régna plus tard sur les
Arabes, — et se retira en laissant auprès de lui une forte armée. Ce
dernier causa plus de pertes [aux Turcs] que tous ceux qui l'avaient
précédé.
L'an 1029 (717-718), il y eut un fort et terrible tremblement de
terre qui renversa en beaucoup de lieux les temples, les églises et
les grands édifices, et notamment le baptistère et l'église Ancienne
d'Édesse'. De grandes et vastes maisons furent précipitées sur
leurs habitants ; quant à celles qui résistèrent et ne s'écroulèrent pas
dans la commotion, elles en gardèrent les traces afin que les
habitants fussent remplis de crainte en la présence du Seigneur
chaque fois qu'ils considéreraient ces vestiges du tremblement de
terre.
A cette époque Hiâam canalisa le Zeitoun \ bâtit [sur ses rives]
des villes, des châteaux-forts, de nombreux villages qu'il embellit
par de nombreuses plantations de toute sorte. Il canalisa aussi [la
rivière de] Beit Balaâ ' sur laquelle il fit construire un château-
fort, et il y fit planter des plantations de tout genre. Il canalisa
1. La bataille fut livrée à peu de distance d'Ardebil.— Cfr. Thkophane, ad
ann. m. 6220.
2. C'est au contraire parce que Maslamah n*ayait pu vaincre les Turcs que
le khalife mécontent le remplaça par Merwan, en 731. Ce dernier parvint à
soumettre les petits princes du Caucase et à repousser les Khazares avec
lesquels il conclut une paix durable.
3. Cfr. HUt. cTÉdeaae, pp. 15, 16, 245.
4. «( Zaita seu Zeita oppidum sezaginta stadiis a Circesio castro distans
memoratur Zozimo lib. 3, cap. 13. Hinc fortasse fiuvio nomen inditum. >i
AssEM., Bibl, or. y II, 106.
5. Beit Balasou Balid, en latin Balissus, Barbalissus, village sur la rive
de TEuphrate, dans la province d'Alep. C'est sans doute cette partie du
fleuve que Fauteur a en vue. — Cf. Chronique de Michel le Grand, trad.
LANOLOia, p. 253.
24 CHRONIQUE
encore le Hânt * sur lequel il fit construire des forteresses et des
jardins de toute espèce.
De son côté, Maslamah canalisa le Beit BalaS et fit bâtir près
du fleuve qu'il avait canalisé des châteaux -forts et des villas qu'il
décora de toute espèce d'ornements.
L'an 1040 (728-729), Néocésarée • fut prise par Maslamah [27] qui
emmena en captivité les habitants de cette cité et les vendit en
esclavage comme des bêtes, à l'exception cependant des Juifs qui
lui avaient livré la ville. Ils s'étaient rendus secrètement auprès de
Maslamah et, après avoir reçu sa parole, ils dirigèrent traîtreuse-
ment son entrée dans la ville. Pour eux, il les fit captifs, mais ne
les vendit point; il les emmena avec lui.
L'an 1045 (733-734), Soliman* envahit le territoire des Romains
et s'empara de Polozonium * dont il emmena tous les habitants en
captivité. Voici dans quelles circonstances. Artabas, gendre de
l'empereur des Romains, Constantin*, se révolta et après s'être rendu
maître de la ville de Constantinople, il ceignit tyranniquement la
couronne impériale. Tandis que l'empereur Constantin marchait
avec son armée contre la multitude des ennemis, il avait laissé
1» La rivière qui passe à oUi <ians Tlraq *Arabi, près de l'Ëupbrate, Cfr.
Bibl. or.f 1112,717. Bar Hbbr^us {Chron, ayr., 156, antepon.) dit que
Nasr gagna v lejïeuce Hdni qui est près de CalUnice ».
2. Denys seul fait mention de la prise de Néocésarée. 11 confond peut-être
Néocésarée dans le Font, avec Côsarée de Cappadoce. Cfr. Thbopu. Chro-
nogr.tdA. ann. 10 Leonis.
3. Fils du khalife HiSam.
4. J'ai conservé ici l'orthographe d'AssBMANi [TiibU or,, II, 106). D*après la
collation de M. Guidi, le groupe de lettres Nud-Jud pourrait se lire iletk.
Je ne puis identifier ce nom avec certitude. Peut-être est-ce une corruption
de Paphlagonie. Soliman envahit cette province à Tépoque indiquée par
Denys et battit une armée romaine commandée par un général du nom de
Constantin. Ce qui appuierait cette supposition, c'est que notre auteur place
ces événements sous le règne de Léon. La révolte d'Artabas n'eut lieu que
dix ans plus tard, sous Constantin Copronyme. L'identité entre le nom du
général et celui de l'empereur aura induit Denys en erreur. Cfr. HisL du
Bas-Empire, t. XU, pp. 169, 189-197.
Une autre conjecture non moins probable, c'est que ce mot traduit le
nom grec '04^1x10 V. Nous savons qu' Artabas était comte du thème d'Opsicium
(Thropu., ad ann. m. 6232-33) et qu*il était à la tête des troupes de ce
thème. Or, Denys dit précisément un peu plus bas que le tyran Artabas se
défendait dans Constautinople avec la légion de Pelozonium. Assemani
(toc. cit. ) croit que c'est XQ-Castrum Fcrreum dont parle Théophane à l'an 22
de Léon.
5. Il était gendre de Léon, dont il avait épousé la fille Anne.
DE DENYS DE TBLL-MAI^RÉ 25
dans la ville» pour la garder, ce tyran Artabas avec la garnison de
Pelozonium. Ce dernier, oubliant le pacte conclu devant Dieu
avec Léon, et voyant qu'il occupait la ville, s'efforça de se rendre
maître de l'Empire. Celui-ci donc occupait la ville, et l'armée im-
périale, avec Constantin lui-même, campait à l'extérieur, tandis
que toute la légion de Pelozonium combattait à l'intérieur contre
l'empereur.
Comme Soliman approchait, Léon lui 6t dire : « Ne viens pas
vers moi ; tu t'exposerais à sortir difficilement de mes mains ;
mais va à Pelozonium, dévaste-la, renverse-la, fais-y tout ce qui
te plaira, car là personne ne te résistera.» Il y alla, la pilla et la
dépouilla selon son bon plaisir, emportant un butin tel que per-
sonne avant lui n'en avait jamais emporté.
Léon, ayant saisi le tyran, lui creva les yeux et priva de solde
l'armée qui avait pris son parti*. [28]
L'an 1046 (734-735), Méliklbn Sebib,émirdeMélitène, et 'Abd-
allah al- Batal vinrent assiéger la ville de Synada*. Tandis qu'ils
campaient dans les prés qui environnent cette place, une armée
innombrable se réunit contre eux pour tirer vengeance de ce que les
Arabes avaient fait l'année précédente à Pelozonium. Au moment
où les Arabes qui étaient environ cinquante mille étaient dans leur
camp sans méfiance, les Romains les entourèrent à l'improviste de
toutes parts et les firent tous périr par le glaive. Un petit nombre
seulement échappa, grâce au jour qui avait baissé: ils fuyaient en
se défendant avec le glaive, la lance et l'arc, et ils marchèrent
toute la nuit.
Des cinquante mille qui étaient venus, cinq mille à peine
s'échappèrent. Les chefs eux-mêmes tombèrent dans le combat ;
jamais pareil malheur n'était arrivé aux Arabes'.
A cette époque, il y eut dans la région occidentale un séducteur
qui trompa et perdit un grand nombre de Juifs\ Satan, qui est pcr-
1. Hisi. du BaS'Em/nre, t. XII, p. 197.
2. Grande ville de la Phrygic dite Salutaire. Cf. Wbil, Gesch. der
Chaliphen, I, 638, 639.
3. Thôopbane (ad ann. 22 Leonis) dit que la bataille fut livrée trepc tov
*Âxpofvov, en Pbrygie et réduit à vingt mille hommes la force de l'armée
arabe. Il donne aux généraux musulmans les mêmes noms que Oenys:
4. Un récit analogue se trouve chez Théophane (ad ann. 5 Leonis).
26 CHRONIQUE
nicieux et malin dès Torigine, s'efforce toujours de tromper les
hommes, non pas seulement quelques-uns, mais tous pareillement,
quelle que soit ]eur race ou leur langue, en suggérant à chacun ce
qu'il sait lui être agréable et capable de Tinduire en erreur. Il tire
son nom de ses œuvres: Satan, en effet, signifie adversaire. 11 ne
néglige rien et ne cesse de troubler ou de tromper tous les peuples
dans toutes les générations. Le courage ne lui fait jamais défaut,
et il n'abandonne jamais ses antiques méchancetés qu'il inventa
autrefois contre le chef du genre humain pour le perdre. [29]
Dans ce temps donc, il fit sortir de la Mésopotamie un certain
homme, originaire du village de Phalkat', dans la région de Mar-
din, et le fit passer dans la contrée occidentale, du côté du Beit
V
Sammar\ Cet individu eut acc^s dans la maison d'un des princi-
paux d'entre les Juifs, mais abusant de l'hospitalité qu'on lui
donnait, il corrompit la fille de celui-ci. Quand la chose fut
connue des Juifs, ils le vouèrent à la mort. Mais comme il était chré-
tien, ils lui infligèrent de cruels et longs supplices pendant les-
quels il trouva l'occasion de s'échapper de leurs mains. Il songea
dès lors à leur faire subir toutes sortes de maux. Étant parti de là,
il descendit au pays des Aramoyé'qui est plongé dans tous les
maléfices des incantations. Là, il s'adonna à la magie et aux arti-
fices diaboliques. Il fit du progrès dans tous les arts mauvais et y
passa maître. Quittant alors ce lieu, il remonta dans la région du
Beit Sammar. Il dit aux Juifs : (( Je suis Moïse, celui-là même qui
fitautrefoissortir Israël de l'Egypte, qui fut avec eux par la mer
et le désert pendant quarante ans. Je suis envoyé de nouveau
pour le salut d'Israël et pour vous conduire au désert, afin de
vous introduire ensuite dans l'héritage de la Terre- Promise que
vous posséderez comme auparavant. De même qu'autrefois Dieu
renversa toutes les nations qui l'habitaient pour que vos pères en
prissent possession, ainsi encore il les fft*a disparaître devant
vous pour que vous y entriez, que vous la possédiez comme aupa-
1. Ce nom désigne aussi uo village de la Sophène (Land, Anecd.
syr.f II, 225). Je ne trouve sur les cartes aucun lieu avec lequel on puisse
identifier celui dont il est ici question. La disposition des signes dans le
ms. permet aussi de lire palnit := « un certain » village.
2. Région sur la rive gauche de l'Euphrate, à la hauteur du 35* de lat
Nord.
3. On trouve l'expression Beit A rmoyé employée pour désigner le pays
autour de Séleucie-Ctésiphon [Bibl, or., I, 354 et 35S); je crois donc qu'il faut
ici lui attribuer ce dernier sens qui parait exigé par le contexte. On des-
cendait, en effet, pour aUer du Beit Sammar dans cette région.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 87
ravant, et que tous les Israélites dispersés soient réunis selon ce qui
estécrit' : « Il rassemblera les dispersés d'Israël.» Comme il leur
tenait quotidiennement un tel langage et excitait constamment
leur admiration par ses incantations, ils erraient à sa suite. Tan-
tôt il les faisait circuler dans les montagnes et les précipitait de pics
escarpés et les tuait, tantôt il les enfermait dans des grottes et des
cavernes où il les faisait périr. [30] Il leur fit ainsi subir beaucoup
de mal, en tua et en fit périr un grand nombre. Il leur enleva aussi
beaucoup d'or, en leur persuadant par ses incantations qu'il les
conduisait dans le désert. Quand il fut rassasié des maux qu'il
leur faisait souffrir journellement, il les fascina par ses artifices,
prit tout l'or et tous les biens qu'il leur avait enlevés et s'enfuit
dans son pays.
Les Juifs, revenus à eux-mêmes et voyant le mal qu'il leur avait
fait souffrir, le poursuivirent aux quatre coins du monde, interro-
geant e^'informant de lui. L'ayant enfin découvert, ils le condui-
sirent à rémir des croyants, Hi§am. Celui-ci le leur ayant aban-
donné, ils lui firent subir des supplices et des tourments à
Babylone et finalement le crucifièrent. Il mourut ainsi et Dieu lui
donna de la sorte la récompense qu'il méritait.
L'an 1047 (735-736), Attiq se révolta et embrassa la secte des
tiarourites'.
Lorsqu'il se révolta et embrassa la secte des l^arourites, il fit
1. Is.. Lvi, 8.
2. « Vox Arurita ex syriaca Arurojuto, quae libertat«m signiflcat,
d^^ampta est : relictis eaim uzoribus et bonis. Arabes pro liberiate, seu potius
Ubere, etabsqueimpedimentis pugnabant. Hinc vox (««». A rarapud Dionysium
ex Arurojuto sea potius iLoijÛ Hiruto (quod libertatem sonat) derivata. »
AssBMANi, Bibl, or., II, 108. Le môme écrivain, à propos d*uD passage de
Denys que nous lirons bientôt, fait observer Tusagedu mot A car chez notre
auteur. « Vox Acar, dit-il, non pro albo aut /)uro (ut ubique apud omiies Auc-
tores), sed pro actione quam supra [cfr. p. suiv.] ex Dionysio descripsi
sumilar. Portasse etiam Aoar voci Uchama (qu8e nigrum significat) ibi oppo-
oitur; nam Persse (ut ad. ann. 1060 et 1061 videbimus) nigris utebantur, Arabes
albis : atque adeo iactio quaelibet, rebellio, aut Arabum dissidium, ea voce
ab auetoribus sequioris sseculi exprimitur. » {Ibid.) — Ces assertions sont
fort hypothétiques. Les origines de la secte politico-religieuse des Harouri-
tes, dont les partisans s'opposèrent si vivement aux Abbassides, ne sont pas
encore suffisamment édaircies.
28 CHRONIQUE
comme les Arabes ont coutume de faire lorsqu'ils abandonnent leurs
femmes et tout ce qu'ils possèdent. Il s'en alla avec vingt compa-
gnons près de Sigara*. Hiâam, ayant appris cela, commanda à
Qaliu et à Zohaïr, généraux de cavalerie de Sigara, de marcher
contre lui et de lui livrer bataille. Ceux-ci, après avoir reçu cet
ordre, réunirent une armée nombreuse et sortirent à sa poursuite.
Ils le rejoignirent dans le désert même de Sigara. Celui-ci leur de-
manda d'attendre au lendemain pour engager le combat. Comme
ilsavaientaveceux une grande armée et que les rebelles étaient peu
nombreux, ils les méprisaient d'autant plus que la soif se faisait sentir
dans leur camp, car les eaux manquaient dans ce désert et, de plus,
le jour baissait. [31] 'Attiq, qu'ils regardaient en tout avec mépris,
était un homme courageux ainsi que ses compagnons et il leur
avait fait cette proposition par ruse. Lorsque la nuit fut venue et
qu'ils eurent mangé et bu, ils s'endormirent sans défiance, tandis
que 'Attiq et ses compagnons prirent leurs armes, tombèrent sur
eux à la première veille de la nuit et les tuèrent tous. Le Seigneur
tourna Tépée de chacun contre son voisin et les compagnons de 'Attiq
passaient parmi eux comme les tailleurs de pierre et comme ceux
qui conduisent la charrue. A l'exception de quelques-uns qui
montèrent sur leurs chevaux rapides et prirent la fuite, personne
n'échappa; ils périrent tous par le glaive. Les chefs de l'armée eux-
mêmes, Qaliu et Zohaïr, tombèrent parmi les morts.
L'an 1052 (740-741), l'empereur des Romains, Léon, mourut
après un règne de vingt-cinq ans et eut pour successeur son fils
Constantin qui régna trente-cinq ans'.
A cette époque, Hi§an?, roi des Arabes, fit construire un pont
sur l'Euphrate, en face de Callinice '.
L'an 1053 (741-742), il y eut, un dimanche, un grand et terrible
tremblement de terre.
Toute la nuit de ce dimanche, on entendit le bruit qu'il pro-
duisait, bruit semblable au mugissement d'un taureau. Quand vint le
moment de la messe, tout le peuple accourut à l'église. Or, l'église
de Maraq* fut renversée par la violence et la force du tremblement
1. ZiYY^P** ^i^'® épiscopale de la Mésopotamie à l'ouest du Tigre, à trois
journées de marche de Mossoul sur la route de Callinice. Cfr. Assbmani,
Dis. de Syri8 monophia,^ p. 109.
2. HUt. du Bas-Empire, t. XII, p. 180.
3. Aujourd'hui Er-Rakka^ sur l'Euphrate, non loin du confluent du
Balik.
4. Village situé entre Nisibe et Mossoul d'après Yakout. CIr. Wright,
Catalogue ofsyr, ms,, 669, a. — Bar Hrbr., Chron, eccL, II, 363, n. 1.
DE DKNYS DK TELL-MAHRÉ 29
de terre qui arriva subitement, et elle écrasa tout le peuple qui
s'y était assemblé ; personne n*en sortit vivant, excepté le prêtre
qui offrait à ce moment-là le sacrifice. La colline sur laquelle
l'église de Maraq était bâtie fit entendre des grondements et des
clameurs pendant environ trente jours. [32]
L'an 1054 (742-743), le grand pont du Tigre, près d'Amida, fut
renversé.
L'hiver avait été dur; une neige abondante était tombée du ciel
et s'était accumulée sur la terre pendant des jours nombreux, de
sorte que toute chair approchait de sa fin. Les animaux surtout et
les oiseaux périrent. Vint ensuite une température froide et rigou-
reuse, des vents et de la pluie pendant longtemps; la neige fondit
et la terre fut abondamment imprégnée tant par les eaux dont elle
avait été couverte que par la fonte des neiges. Il y eut des inondations
dans tous les fleuves, et surtout dans le Tigre.
Dans ce fleuve eurent lieu des ruptures et des débordements
violents qui détruisirent nombre d'hommes et de pays. Il charria
beaucoup de bois et la poussée des eaux fut si véhémente que de
gros arbres s'acculèrent au grand pont et s'accumulèrent l'un sur
l'autre jusqu'à cinq ou six milles en amont. Ainsi, à cause de la
violence du choc des pièces de bois et de la force de l'inondation,
le pont fut brisé et renversé par les eaux. Il ne fut pas rétabli, car
au moment où Hisam, après avoir réuni des ouvriers et des
maçons avec tout ce qui était nécessaire pour le reconstruire, se
hâtait de le rebâtir, il fut surpris par la mort et laissa l'ouvrage
inachevé.
A la même époque Édesse fut aussi inondée.
11 y eut, en effet, une grande et violente inondation dans le fleuve >
qui traverse la ville et qu'on appcille le DaiQan\ Les eaux entrèrent
en quantité dans la ville, de sorte que les issues pratiquées
pour elles dans le mur oriental de la cité furent obstruées. Les eaux
ne parvenant pas à renverser le mur revinrent en arrière et, s'élevant
d'une manière extraordinaire, elles se répandirent dans les places
de la ville et détruisirent toutes les boutiques. Beaucoup de maisons
s'écroulèrent ; mais parce que cela arriva de jour, personne ne
périt dans Tinondation : les habitants avaient fui en abandonnant
leurs demeures.
1. Le Daiçan [sauteur, en grec Sxipxoç) avait déjà causé plusieurs fois
de terribles ravages par ses inondations. Justinien fit faire de grands travaux
pour prévenir le retour de semblables malheurs, mais ils furent inefficacest
comme on le voit. Cfr. R. Duval, Hlat. d*Édease, pp. 7-9; et Thbopuamk,
Chronogr.^ ad ann. 24 Leonis.
30 CHRONIQUE
[33] La rupture du canal causa aussi de grands maux dans toute
la plaine d'Édesse et de Harran.
L'an 1055 (743-744), Hiâam, roi des Arabes, mourut, et après
lui, Walid [11]^ régna huit mois. Le tyran Yézid, *Abbas et
Ibrahim qui étaient frères, et leur parent 'Abd al-*Aziz, les fils de
^addjadj \ s'élevèrent contre lui et le tuèrent par le glaive près de
la ville deQoré'.
Yézid [III] régnaaprès lui pendant six mois, mais la contrée nelui
obéit point et il n'établit pas de gouverneurs en Mésopotamie. A la
mort de Yézid, son frère Ibrahim prit sa place.
Cette même année, la discorde s'éleva dans toute la contrée, à
cause de la tyrannie exercée par 'Abbas et son frère contre Walid,
qu'ils avaient mis à mort par le glaive. Comme ils régnaient tandis
que la royauté ne leur appartenait pas, les Arabes ne leur obéirent
point, surtout ceux de la Mésopotamie.
Cependant chacun se tint chez lui et veilla sur soi . La dissension
et le brigandage régnèrent dans toute la contrée et personne ne
pouvait sortir de chez soi.
De la sécheresse et de la grande famine qui arrivèrent aussi sur
toute la terre en ce temps-là.
En ce temps. Dieu envoya sur nous les plus cruels et terribles
fléaux qui sont : le glaive, la captivité, la famine et la peste,
à cause de nos péchés et des œuvres mauvaises que nos mains ont
opérées.
« Quand même Moïse et Samuel se tiendraient devant moi, mon
âme ne pencherait pas vers ce peuple. Chasse les de ma face, et
qu'ils se retirent. Que s'ils te disent: Où irons-nous? [tu leur
diras :] Voici ce que dit le Seigneur : A la mort celui qui [est destiné]
1. Son neveu, flis de Yézid II, flls de *Abd al-Mélik. — Cf. Wbil, Geêch,
lier Chalipheriy t. 1, pp. 658 sqq.
2. Il faut probablement lire *Abd al-'Aziz Ibn ^addjadj. Cf. Wbil, Gêëch.
d, Chaliphen, I, 673.
3. La phrase de l'auteur parait altérée. Bbrnstbin observe que Walid II
périt^ selon les auteurs arabes, à un endroit appelé : n^, ^^ ^j^ r^
Assemani cite {BibL or,^ III, I, p. 178) dans la région de Marga, un monas-
tère de Cyrus dont le nom est orthographié «ioA, et un village du même
nom près de Nirba Barzi (III, I, p. 499). Cf. Wbil, Geach. d. Chaliphen,
I, p. 670.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 31
à la mort ; aa glaive celui qui [est destiné] au glaive ; [ 34] à la famine
celui qui [est destiné] à la famine ; à la captivité celui qui [est destiné]
k la captivité. J'enverrai sur eux quatre fléaux, dit le Seigneur : le
glaive pour tuer, les chiens pour déchirer, les oiseaux du ciel et
les bêtes de la terre pour dévorer et pour mettre en pièces, et je les
livrerai au tremblement \ » Voilà ce que Jérémie, instruit par une
révélation, nous a laissé. Lui-m(^me dit encore* : « La clameur de
Jérusalem est montée devant moi. Les grands ont envoyé les petits
vers l'eau ; ils sont venus aux citernes et n'ont point trouvé d'eau :
ils sont revenus leurs vases vides, ils ont été confondus et ai&igés,
et ils ont couvert leurs tètes. A cause des œuvres de la terre il n'y
a point eu de pluie ; les laboureurs ont été confondus, et ils ont
couvert leurs tètes ; les biches ont mis bas dans le désert, et elles
ont abandonné leurs petits parce qu'il n'y avait pas d'herbe; les
onagres se sont tenus sur les chemins : ils ont aspiré l'air comme
des dragons et leurs yeux se sont obscurcis parce qu'il n'y avait
pas d'herbe. » En vérité, toutes ces choses qu'a dites le prophète
ont été accomplies dans le temps présent.
Voilà le carnage que les armées des Arabes ont fait entre elles.
Ils ont enivré la terre de leur sang; les oiseaux, les bètes sauvages
et même les chiens se sont rassasiés de leur chair. Les hommes
se pillèrent mutuellement. La peste étend sur eux ses ravages,
de sorte que si quelqu'un sort dehors le glaive l'arrête; s'il reste
à la maison, la peste et là famine le saisissent. On n'entend de tous
côtés que tristesse et amertume.
D'abord, la pluie qui avait coutume de descendre sur la terre
pendant l'hiver a été retenue et n'est pas tombée. Toutes les
semailles ont été desséchées et rien n'a germé, de sorte qu'il y a
eu une grande famine dans toute la région, à tel point que le
froment monta à huit ou même sept qephizc^ pour un dinar : et
cependant on n'en trouvait pas. Certains gouverneurs envoyèrent
des hommes qui saisirent le froment partout où ils le trouvèrent,
soit dans les maisons, soit dans les silos, et le consignèrent. Les
hommes étaient opprimés par la faim jusqu'à en mourir, surtout les
possesseurs de froment qui n*avaieut pas été soumis [35] à l'épreuve
de la famine et dont les blés furent saisis par l'autorité, de sorte
1. JÉR., XV, 1-4.
2. JéR., XIV, 2-6.
S. Il est impossible de déterminer la valear précise des mesures et des
poids qui a beaucoup varié selon les temps et les lieux. Bar HBBRiCUS {Sehol.
nd II Reg., vi, 25) donne à cette mesure la valeur d'une charge d*àDe. Voir
Thés, êyriae., sub h. y.
33 CHRONIQUE
qu'ils périrent de faim. Dès lors, la famine se fit sentir aussi bien
sur les riches que sur les pauvres. Elle s*étendit également sur
toute la contrée» de sorte qu'il n'y avait pas un lieu mieux préservé
qu'un autre de ses ravages : c'était partout la même oppression.
Les bêtes sauvages, de même que les animaux domestiques qui
vivent d'herbe, périrent parce qu'il n'y avait point d'herbe. Il y eut
donc une grande affliction sur les hommes et sur toute chair, à cause
de cette famine qui n'eut point sa semblable dans notre temps, ni
dans le temps de nos pères. Les fontaines et les ruisseaux firent
défaut et les fleuves se desséchèrent.
Au moment de la mort de HiSam les fléaux se multiplièrent
sur la terre. Tous les maux» et principalement la peste et la famine,
s'abattirent sur nous à cause de nos nombreux péchés.
De la grande peste qui arriva en ce tempa-là*.
Ici le prophète Jérémie nous vient en aide très à propos, lui qui
sait mieux que personne se lamenter sur les maux qui nous ont
environnés de toutes parts : « Qui donnera à ma tète de l'eau, et
à mes yeux une fontaine de larmes? et je pleurerai jour et nuit les
morts de la fille de mon peuple*. » Et encore' : (( Sur les mon-
tagnes je m'abandonnerai aux larmes et aux lamentations, et sur
les habitations du désert aux plaintes, parce qu'elles sont déso-
lées et qu'il n'y a personne qui y passe. Que nos yeux versent des
larmes, que de nos paupières coulent des eaux. C'est pourquoi,
écoutez, femmes, la parole du Seigneur; que vos oreilles saisissent
le discours de sa bouche, enseignez à vos filles les lamentations, et
que chacune apprenne à sa voisine le chant plaintif; parce que la
mort est montée par nos fenêtres, qu'elle est entrée dans nos
demeures pour exterminer les enfants dans les rues et les jeunes
hommes dans les places publiques. Les cadavres des hommes
tomberont comme le fumier sur la face de la terre, comme l'herbe
derrière le faucheur, et il n'y a personne qui la recueille I » [36]
Qu'il vienne maintenant [le prophète], et qu'il pleure non plus
sur un seul peuple, ni sur la seule ville de Jérusalem, mais sur
tous les peuples et sur des villes nombreuses, que le fléau a ren-
1. La peste ravagea aussi l'Occident, surtout au printemps de Tannée 748.
Cfr. Hist! du^BaaEmpire, t. XII, p. 201.
2. JÉR., IX, 1.
3. JÉR.,'ix, 10, 18, 20-22.
DE DKNYS DE TELL-MAHRÉ 33
dues semblables à un pressoir en y foulant aux pieds et en y
écrasant sans miséricorde leurs habitants comme de superbes
grappes; — sur la terre tout entière, parce que le châtiment,
comme le moissonneur au milieu des blés mûrs sur pied, menaça
et enleva tous les âges, toutes les conditions, tous les rangs sans
acception de personne; — sur les cadavres en putréfaction et
déchiquetés [qui gisent] dans les rues de l'univers entier: leur pus
coule comme de l'eau, et il n'y a personne pour ]les ensevelir ; —
sur les maisons grandes et petites, belles et agré«ables, qui sont
devenues subitement les sépulcres de leurs habitants, dans les-
quelles tout à coup les serviteurs tombèrent avec les maîtres sans
que personne échappât pour tirer dehors les cadavres de l'intérieur;
— sur les routes, qui sont désolées ; — sur plusieurs villages dont
les habitants ont tous péri à la fois; — sur les palais qui frémis-
saient l'un contre l'autre; — sur les chambres nuptiales ornées
pour les fiancées, qui y sont apparues mortes subitement; — sur
les jeunes vierges gardées dans les gynécées, qui attendaient les
réjouissances de leurs noces et qui tout à coup ont été conduites
au tombeau ; — sur beaucoup de choses semblables qui surpris-
sent les discours et les narrations de tous les rhéteurs ; — sur ces
choses, dis-je, le prophète aurait raison de pleurer et de dire :
« Malheur à moi ! )) non à cause « du brisement de la fille de mon
peuples » mais à cause de la ruine de toute la terre habitée, et
de l'univers entier que la peste a complètement ravagé à cause de
ses péchés. Il aurait lieu de se servir des paroles prophétiques de
ses collègues : a Qu'il vienne et dise au reste de ceux qui ont sur-
vécu : Pleurez, lamentez- vous, ministres de Tautel ; entrez, passez
la nuit sur le cilice, ministres de mon Dieu, » non « parce que
l'oblation a été retranchée [37] de la maison de Dieu, » maisà cause
des hommes qui ont été retlranchés du monde' ; et encore' : « Que
la terre habite dans le deuil, que tous ses habitants se lamentent.
Appelez les pleureuses et que les chanteuses de lamentations vien-
nent célébrer le deuil toutes ensemble, non plussur un fils unique, »
ni sur un seul cadavre, mais sur des peuples et des royaumes.
« Par le déchirement sera déchirée la terre, par le brisement
sera brisée la terre, par l'ébranlement sera ébranlée la terre, par le
chancellement chancellera la terre. Elle sera livrée au feu comme
un térébinthe garni de feuilles, comme un chêne tombé de sa
1. JÉR., VIII, 21.
2. Joël, i, 13.
3. Cfr. JÉR., IX, 17; Amos, vin, 8.
34 CHRONIQUE
base\ » Toutes ces choses ont été accomplies cUlds le temps pré-
sent : les grandes commotions et les tremblements de terre vio-
lents ; les armées, les guerres, les inimitiés des Arabes entre eux
au sujet du pouvoir; la famine qui sévit tellement que dans la
région méridionale et orientale toute la population se leva et se
répandit sur les contrées du Nord et de TOccident; la discorde
avec tous les maux.
t J'enverrai après eux, dit le prophète, le glaive et la captivité,
la famine et aussi la peste *.» Toutes ces choses arrivèrent de dos
jours sans aucune exception. Voici le glaive des Arabes [tourné]
contre eux-mêmes; voici la déprédation telle qu'il était impossible
de sortir sans être pillé et dépouillé de son bien ; voici la famine
qui sévit à l'intérieur et à l'extérieur. Si quelqu'un entre dans sa
maison, il y rencontre la famine et la peste, s'il sort au dehors, le
glaive et la captivité courent au-devant de lui. De tous côtés ce
n'est que cruelle oppression, douleur lamentable, souffrance et
commotion.
(( Ils sont ivres, non, certes, de vin, et ils chancellent non pas
d'eau-de-vie'. » Les hommes commencèrent à errer et à circuler
de ville en ville et de lieu en lieu; ils trébuchaient comme s'ils
étaient ivres; ils demandaient du pain et il n'y en avait point!
ainsi que dit le prophète.
D'abord, un grand nombre de chefs de familles commencèrent à
tomber malades et à mourir de corruption du sang et d'ulcères.
Les choses se passèrent ainsi [38] pendanttout l'hiver. On ne par-
venait pas à les ensevelir. Les hommes gisaient dans les places,
les portiques, les tours, les temples, dans toutes les habitations,
torturés par la violence de la maladie et la grande rigueur de
la famine : de sorte que le nombre de ceux qui périrent de faim fut
plus considérable que celui de ceux qui périrent par la maladie.
Ce furent surtout ceux qui avaient du pain à satiété qui furent
saisis par cette maladie. Quand les jours devinrent plus chauds,
des tumeurs se manifestèrent sur les malades qui commencèrent à
tomber dans les places publiques comme du fumier à la face de la
terre, et il n'y avait personne pour les ensevelir! Cette peste
commença à sévir sur les pauvres, qui étaient abandonnés sur les
places. On les ensevelissait avec honneur, au chant des cantiques,
et on les enterrait convenablement, et comme il n'y eut bientôt
1. Cfp. Is., XXIV, 19.
2. Jér., XXIV, 10.
3. Is.. XXIX, 9.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 35
plus de pauvres, la mortalité sévit avec une telle violence sur les
seigneurs des villages et des villes que, quand les prêtres voulaient
faire un enterrement, on réunissait le matin dans un même lieu
cinquante, soixante et jusqu'à quatre-vingts ou cent cercueils, dans
chacun desquels il y avait deux ou trois morts ou même quatre
enfants. Et ainsi tout le jour, sans trêve ni repos, se passait à ense-
velir les cadavres des hommes.
Les Arabes couvrirent la terre de fosses, et les Juifs pareille-
ment. Les tombeaux des chrétiens étaient tellement remplis
qu'eux-mêmes furent contraints de creuser la terre. Dans un seul
jour, plus de cinq cents cercueils sortaient par une seule porte.
Pendant toute la journée les portes ne servaient qu'aux allées et
venues de ceux qui emportaient les cadavres: ils sortaient, les
déposaient et revenaient en prendre d'autres. Alors, excepté pour
quelques-uns, on ne faisait point d'office \ tant à cause de l'instan-
tanéité de la mort que du petit nombre [39] des prêtres et de la mul-
titude innombrable des convois.
Le matin, les prêtres prescrivaient que quiconque avait un mort
vînt avec son défunt au carrefour voisin, et toute la région ou
le quartier s'assemblait en cet endroit. Les prêtres se divisaient
ainsi dès le matin pour s'en aller de tous côtés faire TofBce des
morts et les porter en terre par groupes. Il arrivait que dans un
seul groupe se trouvaient réunis plus de cent cercueils dans les-
quels il 7 avait plus de deux cents ou de deux cent cinquante
morts : car ils s'entassaient les uns à côté des autres sans relâche
pendant tout le jour.
Là, point de distinction entre le serviteur et son maître, entre la
servante et sa maltresse, entre l'homme à gages et celui qui le paie,
mais un même pressoir de perdition et de fureur était préparé pour
tous : serviteurs et maîtres étaient également frappés sans accep-
tion de personne ; l'homme du peuple et les chefs tombaient et
râlaient l'un à côté de l'autre. Que chacun donc admire le décret
divin et soit saisi d'étonnement et de stupeur en présence de ces
jugements de Dieu, insondables, incompréhensibles, incommen-
surables pour les hommes. Certes, « abîme profond que les juge-
ments du Seigneur * ! »
Le fléau étendit sa main dévastatrice sur ceux qui tiennent le
1- Le sens paraît être, d'après le contexte, tout à la fois qu'on n'adminis-
trait pas les sacrements aux mourants et qu'on no récitait pas l'office des
morts sur les cadavres.
2. P«., XXXVI, 6.
36 CHRONIQUE
pouvoir, qui jouissent de l'opulence, ou qui se délectent dans les
grandeurs. Les maisons de beaucoup d'entre eux demeurèrent sans
héritier, car il ne resta pas même en elles un serviteur ou un
maître. Les hommes abandonnaient subitement à leurs compa-
gnons leurs possessions, leurs richesses, leurs moissons, même
leurs maisons superbes. Combien de splendides et opulentes de-
meures, combien de familles périrent parce qu'il ne leur resta pas
un seul héritier !
La langue humaine est incapable d'exprimer les calamités prodi-
gieuses [40] qui survinrent dans le pays qui s^étend depuis l'Eu •
phrate jusqu'à l'Occident, aussi bien que dans les autres villes de
la Palestine, dans le Nord et dans le Midi, jusqu'à la mer Rouge,
de même que dans le reste de la Cilicie, de la Lycaonic, de l'Asie
[Mineure], de la Bithynie, de la Lysynie\ de la Galatie, même
de la Cappadoce : car l'oppression de cette cruelle souffrance se
fit sentir sur tout l'univers. Comme la pluie qui descend sur toute
la terre, ou comme les rayons du soleil qui se répandent égale-
ment en tous lieux, cette peste se répandit pareillement sur le
monde entier. Cependant elle sévit davantage dans les pays précé-
demment désignés.
Dans ces régions, des bourgs et des villages nombreux sont deve-
nus subitement déserts, sans personne qui y passe ou y demeure.
Ils étaient remplis de cadavres en fermentation étendus sur le
sol comme le fumier sur la face de la terre, sans personne pour
les ensevelir: car il ne resta pas un seul de leurs habitants; eu
sorte que les hommes gisaient au milieu d'eux enflés, purulents,
en décomposition. Les maisons étaient ouvertes comme des sé-
pulcres et leurs propriétaires tombaient en putréfaction au milieu
d'elles. Leur mobilier, leur or, leur argent, leurs biens, étaient
dispersés dans les rues et il n'y avait personne pour les recueillir.
On méprisait l'or et Targent, les richesses étaient abandonnées en
tout lieu et ne trouvaient point de maître. Des vieillards et des
vieilles femmes, ornés de cheveux blancs, qui avaient espéré être
ensevelis avec honneur par leurs héritiers, gisent la bouche béante
dans les rues, dans les maisons, dans les places publiques, se
crèvent et tombent en putréfaction. Des vierges charmantes, de
belles jeunes filles qui attendaient les hyménées joyeux et l'orne-
ment de vêlements précieux sont étendues découvertes, pourrissent
pêle-mêle et sont devenues un objet de pitié pour ceux qui les
voient. Plût à Dieu que ce fût dans les tombeaux 1 Mais, c'est
1. Lydie {?).
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 37
dans les maisons, au milieu des rues, [41] que des jeunes gens char-
mants et joyeux sont devenus livides, qu'ils sont étendus, et que leur
pas se mêle à celui de leurs parents.
Voilà ce qui est arrivé dans ces contrées.
Partout, ceux qui restaient, — en bien petit nombre, — enlevaient
les morts, et pendant tout le jour sans relâche les portaient dehors,
les jetaient comme qui jetterait une pierre sur un monceau, puis
revenant^ en prendrait une autre^ et sortant de nouveau, irait la jeter
pareillement.
Beaucoup manquaient de proches: on les voyait étendus sur les
rues et dévorés par les chiens, car il n*y avait personne pour les
ensevelir. Chacun ne suffisait qu'à sa propre maison : on prenait
même plusieurs ouvriers à gages, uniquement pour emporter les
cadavres de la maison ou de la place publique à cause de leur
putréfaction. Et ainsi fut accomplie cette parole^: ((J'ai fait monter
rôdeur de leur putréfaction à vos narines, » et cette autre' : « La
erre a pleuré et elle s'est lamentée. »
Bientôt il n'y eut plus ni pleurs, ni chagrin, ni douleur: car tout
homme frappait déjà à la porte du tombeau. L'or et l'argent étaient
méprisés comme du fumier : de sorte que s'il y avait sur les
épouses ou les vierges de l'or, de l'argent ou des ornements pré-
cieux, personne n'étendait la main pouren preniire quelque chose,
pas même les parents de leurs enfants : car ils estimaient que
bientôt ils entreraient avec eux dans la tombe et que leur pus se
mêlerait au leur.
Et maintenant, mes bien-aimés,avec quelles larmes pleure rai-je?
Quels sanglots me suffiront? Quel brisement de cœur, quel deuil,
quelles lamentations, quels gémissements, quelles douleurs seront
suffisants quand je vois des vieillards et des hommes de tout âge
et de toute taille abattus et étendus comme des cèdres!
La grande miséricorde de Dieu apparut même dans ce fléau : car
M s'abattit premièrement sur les pauvres qui étaient étendus dans
*es rues des villes : partout ce fut par eux qu'il commença, [42] et
quand ceux-ci étaient complètement enlevés, alors cette verge
terrible se tournait contre les riches et les seigneurs des villes.
Ces deux choses furent opérées par la miséricorde divine, de
manière à profiter aux deux parties. D'abord aux habitants des
villes, car ils montraient leur zèle pour la justice et retiraient pour
leurs âmes un grand profit de leur sollicitude pour les pauvres,
1. Amos, IV, 10.
2. Is., xxiv, 4.
38 CHRONIQUE
tandis qu'ils prenaient soin d*eux, les ensevelissaient^ s'occu-
paient de leurs convois et les enterraient avec grande douleur, avec
soin, avec crainte et avec zèle. Ensuite [aux pauvres], parce que si
le fléau les avait confondus avec les autres, comment aurait-il été
possible, à cause de leur puanteur, de faire enlever leurs ossements
décharnés des rues? Car ils eussent manqué de ceux qui pouvaient
s'en occuper, s'il ne les avait visités d'abord, quand tout le monde
était sain, debout et valide : on prenait alors soia d'emporter, pour
les enterrer, ceux qui n'avaient personne pour les ensevelir. Par la
suite, le fléau fit que les puissants qui comptaient sur des tombeaux
et des ensevelisseurs, demeurèrent sans sépulcre, en sorte que pas
un seul d'entre eux n'eut d'office. Le fléau, en effet, se tourna
vers les grands dès que les pauvres furent ensevelis, et la mort les
saisit tous depuis le plus petit jusqu'au plus grand : personne
d'entre eux ne Testa. Ceux-mômes qui échappaient à cette calamité
et n'en' mouraient point se retiraient, tant qu'ils étaient, en dehors
des villes. A la fin, ceux qui survécurent furent frappés d'une plaie
terrible, celle des aines : les uns d'une seule, les autres des deux.Ce
qui était arrivé aux morts avait lieu pour les vivants. Ils étaient su-
bitement saisis de douleur [43] des aines, et aussitôt, par ce signe,
celui qui avait échappé à la mort acquérait la certitude de souffrir
plus durement que par une mort cruelle. Les aines se gonflaient,
se tuméfiaient et se crevaient, et il se produisait des ulcères grands
et profonds qui laissaient couler du sang, du pus et de l'eau, jour et
nuit, comme une source. De là une grande langueur dans laquelle
ils restaient les uns un mois, d'autres deux, cinq, six mois et
jusqu'à un an, un grand nombre même deux ans. Beaucoup d'entre
eux furent atteints pour toujours.
Alors fut accomplie la parole prophétique qui dit*: a L'eau
coulera de tous les genoux, » et*: « Tout cœur humain sera en
putréfaction.» et cette autre': « Sur toutes leurs têtes sera la
calvitie. »
Il en advint ainsi dans le temps présent. Quiconque avait sur-
vécu à sa famille ou à sa tribu tombait dans cette infirmité. Il
arrivait que ses deux genoux laissaient couler de l'eau et même du
sang et du pus, jusqu'à ce que sa tête devînt chauve, et à cause de
cela, ceux qui avaient survécu, en petit nombre, n'étaient point
reconnaissables, à moins qu'on ne les reconnût et ne les distinguât
1. ËZECH., VII, 17.
2. ISAÏE, XIII, 7.
3. ISAÏE, XV, 2.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 39
par leurs vêtements. On ne pouvait discerner les prêtres et les
moines : tous étaient devenus chauves. Comme il en avait été des
aines, ainsi il en fut des aisselles et du cou. La plupart furent
promptement délivrés de ce mal, d'autres le furent après un cer-
tain temps, d'autres en6n ne recouvrèrent jamais parfaitement la
santé.
Or, tandis que cette calamité enveloppait la région de toute part
comme les douleurs de l'enfantement oppressent la femme enceinte,
les Arabes ne cessèrent point de se combattre et de se nuire mu-
tuellement. Alors que Merwan sortit de la Porte des Turcs, toute
la terre était troublée et agitée. [44]
L'an 1057 (745-746), Merwan sortit de la Porte des Turcs'.
11 est écrit dans le prophète Jérémie' : (( C'est pourquoi ainsi dit
le Seigneur : Voici que je placerai des écueils à ce peuple : les pères
et les fils y échoueront ensemble; le voisin et son ami y périront. »
Toutes ces choses arrivèrent aux Arabes, car les frères et les
neveux tombèrent dans les écueils par leur ambition.
Les partisans de 'Abbas et ceux de HiSam', les fils de Walid et
les partisans de Merwan, qui étaient frères et neveux, voisins
et amis, se jetèrent les uns sur les autres, périrent eux-mêmes
et firent périr avec eux un grand nombre d'hommes.
Jérémie a dit aussi à propos de la sortie même de Merwan* :
f( Voilà qu'un peuple vient de la terre d'Aquilon ; une grande nation
sortira des confins de la terre ; ils sont armés d'arcs et de lances,
ils sont cruels et sans pitié ; leur voix est comme le bruit de la mer
agitée; ils sont montés sur des chevaux et sont préparés comme
des hommes vaillants pour le combat. Nous avons appris leur
dessein et nos mains ont faibli ; la tribulation et des douleurs
comme celles de la femme qui enfante nous ont saisis. Ne sortez
1. C'est-à-dire descendit de rArmônie, dont il était gouverneur, comme
Doas l'avons va plus haut, p. 23.
2. JÉR., VI, 21.
3. Les Abbassides et les Omiades. Cette révolte de Mer\van, qui combat-
tait soi-disant pour venger les enfants de Walid II, ne contribua pas peu
à favoriser les progrès des Abbassides. Ces derniers tirent leur nom de *Abbas»
onde de Mahomet et père de Haschem. De là le nom de Beni-Haschem,
soas lequel ils sont quelquefois désignés.
4. JÉR., Ti, 22 sqq.
40 CHRONIQUE
point dans les champs et ne marchez point dans la route à cause
du glaive des ennemis. )> Et Isaïe dit aussi en parlant d'eux* : « Je
Tai suscité de Taquilon, il viendra de TOrient, il invoquera mon
nom; ils emmèneront les magistrats et les traiteront comme la
boue que le potier foule aux pieds, » et encore': « De Taquilon le
mal se répandra sur tous les habitants de la terre. »
Lorsque Merwan eut envahi la Mésopotamie et qu'elle lui fut
soumise, il y établit des administrateurs dans toutes les villes, et
même à Mossoul. Ayant ensuite réuni une armée nombreuse, il la
fit avancer rapidement avec des ouvriers et des ingénieurs.
Les partisans de 'Abbas passèrent à l'Occident. Yézid, qui
avait tué Walid, mourut après un règne de six mois, et [45] son
frère Ibrahim prit sa place.
Celui-ci, en apprenant que Merwan avait passé TEuphrate avec
une armée considérable, et que la Mésopotamie lui était soumise,
fut saisi de frayeur. « Ils tremblaient et chancelaient comme des
hommes ivres'. »
Il envoya d'abord contre Merwan Nou aim Ibn Thabit*, avec une
armée considérable. On rapporte de cet homme qu'il avait soixante-
dix (ils.
Ils s'avancèrent doue l'un contre l'autre et engagèrent la bataille:
toute l'armée d' Ibn Thabit fut détruite et mise en pièces en présence
de Merwan.
Les partisans d'Ibrahim voyant que Merwan avait triomphé
dans ce premier combat furent saisis de crainte et rassemblèrent
des forces innombrables, réunissant même le peuple des campagnes
pour combattre avec la fronde.
Les deux armées s'avancèrent l'une contre l'autre, et s'étant
rencontrées, campèrent à *Aïn Gara*. Après de nombreux engage-
ments, et après qu'un grand nombre d'hommes fut tombé conti-
nuellement de part et d'autre, Merwan remporta enfin la victoire et
tailla en pièces Ibrahim et ses frères qui prirent la fuite, ainsi que
Soliman, fils de Hi§ara. Jamais pareille bataille ne se vit dans le
1. Isaïe, xli, 25.
2. JÉR.. I, 14.
3. Ps., cvii» 27.
4. Peut-être Thabit Iba Nou'aïm. Cfr. Wkil, Gesch, d. Chaliphen, i. ï,
p. 688, n. 1. — Notre auteur n'est pas tout à fait d'accord avec les auteurs
arabes pour l'ordre des faits qu'il rapporte.
5. *Aïn al-Djarr, entre le Liban et l'Anti- Liban, sur la route de Damas à
Baalbek. — Cfr. Wbil, Gesch. d. Chaliphen, l, 682, n. 1, où oo discute
Videntiûcation de ce nom.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 41
monde; jamais en aucun lieu autant de sang ne fut répandu qu'en
cet endroit. Même le peuple de la campagne, — plus de cinq
mille hommes, — y périt.
Merwan après sa victoire assiégea Éraèse, s'en empara et ren-
versa ses murailles. Il fit aussi retirer le cadavre de Yézid de son
tombeau et le fit crucifier la tète en bas.
Il prit encore, d'un certain Juif, quatre cent mille [pièces] d'or.
Des porteurs de V Église qui florissaient à cette époque.
Après saint Âthanase, saint Mar Jean fut patriarche d'Antioche^
A Édesse florissait l'évoque saint Constantin ; à Flarran, saint Mar
Siméon, du saint monastère [46] de Qartamin ; à Samosate, un autre
Constantin ; à Maipherkat, saint Mar Athanase surnommé San-
dalia, qui par la suite devint patriarche.
A Amida, saint Mar Cosme eut pour successeur Mar Sabas, du
saint monastère de Zouqenin, situé dans le ressort de cette ville. Il
mourutaprès vingt ans, et Sévère, du même monastère, lui succéda.
Celui-ci mourut au bout d'un an environ, pendant l'épidémie,
tandis qu*il visitait son diocèse. On mit à sa place un autre Sévère,
du même couvent.
A cette même époque, un certain trouble eut lieu dans l'Église, à
propos de saint Mar Jean à qui tous ne voulaient pas se soumettre.
Translation du trésor royal d* Occident en Mésopotamie.
Merwan, connaissant la perfidie des Occidentaux à son égard,
voulut amener le trésor royal en Mésopotamie. Les Occidentaux se
soulevèrent alors violemment et commencèrent à se tourner contre
lui. Sachant qu'ils ne le lui livreraient point sans combat, il les
trompa et leur dit: « Je ne veux pas le conduire en Mésopotamie,
mais à Damas, puisque c'est là qu est établi le siège de la royauté. »
Quand il eut fait cela, ils lui permirent de le conduire à Damas.
Eux-mêmes l'accompagnèrent et Tintroduisirent dans la ville. Après
quelques jours, il les renvoya dans leurs maisons, et deux ou trois
mois s'étant écoulés, au moment où les Occidentaux n'y faisaient
1. Cfr. Bar Hibraus, Chron. eccles,, l, 306 sqq.
43 GHRONIQVB
point attention, il enleva furtivement le trésor et le conduisit à
Ijlarran où il vint lui-même habiter.
Depuis lors la guerre ne cessa pendant tout son règne. [47 J
L'an 1058 (746-747) Dahaq, s'associant à la secte des Harourites,
envahit la Mésopotamie \
Merwan en venant en Mésopotamie n'avait pas encore trouvé
trêve à ses maux: il lui surgit de cette terre de Mésopotamie une
cruelle épine.
A cette époque le tyran Dahaq, du mont Izala, et avec luiYakoub,
Haïbari et Saqsaqi, vinrent engager de nombreux combats avec
Merwan et tuèrent un grand nombre de ses soldats. Après de nom-
breux engagements livrés en tous lieux, une violente et cruelle
bataille eut lieu à Tell-Maârita, dans laquelle Dahaq périt avec
toute son armée, qui fut taillée en pièces. Ceux qui restaient prirent
la fuite \
L'an 1059 (747-748) il y eut un grand et violent tremblement de
terre dans la région occidentale.
« Par l'ébranlement sera ébranlée la terre, par le chancellement
chancellera la terre et elle sera agitée comme une cabane *. »
Ces choses, et des choses semblables, et de plus mauvaises
encore, ont été causées par les iniquités, les péchés, les malices que
nous commettons chaque jour. Où pourrons-nous trouver la cause
de ces tremblements de terre, si ce n'est dans les péchés des hommes ?
Est-ce que la terre se disloque? Quand elle tremble et qu'elle est
agitée, invoque-t-elle son artisan pour qu'il vienne la consolider?
Je ne le pense pas. Mais quand elle tremble, elle proteste contre les
iniquités qui s'accomplissent à sa face, comme elle le fit voir une
fois clairement par le fait suivant:
Il y eut pendant la nuit une commotion, et on entendait de très
loin comme la voix d'un taureau qui mugit. Le matin venu,
révêque ordonna, sous peine d'excommunication, que tout le
monde se réunît pour sortir en prière*, car, disait-il, cela arrive
à cause des péchés. Tous vinrent donc à la prière, et allèrent en
1. Cfr. Wkil, Gesch. d. Chaliphen, I, 687-689.
2. ISAÏB, XXIV, 19.
3. La fonction religieuse désignée par le mot Baouta (petit ion, prière),
correspond dans l'office syriaque aux Rogationa des Latins.
DE D^NYS DE TELL-MAHRÉ 43
procession à un temple dédié à la Mère de Dieu, qui se trouvait en
dehors de la ville, «».'est-à-dire de Maboug, [48] dans la région occi-
dentale. Ces gens étaient chalcédoniens \ L^évèque lui-même mar-
chait à leur tête. Comme ils venaient d'arriver à l'église et qu'ils
y étaient tous entrés comme des chèvres dans la bergerie, tandis
qu'ils récitaient tous ensemble la prière, il y eut tout à coup un
tremblement de teire, l'édifice s'écroula sur eux et les écrasa tous
avec leur évéque. Ils y périrent tous, et pas un n'échappa vivant.
Ils devinrent subitement un pressoir de perdition et de malheur :
le juste y périt avec le pécheur.
L'an 1060 (748-749), le peuple des Perses' envahit la terre de
Syrie, subjugua les Arabes et régna à leur place.
Isaîe prophétisa autrefois sur ces choses en disant ' : « Voici
Assur! C'est lui la verge de ma fureur; dans sa main est le bâton
avec lequel je frappe. Je l'enverrai vers une nation impie et lui
donnerai des ordres contre le peuple de ma colèi-e. » Il dit encore * :
« Il arrivera en ce jour-là que le Seigneur sifflera pour [appeler]
les mouches qui sont sur les bords des fleuves de l'Egypte et les
abeilles qui sont dans la terre d'Assur. Elles se reposeront d^ms
les vallées désertes et dans les creux des pierres. »
En vérité, ceux-ci sont la verge de fureur, et le bâton qui frappe
est dans leurs mains, comme dit le prophète, car ils portaient
à la main des bâtons, à l'extrémité de chacun desquels se trou-
vaient des clous de fer, comme s'ils s'avançaient pour tuer des
chiens.
11 Les appelle aussi a mouches et abeilles » et à bon droit:
car de même que les mouches bourdonnent, se posent partout,
produisent des vers et une odeur fétide, de même ceux-ci étaient
des magiciens, des voleurs, des adultères, des assassins qui, partout
où ils allaient, causaient le mal, la discorde et le trouble. Ils s'éle-
vèrent de leur contrée et s^avancèrent en grand nombre, comme un
essaim d'abeilles qui parait méprisable, mais ne retourne point [49|
en arrière. Ils se réunirent ainsi pour envahir la terre.
1. C'est-à-dire partisans da concile de Cbalcédoine que rejetaient les mono-
pbysites, et par conséquent hérétiques aux yeux de l'auteur.
2. Denys désigne sous le nom de Perses, les Abbassides. Theophanes,
Chronogr., ad ann. m. 6240, les appelle Xiooaffav^Tat et aussi Maupocopot
(vêtus de Doir). C'est en effet dans le Kboraçan et la Perse orientale que les
Abbassides firent les premières tentatives de révolte contre les Omiades et
qu'ils recrutèrent leurs troupes.
3. ISAÎB, X, 5.
4. IsAîB, vu, 18 sqq.
44 CHRONIQUE
Une armée arabe descendit contre eux près de Akoula ' ; mais
elle ne put leur tenir tôte : ils la détruisirent, et les survivants
prirent la fuite et se dispersèrent. Ils s'emparèrent des armes, des
chevaux et de grandes richesses, car auparavant tous allaient à pied
et ne possédaient rien autre chose que les bâtons qu'ils portaient à
la main.
Joël a parlé d'eux quand il dit* : « Comme l'aurore répandue
sur les montagnes, un peuple nombreux et fort se répandra; de
semblable à lui, il n'y en a point eu depuis le commencement, et
après lui il n'y en aura point pendant les années des diverses
générations. Devant sa face un feu dévorant : et derrière lui une
flamme brûlante. La terre est comme un paradis d'Éden devant lui :
et derrière lui, comme la solitude du désert. Il n'y a personne qui
lui échappe. Comme l'aspect des chevaux est leur aspect; ils
courent comme des cavaliers. »
Le prophète a raison de les appeler « figure de chevaux », car de
même que le cheval porte une crinière sur la tôte et sur le cou, ils
avaient une chevelure longue, semblable à la crinière d'un cheval.
Aussi il dit encore • : « Ils courent comme des cavaliers, imitant
le bruit des quadriges sur les sommets des montagnes, le bruit de
la flamme d'un feu qui dévore la paille, comme un peuple fort pré-
paré au combat. Devant lui tous les peuples trembleront, tous les
visages deviendront noirs comme la suie d'une marmite. Ils
courront comme des géants; comme des hommes de guerre, ils
escaladeront les murs. » Et encore * : « Ils monteront dans les
villes» ils courront sur les murs, ils monteront ciu haut des maisons
et entreront par les lucarnes comme des voleurs. A sa face la terre
a tremblé, les cieux se sont ébranlés.» — Nahum aussi a dit*:
« Leur aspect était comme des lampes de feu et ils courent comme
des éclairs. Ils s'empareront de leurs maîtres, ils fléchiront dans
leurs marches, ils monteront rapidement sur les murs et se pré-
senteront sur les créneaux. » Et encore*: « Leur face à tous était
comme le noir [50] d'une marmite. »
Non seulement leurs visages étaient noirs, mais tous leurs
1. Ancien nom de Koufa, sur la rive oci^identalc de TEupbrate à cinq
journées de marche de Bagdad. Vide Bar HEBRiEUs, Chron. cccl.^ II, 111,
n. 1.
2. JoBL, 11,2,4.
3. JoEL, II, 3, 4.
4. JoBL, II, 4-7.
5. Nahum, ii, 4.
6. Nabum, II, 11.
DE DENYS DE TELL-MAHRK 45
vêtements, car leur habillement était de cette couleur. Pour
cela on les appelait [en arabe] Me880uàdi\ ce qui signifie noir [en
syriaque].
Lorsqu'ils eu rent su bj ugué la région inférieure. Mer wan en voya de
nouveau contre eux à Nisibe Ibn Houbeira qui, lui non plus, ne
put tenir devant eux et fut également taillé en pièces. Alors 'Abdal-
lah Ibn Merwan descendit et fut aussi vaincu.
Merwan vint lui-même, et après de nombreux combats dans
lesquels il y eut des deux côtés beaucoup d*hommes tués, ils enga-
gèrent enfin une grande et terrible bataille, et la terre fut rassasiée
du sang qu'ils répandirent en abondance à Beit Zabê'.
Merwan, taillé en pièces, prit la fuite. Son armée fut dispersée;
et il se réfugia lui-même au delà de TEuphrate. Toutes les villes
se fermaient devant lui, et les Occidentaux voulurent le combattre.
Dès lors il disparut et on ne le vit plus, lui ni aucun des siens.
Les captifs furent en partie mis à mort, en partie jetés dans les
fers'.
Les Perses, après avoir ainsi battu Merwan se répandirent sur
la terre, u comme les loups du soir ou les aigles affamés » .
Habacuc a prophétisé d'eux quand il dit* : « Voici que je
suscite les Chaldéens, nation audacieuse et cruelle qui parcourt
rétendue de la terre pour s'emparer des tabernacles qui ne sont
pas à elle. Elle est formidable et terrible; c'est d'elle-même
que sort son jugement, » — en vérité ils se répandirent sur l'étendue
de la terre, — « ses chevaux sont plus légers que les léopards, plus
agiles que Jes loups du soir. Us voleront comme un aigle aSamé à
sa pâture. Tous viendront au butin. »
Ce prophète les assimile justement aux loups du soir. Les loups en
effet [51] ne se montrent pas et ne peuvent être vus des hommes ou
des chiens pendant le jour. Le soir, ils ont faim, car ils n'ont
pas mangé de la journée, a Dès le lever du soleil ils se retirent
dans leurs antres pour s'y coucher et l'homme sort pour son travail
et son labeur jusqu'au soir^
1. Cfr. ci-dessos, p. 43, n. 2; Dozv, Suppl., sub v. g^,.,,^
2. C'est-à-dire sur les rives du Zab supérieur, entre Mossoul et Arbèle :
Jj.jlj ^^ 4>J J^Vl ^lj(l Jp ô^ (Yakout, II, 904). Cette bataille
mit fia à la domination des Omiades et assura le triomphe des Abbassides.
3. Cfr. Wbil, Gt^ch. d, Chaliphen, I, 699-702.
4. Habac, I, 6.
5. P«., civ, 22, 23.
^
46 CHRONIQUE
De même qu'ils hurlent quand ils sont affamés, ainsi en était-il
de ceux-ci; ils criaient comme Taiglequi gémit lorsqu'il a faim, et
partout où ils parvenaient, comme des loups, ils volaient les biens
des hommes, ainsi qu'il est dit : « Tous viennent au butin;» et
ailleurs : « Il insultera aux rois, tournera les princes en dérision, se
moquera de toutes les fortifications \ »
La prophétie n'a-t-elle pas raison de dire : « Il se moquera des
fortiGcations, » puisque tous les murs des villes ont été renversés
par leurs mains et qu'ils ont détruit tout ce que des rois sages et
prudents avaient fait à grands frais pour se défendre des ennemis.
Elle dit : «Il insultera aux rois et tournera les princesen dérision. »
Ne leur insulte-t-il pas, ne se moque-t-il pas en détruisant leurs
constructions?
Le premier gouverneur de la Mésopotamie fut 'Âki,qui fit un
édit pour obliger tous les Musulmans à se vêtir de noir.
L'an 1054 (742-743), le vendredi premier jour de Kanoun second
[janvier], les étoiles tombèrent du ciel et on les voyait comme des
globes de feu qui couraient de tous côtés. Elles présageaient les
calamités qui sont venues par la suite sur la terre : le glaive, la
peste et l'invasion des Perses.
L'an 1061 (749-750), les Arabes prirent le blanc».
Les Arabes, voyant les maux que leur infligeaient les Perses,
qui ne cessaient de les tuer sans pitié comme des agneaux, et de
piller [52] leurs biens, ne purent les supporter davantage et revê-
tirent le blanc.
Il est dit : R II se moquera des rois et des princes, » et encore* :
(( L'homme vil prévaudra sur les grands, et les misérables contre
les gens d'honneur. » Les Arabes prirent donc le blanc, tuèrent un
grand nombre [de Perses], les mirent en fuite et descendirent dans
leur pays.
Il y eut un interrègne d'une année entière, pendant lequel la
discorde s'éleva, et Boraïka embrassa la secte des Harourites.
L'an 1062 (749-750), les Arabes de Maipherkat se répandirent
dans la région et commencèrent à faire beaucoup de mal aux habi-
tants de la montagne et de toute la contrée. Qôré Ibn Thabit monta
dans le canton de Qoulab, s'empara de ses notables et en tua
sept. Quand leurs frères, les habitants du canton de Phis, con-
1. Hab., 1, 10.
2. Se révoltèrent; ou embrassèrent la secte des Harourites. Voir ci-dessus
p. 27, n. 2. — Cf. Hiat. d'Édesse, p. 259, n. 1.
3. Cfr. Is., III, 4-5.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 47
nurent ce qui était arrivé, ils se tinrent sur leurs gardes de peur
d'être traités encore plus mal. Or, il se trouva un homme coura-
geux, fidèle et craignant Dieu, nommé Jean Bar Dadai, originaire
du village même de Phis, qui réunit tous les habitants du canton
de Phis, et leur parla en ces termes : « Aujourd'hui, vous le savez,
il n'y a pas de roi pour venger notre sang des mains de ceux-ci. Si
nous les laissons faire, ils se réuniront contre nous et nous emmè-
neront d'ici en captivité, nous et tout ce qui est à nous. » Ceux-ci
l'écoutèrent avec empressement, s'attachèrent à lui et l'établirent
leur chef. Il les fit entrer dans le temple saint et leur fit jurer, par
les divins mystères, qu'ils écouteraient tout ce qu'il leur comman-
derait, qu'ils n'agii^ient point contre son ordre et ne le trompe-
raient en aucune façon.
Cet homme, fortement encouragé, ayant établi Dieu pour son
chef, prit sa troupe et créa des chefs d'armée et des officiers qui
commandaient à chaque groupe de mille, de cent, de cinquante et
de dix hommes. Il établit des gardes [53J à l'entrée de tous les
passages qui donnaient accès à la montagne.
Or, vint un homme, nommé Souda, qui promit à tous les Arabes
de Maipherkat de leur apporter les tètes coupées de tous les grands
de la montagne, et de jeter les autres dans les fers. Après avoir fait
de telles promesses, il emmena une forte armée avec lui et s'avança
vers eux, comme pour demander la paix. Ceux-ci, ayant eu con-
naissance de sa ruse trompeuse, tombèrent sur lui à l'improviste
et tuèrent un grand nombre de ses hommes; les autres prirent la
fuite et échappèrent, grâce aux chevaux sur lesquels ils étaient
montés ; ils rentrèrent dans la ville. Depuis ce moment, il leur
arriva de grands malheurs.
Les Arabes et les chrétiens voulurent, d'un commun accord,
faire descendre le gouverneur qui, depuis deux ans, était établi
dans la forteresse de Qoulab. Ils refusèrent de lui obéir et se révol-
tèrent contre lui. Les Arabes voulaient le faire descendre de peur
qu'il ne se joignit aux habitants de la montagne; les Syriens aussi
demandaient son départ dans la crainte qu'il ne les trahît. Celui-ci,
résistant aux deux partis, s'établit solidement dans la forteresse : il
réunit des hommes pervers dont il devint le chef et descendit à la
télé de sa troupe pour ravager les villages et emporter le butin dans
la forteresse. Il tomba à l'improviste sur Eloul et Pa§pa§at, où il
commit toutes sortes d'atrocités, lui et son armée. Il jeta les habi-
tants dans les fers et s'empara de tout ce qu'ils possédaient.
Tandis que ces hommes faisaient souffrir ces maux aux habi-
tants du village, ceux-ci mandèrent secrètement à Jean : « Accou-
48 CHRONIQUE
rez à notre secours, que nous ne soyons pas emmenés en capti -
vite. » Jean, en apprenant l'oppression de ses frères, s'empressa de
faire avancer rapidement son armée et de descendre vers eux. A la
nuit, il entoura le village dans lequel se trouvaient [ses ennemis]
et leur fit dire : (( Sortez [54] du village, et allez en paix. » Mais le
gouverneur ne voulut pas. Il se mit à la tête de sa troupe et ils
sortirent en armes pour s'avancer au combat. Jean tomba sur lui,
et il périt avec son armée. Le Seigneur tourna contre sa tête le mal
qu'il avait fait, il le renversa en présence de [Jean] et il mourut.
Il y avait aussi dans la montagne un des notables, nommé
Etienne, fils de Paul, homme criminel et fourbe qui foulant aux
pieds le serment qu'il avait juré à Jean, sur les'divins mystères, lui
dressait continuellement des embûches. Il avait l'intention de le
livrer aux Arabes. Il envoya donc perfidement vers larmée arabe
et 'Aouph^ vint le trouver avec une troupe considérable dans le
village appelé lïazro*. Il convint secrètement avec eux de faire
venir Jean pour le livrer entre leurs mains. Il agit, en effet, ainsi
pour exécuter ses desseins, mais Dieu ne permit pas au criminel
d'accomplir son désir. Le projet qu'ils avaient formé contre l'homme
innocent retomba sur leur tête et ils remplirent de leurs propres
cadavres la fosse qu'ils avaient creusée.
[Etienne] Bt donc entrer 'Aouph, avec deux de ses compagnons,
dans sa maison et les cacha dans une chambre. Il convint avec
eux que, lorsqu'il amènerait Jean, il l'introduirait dans la mai-
son et qu'eux sortiraient alors de leur retraite et le tueraient. Il fit
aussi placer l'armée en embuscade sur le village de I^azro et en-
voya immédiatement quelqu'un pour dire à Jean ce mensonge :
« Viens sans tarder voir ce que nous devons faire, car l'armée nous
environne de toutes parts.» Jean qui était loyal accourut prompte-
ment comme un agneau à l'immolation, ne sachant rien.
Comme il était sur le point d'entrer dans la maison où on lui
avait tendu un piège, il se trouva là, comme par la volonté divine,
un homme fidèle et craignant Dieu, qui avait eu connaissance [55]
de leur dessein et lui fit connaître la trahison. Il retourna prompte-
ment en arrière, et tandis que ceux-ci attendaient sa venue pour
accomplir sur lui leur projet, il envoya une armée qui, avant que
les troupes qu'ils avaient avec eux en eussent eu connaissance, les
environna de tous côtés. Aucun d'eux n'échappa, mais tous périrent
2. Le oom est ici ajouté A la marge du manuscrit. — Ce village est situé
à Toucst et à environ 20 kilomètres de Maipherkat, sur la route d'Amida.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ ' 49
■
frappés à coups de lance. La chose n'était pas encore connue
d'Etienne, ni de 'Aouph, chef de l'armée. Quand ils apprirent ce qui
était arrivé à leurs compagnons, ils montèrent sur les chevaux
rapides qu'ils avaient avec eux et songèrent à s'échapper, mais ils
ne furent pas sauvés de la sorte, car des hommes agiles se mirent
à leur poursuite. Ils atteignirent 'Aouph et ses compagnons et les
tuèrent par le glaive. Quant à Etienne, lorsqu'il vit que sa fraude
et celle de Satan, son père, était divulguée, il prit la fuite, gagna
la ville et ne périt pas. Depuis lors, saisi de crainte, il ne rentra
plus dans la montagne.
Depuis ce moment, les maux s'ajoutèrent aux maux. Les habi-
tants de la montagne et les Arabes s'attaquaient et se tuaient conti-
nuellement. Les montagnards s^emparèrent des défilés et on ne vit
plus aucun Arabe dans la montagne.
Mais une autre épine leur poussa de l'intérieur.
Un certain Ourtéen\ du nom de Grégoire, s'avança contre eux
avec une grande armée et attaqua les habitants des rives du fleuve
Hara. Il en tua un grand nombre; il lit couper aux uns les mains,
à d'autres les membres : à ceux-ci les oreilles, à ceux-là le nez ; à
d'autres enfin, il fit crever les yeux par le feu.
Les habitants du mont Çahya' se tinrent sur leurs gardes et se
confièrent à Jean.
Dans les pays orientaux, Boraïka adhéra à la secte des Ilarou-
rites.
Dans la région d'Édesse, 'Oubeidallah Ibn Boktari* se révolta
aussi et fit beaucoup de mal à un grand nombre d'hommes, sur-
tout à Beit Maada, [56] dont il saisit les principaux habitants et les
fit rôtir au feu comme des poissons. Pour s'emparer de leur or, il
tua, emmena en captivité ou fit périr un grand nombre de per-
sonnes. Il dévasta tous les monastères de la région d'Édesse, de
Harran et de Téla, s'empara de tous leurs biens et fit mourir, rôtis
par le feu, leurs supérieurs.
1. Le syriaque Ourtaia. que l'on a traduit souvent par Ibérien, désigne
proprement les habitants du district d'Anzîièue. Cf. JosuÉ le .Siyli tk, éd.
Wright. 33. 9 Itrad., 28, n.); No!:lurki% ZMDG.. xxx, 358» xxxiii, 163. —
V. ci-dessous, p. 56, n. 5.
2. C'esl-à-dire mont aride. Nom propre d'un lieu situé près de la ville de
Halat sur le Tigre. Cfr. lUbL or., 1, "iVù; U. ij.lxciv, cj, 127. 218. — Ce nom
désigne aussi d'une manière générale la partie méridionale du Taurus qui
:*e trouve sur les territoires d'Arzoun. de Maipherkat. d'Amida, de Hanazit
et de Samosate.
3 Jjii4
50 CHRONIQUE
Voici les monastères qu'il ruina avec un grand nombre de vil-
lages : le monastère de Coubê, le monastère de Resmat, à Tispa,
le monastère de Qatara\ le grand monastère de Hesmi, le monas-
tère de Mar Lazare, Beit Maada, le monastère de Mar Habil, le
monastère de Mar Miles % le monastère de Sanin' et de nombreux
villages.
Cet impie dirigea toute sa colère contre les monastères. Satan
Texcita aussi contre les églises, et il menaçait continuellement les
couvents de TOrient et du Nord, pour satisfaire la vengeance du
diable son père.
Des trois hivers rigoureux qui survinrent Cun après Vautre; de la
neige qui tomba pendant ce temps en abondance; de la destruc-
tion des bestiaux^ des animaux et des oiseaux qui périrent à
cause du grand froid.
L'année même où la guerre civile s'éleva, la neige tomba en
abondance ; elle s'accumula sur la terre à l'épaisseur de cinq
palmes et resta sur le sol pendant quatre-vingt-dix jours, et dans
les plaines, elle resta soixante-dix jours, de sorte que toute chair
approchait de sa fm. Beaucoup de ceux qui avaient des bestiaux
et du froment, après avoir épuisé les provisions faites pour la
nourriture des animaux, prirent le froment et le donnèrent aux
bétes pour que celles-ci ne périssent pas de faim; mais ils ne purent
sauver leurs bestiaux à l'aide du blé. Ceux-ci périrent comme des
sauterelles et leur chair ne pouvait être mangée par les hommes. Il
y eut un grand froid, de la glace, de fortes gelées. [57] Des ténèbres
couvrirent la terre pendant plusieurs jours, et tellement épaisses
qu'un homme pouvait à peine distinguer la route à ses pieds. Elles
se condensèrent sur les arbres, les vignes, les oliviers, comme de
la neige, et firent ainsi beaucoup de tort aux arbres, aux vignes,
aux oliviers, aux jardins, de sorte qu'il y eut à peine quelque chose
qui ne fût pas atteint par la violence de la gelée et du froid.
1. Pn^s d'Amida. Cfr. Bihl. or., II, 58.
2. Le texte porte Nffgas, mais la confusion des lettres lomad et gomal
étant si fréquente chez les copistes inexpérimentés, j'ai cru pouvoir corriger
en Miles, nom d'un martyr très honoré chez les Syriens.
3. Probablement le monastère appelé aussi Sanoun, — Cfr. Bibl. or., II,
19, 38. Cat. Bibl. Vatican., III, 217; Cat. of syriar mss. of the British
Muséum, 649, 706.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 51
Les fleuves se congelèrent au point que les cheyaux pouvaient
les traverser au galop sans que la glace fût ébranlée sous leurs
pas. Le Tigre lui-môme fut pris, et une nombreuse caravane de
chameaux put le franchir sans que la glace mollit sous leurs pieds.
Toutes les bêtes des champs et les oiseaux du ciel périrent : la
neige, le froid, le givre avec les embûches, la discorde, la maladie,
la peste, furent tels pendant trois années successives que toute la
région septentrionale approchait de sa fin.
De la famine qui survint en ces années^ et du peuple Arménien
et Ourtéen qui envahit la Syrie,
La neige s'étant accumulée sur le sol pendant de longs jours, et
an certain temps s'étant écoulé sans que la face de la terre apparût,
tout ce qui avait été semé périt sous la neige. La semence se cor-
rompit, fut arrachée par la gelée et se dessécha. Quand la neige
disparut, rien ne germa, excepté les mauvaises herbes et les épines.
Ainsi s*accomplit sur nous cette parole prophétique^: a La terre
est maudite à cause de toi, elle produira pour toi des épines et des
ronces; quand tu travailleras, tu n'obtiendras pas qu'elle te donne
les fruits de sa fécondité; )) et cetta autre* : (( Vous sèmerez du fro-
ment, et vous récolterez des épines, vous travaillerez et n'en reti-
rerez rien; vous serez confus, privés de vos récoltes. »
La terre, en eSet, nous a produit des épines, des ronces, des
buissons. Au lieu de froment, [58] Tivraie a poussé ; au lieu de l'orge,
les ronces; au lieu des fèves, des lentilles, des pois, les épines.
Et lorsqu'il arriva que quelque chose germât et même grandît,
la rouille et le vent brûlant s'abattirent dessus et le détruisirent.
Ce qui échappa au froid, à la gelée et au vent brûlant, fut détruit
par le puceron et le charançon \ de sorte que si vous prenez dix
épis et les frottez dans vos mains, il ne s'y trouve pas un seul
grain de froment. Ainsi, à cause du vent brûlant, beaucoup de
champs restèrent sans être moissonnés quoiqu'ils parussent dorés
et de belle apparence, car le poison qui était tombé sur eux était
rouge; il s'y fixait comme le givre sur les arbres pendant l'hiver,
et la couleur du froment fut également changée en couleur rouge.
1. Gen,^ m, 6.
2. JÉRÉM., XII, 13.
3. Sur les différents noms d'insectes qui se rencontrent ici et un peu plus
bas, voir Tlntroduction au texte syriaque.
52 CHRONIQUE
C'est à propos de 6es choses que le prophète Amos nous inter-
pelle en disant^ : « Je vous ai frappés par le vent brûlant, par la
rouille, par lagrôle; la chenille a rongé la plupart de vos jardins,
de vos vignes, de vos figuiers, de vos oliviers, et vous ne vous êtes
pas tournés vers moi, dit le Seigneur; j'ai envoyé sur vous la
peste, j'ai massacré par le glaive vos jeunes hommes et vos vieil-
lards, et j*ai fait monter à vos narines l'odeur de votre pourriture. »
Le froment se vendait cette année-là un dinar legeribayet il vint
jusqu'à un dinar les sept qephuè.
Des charançons et des pucerons dont la terre fourmilla
à cette époque.
Comme le temps de la moisson approchait, et que tout le monde
attendait les gerbes, la terre fourmilla de nombreux insectes qui
montèrent sur le froment, l'orge et toutes les graminées. On ne
voyait pas l'endroit dévoré, mais tous les épis sur lesquels ils s'é-
taient posés étaient perdus, et quand ils étaient sur le point d'arriver
à maturité, tout à coup ils se desséchaient et il ne [59] restait rien
autre chose que l'écorce. 11 fut reconnu par des hommes expéri-
mentés qu'ils suçaient la substance des épis qui perdaient leur
force et en peu de temps changeaient de couleur.
On appelait ces insectes charançons et pucerons, car ils n'étaient
pas d'une môme espèce, ni d'un môme type. Celui qu'on appelait
charançon était rond et de diverses couleurs. Le puceron était
pareillement rond, mais petit; sa trompe était allongée comme celle
du moustique et même du taon, et tachetée de plusieurs couleurs.
Selon l'opinion des sages, c'est cette même plaie que Moïse
envoya autrefois sur les Egyptiens, car c'était le bruchus,le cynips,
la cynomyia. Ce tléau ne s'attaqua qu'aux blés. Ces insectes grim-
paient sur les tiges du froment et de l'orge, depuis la racine
jusqu'au sommet, ainsi que sur les feuilles.
De la chenille.
11 y eut aussi des chenilles nombreuses qui ravagèrent les
vignes, les arbres et tous les fruits. Elles ne pouvaient marcher
1. Amor, IV, î).
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 53
sur la terre à cause de leur multitude. Elles étaient répandues en
tous lieux, car la terre elle-même les avait vomies et fait sortir [de
son sein]. Ainsi les vignes, les arbres, les fruits, les semailles et
tout ce qui sert à la vie des hommes fut détruit.
De la sauterelle,
11 est écrit dans le prophète*: « Il a donné leurs moissons à la
sauterelle et leurs labeurs au bruchus, » qui est une sauterelle
pourvue de pattes et qui n'a point d'ailes pour voler ou pour s'a-
vancer. Son ravage est plus grand et plus pernicieux que celui de
toutes les verges de colère.
On avait dit du puceron : « S'il tombe sur [60] un silo de blé, il
le détruira. » Cela s'est justifié, car lorsqu'il tombait sur un champ
riche et prêt à être moissonné, le blé était perdu. Au dehors [les
épis] paraissaient pleins et beaux, mais quand on les écrasait on
trouvait l'intérieur perdu et réduit en farine. Si on semait ce blé il
ne germait point, car il était gâté.
La région inférieure elle-même ne fut pas exempte de cette
calamité. La terre entière produisit la sauterelle qui se répandit
et dévasta les semailles, les vignes, les jardins, les arbres et toute
espèce de verdure.
La prophétie prononcée par le prophète Joël ' s'est accomplie sur
nous : « Écoutez ceci, vieillards; prêtez l'oreille, vous tous, habi-
tants de la terre. Est-il arrivé chose semblable de vos jours, ou
dans les jours de vos pères ? Racontez-le à vos fils ; et vos fils à leurs
fils, et leurs fils à une autre génération. Ce qu'a laissé la chenille,
la sauterelle ailée Ta mangé ; ce qu'a laissé la sauterelle ailée, la
sauterelle sans ailes Ta mangé; ce qu'a laissé la sauterelle sans ailes
le cynips Ta mangé. » 11 nous arriva selon la prophétie et pis encore :
la neige et le givre détruisirent tous les arbres, et tout ce qui leur
échappa fut enlevé par le vent brûlant, la rouille, la sauterelle, le
bruchus, le cynips, la cynomyia, la chenille, en sorte que la famine
s'aggrava sur les hommes, au delà de toute mesure. Le froment
commença à diminuer dans les greniers et vint au prix d'un dinar
le geriha ou même d'un dinar pour sept qephizè; et on n'en trou-
vait pas.
l. P«., Lxxviii, 46.
2. JOEL, I, 2.
54 CHRONIQUE
Du peuple des Arméniens et des Ourtéens qui envahit la Syrie à
cause de la famine; de la contagion, des ulcères, de la peste et des
diverses maladies qui sr n*pandirent sur la terre à leur arricre.
Dieu envoya donc de grands fléaux sur le froment, l'orge, [61] les
vignes et tout ce qui sert à la vie de Thomme, à cause des péchés
et des iniquités que nous commettions quotidiennement; la famine
s'appesantit sur toute la terre, et surtout sur l'Arménie et le pays
des Ourtéens, car toutes leurs récoltes avaient été détruites, et il
ne leur restait rien pour vivre. « Quand il le veut, il fait sécher par
le froid, et quand il lui plaît de nouveau, il humecte avec le feu. n
Ici donc il fit sécher par le froid.
Toute l'Arménie émigra pour fuir la famine qui survint, et [ses
habitants] envahirent la Syrie, poussés par la crainte de mourir de
faim, eux et leurs enfants. Mais ils n'échappèrent pas de la sorte
au fléau. « Je leur ferai boire des eaux amères, je les nourrirai
d'absinthe, je les disperserai parmi des nations qu'ils ne connais-
saient point; j'enverrai après eux le glaive, la captivité, la famine
et la peste, jusqu'à ce que je les aie.consumés*. » L'Esprit-Saint a
dit ces choses; et elles s'accomplirent toutes parmi eux.
Ils sortirent et remplirent la terre entière : les villes, les monas-
tères, les villages, les campagnes ; ils vendirent tout ce qu'ils
avaient pour acheter du pain et causèrent la famine dans le pays.
La maladie des ulcères d'abord et la dyssenterie, puis les pus-
tules s'emparèrent d'eux, et partout on en voyait qui gisaient dans
les portiques, les édifices, les églises, les tours, et en tous lieux. La
peste s'empara aussi d'eux, et il en mourut une telle quantité que
les hommes ne suffisaient pas à les ensevelir. Partout où ils
allaient, la main du Seigneur les poursuivait pour les affliger.
Ce fléau de la famine, des ulcères, des pustules, s'empara aussi
des Syriens et les consuma, mais il en périt plus de faim que de
maladie.
Il mourut cette année-là dans notre monastère de Zouqenin, du
mal des pustules, quarante-deux hommes, sans compter les étran-
gers.
Cette maladie et la peste s'aggravèrent en tous lieux. [62]
1. JÉR., IX, 15.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 55
L'an 1063 (752-753), les Perses revinrent dans le pays avec des
troupes nombreuses. Ils combattirent et vainquirent tous ceux qui
voulurent leur résister. Ils firent de grands ravages parmi les
Arabes de Mossoulet de *Aqoula. Ils massacrèrent grands et petits.
'Abdallah Ibn Mohammed \ frère du roi des Perses, attaqua Bo-
raîka près dç Dara et le tailla en pièces. Celui-ci prit la fuite.
'Abdallah ayant appris tout le mal que les Arabes de Maipherkat
avaient infligé aux Syriens de ce pays, et ce que ceux-ci avaient
fait, envoya des ambassadeurs à Jean qui descendit à Harran. Il le
reçut avec joie, l'honora, lui donna môme des présents, rétablit
chef de sa contrée et l'y renvoya.
Çalihibn Çabih*, était monté et avait pénétré dans l'Arménie.
Il avait pris des otages dans toute la montagne et les faisait
garder à Maipherkat avant que Jean fût revenu de IJarran,
d'auprès de 'Abdallah.
Jean rapportait avec lui un écrit d'après lequel on devait lui
donner les otages. A son arrivée [Çalih] renvoya toutes les femmes
qui se trouvaient parmi eux, mais parce que les Arabes de Mai-
pherkat lui avaient donné des présents pour qu'il les vengeât de
Jean et de ses compagnons, il traînait en longueur, disant : « Au-
jourd'hui ou demain je renverrai ceux qui restent. » Ils restèrent
ainsi longtemps ; diverses maladies s'emparèrent d'eux et beaucoup
périrent en j^rison.
Il traîna ainsi en longueur pendant longtemps, car il cherchait
une occasion de faire périr Jean et eux, pour donner satisfaction
aux Arabes de Maipherkat. Or, Jean envoya des messagers à
^Abdallah qui était émir de la Mésopotamie, et, le jour même où
Çalih se disposait à faire crucifier Jean le lendemain matin, arriva
un envoyé [de 'Abdallah] qui le fit sortir de prison ; il descendit [63]
à Harran avec Etienne, fils de Paul. Dieu accumula sur la tête
d'Etienne le mal qu'il avait fait; il le frappa et il mourut là. Quant
à Jean, il envoya une lettre et délivra promptemeut tous ceux qui
avaient été emprisonnés comme otages par Çalih.
L'an 1061 (749-750), Constantin, empereur des Romains, sortit
avec des troupes nombreuses; il renversa et rasa jusqu'au sol
Mélitëne% dont il chassa les habitants ; mais il ne tua personne,
1. Il s'agit de Al-Mansour, qui succéda plus tard â Abou'l-Abbas al-Saffah.
2. Ce personnage parait être Çaleh Ibn *Alî, oncle du khalife. Tbèophanc
l'appelle 2^aXYj{i. Cf. Hist. du Bas-Empire, i. XII, p. 232, n. 2.
3. Clr. Hîst. du Bas-Empire, t. XII, p. 209.
56 CHRONIQUE
et ne leur enleva rien de ce qu'ils avaient; il les fit seulement
sortir, et les chassa de la ville. Us se rendirent tous en Mésopo-
tamie. Quant à lui, il renversa les murailles, brûla les maisons,
puis reprit son armée et revint dans son pays.
1/an 1^J64 (752-753), les Perses rasèrent [les villes. Les Perses
revinrent une seconde fois, occupèrent le pays et ses plac(^s
fortes, et y régnèrent. Le roi ordonna do raser les murs de
toutes les villes des Syriens. Ils réunirent donc des ouvriers et des
artisans en grand nombre et rasèrent toutes les murailles; ils brû-
lèrent les portes et prirent l'airain et le fer qui s'y trouvaient. Ce
que les rois prévoyants et sages avaient fait à grands frais pour
la défense contre les ennemis, ceux-ci, dans leur tyrannie, le ra-
sèrent et le jetèrent à terre. La parole deJérémie fut accomplie' :
« Les murs larges seront renversés, les portes élevées brûleront
dans le feu, les peuples les pleureront inutilement. » Il dit encore* :
« Le Seigneur a formé le dessein de détruire les murs de la fille de
Sion ; il a lancé le cordeau, il ne retirera pas sa main avant de
ravoir fait disparaître. Il a jeté ses forces dans le deuil, et ses murs
sont devenus déserts. » Qu'il vienne maintenant, le prophète Jéré-
mie, et qu'il pleure, non plus sur la seule ville de Sion dont les
murs ont été renversés, mais sur toutes les villes de la Mésopotii-
mie et de l'Occident. Esdras, le scribe, parle aussi de la destruction
des murailles et de ce serpent [64] tortueux qui les a renversées :
« 11 abaissera les murs qui n*ont pas péché contre lui. »
L'an 1()65 (753-754), toute la région septentrionale fut pillée par
Kousan^. Cet homme était arménien* de l'Arménie IV«. Après la dé-
faite et la fuite de Merwan, il prit ses biens et sa famille et entra
dans le pays des Romains. Comme c'était un homme courageux et
brave, Constantin le fit général. Cette année-là, il sortit avec une
armée considérable et tomba sur le montÇahya. Il fit captifs et pilla
tous les paysans qui y habiuiient, s'empara de leurs richesses et de
tout ce qu'ils possédaient et ne leur laissa absolument rien que la
vie. Après avoir ainsi tout enlevé, il rentra au pays des Ro-
mains.
L'an 106G (754 755), Kousan l'arménien envahit de nouveau la
région de Anzeta"^ avec les armées nombreuses des Romains et des
1. JEU., u, 58.
2. Thren,^ ii, 8.
3. Cf. Hi'^t. (lu Bas-Empire, t. XII, p. 209.
4. Sur les divisions géographiques de l'Arménie, Cf. Saint-Martin,
Mémoires sur l'Arménie, t. I, pp. 23. 91, 92.
5. ViHe du sud de rAniiéuie dont le nom est très diversement orthographié
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 57
Ourtéens. Quand Aki, alors émir de la Mésopotamie, apprit cela,
il réunit une grande armée de Perses et d'Arabes, mit son fils à la
tête, el renvoya combattre Kousan. Le jeune homme s'avança avec
arrogance et grande présomption. Les deux armées se rencon-
trèrent, il méprisa ses adversaires. La jeunesse, en effet, est portée
au désordre, et comme elle est inexpérimentée et n'écoute pas
[les conseils], elle tombe dans l'abîme des maux.
Des hommes âgés, qui avaient grandi au milieu des combats et
qui connaissaient les nombreuses difficultés qui surviennent dans
les batailles, le détournaient et lui conseillaient de ne pas se pres-
ser de combattre avec Kouvsan. «C'est, disaient-ils, un homme ins-
truit dans l'art de la guerre, vigoureux, qui jamais ne recule. De
plus, il connaît le pays et sa conformation, [65j puisqu'il y est né
et y agrandi. » Mais il abandonna le conseil que lui donnaient les
vieillards, et, nouveau Roboam, [ils insensé, il suivit l'avis des
enfants qui avaient été élevés avec lui '. Tandis qu'il s'empressait
de se faire rapidement une renommée illustre, il s'acquit un nom
vil, plein d'opprobre et de honte aux yeux de nombreuses généra-
tions futures.
Il s'avança donc avec empressement, car il voulait promptement
tomber sur Kousan, le faire disparaître de ce monde avec ceux qui
raccompagnaient, faire des prisonniers, piller et dévaster,
puis retourner chez lui après avoir remporté une grande victoire.
Kousan, en voyant les mouvements du jeune homme, gambada,
ricana et mit la main sur sa tète en disant : (( Voici le jour que le
Seigneur a fait pour tirer vengeance des ennemis. Allons, tres-
saillons d'allégresse, réjouissons-nous en ce jour\ ))
Quand la bataille fut engagée et que les morts commencèrent à
tomber des deux c6tés, Kousan fit un eflFort énergique contre les
Perses qui prirent la fuite devant lui : ils tombèrent tous sous le
glaive. [Kousan] fitde nombreux captifs, pilla et dépouilla les morts.
Le fils de 'Aki s'enfuit, dépouillé de tout, sur le cheval rapide
qu'il montait, et s'échappa en laissant tous ses bagages aux mains
des Romains. A l'exception d'un petit nombre qui montaient des
chevaux et s'enfuirent en abandonnant tout ce qu'ils possédaient^
personne d'entre eux n'échappa au glaive.
Tandis que ce jeune homme s'empressait pour acquérir la re-
par les Syriens. Cf. Assrmani, Bibl. or., I, 259, ii, lxiv, m 2, 718, et Arta
Martyr., II, 352, et Saint-Martin, Mém. sur V Arménie, t. I, p. 93.
1. Cf. // Reg., XII.
2. Cfr. P5.,cxvni, 24
58 CHRONIQUE
nommée et la gloire, il se fit une réputation ignominieuse, à lui-
même et à sa famille ; tandis qu'il voulait piller, dévaster, faire de
nombreux captifs, [sa propre armée] fut pillée, dévastée, jetée dans
les fers, emmenée en captivité.
A cette époque, [parmi] les pasteurs orthodoxes florissaient dans
l'Église : saint Mar Jean, patriarche d'Antioche; saint Mar M ikael,
patriarche d'Alexandrie la Grande^ ; saint Mar Timothée, évoque
[66] d'Ëdesse; (Constantin, évèque de Samosate; Denys, évèque
de Harran ; Sergouna, évèque de Mardin; David, évèque de Dara,
qui par la suite devint patriarche.
A Maipherkat fiorissait Athanase, surnommé Sandalaia, qui
bâtit sur la montagne de Tell-Besmè' un monastère fameux qu'on
appelle couvent de Mar Athanase; il devint, lui aussi^ patriarche
par la suite.
A Amida brillait saint Mar Aba, du monastère de Mar Habib,
dans l'Arzanène. Saint Mar Sévère, dont nous avons parlé plus
haut, du monastère de Zouqenin, se démit de son vivant du gou-
vernement de cette ville, parce qu'il avait les yeux fatigués et ne
voyait pas bien. Mar Aba fut établi à sa place.
A cette époque était aussi célèbre Jean, évèque de Callinice, qui
causa dans l'Église les troubles dont nous parlons en leur temps.
A saint Mar Jean, patriarche d'Antioche, succéda un certain
moine du nom d'Isaac', du monastère de Qartamine. Il avait fixé
sa demeure à Édesse, et parce qu'il était versé dans l'alchimie de
l'or et de l'argent, il avait obtenu l'affection de ^Abdallah, émir de la
Mésopotamie, qui, par la suite, devint aussi roi. Comme celui-ci
voulait lui faire sentir l'honneur de son amitié, il le fit élire
patriarche d'Antioche après saint Mar Jean.
Mais les dignités acquises irrégulièrement sont très funestes.
Celui-ci éleva beaucoup son ami, et bientôt il le fit étrangler,
comme Judas.
Isaac ne fut pas très bien accueilli par le peuple, et son gouver-
nement ne dura pas longtemps, car celui qui l'avait élevé le ren-
versa et le fit périr. On ne sait ce qu'est devenu [67] son corps; il
ne fut pas même digne d'être enseveli par les hommes. Telle est la
belle récompense que Satan a coutume de donner à ceux qui
courent à sa suite en ce monde.
1. Cbail, apud Rrnaudot, Hlst. Pair. Alexandr., p. 203, sqq.
2. Tell-Besmô (colline des aromates) (^e trouvait près de Deyrik, à l'ouest
de Mardin. Cf. Assbmani. Diss. de Syr, monoph., p. 115; BarHbbr. ,
Chron, Syr., 398; Hoffmann, Auszâge, etc., p. 115, n. 1046.
3. Cfr. Bak Hebr.«U8, Chron. eccles., I, 315 sqq.
DE DENYS DE TELÏ--MAHRÉ 59
Le vénérable Mar Athanase Sandalaia, évêque de Maipherkat, lui
succéda\ Mais idi non plus n'eut pas de longs jours, car il périt
promptement et mourut, les uns disent d'une manière, les autres
de l'autre; quant à nous, nous ne-saous arrogeons pas le droit de
parler des choses secrètes, mais nous les abandonnons à Dieu devant
qui tout est clair et manifeste. On le prit, et on le transporta de
Harran à son monjistèrè, où il f ut déposé. 11 eut pour successeur
saint Mar Georges, du saint monastère de Qen-NéSrèV
Du synode qui fut réuni pour Vélection de Georr/es, patriarche
dWntioche, d Mahoug, ville près de CEuphrate, dans V église
de Mar Thomas Apôtre^ hors la ville'^.
Les nombreuses difficultés qui avaient eu lieu dans l'élection du
patriarche Isaac et du patriarche Athanase Sandalaia, troublaient
les fidèles, et beaucoup d*enfants de rÉgliscen étaient scandalisés,
surtout parce que ces patriarches étaient imposés par la puissance
tyrannique de Témir, mais aussi pour d'autres causes qui suivirent
et qu'il n'est pas nécessaire d'exposer dans ce livre.
Après la mort du vénérable Athanase, tous les pasteurs de la sainte
Église voulurent s'imposer un chef avant que Satan n'exc.itàt parmi
eux l'amour de la 'domination et qu'ils ne fussent livrés aux mains
de la puissance tyrannique, de peur que [68] la fin ne devint pire
que le commencement, et que la division, la dissension, le trouble
n'arrivassent de leur temps dans la sainte Église, ce qui pourtant
eut lieu, car comme dit le Juste*: « Ce qu'ils craignaient leur
arriva. »
Il ne firent point régner la paix et la tranquillité ; le trouble qu'ils
redoutaient les atteignit promptement. Tous les pasteurs Mossu-
liens, Mésopotamiens, et les Occidentaux n'avaient qu'un même
désir; ils se rassemblèrent avec empressement, dans une seule
pensée, un seul esprit droit, un même accord. Tous les évoques se
réunirent avec les hommes honorables et fidèles dans la ville de
Maboug, dans l'église de Mar Thomas. Après qu'ils eurent siégé
1. Cfr. Bar HEBUiCus, Chron, eccles., I, 319-320.
2. Ua des plus fameux monastère» de Jacobites. Il était situé près du
▼illage de ce nom, à une journée de marche au sud d'Alep. Cf. Assbmani*
Diss, de monoph., p. 83.
3. Ibid., coll., 320-327.
4. Cfr. Job, ui, 25.
60 CHRONIQUE
un jour ou deux, et beaucoup parlé entre eux (le beaucoup de per-
sonnes : Tun exaltant celui-ci, l'autre le blâmant, et ainsi pendant
longtemps, arriva ce qui suit.
1 1 y avait un homme de Ba'altan^ ,du saint monastère de Qen-Néârê
qui vivait saintement dans ce lieu, et brillait par les œuvres de la
crainte de Dieu ; homme connu, célèbre, instruit, zélé pour toutes
les vertus, qui s'appelait Georges; il avait reçu Tordre du diaconat
dans son monastère. Tous, unanimement, d'un même consen-
tement et d'une môme convention, tombèrent d'accord pour choisir
cet homme. Mais il était éloigné. Ils choisirent aussitôt des hommes
honorables qui se trouvaient là, et les envoyèrent pour l'amener
près d'eux. [Quand il fut arrivé], tous se présentèrent à lui et lui
exprimèrent leur adhésion. Ils écrivirent leur consentement et lui
donnèrent cet écrit après l'avoir signé.
Les principaux étiiient : Jean, deCallinice; Timothée, d'Édesse;
David, de Dara ; Abbas, d'Amida; Sergouna, de Mardin ; Etienne,
de yaboura*; Constantin, de Samosate ; Cyriaque, du Tour 'Abdin ;
Dcnys, de Harran ; Elias, de Singar ; et de la région de Mossoul :
Paul, deTagrit ; Zachée, de Karma' ; Jonas, [69] de Beit Nouhadra *
avec beaucoup d'autres ; parmi les Occidentaux, se trouvaient :
[ligne en blanc dans le ms,]
Ils écrivirent donc, adoptèrent, signèrent l'acte, et ils étaient sur
le point d'imposer les mains à Georges selon la règle de l'Église.
Mais Satan, voyant que la paix allait se faire dans toute l'Ëglise,
ne resta pas indifférent, inactif, oiseux, tranquille. 11 fit venir
promptement et amena là un certain moine dans lequel il avait
fait sa demeure, parce qu'il ne pouvait apparaître manifestement
pour les troubler, les agiter, élever des dissensions parmi eux. De
même qu'il n'a pas pu parler en personne à Eve, de peur que sa
fraude ne fût reconnue et divulguée, de môme agit-il ici. Là
il se choisit le serpent, entra et habita en lui, et accomplit par lui
tous ses desseins. Ici il se choisit un moine pour auxiliaire et
accomplit par lui tousses désirs. Ce moine s'appelait Jean, et avait
habité la solitude aride de Aisouma \ Il avait vécu longtemps
1. Village de la région d'Émèse. Cf. Bar Hebr., Chron., eccl.^ I, 319.
2. L'antique Circeaium, au confluent de l'Euphrate et du M&boura.
3. Évècbô situô au delà du Tigre, non loin de Tagrit. Cf. Assbmani,
Bibl. or., II, 419; Land. Anecd. ayr., I, 84; Guidi, ZDMG., xuii, 411.
Suivant Hoffmann [Auszdge, p. 231), Kermé sur le Zab, d'après Aînworth,
Journ, Geogr. Soc, II, 58.
4. Évcchô situô au nord de Mossoul, dans le voisinage de Marga.
Hoffmann, Aussûge aus ayr. Aktcnpers. Martyr., p. 208 sqq.
5. La colline de ce nom était située près d'Amida d'après Bar HsBiLeuSf
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 61
dans l'exil et, comme s'il avait connu Georges, il vint trouver les
évéquesdela Mésopotatnie, surtout ceux de Qartamine, etleurdit:
« Comment voulez- vous constituer patriarche un homme qui a
menacé de détruire votre couvent en disant : Si j'obtiens la
primauté dans l'Église, je ferai disparaître de sur la terre le nom
de Qartamine et celui du monastère d'Athanase^? » Ce moine les
agita et les troubla par beaucoup [de propos semblables]. Eux, qui
ne connaissaient pas le vénérable Georges, ajoutèrent foi aux dis-
cours du moine, et ne comprirent pas que toute leur force venait
de Satan. lisse hâtèrent de monter à cheval, se dérobèrent et re-
tournèrent à leur pays. Ceux qui restaient, voyant leurs compa-
gnons partis, étaient encore plus troublés et perplexes. D'un côté,
ils craignaient d'exciter la division [70] et le trouble dans l'Église en
faisant un patriarche en l'absence de leurs collègues * ; de l'autre,
ils avaient fait venir cet homilie.
11 fut sur le point d'être dénigré et de devenir un objet de scan-
dale dans le monde, parce que la chose ne fut pas racontée exac-
tement par les méchants, surtout au loin. Ceux qui restaient,
voyantque les bons, les méchants aussi, et surtout leur conscience,
leur reprochaient ce qu'ils avaient fait à l'égard de cet homme, le
firent venir et l'ordonnèrent.
On connaît parmi eux, d'entre les Mésopotamiens : Timothée,
d'Édesse; Aba, d'Amida; Constantin, de Samosate; Jean, de
Callinice, avec le reste des*Mossuliens et des Occidentaux.
Ceux qui s'en étaient allés auparavant s'agitèrent de toute ma-
nière. Quand chacun fut parti et retourné à son pays, Satan ne
cessa point alors même de jeter la discorde parmi eux. Il les excita
de telle sorte que beaucoup d'entre les Mésopotamiens s'assemblèrent
et se choisirent pour patriarche Jean, [évoque] de Callinice,du saint
monastère de Qarqaphta^, qui, foulant aux pieds son adhésion, sa
promesse et sa signature, succomba à l'ambition et devint pa-
triarche.
Dès lors tous [ceux qui portaient] le précieux et saint habit reli-
gieux tombèrent dans les injures, le mépris, les malédictions : beau-
coup anathématisant celui-là avec ses adhérents, beaucoup d'autres
celui-ci.
cité par P. Smith, Thés, syr., col. 406. La référence {Citron. f*yr., p. 306)
étant inexacte, je n'ai pu vérifier ce passage.
1. Cf. ci-dessus, p. 58.
2. On pourrait aussi traduire : « que leurs collègues repoussaient. »
3. Ce monastère était situé non loin de Ris'aïn, dans la région de
l.iaboura. Cf. Bibl. Stud. Oxon.^ Ifl, pp. 60sqq.
62 CHRONIQUE
La discorde se prolongea ainsi dans TÉglise jusqu'à ce moment;
et depuis lors quelles injures, quels opprobres, quelles calomnies,
quelles malices n*eurent pas lieu parmi eux, jusqu'à amener
Temprisonnement par le bras de la puissance tyrannique 1
Tels sont les maux qui vinrent sur r Église et les pasteurs, par
le moyen de ce mauvais moine qui joua le rôle du serpent rusé et
sinueux, et qui fit entrer la discorde dans l'Église par ses discours
et ses conseils.
L'an 1065 (753-754), mourut 'Abdallah Ibn Mohammed, roi [71 J
des Perses. Dès lors Abdallah, son frère, et un autre 'Abdallah Ibn
'Ali, son cousin germain, se jetèrent sur le pouvoir. Depuis ce
moment, il n'y eut plus qu'effusion de sang et meurtres nombreux
parmi eux\
Les Occidentaux et les Arabes de la Mésopotamie suivaient tous
Ibn 'Ali, lui obéissaient et le voulaient pour roi. Ils prirent le blanc
et sortirent à sa suite. Les Perses, au contraire, et les Khoraçaniens
marchaient avec 'Abdallah Ibn Mohammed. Après avoir engagé
de nombreux combats en tous lieux et répandu mutuellement
beaucoup de sang sur la terre, ils se livrèrent enfin bataille au
fleuve MaSe, au-dessous de Nisibe*. La lutte dura plusieurs jours
et une grande multitude périt des deux côtés. Enfin, 'Abdallah Ibn
'Ali fut battu par le Persan Abou-Mouslim. Il fut taillé en pièces,
prit la fuite et périt le vingt-six de tesri second [novembre], un mardi
aux premières vêpres du mercredi.
Ibn 'Ali ayant été vaincu, 'Abdallah Ibn Mohammed occupa le
trône pendant [ ] années.
Le soir même de la défaite d'Ibn Ali, Dieu opéra un grand pro-
dige. Un gros météore effrayant et terrible sillonna le ciel et l'air
en volant, et vint s'abattre au déclin du jour au milieu de
l'armée d'Ibn *Ali sous la forme d'un globe de feu. Les Arabes en
voyant cela furent brisés et perdirent tout espoir ; leurs yeux furent
obscurcis et ils ne purent tenir, car ils comprirent manifestement
que cela venait de Dieu % et ils ne résistèrent pas davantage.
L'an 1(3G6 (754-755) les arbres produisirent des poires, des pru-
nes et des fruits de toute sorte aux mois de tesri [oct.-nov.],
1. Cf. Weil, Gesch. d. ChaUphen, II, p. 23 sqq.
2. IbUi,, pp. 26-27. Sur le fleuve Mase, ou Masiu.s, cf. Tuch, De Nino
urbCf p. 13, n. 19.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 63
comme aa temps de nisan oa de yar [avril-mai]. Il y eut cette
aDnée-là une récolte abondante par toute la terre. [72]
L'an 1067 (755-756), le mardi trois du mois d'adar [mars], il y
eut au milieu de la nuit un grand et terrible tremblement de terre
dans la région de la Mésopotamie. Trois villages près de Haboura
furent renversés; la nombreuse population qui s'y trouvait fut
écrasée comme des raisins dans un pressoir et périt. Beaucoup
d'autres pays furent aussi détruits par le tremblement de terre à
cause de nos péchés.
« Par l'ébranlement la terre sera ébranlée; par le chancelle-
meni chancellera la terre, et elle sera enlevée comme une tente \ »
Nos péchés sont capables de faire cela et d'ébranler la terre sous
nos pas.
L'an 1070(758-759), il y eut des complications chez les Orientaux
à propos du carême. Parmi eux, les uns commencèrent le jeûne le
dix-huit de âebat [févr.] et le rompirent le six de nisan [avr.] : les
autres, au contraire, le commencèrent le vingt-cinq de §ebat pour le
terminer le treize de nisan, et tous les chrétiens furent ainsi trou-
blés. Dans un lieu on célébrait la Résurrection, dans l'autre les
Rameaux; pour les uns c'était la Passion, pour les autres la
Pâque. Il arriva même dans les villes que dans une église on
faisait la Pâque tandis que dans l'autre on célébrait les Rameaux.
Beaucoup de ceux qui sont portés à la gourmandise ne jeûnèrent
que six semaines, ayant commencé avec les derniers pour finir
avec les premiers ; beaucoup d'autres voulurent tenir le milieu et
cela tourna à leur détriment à cause du trouble qui eut lieu : ils
commencèrent avec les premiers et finirent avec les derniers.
L'an 1071 (759-760), au mois d'adar [mars], on vit un signe
blanc dans le ciel, avant l'aurore, au nord-est, dans le signe qu'on
appelle le Bélier, au nord des trois étoiles les plus brillantes decc'tte
constellation. Il ressemblait par sa forme à un balai. Le vingt-deux
du mois il se trouvait dans [73] le Bélier, à un degré de la tête, à
deux des planètes Saturne et Mars, un peu vers le Sud. Il y
demeura quinze nuits jusqu'à la veille de la fête de la Pentecôte.
L'une de ses extrémités, la plus étroite, tournée vers le Nord,
paraissait plus brillante à cause d'une étoile qu'on y voyait; l'autre
qui était large et plus obscure était dirigée vers le Sud. Ce signe
allait peu à peu vers le Nord-Est. Il présentait cette disposition.
[ Voir la figure dans le texte.]
1. Is., XXIV, 20.
64 CHRONIQUE
La veille du mardi de la Pentecôte [ce signe] apparut de nouveau
vers le soir, au Nord-Ouest et resta vingt-cinq soirs; il allait peu à
peu vers le Sud. Il disparut de nouveau et ensuite redevint visible
au Sud-Ouest où il resta également longtemps.
A cette époque, il y eut beaucoup de dissensions dans TÉglise
à cause du patriarcat. Les monastères orientaux avaient élu Jean
pour patriarche. Mais les villes et tous les monastères de la Méso-
potamie le rejetaient. Les Occidentaux et les Mossuliens obéissaient
à Georges.
A cause de cela, toute l'Église fut troublée.
L'an 1072(760-761), mourut saint MarTimothée, évéque d'É-
desse. 11 eut pour successeur un moine reclus qui habitait dans un
village de la même région, nommé Beit Qidouna\ [74] Il s'appelait
Siméon. A cause de sa pureté et de sa perfection, parce qu'il était
orné de toutes les vertus et surtout de l'amour des étrangers et des
pauvres, tous les fidèles d'Édesse, du môme accord, demandaient
unanimement qu'il devînt le pasteur de leurs âmes. Ils ouvrirent
donc de force sa cellule de reclus et l'en tirèrent pour le conduire
au patriarche Georges, afin qu'il l'établît leur chef.
Mais comme cet homme aimait mieux [vivre dans] les chastes
labeurs de la solitude et la tranquillité de la vie monastique que
de devenir évêque et d'être établi chef du peuple, il ne voulut pas
prendre sur lui la charge de l'épiscopat.
Quoique le vénérable Georges le pressât vivement et que les
Édesséniens pleurassent devant lui, il ne voulut pas accepter. Ils
le prirent donc de force et l'ordonnèrent malgré lui. De plus, le
vénérable Georges l'adjura par le ciel et la terre, par Dieu et ses
anges, de ne point quitter sa ville ni son diocèse pour s'en aller
ailleurs. L'ayant ainsi obligé sous peine de nombreux anathèmes
à ne pas s'en aller et à ne pas s'enfuir, ils le prirent pour le con-
duire à Edesse. Tous les Edesséniens sortirent au-devant de lui et
le reçurent très solennellement.
Après être resté dans la ville un jour ou deux sans manger
de pain ni boire d'f>au, au point que sa vie était presque épuisée, il
les supplia de lui permettre de sortir pour aller demeurer dans un
des monastères de la montagne d'Édesse, « car, disait-il, J'air de
cette ville est trop lourd pour moi ». Il habita donc dans un monas-
tère du sud de la ville, appelé « de la Mère de Dieu ».
m
Or, les clercs et les grands d'Edesse montaient là chaque jour
1 Ce village était situé dans le voisinage d'Édesse. Cf. Assemani, Bibl,
or., I, 3Î)6, n. 1.
DE DKNYS DE TELL-MAHRÉ 65
pour le prier de rentrer et de reprendre [le gouvernement] de sa
ville; [75] mais lui ne voulut en aucune façon y consentir. « S'il me
fallait mourir ou être crucifié, dit-il, je ne ferais jamais cela. Pour
Dieu, laissez-moi et faites-vousun évt^que de qui vous voudrez. »
Mais les Édesséniens, à cause de leur affection pour lui, ne
pouv<iient pas même entendre cela. Tout Thiverse passa ainsi sans
que lui se fût décidé à rentrer dans la ville, ou à leur faire une
ordination, ou à leur célébrer une fête, et aussi sans qu'eux con-
sentissent à le laisser partir de chez eux, car ils étaient attachés à
lui ; même les Arabes et les hérétiques de la ville l'aimaient.
A la fin, voyant qu'ils n'obtenaient rien, ils le prièrent et lui
dirent: « Cherche-nous un homme craignant Dieu pour remplir à
ti place les fonctions del'épiscopat; mais toi tu ne t'éloigneras pas. »
Il ne voulut pas même consentir à cela, « Vous êtes, dit-il, un peuple
difficile; choisissez-vous vous-mêmes un évêque et ne m'imposez
aucun labeur. » Ceux-ci ne voulant pas qu'il s'éloignât de chez
eux, lui laissaient la décision de cette affaire. Il n'accepta pas non
plus cela ; mais, voyant qu'il n'obtiendrait rien et qu'il ne pouvait
s'échapper de leurs mains, il leur dit : « Jurez-moi que vous accep-
terez celui que j'amènerai, et moi-même je ne m'éloignerai point
de vous. »
Ils tinrent tous lui en faire le serment.
Or, il y avait dans le saint monastère de Zouqenin, dans la
région d'Amida, un homme humble, doux, calme, orné de toutes
les vertus divines, qui s'appelait Anastase l'Éthiopien. Siniéon
le choisit, de préférence à tout autre, pour lui confier sa place, et
prit sur lui touU; la responsabilité, lui rendant témoignage, [76] bien
qu'il fût éloigné. « Il n'a pas son pareil aujourd'hui parmi les
moines, » tel est le témoignage qu'il donna sur ce saint religieux,
quoiqu'il ne l'eût jamais vu personnellement.
Il se mit donc à lui écrire d(»s lettres insidieuses ainsi qu'aux
vieillards honorables de son nionasti»re, comme pour demander à
le voir et à parler avec lui, et il l'envoya quérir par des hommes
respectables.
Anastase ayant reçu les lettres reconnut qu'elles étaient pleines
d'artifice; il ne voulut pas descendre rt les habitants du monastère
ne le lui permirent pas. Les envoyés montèrent et descendirent
ainsi beaucoup de fois inutilement. A la fin, les moin(*s l'engagè-
rent à céder, car les lettres et les supplications ne cessaient pas, et
ils ne voulaient pas mépriser saint Siméon.
Anastase descendit donc avec son disciple à Édesse, et monta
près de Siméon sur la montagne où il habitait. Celui-ci sortit au-
5
G6 CHRONIQUK
devant de lui et le reçut avec grande joie. Il envoya à la hâte dire
au clergé et aux grands de la ville, en secret et sans que le chaste
Anastase en sût quelque chose : « L'homme que je vous ai promis
est venu, » Aussitôt ils sortirent tous, grands et petits, et montèrent
près de lui : ils virent AnasUise et se réjouiront vivement à cause
de lui.
Tout d'abord, d'un commun accord, ils le lièrent, de peur qu'il
ne s'enfuît quelque part, avant qu'ils lui eussent persuadé [d'accep-
ter l'épiscopatj.
Le chaste Mar Anastase, en apprenant ces choses, fut ému et
troublé, la couleur de son visage changea et il devint pâle comme
un mort. Il blâmait hautement les habitants de son monastère dont
les conseils lui avaient attiré une telle affaire, mais surtout il blâ-
mait le vénérable Siméon lui-même.
Après l'avoir supplié pendant longtemps sans obtenir son con-
sentement, les Êdesséniens prirent la résolution de l'enlever de force
et de le conduire au patriarche [77] pour que celui-ci l'ordonnât ;
mais Anastase ayant découvert leur dessein, emmena son disciple
pendant la nuit et retourna à son couvent. Saint Siméon lui-même,
voyant que le vénérable Anastase s'était enfui, se récusa en disant
aux Edesséniens : « Tout ce que vous m'avez demandé, je l'ai
fait; maintenant laissez-moi. » Il les quitta donc et retourna à la
montagne du pays de Samosate où il habita jusqu'à la fin de sa vie,
recevant les étrangers et les malheureux qui venaient le trouver :
car il était le refuge de tous les affligés. Il eut pour successeur
Zacharie, du monastère de' , qu'on (it descendre de sa
colonne.
L'an 1075 (763-70^1), il y eut une grande épidémie sur la race
chevaline dans toute la contrée. Cette épidémie parcourut touttî la
région. Elle commença aux confins extérieurs de la région et peu à
peu s'avança et se répandit sur tout le pays, (-es animaux péris
saient en un clin d'<ril, et telle étiiit la violence du fléau que quand
il frappait un troupeau de chevaux dans lequ(»l il y avait trois cents
bêtes de somme, lorsqu'on les faisait desctendre à Tabreuvoir, vingt
ou trente y tombaient et y périssaient, de sorte que les vallées et
les collines, les torrents et les routes étaient remplis et infectés [de
leurs cadavres].
Cette épidémie prenait la même forme que la peste qui avait at-
teint les hommes. Elle les saisissait au cou, et aucun animal ne
supportait ce mal même pendant une heure. S'il arrivait que l'un
1. I^ place du nom est en blanc dans le manuscrit.
• f*»
DK DKNYS DE TKIJ-MAIIHE ()/
d'entre eux souffrît pendant deux heures ou une demi-journée, il
échappait à hi mort; mais à peine un sur cent de ceux qui avaient
été frappés échappait. Les chevaux, les niiilt^ts, h's Anes périssaient
tous, et ce lléau se répandit dans tous les peuples et tous les
royaunit»s [78] de la ttUTe, au point que les honiines furent privés de
chevaux. La signification de ce balai, qui était apparu peu aupa-
ravant, fut manifestée par le fait; il balaya le monde, comme le
balai balaye la maison.
C'est aussi Topinion des sages et des hommes craignant Dieu
que cette verge cruelle devait être envoyée sur les hommes, mais
que Dieu dans sa miséricorde, l'abondance de sa grâce et sou
amour pour Thumanité, la détourna des hommes sur les animaux.
Nous avons, en effet, ce témoignage que « les animaux n'ont
pas péché et n'ont pas irrité le Seigneur par leurs œuvres et leurs
fautes ». Amos dit^ : « J'ai tué avec le glaive vos jeunes hommes,
ainsi que les chevaux pris comme butin; j'ai fait monter à vos na-
rines l'odeur de votre putréfaction, et vous ne vous êtes pas tour-
nés vers moi, dit le Seigneur. )) Et Michée dit* : « Kn ce
jour-lâ, dit le Seigneur, je ferai périr les chevaux du milieu de toi
et je détruirai tes chars. » En vérité, les chevaux et les chars dis-
parurent de la terre, comme dirent les prophètes. Nos péchés ont
fait que les créatures privées de parole furent frappées à notre
place.
L'an 1072 (7G0-761), 'Abdallah Ibn Mohammed, roi des Perses,
envoya Ibn Wahabavec une armée nombreuse et des ouvriers de
toute la Mésopotiimie rebâtir Mélitône de Cappadoce, qui était
restée démoli(î depuis qu'elle avait été dévastée huit ans aupara-
vant'. 11 y conduisit un peuple et une armée, et elle devint plus
habitée et plus peuplée qu'autrefois.
L'an 1076 (7G1-705), le vendn^di quatre du mois de Kanoun se
cond [janvier], les étoiles du ciel tombèrent. Au moment où la nuit
arrivait et où les étoiles commençaient à se lever, deux étoiles sor-
tirent du milieu du ciel et luttèrent ensemble, comme des hommes
qui se combattent ou qui luttent; en combattant elles langaicïit des
traits et descendaient [79] vers l'Orient. Quand celles-ci furent des-
<*endues et eurent cessé de brilh^r, toutes les étoiles du ciel eonimen-
f^Tt^tà filer, sous l'aspect de sphères d<^ feu, dans toutes les direc-
tions. Elles tombèrent ainsi toute la nuit, et la parole de notre
1 . Amos, iv, 10.
2. MiCHKK, V, 9.
3. Voir ci-dessus, p. 55.
68 CHRONIQUE
Sauveur fut accomplie^ : « Le soleil s'obscurcira, la lune devien-
dra [couleur de] sang, les étoiles tomberont du ciel et les vertus des
cieux seront ébranlées. Mais ce n'est pas encore la fin". » Que
celui qui lit comprenne^ et qu'il observe les choses qui arrivèrent,
par la suite, dans le monde, soit à propos des agitations et des
discordes qui survinrent dans rftglise au sujet de Télection des
patriarches Georges et David, à cause desquels tous les chrétiens
se brouillèrent; soit à propos des oppressions que les hommes
avaient à supporter de la part de la puissance tyrannique, ou
de la fuite d'une ville dans une autre ville, d'un lieu dans le Heu
voisin, d'un village dans un autre village.
11 a dit encore* : « Il y aura une grande tribulation, et elle sera
telle qu'il n*y en a point eu de semblable depuis le commencement
du monde jusqu'à nos jours. Priez qu'il ne vous faille pas fuir
pendant Thiver. Malheur à celles qui seront enceintes ou qui allai-
teront en ces jours-là. » Lis, 6 sage, et passe à la considération des
maux qui arrivèrent par la suite dans le monde et que nous rap-
portons en leur temps. Quelles angoisses! quels maux! quelles
tortures ! quels tourments ! quels coups! quelles fuites! quels pil-
lages! quels tiraillements! quels reniements des fils et des filles !
quelles séparations des femmes d'avec leurs maris ! quelles famines!
quelles maladies! quelles pestes! Considère, ô homme judicieux,
que toutes ces choses sont arrivées après cette chute des étoiles et
que, de plus, tous les peuples, toutes les nations, tous les royaumes
s'affaissèrent et toml)èrent devant (*-ette puissance tyrannique en face
de laquelle personne n'a pu tenir [80).
A cette époque*, la secte des Manichéens de Harran, ville de la
Mésopotamie, devint un objet de mépris. Ils avaient un couvent,
situé à un mille environ à lestde Harran, dans lequel ils faisaient
une fois Tan une grande et cruelle» exécution, (''est dans ce couvent
1. Cfr. Mattii., xmv, 29; Mahc. xiii, 24; Luc, xxi, 25; Act. Apo.^t.,
II. LU
a. Cfr. Maith., \xiv, 6.
i). Cfr. Mattii., XXIV, 16.
4. Maith., xxiv, 21, 20, lî).
f). Il y a ici à la niai'i;e quelques mots illisible^ qui paraissent être un titre
«oinnio ccAix cjuo Tailleur a coutume de uiettre en télé îles digressions qu'il
introduit dans son r6oit des événements.
DE DENYS DE TELL--MAHRÉ 69
qu'ils sacrifiaient, que l'évoque de cette secte impie demeurait, que
se célébrait leur grande fête et iju'ils se livraient à la divination.
A l'approche de leur fête, ils ont coutume de s'emparer d'un
homme et de l'emprisonner jusqu'à l'année suivante et, le jour de
la fête, ils l'immolent, lui enlèvent la tête, et lui mettent une
pièce de monnaie dans la bouche, puis la placent dans une niche,
l'adorent et s'en servent pour la divination.
Or, le jour de leur abominable fête arrivait, et ils voulurent faire
venir l'homme qu'ils se disposaient à enfermer pour leur servir
de victime à la fête qui suivrait celle qui allait avoir lieu.
Les principaux d'entre ces Manichéens écrivirent une lettre et
sortirent sur la place publique de H an-an. Ayant trouvé un homme
tel qu'ils le désiraient, ils l'abordèrent et lui dirent : m Prends la
récompense que tu voudras et va porter cette lettre à tel mo-
nastère, au supérieur du couvent. » Le malheureux ignorait
la fraude diabolique qui devait amener sa mort. Il s'empressa
d'y aller, comme un agneau à l'immolation. Il arriva prompte-
mentau couvent, s'approcha de la porte et demanda à ceux qu'il
y trouva à voir leur supérieur et les pria de l'appeler. Ils allèrent en
hâte trouver le supérieur pour lui dire cela. A cette nouvelle, celui-ci
sortit promptemeni et reçut l'homme avec honneur et grande joie :
ce Viens, lui dit-il, entre, repose-toi un peu, mange le pain, puis tu
prendras la réponse [81] de ta lettre et tu iras en paix. » Ils le firent
passer de chambre en chambre, dans une première, dans une
seconde, une troisième, et par plus de six ou sept, jusqu'à ce
qu'ils arrivassent auprès de l'homme enfermé depuis l'année
précédente, qui était destiné à devenir leur victime à la fête
prochaine. Ils lui dirent: « Assieds-toi là près de cet homme.»
Quand il se fut assis, l'homme lui dit: (( Infortuné I quel mal-
heur pour toi ! — Et pourquoi ? » dit celui-ci. L'autre reprit:
M Ils m'ont fait de même; quand je suis venu ici, j'ai trouvé un
autre homme qui y demeurait, et à leur fête, ils l'ont sacrifié. Voilà
sa tète dans cette niche, avec une lampe qu'ils allument devant ;
ils l'adorent et s'en servent pour la divination. Ils se préparent
maintenant à me tuer dans cette fête; tu resteras à ma place
jusqu'à la fête suivante, alors tu deviendras toi-même leur victime.
Mais si tu veux t'échapper d'ici, écoute moi et tu t'en trouveras
bien: Observe le moment où ils se prépareront à me tuer, tiens-
toi à c6té de moi, et quand ma tête tombera à terre, prends-la
promptcment, répands mon sang et asperges en la porte. S'ils
crient après toi, s'ils te supplient, s'ils t'offrent de nombreux pré-
sents, ne la dépose pas ; s'ils veulent te saisir, jette du sang contre
70 CHRONIQUE
eux et ils sVloigneroiit (le toi. )) Celui-ci fit i<voc un louable em-
pressement selon ce qu'on lui avait dit. Il saisit la tête et courut
vers la porte. Les Manichécïis le sii[)pliaient en se lamentant de
la déposer ; mais il ne céda ni aux prcjuiesses ni aux exhortations
cl ne recula pas devant leurs menaces, car ils ne pouvaient rappro-
cher. Emportant cette tête d'un pas rapide, il alla trouver 'Ahhas
qui était alors éïuir de la M('soj)()tamie. Celui-ci, en apprenant ce
qui s'était passé, fit saisir et emprisonner tous les Manichéens,
honnnes, femmes et enfants; f82| il s'empara de tout ce qu'ils pos-
sédaient, leur inlli^çea divers supplices et leur prit plus de quatre
ou cinq cent mille mines.
L'an 107(5 t7Gi-7G5),le vendredi quatorze du moisd'adar [mars],
le saint évêqu(î d'Amida, Sévère, quitta ce monde et fut enseveli
dans son monastère.
La même année, un synode des évoques mésopotiimiens, mossu-
liens et occidentaux se réunit à Saroug, dans le village de^
Ils firent la paix et l'union avec Georges, qui devint patriarche
après la mort de Jean, évéque de Callinice, que les Mésopotamiens
avaient fait patriarche. Dans ce synode, on déposa tous les évoques
ordonnés par le patriarche Jean ; non pas à cause de la foi, mais
parce qu'ils n'avaient pas été ordonnés selon Tordre et la loi divine,
et que les pays qui leur avaient été assignés ne les acceptaient
point, et, pour dire la vérité, parce qu'ils n'étaient pas dignes de
l'épiscopat, car ces hommes étaient des moines scélérats, des loups
ravisseurs qui n'épargnent pas le troupeau, de ceux que l'apôtre
Paul nous a signalés d'avance'. Ils étaient de mauvais arbres qui
portèrent de mauvais fruits^ et les firent dévorer à l'Église. Nous
raconterons leurs (cuvres en leur temps.
Les Mésopotamiens, les Mossuliens, les Occidentaux avec les
monastères et les villes de leurs régions approuvèrent, dans ce
synode, l'élection de Georges. Les chefs et les notables de ce synode
étaient: Georg(^s, patriarche d'Antioche; David, évùque de Dara;
Aba,d'Amida; Sergouna,dc Marda; Constantin, de Samosaté [83].
1. La place de ce nom est en blanc dans le manuscrit.
3. Cfr. Mattii., vu, 17.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 71
L'an 1077 (765-76G), il y eut une grande et nombreuse réunion
de Nestoriens dans le monastère de Beit Kewila sur les monts
Cardes ^ , pour célébrer une fête, comme ils avaient coutume de faire,
dans le lieu où Tarche se reposa. Tandis qu'une grande multitude
était réunie en ce lieu, à la pleine lune de tesri second [novembre],
un éclair brilla dans le ciel, le feu tomba et enflamma leur
temple, le consuma avec le peuple qui était dedaus, et réduisit
les pierres en chaux.
Ceux même qui étaient dehors n'échappèrent pas à Tincendie
qui les consuma tous sans que personne fût sauvé.
Plus de sept ou huit cents personnes périrent dans cet incendie,
avec une multitude d'animaux. L'odeur infecte de ce lieu allait
jusqu'à deux milles de là, et pendant deux ans les hommes ne pou-
vaient approcher dans les environs. Cet endroit qui avait été un lieu
de refuge contre les eaux du déluge pour les hommes, les bûtes, les
animaux, les reptiles, fut un lieu de ruine pour ces hommes et
leurs animaux, par le moyen de la flamme qui descendit du ciel.
De môme que l'arche d'alliance ne préserva ni les prêtres Ophni et
Phinées, fils d'Héli, ni elle-même*, de môme ici, l'arche de Noé
ne préserva ni le temple bâti en souvenir d'elle, ni les prêtres, ni
les vases et ornements employés aux saints mystères, ni ceux qui
étaient à l'intérieur du temple, ni ceux qui étaient au dehors : ils
périrent tous dans un même pressoir de perdition et pas un
de ceux qui se trouvaient sur la montagne dans cette réunion
n'échappa.
On pouvait voir les nues et l'air répandre du ciel une pluie de feu
et de soufre, comme celle que le Seigneur fit pleuvoir sur Sodome '.
La montagne paraissait au loin comme la fumée d'une fournaise,
de sorte qu'à peine [84] quelqu'un put-il se sauver vivant, et en-
core il n'échappa qu'à moitié brûlé.
L'odeur infecte du soufre que les nuages faisaient pleuvoir et de
rincendie se faisait sentir jusqu'à deux ou trois milles.
Notre-Seigneur fit tout cela de nos jours au peuple nestorien.
L'an 1Q74 (762-763), au mois d'adar [mars], il y eut une grande
inondation dans le fleuve du Tigre qui ravagea la province fron-
tière*, causa des maux considérables sur toutes ses rives, emporta
1. Sur les diverses traditions des peuples orientaux au sujet du lieu où se
serait reposée Tarche de Noë, cfr. Saint Martin, Mcm. sur l* Arménie,
t. I, pp. 261 sqq.
2. Cfr. I Sam., iv.
3. Gen., xix, 24.
4. On appelait Beit Tafioumê, ou province frontière, sous les Sassaaides.
72 CHRONIQUE
des maisons, des moulins, des villages, dos hommes, des animaux
avec quantité de chos(\s.
Il fit les plus terribles ravages à Mossoul ; car il atteignit cetie
vill(; «^ la première veille et, en s'élevant, passa sur trois faubourgs,
entraînant les maisons, les bestiaux, les hommes et toutes sorties de
choses. On voyait des barques et des radeaux qui naviguaient au-
dessus du sol. Les jardins de grands palmiers, qui se trouvent là,
furentcux-mémcs couverts par Tinondation, et les barques paissaient
au-dessus d'eux.
Il en fut de même dans tous les lieux au-dessous de cette région.
L'an 1078 (7(iG-707), toutes les armées des Perses et des Arabes
se mirent en mouvement et se précipitèrent sur la région septen-
trionale.
*Abbas, frère du roi, qui était en ce temps-là émir de la Mésopo-
tamie, envahit Kdesse, *Abdin * et Tell-Dakoum ; le général Hassan
Ibn Qa*at'iba, avec une autre armée, et un autre général qui
commandait l'armée royale et s'appelait Ibn Asa'ad, remontèrent
le Tigre et parvinrent à Amida avec des troupes innombrables.
Tandis qu'ils assiégaient Amida, ville de la Mésopotamie, le
général de l'armée royale Ibn Asa'ad mourut.
(^ette armée était composée de divers peuples, différents d'aspect,
[professant] tous les cultes. |85] Parmi eux, les uns adoraient le feu;
d'autres le soleil : le matin ils se tournaient et adoraient au levant,
au milieu du jour ils adoraient au midi, et le soir au couchant;
d'autres adoraient la lune, d'autres les étoiles, d'autres les che-
vaux; d'autres s'étiiient fabriqué divers simulacres de toute espèce
d'idoles, qu'ils portaient avec eux pour les adorer, en sorte que cha-
cun avait encore avec lui et adorait les faux dieux de son pays
et de sa nation. Cette armée était un mélange de tous les peuples
et éUiit appelée pour cela « la Plénitude royale». Il y avait en effet
parmi eux des Sindhiens-, des Alains, des Khazares, des Mèdes,
des Perses, des 'Aqouléens', des Arabes, des Kousanites, des
Turcs ; en sorte que nous pouvons dire que c'était un essaim de
sauterelles de toutes les variétés *.
les OQvirons de Nisibe et du Tigre, qui formaient alors la fronlièrc do l'em-
pire romain et de l'empire perse.
1. C'est-à-dire le Tour '.Abdin.
2. HabiUmts de la rrgion, appelée par les Syriens, Senad, aujourd'hui
Sindh. Cfr. Bar HKiiuiuiti, CAro/i. ^7/v^, p. 41; AssEMANi,/^i7;/. or., III, 2, 140.
3. Arabes Koufites. Cfr. ci-dessus, p. 44, n. 1.
4. Tliôophane dit que rette armée était forte de 80.000 hommes. Cf. Htst.
du Bas- Empire, t. XII, p. 265.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 73
Il se commettait parmi eux des pécfiés sans nombre et de toute
espèce; mais nous les passons sous silence à cause de leur énor-
mitê et de leur abomination, et aussi pour ne pas faire souiller la
langue du lecteur ni l'oreille de ceux qui écoutent : car c'est une
souillure pour la bouche de les prononcer.
Je pense que Dieu les excita et les fit sortir de leur contrée parce
qu'ils avaient abandonné Dieu leur créateur; et qu'ils offraient à
des simulacres divers de créatures, leurs semblables, Tadoration
qui n'est due qu'à Dieu seul. Au lieu de reconnaître que Dieu est
leur créateur et de comprendre que» c'est lui le Dieu de tous les
peuples, dont la puissance existait même avant le soleil, qui or-
donna: « Que la lumière soit, » et qui dit aussi : « Qu'il y ait deux
grands luminaires dans le firmament, l'un pour présider au jour
et l'autre pour présider [86] à la nuit ' ; » que lui-même donna le feu
aux hommes pour l'utilité de leur vie : ils se sont fait des dieux de
ces objets et ils les adorent. « Ils l'ont provoqué par des divinités
étrangères et ils Tout irrité par leurs idoles. Ils sacrifiaient aux
démons qui ne sont pas des dieux, à des dieux qu'ils ne connais-
saient point ^))
Dieu les amena pour les lancer dans les montagnes du Nord
[où ils devaient succomber] par diverses maladies, par le glaive, la
peste, la famine et pour donner leur chair [en pâture] aux bêtes
des champs et aux oiseaux du ciel.
Ils entrèrent donc dans le territoire des Romains et se disposè-
rent à l'envahir. Ils trouvèrent le pays qui est le long des frontières
fertile et chargé de fruits de loute sorte : car c'était au mois d'ab
[août]. Comme le pays n'étiiit pas habité et qu'il éUiit fertile en
arbres, même en vignes, ces peuples barbares en trouvant de
pareilles choses se précipitèrent dessus, beaucoup plus qu'il ne
convenait, et en mangèrent d'une manière insatiable. Ils tombèrent
alors en diverses maladies, surtout dans la dysenterie et le ténesme.
De sorte qu'on pouvait voir partout où ils avaient campé ou simple-
ment passé des cadavres d'hommes qui gisaient, sans être ense-
velis, le long des routes, sur les collines, dans les vallées, et
qui étaient dévorés par les bêtes sauvages. Leur bétail mourut
aussi ; les chameaux surtout qu'ils avaient fait venir à leur suite
périrent, et de cinquante ou soixante qu'un homme avait amenés,
il n'en sortit pas cinq ou six, quelquefois pas même un.
L'armée entière étant entrée [sur le territoire des Romains] vint
1. Gen., 1, 3, 14.
t. Deut., xxxn, 16-17.
74 CHRONIQUE
assi(^fçer une forteresse appelée Qaniah', qui se trouvait sur la
frontière. Or, des nombreux ouvriers qu'ils avaient amenés de
toute la Mésopotamie, une partie îivait été laissée par *Abbas pour
bâtir la forttTesse nommée Zaïd' et une autre partie êliiit venue
avec eux. 'Al)bas envoya requérir les chariots arméniens, [87J et
leur fit transporter beaucoup de bois de cèdre; il ordonna aux char-
pentiers d'en faire des machines qu'il dressa sur-le champ contre
la forteresse pour lancer des projectiles dans l'intérieur. Les
Romains qui éUiient dans la fortei-esse élevèrent, eux aussi, des
machines à rencontre.
Or, ces Romains qui étaient assiégés, se fabriquèrent une arme
invincible et élevèrent un raur inexpugnable, à savoir: Dieu leur
créateur, en se disant : « Il n'y a point de salut en dehors du
Seigneur; il vaut mieux nous confier dans le Seigneur que dans
un homme ou un prince. Certes, tous les peuples nous environnent,
mais la puissance du Seigneur les fera disparaître'. »
Le chef qui se trouvait alors dans la forteresse s'appelait Ser-
gius; c'était un homme doux, pacifique, craignant Dieu, miséri-
cordieux envers les pauvres. Ce témoignage lui était rendu par
tous les villageois qui, étant entrés pour chercher de la garance*,
tombèrent par hasard entre les mains des Romains. Ceux-ci les
introduisirent dans la forteresse ; en sa présence, ils furent rassu-
rés, et éprouvèrent sa miséricorde, sa générosité, sa bonté. Eux-
mêmes, devant nous et devant tout le monde, rendaient témoignage
à cet homme.
A cette é|X)que, en cfTet, une cruelle épreuve pesait sur le peuple
des Syriens. Ils n'avaient point à travailler, parce que leurs
terres étaient vendues par les Arabes, car ceux-ci ne recevant
pas le tribut qu'on avait coutume de leur donner, vendirent les
terres et les grains et travaillèrent pour eux-mêmes, de sorte que
tout trafic cessa pour les paysans. C'est pourquoi ils se rassem-
1. To Kafjidiyov. Thkoph. CAro/io<;r., ad an n. m. 374.— ViUe forte et très
ancienne de la Grande-Arménie, sur le bord do l'Euphrale occidentai. Elle
portait du temps des Arsacides le nom de Ani; elle s'appelle encore actuel-
lement Gamacb. — V. Saint-Martin, ^fé/n. hist. et jfèogr. sur V Arménie,
t. 1, p. 72 et siiiv.; Uhi. du Bas-Empire, t. XII, p. 73.
2. l.es Syriens d(*sij<nent sous ce nom Kharpcrt ou Garperci, ville de la
Sopbène, au sud du Mourad-Tcbaï, au nord-ouest d'Amida. Cf. Saikt-
Maiitin, Mém, sur l'Arménie, t. 1, p. 95.
3. Cfr. Ps., m, 9; cvii, 8-10.
4. La garance employée quelquefois comme fourrage pour les animaux
était sans doute utilisée comme aliment par les pauvres en ce temps de
disette.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 75
blaient en troupes nombreuses et s*en allaient à Anzcta chercher
de la garance.
Toutes les fois qu'ils passaient au delà de la frontière, soit par
la négligence du gouverneur préposé [88] à sa garde, soit [qu'il les
laissât faire] par avarice pour exiger d'eux, sans pitié, une
amende, ils étaient saisis parles Itomaiiis qiii les conduisaient à
(^^amali. Or, cet homme, quand il les voyait, usait de beaucoup
de miséricorde envers eux et leur disait: « Si vous voulez, restez
auprès de nous; si vous voulez, allez en paix à votre demeure. »
Et, s'ils s'en allaient, il les renvoyait avec des provisions de route.
— En vérité, mes frères, Dieu récompensa cet homme, car il le
délivra des Assyriens, lui et tous ceux qui étaient avec lui dans
la forteresse.
Il voyait qu'une armée nombreuse les environnait de toutes
parts, tandis qu'ils étaient eux-mêmes en petit nombre; que les
ennemis, comme autrefois le grand échanson [de Sennachérib],
insultaient à ceux qui se tenaient sur les murs en disant^ : « Quel est
celui d'entre les peuples qui a pu échapper aux mains de 'Abdallah
Ibn Mohammed? N'avez-vous pas entendu ce qu'il fit à Marwan
et à la maison de Hischam? 11 les a fait disparaître de la terre; où
est le roi des Égyptiens? Et celui des Africains, des Nubiens, des
Maures? Où sont les rois de l'Arménie, de Basan, de la Médie,
de la Perse? N'avez-vous pas appris ce qu'il fit aux rois de Sindh
et de l'Inde? Quel est celui de tous les rois de la t<.»rre qui
a pu arracher sa contrée aux mains de * Abdallah pour que vous
puissiez espérer vous échapper?» Mais, cet homme fidèle revêtit,
comme Ézéchias, le casque de la foi, se ceignit de la confiance en
son Maître et eut recours à la prière comme à un lieu de refuge.
Les cris de leur supplication émouvaient même ceux qui étaient à
l'extérieur. Or, le Dieu de bonté ne détourna pas l'oreille de leur
prière, mais à cause de leur foi, il les exauça, et ne permit point
que cet Assyrien entrât dans le village, mais « il lui mit un anneau
dans le nez et le fit retourner couvert de confusion dans la route
par laquelle il était venu ' ».
Or, de quelque manière que les Perses combattissent, [89] toutes
leurs ruses se trouvaient inutiles. Ils firent des maisons mobiles
en bois afin de remplir de poussière et de pierres le fossé qui était à
côté du mur; mais cela fut aussi inutile: les Romains du dedans
jetaient des pierres et les lançaient si habilement qu'ils tuaient une
1. Rabsacès. Cfr. // Reg., xviii; Is.. xxxvi-xxxvii.
2. Cfr. Is., XXXVII, 29, 34,
76 CHRONIQUE
grande multitude de ceux qui étaient à Textérieur et même brisaient
les machines des Perses.
Comme il y avait un des côtés de la forteresse par où on pouvait
monter, les Romains amenèrent en cet endroit de gros bois longs,
au bout et tout le long desquels ils fixèrent de grosses pierres
rondes, et ils les placèrent sur le bord de cette brèche. Quand les
Perses se précipitaient pour monter, les Romains jetaient un
de ces bois qui les balayait tous en tombant et les mettait en
morceaux.
Une nuit, il arriva que les Perses, s apercevant que la voix des
Romains se taisait, se persuadèrent que ceux-ci dormaient d'un
profond sommeil. ITne foule innombrable s'élança contre eux ;
tandis que les premiers grimpaient et montaient avec joie, pensant
déjà avoir emporté d'assaut la forteresse; les Romains qui
montîiient la garde, les aperçurent et les tuèrent avec grand cou-
rage. Ils lancèrent aussi leurs bois garnis de pierres qui balayèrent
tous ceux qui étaient en train de monter et en firent un monceau
de cadavres.
Toutes leurs entreprises devenaient ainsi inutiles parce que Dieu
aidait les Romains.
Deux chefs d'armée se séparèrent enfin pour entrer et s'avancer
dans le pays des Romains, avec une armée forte d'environ cin-
quante mille hommes, afin de piller, de butiner, de dévaster toutes
les possessions romaines. Ils entrèrent donc; mais parce qu'ils igno-
raient le pays et n'avaient point de guide qui connût la région, [90]
ils ne voulaient point marcher par les chemins battus, de peur que
les Romains ne les découvrissent, ne se réunissent contre eux et ne
les fissent disparaître de la terre. Mais ce que dit Job leur arriva' :
(( Ce que je craignais est venu sur moi ; ce qui me faisait trembler
m'a atteint. » La colère de Dieu ne s'arrêta, ne se reposa point
avant de les avoir atteints. Il les fit monter comme s'élève une
meule de blé en son temps. « Et comme le chêne qui est arraché
par sa racine, ' » ils ont d'abord été détruits par l'air.
Leurs provisions de route s'épuisèrent et ils périrent de faim ;
ensuite ils tombèrent dans des montagnes arides et furent dévorés
par la soif; au moment où ils allaient périr de soif, eux et leurs
bétes, sans que le glaive ou l'épée eussent été tirés, ils descendirent
dans un pré humide où ils trouvèrent de l'eau à la surface en
creusant avec leurs lances : ils burent et évitèrent de mourir de soif
1. Job, hi, 26.
2. l8., VI, 13.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 77
eux et leurs bêtes. Ils pénétrèrent très loin dans l'intérieur, non pas
dans la direction de la terre peuplée, mais dans une région déserte
et aride, entre le territoire des Romains et celui des Arméniens.
Après avoir erré longtemps dans des montagnes désertes, ils se
dirigèrent sur Césarée et trouvèrent une région fertile et dans les
villages tout un peuple [de villageois] qui sortaient et rentraient
sans se tenir sur leurs gardes. Or, ces soldats tombèrent à Timpro-
viste sur eux, et il ne se trouva personne pour leur résister. Ils
pénétrèrent au delà de Césarée et satisfirent tous leurs désirs dans ce
pays. Us butinèrent, pillèrent, dévastèrent la contrée, ils condui-
sirent ses habitants en captivité et firent marcher tous les troupeaux
devant eux. Ils emportèrent un butin considérable d'hommes,
d'animaux, d'objets et d'ustensiles, môme de l'or et de l'argent en
grande quantité.
Mais l**ur joie n'atteignit pas le comble. Ils furent mesurés avec
la mesure même qu'ils avaient employée; ils remplirent de leurs
propres personnes la fosse qu'ils avaient creusée, ils furent pris
dans le filet qu'ils avaient tendu. [91J Le Seigneur les récom-
pensa selon leurs œuvres. Parce qu'ils firent des captifs, ils furent
pris captifs; parce qu'ils pillèrent, ils furent pillés; parce qu'ils
voulurent posséder des esclaves et des servantes, eux-mêmes de-
vinrent esclaves; parce qu'ils voulurent dévaster les terres, eux-
mêmes furent dévastés et devinrent la nourriture des bêtes des
champs et des oiseaux du ciel ; la terre fut enivrée de leur propre
sang. Voici comment la chose leur arriva.
Quand ils entrèrent dans cette région, elle était dans une grande
prospérité; sans pitié ni miséricorde, ils la pillèrent, la dévastèrent
et enchaînèrent ses habitants. Ils se proposaientde rentrer en Syrie
avec un butin considérable, une grande renommée, une victoire
glorieuse. Selon leur désir, ils possédaient déjà de grandes
richesses, des esclaves et des servantes; et les malheureux ne
savaient pas, — car ils marchaient dans les ténèbres, — que dans
peu de temps ils allaient devenir captifs eux-mêmes. Kn vérité, il
faut ici chanter et dire^ : « Dieu a délivré le pauvre et le malheureux
de celui qui l'opprimait violemment ; » et* : « Il l'a arraché d'entre
les dents et l'a retiré des profondeurs de la mer. »
En efïet, les Perses se persuadaient qu'ils éUiient déjà arrivés,
qu'ils entraient en Syrie; ils ne craignaient plus rien. Ils arrivèrent
à une grande prairie dans laquelle ils voulurent camper et se
1. Cf. P^., XXXV, 10.
2. Pa., Lzviii, 2t.
78 CHRONIQIJI-:
reposer. Cette prairie n'avait qu'une issue et de tous côtés
elle se trouvait entourée d'un ruisseau qui se répand dedans. Ils
campèrent doncî, se reposèrent un peu <H lâchèrent leurs béU.'S de
somme; ensuite, comme ils ne connaissaient pas les issues de cett<î
région, ils voulurent séjourner en cet endroit. Alors Dieu, qui ne
se détourne pas de ceux qui l'invoquent, (it arriver et amena un
général romain qui avait avec lui douze mille cavaliers. Cette armée
venait d'un autre lieu et d'une autre expédition après avoir rem-
porté une grande victoire. Parvenus au pré qui se trouvait devant
l'entrée de celui dans lequel les Perses campaient, ils voulurent, eux
aussi, [92] y placer leur camp pour se reposer, ignorant le danger
auquel ils étaient exposés de l'intérieur; ils ne savaient rien de ce
qui s'était passé sur leur territoire et dans leur nation, car ils
venaient de très loin. Quand le camp fut établi, quelques-uns
d'entre eux montèrent sur le sommet d'une colline et aperçurent la
grande armée [des Perses] qui campait plus à Tintérieur avec les
captifs et les dépouilles considérables de leur patrie. Troublés et
saisis de frayeur, ils descendirent promptement annoncer la chose
à leurs compagnons. Leur général ne fut pas indifférent à ce qu'il
entendait, mais il en envoya d'autres, — environ trois cents cava-
liers,— pour examiner et voir si la chose était réelle ou si ce n'était
pas un effet de l'imagination des premiers à qui des spectres seraient
apparus. Ceux qui furent envoyés étant montés virent distinctement
et firent connaître [la réalité] au général qui à son tour monta lui-
même avec quatre ou cinq mille hommes.
Quand les l*erses aperçurent les Romains, voyant qu'ils occu-
paient la seule issue par laquelle ils pouvaient sortir et se trou-
vant comme enfermés dans une prison, leur cœur trembla et dé-
faillit, leurs mains faiblirent, ils chancelèrent et titubèrent comme
des hommes ivres, et toute leur ardeur s'évanouit. Ils envoyèrent
f^ux-mémes des explorateurs pour voir combien était forte l'armée
[des ennemis], et s'ils éUiient préparés au combat, car il y avait entre
eux une grande élévation et une issue étroite. Les messagers en
revenant firent connaître la vérité,c'est à-dire que les Romains for-
maient une grande armée et qu'ils étaient prêts au combat. Les
Perses voulurent alors traiter de la paix avec des paroles llatteuses;
ils libérèrent d'abord tous les captifs qu'ils emmenaient et abandon-
nèrent toutes les richesses et tout le butin cju'ils avaient pris : « Qu'on
nous laisse seulement la vie, disaient-ils, nous sortirons comme
nous sommes entrés, sans rien de plus. » Mais les Romains n'y con-
sentirent point. Ils firent connaître promptement la situation dans
les villes et à d'autres chefs de troupes. On amena une grande armée
DE DENYS DE TELL-MAHRK 79
qui se divisa en quatre parties et fondit sur eux par devant, par
derrière, [93] à droite et à gauche. Comme c'était encore la nuit, ils
se donnèrent mutuellement comme signal : que quand ils descen-
draient et seraient prêts à combattre, ils sonneraient de la trom-
pette et tout le peuple crierait aussi unanimement: « Kijrie eleison, »
Étant donc descendus, quand ils furent disposés, ils sonnèrent de la
trompette et tout le peuple cria aussi comme un tonnerre : a Kyrie
eleison. » Les Perses en entendant leurs clameurs furent effrayés
et devinrent comme des morts, comme des hommes tués qui gisent
dans les tombeaux ; leurs yeux s'obscurcirent et ils ne pouvaient
voir; leurs mains tremblèrent, et tout espoir de salut s'évanouit
pour eux; ils se crurent morts avant d'avoir été frappés du glaive.
Ils voulurent s'enfuir, mais ils ne le purent, car les Romains les
entourèrent comme un cercle, et Dieu gronda sur eux du haut du
ciel et les bouleversa en présence de ceux-ci.
On doit remarquer ici que Dieu se leva et même opéra manifes-
tement le salut. Les lacets furent brisés : ceux qui y étaient tombés
furent délivrés et prirent à leur tour dans IdS filets ceux mêmes qui
les leur avaient tendus. Ceux qui un instant auparavant se regar-
daient comme maîtres et possesseurs d'esclaves apparurent eux-
mêmes enchaînés et esclaves. « Leur fin fut déplorable, parce qu'ils
avaient oublié de faire le bien, qu'ils avaient persécuté le pauvre,
le malheureux et celui qui a le cœur triste jusqu'à la mort\ ))
On se battit tout le jour, et les Perses furent vaincus par les
Romains qui leur infligèrent une grande et très violente défaite. Les
Perses eux-mêmes, — c'est-à-dire ceux d'entre eux qui échappèrent
de cette bataille, et encore étant blessés, — affirmaient devant nous
avec de grands serments, qu'ils n'avaient jamais vu ou entendu
mentionner autant de sang dans un même endroit qu'en ce lieu. Ils
dirent que, dans cette prairie, le sang et les cadavres s'élevaient jus-
qu'au poitn^il des chevaux. Comme il y avait beaucoup d'eau dans
le pré, le saftg n'était pas absorbé.
En vérité, il est juste de dire avec le prophète : « Certes, Baby-
lone est tombée; [94] tous ses dieux sculptés furent brisés et ne
secoururent point leurs adorateurs, » et de répéter : « La crainte, la
fosse, le glaive te menacent, Assur ! Celui qui fuit en entendant le
bruit de l'alarme tombera dans la fosse, celui qui remontera de la
fosse tombera dans le filet, celui qui s'échappera du filet sera
dévoré par le glaive*. »
1. Cf. Pë., cix, 16.
:?. |8., XXI, 9. — Jkr., XLvm, 43-44.
80 CHRONIQUE
Quand le jour approchait de son déclin, on n'en voyait plus
qu'un petit nombre : les uns furent pris sans résistance, le glaive
dévora les autre». Radad, géuf^ral de Tarniée, prit la fuite sur son
cheval, dépouillé de tout, abandonnant tous ses bcOgages aux mains
des Romains. Il ne s'échappa avec lui qu'un millier d'hommes
environ, et encore blessés. Il s'enfuit à Mélitène, après avoir eu
à livrer en route un autre combat dans lequel il reçut lui-môme
trois coups d'épée; mais il n'en mourut pas. L'autre général, Melik
Ibn Touf, s'enfuit vers Callinice avec cinq mille hommes.
C'est ainsi qu'ils retournèrent couverts de honte et de confusion
vers celui qui les avait envoyés. Tous leurs bagages furent perdus,
et ceux qui échappèrent ne se sauvèrent que dépouillés de tout.
Considérons maintenant ce qui arriva à ceux qui assiégeaient la
forteresse, comment ils levèrent le camp et comment ils se retirèrent
couverts d'opprobre et de honte encore plus que leurs compagnons.
Les paysans qui amenaient du blé et de la farine de Syrie,
voyant qu'ils subissaient un tort considérable de ce transport, sans
aucun profit, car comme nous l'avons dit plus haut, ce voyage était
plein de périls et de pertes, et surtout parce que toutes les bêtes de
somme avaient péri, s'abstinrent de leur conduire du blé et de la
farine; il y eut donc parmi [les Perses] une grande famine, et ils
furent sur le point de périr à cause du manque de vivres. Le qcphiza
montîi à trois zouz et demi, [95] et encore on n'en trouvait pas.
('ela dura environ vingt jours, après quoi 'Abbas envoya en
Syrie. [Ses envoyés] parvinrent à un grand marché. Quand les
paysans, qui n'avaient rien à faire, apprirent la nouvelle, le peuple
entier de la Mésopotamie, de l'Occident et de l'Arménie intérieure
se dirigea vers ce lieu. Chacun apportait ce qu'il pouvait, de sorte
qu'il y eut bientôt là une abondance de toute sorte de provisions;
des marchands, des aubergistes, des grainetiers et d'autres négo-
ciants vendaient du froment, de l'orge, delà farine et les autres
choses nécessaires à la vie des hommes. Ils les accumulèrent là eu
quantité, comme des montagnes, espérant amasser en peu de temps
une grande fortune; mais ces malheureux qui avaient les yeux de
l'int^'Uigence obscurcis par l'amour de l'argent, ne comprenaient
pas que bientôt ils perdraient eux-mêmes ce qu'ils possédaient, et
que ce voyage tout entier serait plein de pertes et sans le plus
p(»tit avantage.
[Les Perses] attaquaient donc la forteresse nuit et jour par tous
les moyens usités à la guerre ; mais ils n'obtenaient jamais que
d(»s pertes, Uindis que la machine des Romains tuait chaque jour
beaucoup d'entre eux. Or, *Abbas, qui était miséricordieux, eut
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 81
pitié de ces pauvres qui avaient été enrôlés dans le service, et
voyant qu'ils succombaient sous les pierres de la machine que les
Romains lançaient de l'intérieur, il rassembla les chefs de Tarmée
et ordonna que chaque jour un d'eux désignât les hommes qui
devaient lancer des pierres avec la machine, et que les paysans
fussent employés à d'autres travaux, éloignés du danger de
mort.
Le temps s'écoulait et ^Abbas disait : « Quand je devrais rester
ici dix ans, je ne m'en retournerai pas; je m'en emparerai. » Les
hommes s'assemblèrent de toute part et vinrent en cet endroit.
Après avoir combattu par toutes sortes de moyens de guerre, sans
succès, ils en vinrent aux menaces, se disant : « Peut-être ils
auront peur et nous ouvriront. » [96] Mais, comme l'aigle rapide
qui plane dans les airs avec des ailes agiles n'est point effrayé par
quelque chose de terrestre, de même ceux-ci ne craignirent point.
A la fin, [les Perses] vinrent à eux avec des caresses et des exhor-
tations, pour leur persuader d'abandonner d eux-mêmes la forte-
resse et de s'en aller en paix, mais cela n'aboutit non plus à aucun
résultat, si ce n'est que les assiégés commencèrent à se moquer
d'eux.
Comme déjà on entrait en hiver, et que le froid commençait à
sévir dans cette contrée, les Perses craignirent d'être surpris par la
neige, d'avoir les routes coupées et de périr là de faim et de froid.
Ils avaient peur aussi que des troupes se réunissent contre eux et
ne les fissent disparaître de la terre, et qu'il ne leur arrivât pire
qu'à leurs compagnons qui sortirent seulement cinq ou six mille,
— et encore blessés, — de cinquante mille qu'ils étiiient entrés.
Comme ils ne pouvaient rien faire, un héraut donna subitement
l'ordre de monter à cheval et de s'en aller. QuaiU aux marchands,
aux aubergistes, aux acheteurs et aux vendeurs, ils perdirent en
un clin d'oeil toutes leurs marchandises, parce qu'ils avaientacheié
et entassé sans mesure le froment, Torge, la farine, et qu'ils ne trou-
vaient point de bêtes de somme pour leur faire traîner et emporter
leurs denrées. Comme la contrée était pénible à traverser pour les
bêtes, les paysans leur faisaient porter leurs charges jusqu'au pas-
sage du fleuve appelé Salqal et les renvoyaient; une ou deux bêtes
de somme seulement sur cent, passaient au nord du gué. Mainte
fois il arriva qu'ils louèrent des bêtes pour ne pas faire passer les
leurs, et ainsi on manquait là de bêtes de somme. Aussi, quand le
héraut cria à l'armée de charger, les Perses, voyant que toutes les
marchandises des négociants restaient, allèrent y mettre le feu, afin
qu*elles ne demeurassent pas, de peur que les Romains en descen-
6
82 CHRONIQUE
dant n'en profitassent. Bien qu'ils eussent fait cela, il en resta
cependant beaucoup {97].
Une autre armée s'avança contre yaliqala\ Quand les soldats ren-
contraient des hommes qui portaient et amenaient du fromage, de
rhuile, du miel, des vêtements et d'autres provisions pour l'armée,
ils jetaient leurs marchandises et chassaient devant eux les hommes
et leurs ânes, dépouillés de tout, de sorte que ces pauvres gens per-
daient en un instant tout ce qu'ils possédaient. Ainsi tout le monde
subit des pertes et des dommages de cette campagne, môme les
ouvriers, car 'Abbas, à son départ, ordonna aux gouverneurs placés
sous sa dépendance de leur enlever le salaire qu'ils avaient re<;u en
entrant, pour eux-mêmes et pour leurs ânes.
C'est ainsi que 'Abbas leva le camp et s'en alla. Il descendit dans
la route par laquelle il était venu, couvert de honte et de confusion
avec des pertes considérables.
Les autres troupes descendirent vers Amida et le Tigre, et ren
trèrent en Perse. Les soldats étaient affaiblis, affamés, languis-
sants ; il n'en revint pas même la moitié, surtout des bêtes de
somme et des esclaves qui s'échappèrent pour se réfugier sur le
territoire des Romains.
Il fallait les voir : autant ils étaient fiers et orgueilleux en en-
trant, autant, en sortant, ils étaient humiliés, baissaient tristement
la tête, absolument dépouillés de tout.
Le passage de cette armée fut d'un grand profit pour tout le Nord,
car ils y répandirent des zouz, et surtout des neufs. Dès lors,
quiconque voulait fabriquer des zouz le pouvait faire sans crainte ;
les zouz neufs se multiplièrent ainsi, surtout les faux. Cela causa
la perte des hommes.
Toute la t*îrre dg» Mésopotamie était remarquable par ses vignes,
ses champs, son nombreux bétail. Il n'y avait pas même un'pauvre
misérable dans un village qui ne possédât un champ, des ânes et
des chèvres. Il n'y avait pas un lieu [98J plus ou moins cultivable
qui ne fût ensemencé ou planté de vignes ; même dans la montagne,
tout endroit où la charrue pouvait passer était planté de vignes.
L'avarice s'empara d'eux à tel point qu'ils usurpaient tout ce qui
avait été donné par leurs ancêtres aux églises et aux monastères.
Il y eut du blé et du vin en quantité. A cause de l'abondance des
récoltes, les querelles, les disputes, les procès se multiplièrent à
1- ^tDLï ^a'is les historiens arabes. ï.ocalité à ideniifter avec Erzerouin.
Cf. Saint-Mautin, ;\/r/7i. /iist.ot f/éofjr., I. (39; Bar Hebr. ,C/«ron. syr., éd.
Hcdjan. p. 1-^5. IJre au«;si (^aliqala au lieu de Callinicp, ci-dessus, p. 80, l. 9.
DE DENYS DE TELL-MAHRK 83
propos des limites, au point que mainte fois ils en vinrent au
meurtre. Les gouverneurs des villes eux-mêmes furent sans auto-
rité à cause des procès qu'ils avaient entre eux. La terre fut rem-
plie de pAtres à cause de l'abondance des pâturages.
Ce que nous venons d'écrire a pour but de montrer quelle cala-
mité envahit la terre. « Ce peuple qui s'engraissa, commença à se
montrer récalcitrant, oublia Dieu son Créateur, insulta le Dieu qui
l'avait enrichi'. »
De cette grande fortune en bétail, en champs, en esclaves et en
servantes, les propriétaires tombèrent dans une telle misère qu'on
voyait des hommes qui avaient eu des milliers de chèvres et de
brebis, des champs, des chameaux, des chevaux, des serviteurs
et des servantes, qui montaient sur des chevaux arabes pendant que
leurs serviteurs montés sur des mulets sonnaient de la trompette
devant eux, à la manière des païens, qu'on les voyait, dis-je. eux et
leurs semblables, porter leurs enfants sur leurs épaules, courbés,
nus, affamés, altérés, quêtant de porte en porte un morceau de
pain, chassés d'un lieu dans un autre lieu, d'un endroit dans un
autre endroit; qu'envoyait des maîtresses de maison dépouillées,
abandonnées, portant leurs petits enfants suspendus h leur cou,
languissantes, errant de village en village, de ville en ville.
Or, le blé, celte année-là, après le départ de l'armée, se vendait
vingt-cinq et même trente gribè pour un dinar, le vin quarante
ou quarante-cinq kailtè pour un dinar; [99] et toutes les autres
choses étaient bon marché, car il y avait en ce temps-là grande
abondance dans le pays.
Aussi commencèrent-ils à bâtir des édifices et à restaurer les
églises.
Des discussions, des disputes j des troubles qui eurent lieu dans
la sainte Ef/lise et parmi les paateurSy en cette annre 1078
(766-767), principalement à cause de (ieorfjes, patriarche du
siège apostolique d'Antioche.
Comme nous l'avons dit plus haut, les évéques de la Mésopo-
tamie se séparèrent et s'éloignèrent de Georges et des (Jccidentaux,
et firent patriarche le vénérable Jean. Or, celui-ci étant mort, les
vénérables évéques craignant Dieu voulurent expulser du milieu
1. Cf. DetU., XXXII, 13.
84 CHRONIQUE
d'eux les perturbateurs et ne former qu*un seul peuple obéissant à
un seul chef, selon la loi portée et sanctionnée parles saints l*t»res.
Ils craiguaientaussi qu'il ne survint quelque division ou trouble dans
la foi sainte. Comme toutes les villes avaient fait leur soumission à
Georges, avaient mis sou nom dans les diptyques, et l'aimaient,
tous les évéques de la Mésopotamie et les Occidentaux finirent par
se réunir dans la région de Saroug, avec le vénérable Georges, en
lan 1076 d'Alexandre.
On discuta beaucoup dos deux côtés sur toutes les questions
controversées qui les concernaient mutuellement.
Le patriarche Georges aimait mieux la paix que la discorde et la
division; il ne voulait pas que de son temps on changeât les règles
et les lois établies par les cent cinquante illustres Pères, assemblés
dans TEsprit-Saint à Constantinople, qui sanctionnèrent et éta-
blirent les patriarcats, donnant à Nectaire celui de Constantinople,
après celui de Rome; [100] à Timothée celui d'Alexandrie, d'Egypte
et de toutes les régions occidentales ; à Mélèce celui d'Antioche et
de tout l'Orient'. Craignant que la division n'arrivât de son
temps dans ce siège d'Antioche, il accepta et accorda tout ce que
demandèrent les évoques de la Mésopotamie, excepté au sujet des
évéques ordonnés par Jean, du monastère de Qarqaphta, qu'ils
avaient fait patriarche. Il n'accepta point cela et n'y consentit
pas; il voulut les déposer de tout ordre sacerdotal. Sur ce, les
évoques de la Mésopotamie se récrièrent, parce que la plupart
avaient été pris dans des monastères célèbres; mais cela ne put
contraindre le vénérable. « Le sacerdoce, dit-il, et même Tépisco-
pat, sera donné à ceux d'entre eux qui voudront aller dans les régions
inférieures du Sagistan et de llarab'. » Cela plut beaucoup aux
évêqiios. (( Comment est-il possible, disait le vénérable, que je
chasse de sa ville, pour le remplacer par un de ceux-là, un évêque
qui est meilleur que moi et n'a pas été établi par moi? N'a-t-il pas
gouverné le diocèse qui lui a été confié selon toutes les pratiques
de la vertu? NVi t-il pas passé déjà trente ans dans l'épiscopat? Il
n'y a aucune ville qui demande un de ceux-là ou qui Taceepte.
Que celui d'entre eux qui le désire et qui a la crainte de Dieu s'en
aille dans les régions inférieures. » 11 ordonna que tous ceux qui
accepteraient fussent aidés par tout le monde dans leur voyage.
En vérité, mes frères, si même le vénérable (îeorges avait voulu
1. Hremipr concile de Constantinople en 381 ;cf. can. 1,2, 3.
ii. La ville et le pas s de Sagistan se trouvaient dans le Kboraçau. Harab
(= HarcNM doit eue identiliee avec Hérat. V. Noei.dekk, Tabari, p. 42, n
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 85
les accepter, il n'aurait pu en trouver un seul parmi eux qui fût
digne de Tépiscopat, car c'étaient des hommes hautains, orgueil-
leux, perturbateurs, chicaneurs, astucieux, habiles à tenir des
discours pervers, qui n'avaient point devant les yeux le jugement
de Dieu, et sur lesquels s'accomplissait la parole de TApôtre* : ce Je
sais que quand je serai parti des loups cruels, [101] sans pitié pour le
troupeau, entreront au milieu de vous; et même du milieu de vous
surgiront des hommes tenant des discours pervers pour attirer des
disciples à leur suite. »
Notre- Seigneur, lui aussi, parlait d'eux quand il avertissait ses
disciples' : « Gardez-vous des faux prophètes qui viennent à vous
avec des peaux de brebis, et ne sont au dedans que des loups
dévorants. A leurs fruits vous les reconnaîtrez. Est-ce qu'on
recueille des raisins sur les épines, ou des figues sur les ronces?
Partout arbre bon produit de bons fruits, et un mauvais arbre
produit de mauvais fruits. Un bon arbre ne peut produire de mau-
vais fruits, ni un mauvais arbre produire de bons fruits. A leurs
fruits, dii-il, vous les reconnaîtrez. »
En vérité, ceux-ci étaient de mauvais arbres qui firent goûter
des fruits amers à l'Église et au peuple de Dieu.
A présent je vais montrer dans quel abîme profond tomba le pays ;
mais que personne ne blâme le vénérable Georges ni les évèques,
pour les avoir chassés de l'Église.
Pour moi, mes frères, je ne comprends pas comment le vénérable
Jean, qui avait vécu dans les pieux labeurs de la vie monastique,
qui avait été naziréen, qui était loué par tout le monde, avait
admis à l'imposition des mains, même pour la simple prêtrise, des
hommes comme ceux-là. D'autant plus qu'aucune ville n'en avait
b*»soin. La ville d'Amida avait déjà deux ou trois évêques, il en fit
encore un troisième ou un quatrième pour cette cité. Or, les évêques
qu'elle avait étaient beaucoup plus vertueux que ceux qu'il ordonna.
L'un d'eux était Mar Sévère, du monastère de Zouqenin, homme
célèbre et craignant Dieu, qui se démit de la conduiteMÎe la ville
parce que sa vue s'affaiblissait, et alla habiter dans son monastère
jusqu'à la fin de sa vie. On mit à sa place Mar Aba, du monastère
de Map Habib.[102] dansl'Arzanène, homme doux et humble, orné
de toutes les vertus divines; de plus, àTell Besmê, il y avait Ser-
gouna, homme de Dieu, du monastère de Mar Athanase. C'étaient
tous des vieillards vénérables et saints. Or, quoique la ville
1. Art. Apost., XX, 29.
2. Matth., VII, 15-19.
86 CHRONIQUE
eût ceux-ci, il en ordonna d'autres, dont un du monastère de
Harbaz.
J'écris ces choses, nifs frères, parce que je veux faire connaître
les maux qui vinrent sur nous par la suite. Que personne oe
blAme Técrivain avant d'avoir vu les fruits de ces arbres mauvais.
« L'aspect d'un homme fait connaître ses ceuvres, et ses traces
rendent témoignage pour lui\ » — Voici ces hommes et leurs œuvres
devant eux.
Quand le synode fut terminé, chacun retourna à son pays. Le
vénérable (îeorges descendit à son monastère. Ces hommes misé-
rables, de leur côté, s'en allèrent dans une profonde ignominie et
une grande confusion; mais non pas comme des hommes qui
cherchent à cacher leur honte et à demeurer oubliés dans leurs
monastères. Us remuaient toute pierre; ils excitaient et agitaient
beaucoup de monde; ils cherchaient comment ils tireraient ven-
geance de Georges et de ceux de son parti.
Georges, ayant déjà fait l'expérience de la chose et craignant que
ce qui était arrivé ne se renouvelât, s'en alla à son monastère et prit
la résolution de ne point entrer dans une ville, dans un vilhige, ou
dans un couvent à moins que les notables du lieu ne vinssent le
chercher pour raccompagner.
Il advint cette année-là que les habitants de Harran vinrent le
chercher, à cause d'une dispute entre eux et leur évêque. Quand
l'affaire pour laquelle il était venu fut terminée, les habitants
d'Amida descendirent près de lui avecMar Aba, leur évèque, pour
le conjurer de vouloir bien se donner la peine de venir les visiter.
Lui, comme un bonpasteur, accueillit leur demande [103J et monta
avec eux. En passant par les villages et les villes qui se trouvaient sur
sa route, il futre<^u partout le monde avec honneur.
Les habitants d'Amida eux-mêmes vinrent le recevoir en grande
pompe, comme il convenait à un tel homme.
Il demeurait là depuis quelque temps lorsque arrivèrent les habi-
tants du monastère de Zouqenin, c'est-à-dire tous les vieillards
vénérables de ce couvent avec le digne Mar Eutal, leur supérieur,
et leur visiteur Denys, qui par la suite devint évéque de Harran.
Ils le conduisirent à h^ur monastère. Le vénérable Georges désirait
dej)uis longtemps voir ce couvent et y prier. Après avoir satisfait
son désir et joui de l'afTection des moines de Zouqenin, il passa par
Hani' et arriva à Tell-Dakouni.
1. Cf. Krrli., XIX. X'().
Z. m ni, à li) kil. environ au N. d Amidj. Cf. Saint-Martin, Mém.. I, 94.
DE DKNYS DK TELL-MAHRÉ 87
Quant il voulut se diriger vers son monastère, Satan, qui est
l'ennemi de tout bien depuis le commencement, excita ses dis-
ciples, ceux qui sont ses suppôts, qui ont rempli la mesure de
perdition ; car, en voyant que le patriarche était accueilli par tout
le monde avec honneur, il comprit que la paix allait régner dans
rËglise et que le trouble et la discorde allaient disparaître du milieu
d*elle.
Quelques-uns de ces hommes dont nous avons parlé plus haut
descendirent vers le roi et tinrent des discours méchants contre
le vénérable Georges et contre tous les évéques: « Ils ont même dit
que c'était lui le roi et non pas toi, » dirent-ils.
C'est avec raison que le prophète a parlé de ceux-ci ': « Tes
princes sont infidèles et compagnons de voleurs. Tous aiment les
présents et sont prompts à se venger. » Voici la persécution qui
enfonce ses racines, qui montre sa ileur qui produit des fruits mor-
tels. Venez et voyez les arbres, et à leurs fruits reconnaissez-les.
La colère du roi, en entendant ces choses, monta comme la
fumée ; il rugit comme un lion après sa proie, et envoya des mes-
sagers rapides et pleins d'ardeur chercher Georges fl04] et les
évêques de la Mésopotamie.
Il était encore à Tell-Dakoum. Ils le transférèrent de là à I.larran,
où ils ne lui permirent pas même d'entrer dans le monastère; et
tous les évéques furent rassemblés en cette ville. De ce lieu, ils
descendirent près du roi, à Bagdad, où il demeurait à cette époque.
11 était impossible à ce roi, dès qu'il avait appris qu'un homme
remuait la main ou le pied, dans toute l'étendue de son empire, de
trouver le calme et le repos avant de l'avoir fait périr, que ce fût
un Persan, un Arabe ou un Syrien. Il regardait comme son plus
grand ami quiconque venait lui faire connaître un homme qui
possédait quelque chose.
Quand ceux-ci arrivèrent, ils furent introduits devant le roi. En
les voyant, il rugit contre eux comme un loup qui veut dévorer sa
proie, leur adressa de violentes paroles et les chassa de sa présence.
Il fit emprisonner et jeter dans les fers le vénérable Georges.
Après qu'ils eurent passé là un certain temps, il donna cet
ordre aux évêques : « Choisissez-vous parmi vous celui qui
est digne, mettez-le à votre tête et allez-vous-en. » Il usait ainsi
de miséricorde envers eux. Ils voulurent tous élire David do
Dara. On dit que tout cela venait de ce dernier. C'était un homme
âgé, et tous disaient: « Si c'est un autre [qui est élu], il ne se sou-
1. I8., I, 23.
88 CHRONIQUE
mettra pas à lui. D'ailleurs, il ne vivra pas longtemps et [Georges]
lui succédera. » David n'ignorait pas ces choses; et qu'il Tait voulu
ou non, il devint patriarche. Le roi lui donna des diplômes pour
emprisonner, frapper et faire périr quiconque, à leur vue, ne se
soumettrait pas à lui. Quant <î Georges, il resta enchaîné dans la
prison. De là la division dans TÉglise et le peuple de Dieu.
Les opprobres et le mépris pesèrent sur les moines et lesévêques,
au point qu'aucun d'eux ne pouvait passer par les rues de la ville,
à cause des opprobres et du mépris. On les appelait même assas-
sins et [105J sanguinaires. On allajusqu'ànepas vouloir participer
au sacrifice offert par l'un d'eux. « Tu as fait mémoire du nom de
David en l'oflrant, » lui disait-on.
Voilà la mauvaise semence et la zizanie que le mauvais a semées
par le moyen de ses disciples.
Or, le vénérable David s'en alla avec les évèques ses partisans. Il
vint à Mossoul, puis à Tagrit. Au lieu de lui fîiire une réception
patriarcale, on vint au-devant de lui avec des injures et des oppro-
bres. On l'appelait même assassin et sanguinaire. Mais lui ne se
fâchait contre personne; il ne se plaignait pas, mais offrait tout à
Dieu en le prenant à témoin qu'ils le calomniaient en ces choses.
(( Si, disait-il, j'ai trempé dans l'affaire de Georges, que je reçoive
un châtiment exemplaire! » Bien qu'il fit dans les églises des
déclarations accompagnées de beaucoup de serments et d'anathèmes,
personne ne le crut, car, disait-on, les autres n'ont agi que sur son
conseil. Ainsi il ne fut reçu par personne à cause du vénérable
Georges. Lui, de son côté, ne se vengea sur personne de cette
injure; il ne contraignit personne aie nommer [dans l'office], mais
il dit: « Que celui qui veut me nommer me nomme; quant à celui
qui ne veut pas me nommer, je n'ai rien à voir avec lui.<J
Par là, il monfra qu'on le calomniait frauduleusement, puisque,
ayant entre les mains un édit puissant, il ne fît souffrir personne,
même lorsqu'il recevaiten face les injures et les opprobres.
On en était venu à ce point que parfois, s'il envoyait dans
une ville un évéque de son parti, les habitants tombaient dessus;
s'il arrivait que celui-ci offrît le sacrifice, ils ne recevaient pas la
communion de sa main, mais ils le méprisaient, lui et son sacrifice;
s'il arrivait qu'il se trouvât un homme intelligent et craignant
Dieu qui les avertît et leur dit: « Le châtiment de Dieu viendra sur
vous à cause de cette manière de faire, )) ils le traitaient encore plus
mal [106] que Tévêque. Ils allaient d'église en église en disant:
(( Nousnerecevons pas la communion des mains d'un tel, parce qu'il
nomme David. »
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 89
L'habit monastique ou épiscopal était surtout devenu mépri-
sable à leurs yeux; et s*il arrivait qu'ils trouvassent un moine qui
n*avait jamais vu David ni Georges, ils le tournaient en ridicule
jusqu'à ce qy'il les eut anathématisés et maudits tous les deux.
QuelqiVes-uns finirent par ne plus nommer ni Tun ni l'autre.
Cette division dura, et fit des ravages dans l'Église, jusqu'à la
mort du vénérable David.
Voilà quels fruits mauvais produisirent ces mauvais arbres. —
Attends et écoute quel fléau vint sur nous à la suite de ces choses.
Sachez, mes frères, que toutes les fois que TKglise est troublée,
les affaires publiques sont aussi troublées. 11 advint que celle-là
fui agitée la première et celles-ci ensuite.
L'an 1079(767-768), fut construite la forteresse d'Arsamosate ^
près du fleuve Arsanias. Or, comme les maçons et les ouvriers ve-
naient de commencer la construction qui s'élevait déjà à la hiiu-
tenr d'une taille d'homme, une armée romaine vint camper sur la
rive du fleuve opposée à la forteresse, mais elle ne passa point le
gué, parce que c'était le saint jour du dimanche, et qu'elle n'avait
point reçu Tordre de combattre. Tandis que les Romains étaient
campés là, offraient le sacrifice et mangeaient le pain, la popula-
tion entière de la forteresse, abandonnant tout, prit la fuite ; les
Romains passèrent donc, prirent tout ce qui leur convenait et brû-
lèrent le reste. Ils rasèrent la construction, s'emparèrent de tout ce
qu'ils trouvèrent et retournèrent dans leur pays. Les Arabes se
réunirent de nouveau avec des architectes et des ouvriers, et recons-
truisirent cette forteresse.
'Abbas envoya des lettres dans toutes les villes pour ordonner
aux Arabes de la Mésopotamie de descendre tous, grands et petits,
à Harran.
Ils se réunirent donc et descendirent, en abandonnant leurs
récoltes sans les moissonner, car ils étaient pressés de gagner des
zoaz. f 107] Tout le peuple afflua etdescendit, grandset petits, mais
1. Ce nom signifie ville d'Arsame. Elle fut fondée, selon la tradition, au
troisième siècle avant notre ère, par un roi de l'Arménie occidentale nommé
Arsame. Les Arméniens du moyen âge rappelaient Asmousatt elles Grecs
du Bas-Empire Asmosat. Elle était située sur la rive gauche du Mourad-
tchaï. Saint-Martin, Hist. du Bas-Empire, t. XII, p. 266, n. 4. — Cf.
CELLAnius, Notitia or bis antiqui, t II, p. 390.
90 CHRONIQUE
ils ne recueillirent que de la perte, car il est difficile à un méchant
de devenir bon.
Ils attendirent longtemps, jusqu'à ce que leur récolte fût perdue
et détruite; il assigna environ six cents hommes d'en^e eux aux
forteresses et renvoya le reste. Ils ne remportèrent chez eux que
des pertes.
Cette année, mourut Denys, évéque de I.îarran, auquel suc-
céda un autre Denys, du monastère de Zouqenin.
Cette année aussi, mourut Etienne de Haboura, qui eut pour
successeur ^
L'an 1080 (768-769), rêvéque Zacharie décéda à Édesse, et
1 cvùque Jané' à Téla.— - A la place de Zacharie on mit, à Edesse,
Êlic, du monastère de Qartamin, homme sans cœur et criminel,
qui ne pensait aucunement à Dieu. 11 fut ordonné non parce qu'il
était digne de l'épiscopat, mais parce que les Édesséniens étaient
dignes de lui. Cependant il ne fut pas accepté, et on ne consentit
pas à son élection; mais la chose traîna en longueur pour des
raisons graves qu'il n'est pas nécessaire d'exposer, et Edesse resta
sans évêque. — A Téla, Jané eut pour successeur Sabinus.
A cette époque florissaient Sergouna de Mardin, le patriarche
David, Mar Abad'Amida, Constantin de Samosate et Paul de
Tagrit.
Il y avait cette année-là une grande abondance de toutes choses.
Le froment se vendait trente qephizé, le vin quarante spâdé^
l'huile huit litre pour un zouz.
La région abondait en vignes et en champs cultivés. Le bétail y
était [nombreux] comme le sable.
Zaïd vint sévir conti-e les usuriers*. Ceux-ci lui donnèrent un zouz
par dinar; il prit ce tribut et s'en aMi sans avoir molesté personne
autre [108].
Encore cette année-là, des pierres tombèrent du ciel, des pierres
noires que beaucoup ont vues et touchées et qui sont même restées
jusqu'aujourd'hui. Comment étaient-elles montées dans les nues?
D'où venaient-elles? Dieu seul peut le savoir. Dans la région
où elles tombèrent il n'y a absolument aucune pierre noire;
1. La place du nom est en blanc dans le manuscrit.
2. Nous adopton«i la lecturo d'Assemani. Voir la préface du texte syriaque.
3. Le mot se trouve avec un olaph prosthétique dans Josué le Styliie,
éd. Wright, chap. xciii. Cf. Bar Bahloul, col 233, pénult. ; 234, 4. I^ lecture
semble être cspddd ou .y)ddâ,
4. AssKMAM [Bihl. or,, t. II, p. 114) a pris le mot comme uu nom
propre (Zaïdus ab Sryt/ns nummum capitatim exegit).
DE DENYS DE TELL-MAHflÉ 91
mais sois sur» lecteur, que le Seigneur fait tout ce qu*il veut au ciel
et sur la terre.
L'an 1081 (769-770), il y eut pour gouverneur à Mossoul un
homme méchant et cruel du nom do Mousa Ibn Mouç*ab. C'est
de lui que le prophète a prophétisé quand il dir : « Par lui je rava-
gerai la terre dans sa plénitude, je dévîistcrai la terre habitée
comme un désert. » Cet homme n'aurait pu trouver son semblable
ni parmi les rois païens, ni parmi les mages, ni parmi les Mani-
chéens. Il jeta la terre dans une tribulation telle que depuis que le
monde est créé jusqu'à ce jour elle n'avait pas vu de tribulation
semblable à celle qu'il lui fit voir.
Si quelqu'un veut l'appeler Antéchrist, et ses ministres messagers
du fils de perdition, il ne le calomniera pas, mais l'appellera de
son vrai nom.
« Quand le roi est inique, tous ses ministres sont iniques*. »
Comme nous l'avons dit plus haut, le respectable habit monas-
tique fut méprisé, lesévèques et les moines furent accablés d'op-
probres. L'audace se portait jusque sur le saint sacrifice. Aussi les
moines tremblaient-ils de sortir dans les rues, à cause des insultes,
surtout de la part du peuple de Tagrit, d'Arsidonie et de Mossoul.
C'est pourquoi ce fléau frappa [les habitants de ces villes] les
premiers. Il s'avança contre eux et les fit passer dans des contrées
lointaines.
Le roi ne trouvait pas un homme selon son cœur en dehors de
celui-ci. Il est écrit^ : « J'ai trouvé dans lé fils d'ïsaï un homme
selon mon coeur. » 'Abdallah Ibn Mohammed trouva dans Mousa
un homme selon son C(eur, qui accomplissait tous les jours l'ini-
quité devant lui.
Quand Mousa devint gouverneur de Mossoul, il rugit [109]
comme un lion sur sa proie en disant: « Maintenant je poursuivrai
mes ennemis et je les atteindrai ; je ne retournerai pas avant de les
avoir achevés, de les avoir frappés de telle sorte qu'ils ne puissent se
relever. Ils tomberont sous mes pieds; ils crieront et personne ne
viendra les délivrer; ils appelleront le Seigneur et il ne leur répon-
dra point. Je les broierai comme la poussière à la face du vent, je
les foulerai aux pieds comme la boue des places publiques*. » Il
persécuta, en effet, la région, fit périr les hommes qui se trouvaient
1. Cf. Is., xiv. 17.
2. Cf. Pror,, xxix, 12.
3. Cfr. 1 Sam., xvi.
4. P». xviii, 38, 39,42.4.^.
92 CHRONIQUE
dans l'univers; il les frappa et ils ne purent tenir devant lui; ils
tombèrent sous ses pieds et il les foula comme le limon des places
publiques des villes; il les réduisit à Tétat delà poussière dans
un tourbillon. Us s'en allaient de lieu en lieu implorant le secours
du Seigneur, qui ne les arracha pas aux mains de cet homme,
qui ne les délivra pas de leurs angoisses. Leurs yeux se fermaient
en attendant le libérateur.
Mousa demanda au roi, sous prétexte de pacifier la contrée, de
lui donner la permission d'envoyer rechercher de tous côtés le peuple
qui s'était enfui de Mossoul.
Il écrivit dans toute la région que personne n'osât s'opposer à lui
ou à ses lieutenants. Il envoya un homme pour chaque groupe de
trois villes de la Mésopotamie, car il avait sous ses ordres un
peuple nombreux.
A Amida, Arzoun et Maipherkat, vint un homme aussi méchant
que celui qui l'avait envoyé, du nom de Adam Ibn Yézid, homme
avare qui ne pensait point à Dieu. Le peuple mossulien, qui habi-
tait dans la terre de Mésopotamie, était extrêmement riche
à cette époque, car il profitait de tout le travail des habitants de la
contrée qu'il dévorait par des rachats injustes et des usures. Tandis
que le Seigneur a dit^ : « Tu ne prendras point d'intérêt à ton
frère; tu ne donneras point ton argent à usure, » eux faisaient tout
le contraire : ils prêtaient à usure, donnaient leur argent pour des
rachats* et à des taux [exagérés]; ils devinrent maîtres d'esclaves
et de servantes; ils possédaient les biens mobiliers, les vignes et les
terres: encore un peu, et ils allaient posséder toute la terre [IIOJ qui
parle la langue des fils d'Aram, et toute la Mésopotamie était sur le
point d'appartenir aux habitants de Narsanbad'..
Ils siégeaient dans les places publiques comme des dictateurs et
les maîtres du pays ; ils se considéraient comme les chefs des
églises et ils les administraient eux-mêmes.» Ils ne se sont pas sou-
venus qu'ils étaient des nouveaux venus, des étrangers et des
pèlerins dans ce pays*. » S'ils ont ruiné leur propre pays, comment
auraient-ils pu faire prospérer celui de leurs voisins?
1. Peut., XXIII, 19; Léc, xxv, 37.
2. C'est-à-dire, d'après le contexte, moyennant un contrat aux termes
duquel ou devait les rembourser en nature, avec des denrées qu'on leur
cédait à un prix audessous du cours.
3. Ce nom se reucontre trois fois dans la Chronique ecclésiastique de Bar
Hébréus (II, 177). Voir la note des éditeurs. — On peut aussi lire Narsibadié^
au lieu de Na/sanbadiâ.
4. Cf. Hebr., XI, 13.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 93
La parole prophétique a été accomplie en eux^ : « Ne sois pas
jaloux de ceux qui font mal, ne sois point envieux de ceux qui
commettent l'iniquité; car, comme le foin, ils se dessécheront rapi-
dement, comme l'herbe verte ils se faneront : le matin elle germe
et pousse, et le soir elle est fanée et desséchée. » En vérité, ils de-
vinrent orgueilleux et hautains outre mesure. « Mais le Seigneur
renverse la maison des orgueilleux *; » ils ont été humiliés, ils
ont été arrachés, ils ont péri comme une ileur sous le soleil.
Quand celui dont nous avons parlé plus haut vint pour entrer
dans ces villes et les occuper, tous s'enfuirent devant lui. Tous étant
des marchands ou des grainetiers ne possédant pas grand'chose,
ils cachèrent leurs effets, emportèrent leurs enfants sur leurs
épaules et prirent la fuite. Il y avait de quoi pleurer sur eux. Ils
erraient à travers les montagnes, dénudés, affamés, tourmentés
comme un fétu de paille pendant la tempête.
D'autres étaient entrés dans les chambres les pi us reculées et res-
taient enfermés, comme des morts, dans des pièces secrètes et
obscures ; ils eurent des ulcères et perdirent l'aspect humain, ils
avaient l'apparence des morts qui sont dans les tombeaux. C'était
l'été : ce qui aggrava leurs souffrances. Ceux qui avaient fui mou-
rurent de faim avec leurs enfants dans les montagnes et dans les
cavernes, tandis qu'ils erraient d'une montagne à Tautre. Ceux
qui étaient cachés dans les maisons périrent par la fièvre, la
frayeur, le chagrin, la chaleur; et ceux chez lesquels ils étaient ca-
chés craignaient encore plus qu'eux, car, partout où l'on en trouvait
un, [111] on accablait le receleur de cruelles afflictions, ainsi
que la maison où il était trouvé. Un héraut annonça aussi que :
« Quiconque cache un habitant de Mossoul payera telle amende, et
tout ce qu'il possède sera vendu. »
Dès lors on eut peur, et chacun renvoya celui qu'il avait chez
soi. On proclama encore : « Celui qui prendra un homme de
Mossoul recevra pour sa récompense quarante zouz. » Quand le
peuple cruel et sans Dieu des tondus, des misérables Arabes,
entendit cela, ce fut pour eux l'occasion d'un lucre. Ils épiaient
l'endroit où quelqu'un d'eux était caché, et s'il venait à sortir,
même pendant la nuit, ils s'en emparaient sans pitié et le sollici-
taient en disant : (( Donne-nous, ou nous t'emmènerons et nous
recevrons la récompense de quarante zouz. » Kt lx)n gré, mal gré,
ils lui extorquaient [quelque chose] et le renvoyaient ensuite; et il
1. Ps. XXXVII, 1. 2.
2. Proc, XV, 25.
94 CHRONIQUE
arrivait qu'il tombait après cela de nouveau entre les mains
d'autres plus méchants que les premiers.
Comme c^était un homme rusé et astucieux, il n'ignorait pas plus
Fendroit où quelqu'un d'entre eux avait caché quelque chose que
si la chose elle-même lui eût crié: « Je suis ici. j'appartiens à ud
tel. )) Il trouvait tout, et tout se découvrait à lui, comme il est écrit
du fils de perdition, aussi promptement que si lui-même eût caché
ou déposé ces objets.
Quant à ceux qui avaient pris des femmes syriennes, avaient
engendré des enfants, étaient mêlés avec les Syriens et n'étaient pas
connus des Araméens, lui les découvrait facilement. Il saisissait
les cheiks du vilLagc dans lequel ils habitaient, et faisait pleuvoir
sur leur corps de cruoUos bastonnades, jusqu'à ce qu'ils eussent
fourni des cautions ot les lui eussent livrés.
Il s'empara ainsi d*eux tous et les obligea à répondre l'un pour
Tautre; il vendit aussi tout ce qu'ils possédaient et s'en attribua le
prix; il les pressura tous, comme fait le teinturier, puis il les
emmena et les reconduisit à leur pays. [112] Là, il les enferma. La
famine sévit sur eux avec diverses maladies et des épidémies, de
sorte qu'un petit nombre seulement d'entre eux survécut. Les
riches et les grands qui se trouvaient parmi eux vendirent ce
qu'ils possédaient, lui en livrèrent le prix et demeurèrent dépouillés
de tout; il ne resta rien à aucun d'entre eux.
Ce scélérat ayant promis par serment de ne prendre à
aucun d'eux un zouz ou une obole, il exigeait d'eux des dinars
d'or. Il y en avait parmi eux qui, même en vendant tout ce
qu'ils possédaient, pouvaient à peine former la somme qu'il
exigeait d'eux.
Du signe qui apparut dans les deux en /orme de balai.
L'an 1080 (708 709), au mois de yar [mai], un signe apparut
en forme de balai au \ord-Hlst. Lorsqu'il apparaissait dans ce coin
[du ciel], il se levait obscur comme s'il avait balayé la poussière
d'une maison. Au matin, on le voyait qui inclinait sa chevelure
vers la terre.
Il marchait peu à peu en avant, jusqu'à ce qu'il arrivât dans
l'axe de la roue qui est dans le ciel, dans laquelle il fut absorbé
et disparut. Sa forme étail la même que celle tracée plus haut*.
1. Voir ci-dessus, page 03; page 73 du texte.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 95
Ce signe éuit parfaitement et convenablement appelé balai :
car, de même qu'on fait entrer la pelle et le balai dans la maison
pour la nettoyer et la l)alayer, de même il balaya le monde et fît
périr tout ce qu'il y avait dedans.
D'abord, en cette année-là, périrent tous les animaux domes-
tiques, surtout le petit bétail.
Une neige abondante et épaisse couvrit la terre et y resta si
longtemps que les bêtes furent consumées parla faim. 11 y eut de
nombreux [113] accidents, et il arriva çà et là que la neige en tom-
bant surprit un troupeau avec ses bergers, et que le troupeau périt
avec ses pasteurs.
Ensuite le vent du sud et de Test, accompagné de neige, souffla
avec violence pendant trois jours et trois nuits et fît périr beaucoup
de personnes et d'animaux domestiques, surtout le petit bétail.
Un grand nombre d'hommes qu'il surprit en route tombèrent
morts, eux et leurs ânes.
Du peuple qui monta de la région inférieure, en Van 1078
(766-767), et s'appelait Géant dans la langue priniitice.
A cette époque, le roi envoya de la région de Perse un peuple
qui monta s'établir sur la frontière des Romains. C'étaient des
hommes sans vêtements et sans chaussures, ainsi que leurs femmes
et leurs enfants, car ils ne savaient rien faire. Ils n'apprenaient
rien à leurs enfants ; leurs femmes mêmes ne savaient pas tra-
vaillerjla laine. Tout leur art consistait à se cacher jour et nuit sur
les chemins pour tuer et dépouiller, et pour couper les routes.
Comme ils habitaient dans des montagnes inaccessibles, per-
sonne ne pouvait les dompter. Ils poussèrent l'audace jusqu'à
s'élever contre le roi et à couper la route au trésor du prince des
croyants.
Parce qu'ils avaient fait cela, et aussi parce que toute la contrée
était soulevée par eux, le roi envoya contre eux une forte armée.
Il les dévasta, les pilla, les enchaîna; il les rassembla tous, voulant
les faire périr par le glaive. Déjà il avait fait crucifier leurs chefs,
et se disposait à mettre son projet à exécution, lorsque des hommes
craignant Dieu lui conseillèrent de les envoyer [114] aux frontières
contre les ennemis, afin qu'ils demeurassent là ou qu'ils fussent
tués par les Romains. Il mit promptement à exécution le conseil
J
]
96 CHRONIQUE
qu'il avait reçu, les envoya et les fit monter pour habiter dans la
région agitée, en face de Qamah.
Ils étaient environ trois cent mille. Mais ils s'enfuirent et se
répandirent sur toute la région; il n'en resta là qu'un petit nombre,
et, comme le pays était froid et qu'ils étaient nus, la plupart mou-
rurent au premier hiver qui les saisit. Mais ceux qui restèrent ne
cessfèrent pas leurs premiers méfaits. •
De la reatauration de la grande église d^Amida.
A cette époque*, les habitants d'Amida firent une considérable et
merveilleuse restauration à leur grande église, qui avait été bâtie
par l'empereur fidèle et craignant Dieu, Héraclius*. Depuis sa
première construction, cette église n'avait pas été restaurée. Comme
elle était détériorée et sur le point de s'écrouler, ils s'occupèrent de
sa restauration. L'abbé Mar Aba, évêque de la ville, l'honorable
Mar Georges, visiteur, et Thomas l'archidiacre en prirent grand
soin et y firent de grandes dépenses; ils changèrent tout ce qui
était pourri à l'intérieur, le refirent à neuf, et rendirent l'église
aussi brillante qu'au moment de sa première construction.
De Vordre donné par le roi de recenser les biens des églises
et des monastères.
Satan, qui en tout temps déteste ce qui est bien, ne cessa pas
non plus alors d'exciter des divisions et des troubles dans les églises
et les monastères. — « L'homme prendra parti [115J contre son
père, la fille contre sa mère, la bru contre sa belle-mère ; les ennemis
de l'homme, ce sont ses familiers*. »
A cette époque parut un édit du roi ordonnant de saisir les supé-
rieurs des monastères et des églises, et de recenser les biens de
leurs monastères, de leurs églises et des temples.
Voici la cause de cet édit :
SaUm, qui s'était choisi un disciple dans le saint collège des
1. AssEMANi (Rilil. or., II, 114) rapporte ce fait et les suivants à l'année
1081 (770).
2. Cf. ci-dessus, p. 5,
3. MiCHKL, VII, 6
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 97
Apôtres, Judas Iscariote, se choisit aussi maintenant un homme du
saint monastère de Mar Mattaï\ dans la région de Mossoul, qui
s'appelait Zo^ara.
A cause d'une querelle qu'il avait eue avec le supérieur de ce
monastère, il imita Judas, son maître, qui livra Notre-Seigneur à
la mort. Il ne resta pas au-dessous de ce traître. Satan lui inspira
non seulement de faire comme lui, mais de le dépasser; d'occa-
sionner non pas un, mais plusieurs meurtres; de perdre non
seulement un, mais plusieurs lieux ; il ne voulut pas démolir
seulement un, mais plusieurs couvents.
Celui-ci, séparé comme un loup d'avec les brebis, descendit
auprès de Djaffar', fils du roi, et lui dit : « Tout l'or de la famille
de Hiâam et de la famille de Marwan se trouve dans tel monas-
tère. )) Et il ne laissa rien de ce monastère sans le lui faire con-
naître.
DjafiEar envoya au monastère des serviteurs cruels qui prirent
out ce qu'il y avait dedans, et même tous les ornements sacrés,
qui enchaînèrent les moines dans de dures entraves et les condui-
sirent près de leur maître. DjaSar les tortura et les emprisonna
cruellement, en leur réclamant ce dont lui avait parlé ce second
Judas.
C'est à cette occasion que parut l'édit ordonnant de faire dans
toute la contrée le recensement des biens des monastères.
Tandis que tout le monde croyait qu'on allait les confisquer, il
arriva à Djafïar ce qui était arrivé à Balthazarqui, lui aussi, profana
les vases [116] des divins mystères et voulut s'en servir pour lui et
ses concubines \ Ici non plus, Dieu ne détourna pas les yeux de son
Eglise et de son peuple: il envoya à Djaffar l'esprit malin qui le
suffoquait. Dja^ar renvoya alors les moines qui reprirent leur bien
et retournèrent à leur monastère.
Ainsi se termina cette affaire. On ne fit plus ensuite d'autre
perquisition, car l'esprit malin fit périr Djaffar*.
1. Cf. lotroducttOD, p. XXVI.
2. Abou Djaffar Mansour, fils de Mohammed et frère du khalife Al-Saffah,
régnait lui-même à cette époque. Deuys semble avoir confondu les noms
de ces princes. 11 a mentionné plus haut (p. 62i, Tavènement de Mansour
sous le nom de ^Abdallah Ibn Mohammed. Voir les tables chronologiques
et généalc^ques de l'Introduction .
3. Dan., v.
4. Abou Djaftar mourut en 775.
98 CHRONI 4VK
De la prospérité du pays et des maux qu'elle causa.
Voulant faire connaître les angoisses qu'a supportées la con-
trée, nous ferons d'abord connaître sa prospérité, et nous montre-
rons d'où et jusqu'où est tombée celle qui était riche et glorieuse.
En ce temps, la contrée fut très prospère, surtout la Mésopotamie
et la région septentrionale. Elle était remarquable par les céréales,
les vignes, la multitude du bétail. Toute la terre fut remplie de
bandes de chevaux, de troupeaux de chèvres. Les hommes possé-
dèrent des provisions en abondance. De sorte que le vin s'accu-
mulait sur le vin et le blé sur le blé. « En vérité, Israël a été
engraissé et il a regimbé. Ils n'ont pas dit: Béni soit le Seigneur
qui nous a enrichis % » mais ils se jetèrent sur les biens des monas-
tères et des églises en disant: (( De quoi l'Église a-t-elle besoin?
Nous en avons besoin, nous qui payons l'impôt et avons des
enfants. » Ils avaient en effet beaucoup d'enfants; ils s'enrichirent
considérablement et possédèrent tous des biens; ils devinrent alors
hautains, orgueilleux^ jaloux, adultères, fornicateurs, ivrognes,
voleurs, faux témoins, de sorte qu*ils allaient tomber dans l'abîme
de tous les vices, si [Dieu] ne « leur avait envoyé Tange vengeur
qui traça au milieu d'eux de cruels sillons* ».
Quand un homme avait un procès avec son voisin, et que le
juge exigeait de lui des témoins, [1 17] ilallait surla place publique,
et en rencontrant un voisin, il lui disait: « Un tel, veux-tu témoi-
gner en ma faveur?» Celui-ci répondait promptement et disait:
(( Je le jure sur la parole de Dieu. — De quoi s'agit-il?» Et il
faisait les serments avant de connaître l'affaire.
*
Que méritait un tel peuple, sinon ce qui arriva? — « Le châ-
timent écrasera si fort les hommes qu'ils y réfléchiront, et ils ne
méditeront pas sur de vaines paroles.» Et ceci : « Il n'y aura plus
de délai pour mes paroles*. » Les habitants d'un village entre eux,
ou [ceux d']un village avec [ceux d']un autre village, se faisaient
continuellement des procès au sujet des limites de leurs champs,
et les malheureux ne savaient pas que dans peu de temps le fléau
viendrait sur eux; qu'ils ne posséderaient plus alors ni vignes, ni
maisons, ni champs, mais que leurs propriétés seraient dévastées
sans personne qui les traverse ou les habite.
1. Deut.^ XXXII, 15.
2. Pa. Lxxviii, 48-49.
3. Cf. Kjrod., V, 9. — Ezecii., xii, 8.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 99
L'institution monastique même sortit en dehors de toute con-
venance. Les moines, au lieu d*[observer le conseil]: a Prends ta
croix et suis- moi \ » acquirent des chevaux, des troupeaux de
bœufs, des troupes de chèvres et de moutons; ils achetèrent des
champs, chacun personnellement en dehors de la propriété de la
communauté; ils sortirent dehors pour acquérir des vignes et des
maisons dans les villages; pour monter en selle comme des
payens, pour vivre selon leur bon plaisir, sans obéir au supérieur
qui leur avait été imposé par Dieu.
Ne pense pas, 6 sage, que c*est parce que j'aime à accuser les
hommes que je raconte ces choses; mais je veux montrer la bonté,
la miséricorde, la douceur, la longanimité de Dieu.
Considère et comprends après cela dans quel abîme nous sommes
descendus et quelles angoisses nous ont atteints.
Des esclaves qui se révoltèrent à ffarran^
ville de la Mésopotamie.
Acetteépoque, de nombreux esclaves s'entendirent secrètement, se
réunirent au |118] nombre d'environ cinq cents hommes :Mèdes*,
Sindhiens et Khazares, prirent les armes et envahirent au milieu
du jour la ville de Harran. Ils dirigèrent leurs efforts contre le
trésor royal et passèrent au fil de l'épée tout ce qu'ils rencontrèrent
devant eux. Ils voulaient envahir le trésor et prendre ce qu'il
contenait. *Abbas en apprenant cela fut effrayé; il rassembla une
armée considérable et vint à leur rencontre. Dans le combat
qu'ils engagèrent, il y eut beaucoup d'hommes tués des deux côtés,
mais les esclaves eurent enfin peur et prirent la fuite. Beaucoup
d'entre eux furent tués, d*autres furent faits prisonniers et le reste
s'enfuit. 'Abbas saisit aussi leurs maîtres ; il en frappa et fit périr
plusieurs.
De C expédition du roi dans la région septentrionale; de la
reconstruction de Callinice; de Porigine de tous les maux qui
vinrent sur la terre.
Puisque nous avons fait connaître la richesse et la fertilité de la
contrée et tous les bienfaits, nous parlerons aussi du peuple cruel,
et de Torigine de tous les maux.
1. Cf. Luc, IX, 23.
2. AssKMANi (Bibl. or.j II, 114) a lu : Maures.
100 CHRONIQUE
Il est écrit dans le prophète^ : « Voici Assur: il est la verge de
ma colère. Le bâton qui est dans ses mains, c'est celui de mes
coups. Je l'enverrai sur une nation trompeuse. Je lui donnerai des
ordres contre un peuple de vengeance, afin qu'il pille, butine, fasse
des captifs, et le foule au pied comme la boue des places publi-
ques. » Et encore * : « Parce qu'ils ont dit : Voici que les grands
sont ensemble, ils sont rois; à cause de cela le Seigneur ne mettra
pas sa joie dans leurs jeunes hommes. Il n'aura point pitié de leurs
orphelins, ni de leurs veuves. Car tous sont impies et méchants, et
toute bouche a parlé folie. Et il ne s'est trouvé personne, dit-il, qui
remuât [119] Taile, ouvrit la bouche et fitentendre le moindre cri
en leur présence'. Il est venu à Anath; à Makmas il a déposé ses
bagages; il a passé le passage de GabaS vers Beit Baitan; Rama a
été frappée de stupeur ; Gabaath de Saul a pris la fuite*. Il a levé
sa main sur les montagnes de Sion et sur les collines de Jérusa-
lem ^ » Le prophète a très bien dit : car il a vu d'un œil prophétique
ce maudit serpent qui rAdait.
Cette année-là, le prince quitta l'endroitoù il demeurait avec tous
ses grands et vint se cantonner dans la région septentrionale avec
des troupes innombrables. Il vint à Mossoul. Tous les habitants,
grands et petits, se réunirent et se plaignirent à lui des maux, des
déprédations, des tourments et du ravage que leur infligeait
Mousa Ibn MouQ^ab. Mais comme le roi se complaisait beaucoup
plus dans la dévastation que dans la paix, il les chassa de sa
présence, et fit même subir des châtiments sévères aux principaux
d*entre eux. Il se félicita et se réjouit d*avoir trouvé en Mousa un
homme selon son cœur : (( J'ai trouvé, dit-il, un homme selon mon
cœur, qui accomplira toutes mes volontés et fera tout ce que je
désire. Dorénavant, il marchera devant moi dans l'iniquité pen-
dant toute ma vie. »
Tandis que le prince s'apprêtait à entrer en Mésopotamie, 'Abbas,
son frère, émir de la Mésopotamie, apprit cela. Il savait que c'était
un homme plus ami de la dévastatioa que de la paix. Or, la région
mésopolamienne était riche en vignes, en céréales, et elle était très
peuplée au temps de ^Abbas, car, c'était un homme miséricordieux
et pacifique. Il envoya dire promplement en tous lieux: « Fuyez
et laissez les villages sans habitants en sa présence. » Mais
1. ISAIB, X, 5-6.
2. I8., X, 9; IX, 17.
3. Is., X, 14.
4. I8., X, 28.
5. Is., X, 32.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 101
les paysans ne comprirent point et ne saisirent point ce qu'on leur
disait; ils restèrent tranquilles.
Lorsque le prince entra [dans le pays], il vit une région fertile et
abondante, belle, pleinede biens, [120]car c'était au moisdeyar[mai]
et toutes les récoltes étaient encore sur la terre. Or, quand il vit et
considéra cette région fertile et très peuplée, il n'agit pas comme
il convenait à l'égard de son frère. En voyant le pays prospère
sous le gouvernement de ce dernier, au lieu de l'en remercier, il
rugit contre lui comme u^ lion qui veut saisir sa proie, et quand
celui-ci vint au-devant de lui pour le recevoir avec pompe comme
il convient à un roi, il le cbassade sa présence, le repoussa comme
un vil rejeton et ne lui permit pas même de se présenter devant lui.
«Où est, dit-il, ce désert de Mésopotamie dont tu m'as parlé?»
Il lui retira son gouvernement, lui prit tout ce qu'il avait et usa
envers lui de tous les mauvais traitements. Après avoir fait cela à
son frère, il vint à Nisibe, puis à Kepher-Touta \ et s'avança
jusqu'à Callinice'.
De la reconstruction de Callinice.
Cet homme avait une propension à suivre les magiciens et les
devins. Il écoutait et faisait tout ce qu'ils lui disaient. Il les
consulta donc sur les temps et les règnes. Ceux-ci ramassèrent des
paroles sottes et insipides qu'ils lui offrirent et lui donnèrent,
comme c'est d^ailleurs la coutume des démons d'induire en erreur
ceux qui les écoutent. Us lui dirent : « Il y aura un roi fort, qui
bâtira une ville à côté de Callinice ; il ira ensuite à Jérusalem et y
bâtira une mosquée. Il doit régner quarante ans. » — Ce misérable
dit : « C'est moi !» — Il fît venir des ouvriers de toute la Mésopota-
mie; il leur ordonna de faire des briques, et aux architectes de
bâtir le mur. [121J
De la fuite des Arméniens du territoire des Romains, et de la
défaite que les Arabes infligèrent aux Romains,
Tandis que le roi était à Callinice, les Arméniens sortirent du
territoire des Romains. Ils vinrent demander au gouverneur qui
1. Ville de la Mésopotamie, située près de Mardin.
2. Cf. Wbil, Gêsch. der Chaliphen, II, 57.
• • * «
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• • •
102 CHRONIQUE
était alors préposé aux forteresses de l'intérieur de venir au-
devant d'eux. Ils voulaient rentrer en Mésopotamie. Ils étaient de
ceux qui avaient pénétré avec Kouâan' . Ils prirent donc leurs familles
et s'en allèrent, et les Arabes de leur côté vinrent au-devant d'eux.
Le gouverneur de Qamah, en apprenant ces choses, organisa une
armée, se mit à leur poursuite, et les rejoignit avec leurs familles
tandis qu'ils campaient dans une plaine.
Or, les Arméniens sont fourbes dès l'origine et vivent toujours
de fourberie. Quelques-uns d'entre eux s'échappèrent et firent
savoir aux Arabes où ils étaient campés : car ils n'étaient pas très
éloignés.
Tandis que les Romains eux-mêmes campaient et dormaient
sans précaution, les Arabes les joignirent à la seconde veille de la
nuit et tombèrent sur eux à l'improviste. Ils les passèrent au fil de
l'épée et en prirent un grand nombre. Ils firent conduire à Calli-
nice, près du roi, ceux qui étaient captifs et les têtes de ceux qui
avaient été tués. Ils espéraient obtenir de celui-ci un présent en
même temps que de la renommée et de la gloire. Mais au lieu de
leur donner un présent, il les reçut au contraire très mal. On dit
même qu'il confisqua leurs biens.
Du recenseur que le roi envoya dans le pays.
Quand le roi vit la contrée bien peuplée, il voulut faire le ta^dil,
[122] non pas parce qu'il se réjouissait de voir la contrée fertile et
prospère, mais pour inscrire beaucoup d'hommes comme soumis à
la capitation, etpour accroître le tribut et les tribulations de ce
pays. Il fit venir des hommes méchants et astucieux qu'il établit
gouverneurs, et les envoya dans le pays inscrire tous les hommes
pour le tribut de capitation.
Du çauphi* et du décimateur qu'il enooya aussi dans le pays.
Le prince établit ensuite des hommes cruels pourleçauphi et la
dîme.
1. Cf. ci-dessus, p. 57.
2. AssKMANi a traduit ce mot par Sopbène : « praefectos in Sophenem
misit; » (Dibl. or., II, 114). Le contexte ne permet pas cette interprdtation.
iLitf I produit, reoenu, est un terme de commerce : produit net, c«
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 103
Le gouverneur préposé au çauphi était un mage, homme sans
Dieu et sans miséricorde. Il parcourut toutes les villes de la Méso-
potamie. Il recensa les places publiques et tous les lieux dans
lesquels on vendait quelque chose ainsi que les boutiques du
marché. Toule boutique de la place publique qui ne se trouvait pas
comprise dans le ta*dil, fut confisquée comme appartenant au
roi ; tout moulin pareillement.
Il mesurait au cordeau les places publiques d'une porte de la
ville à Tautre, de l'orient à l'occident et du nord au sud, et en
dehors de la place publique, il mesurait quarante coudées de côté
et d'autre et il occupait soit les maisons, soit les boutiques qui se
trouvaient dans ces quarante coudées et les recensait. Il inscrivait
au çauphi, comme appartenant au roi, tout endroit qui n'avait
point été inscrit dans le ta^dil, soit jardin, soit moulin, soit
champ cultivable.
Il recensa même le mur de la ville dans toute son étendue avec
ses tours, et il inscrivit également quarante coudées autour, tout le
long de la ville.
Ainsi fit-il dans toutes les villes de la Mésopotamie et de la région
occidentale, car il parcourut la Mésopotamie, l'Occident et même
l'Arménie I V«.
D'antres personnes reçurent ces lieux de lui à ferme^ et lui-
même descendit à Harran.
Il n'y avait plus que vol et rapine. Celui qui s'en allait était
pris; celui qui venait était pris de même, plumé et dépouillé de
tout ce qu*il avait avec lui; ils s'emparaient de quiconque avait
quelque chose, soit acheteur, soit vendeur, [123] et lui enlevaient
son bien. Ils sortaient aussi dans les champs et sur les routes et
saisissaient tous les voyageurs.
Du décimateur.
Le roi établit aussi un autre intendant de la dlme qu'il envoya
dévaster la contrée.
Celui-ci vint, entra dans les villes et pénétra dans les boutiques.
qa'on retire d'une chose vendue tous frais faits et toutes charges déduites.—
ii '|K C9 qui a été confisqué, eX delà : le domaine du prince. Dozv, Suppl.
aux Diet. arab., I, 838. — Il s'agissait, comme on le voit par la suite, d'un
droit de patente perçu sur les commerçants et caiculè sans doute d'après
leurs bénéfices.
104 CHRONIQUE
Il inscrivait ce qu'il trouvait dedans. S'il y en avait pour cent zouz
il en inscrivait deux cents, et il prenait une dlme de cinq zouz pour
cent, et quand il pouvait de dix. Ils occupaient aussi les routes et
Is dépouillaient quiconque venait, passait ou allait.
Les misérables qui étaient dans les villes sortaient et se répan-
daient la nuit sur les routes. Ils entraient et se dissimulaient dans
les vignes situées sur le passage de la grande route, et saisissaient
violemment les pauvres marchands qui passaient, de même que
ceux qui entraient pour chercher de la garance.
Ils leur disaient : (( Donne-nous tant, ou nous te conduirons à
l'émir. » Et ils leur extorquaient ainsi autant qu'ils voulaient. Ils
prenaient également les pauvres gens qui étaient venus pour cher-
cher de la garance ; ils leur enlevaient tout ce qu'ils avaient avec
eux, et quand ceux-ci les suppliaient de leur permettre d'arracher
[cette plante], ils leur disaient : (( Allez et arrachez moyennant un
zouz pendant trois jours ou quatre. » Chacun comptait avec eux
comme s'ils l'arrachaient dans son propre jardin. Encore avaient-
ils grand 'peine à sauver une partie de ce qu'ils avaient arraché, car
après avoir échappé à celui-ci, ils étaient saisis par un second, et
quand ils étaient délivrés de celui-ci, par un troisième.
Ceux qui avaient évité la dîme étaient pris par le çauphi, et ainsi
en tous lieux les hommes dépouillaient les pauvres. Les voleurs eux-
mêmes se faisaient passer pour les décimateurs [124] partout où
ils rencontraient de pauvres voyageurs, et ils les dépouillaient. Dès
lors ils n*eurent plus besoin de se cacher la nuit sur les routes,
mais ils accomplirent leurs volontés et leurs desseins en plein
jour.
Ils inscrivirent aussi le froment que les hommes possédaient, et
quand quelqu'un en avait cinquante gribè, ils en inscrivaient
mille I Ils inscrivaient ainsi selon leur bon plaisir; mais cette
année-là, rien ne fit défaut.
Dea aiigmatiseurs et des marques.
Il établit un autre gouverneur pour stigmatiser et marquer les
hommes au haut du cou, comme des esclaves. (( Et quiconque, dit
le prophète, n*a pas reçu le signe de cette bête sur son front \... »
Mais ici ce n'est plus seulement sur le front qu'ils le portaient,
mais sur les deux mains, sur la poitrine et même sur le dos.
1. Cf. Apoc, XX, 4.
DE DENYS DÉ TELL-MAHRÉ 105
Ce gouverneur vint donc, et plus que tous ceux qui l'avaient
précédé, il fit trembler la région, à son arrivée. Il avait ordre, en
effet, de marquer les habitants, sur les mains, d'un signe qui ne
s'effacerait point et ne quitterait point sa place, de toute la vie de
rhomme [qui l'avait reçu].
Quand il pénétra dans les villes, tous les hommes furent saisis
de frayeur et prirent la fuite devant lui. Les boutiques furent
fermées; il n'y eut plus ni achat ni vente dans les marchés; ni
allant ni venant dans les rues. Ceux qui voulaient entrer [dans la
villej s'arrêtèrent par crainte du mal; ceux qui en voulaient sortir,
s'arrêtèrent également parce qu'on ferma les portes de la ville et
qu'on ne permit plus à personne d^en sortir.
Quand il eut agi ainsi pendant une semaine, [voyant que] per-
sonne ne paraissait dans la rue, que personne ne venait du pays
dans la ville, les intendants de l'impôt de capitation envoyèrent
auprès de celui qui avait remplacé *Abbas dans la perception de
cet impôt, et lui firent dire : « Le peuple s'enfuit devant le mar-
queur, et si ce dernier ne part d'ici, il sera impossible de lever
l'impôt. » [125]
Celui-ci, en entendant ces choses, envoya un écrit au marqueur
qui descendit. Les hommes jouirent d'un peu de repos de ce côté,
car il périt en route.
De l'exil.
11 établit aussi un autre gouverneur pour faire reconduire chacun
[de ceux qui s'étaient enfuis] dans son pays, à la maison de son
père. Celui-ci, à son tour, établit d'autres gouverneurs qu'il
envoya dans les villes. 11 n'en envoya pas un pour chaque ville,
mais il envoyait le gouverneur d*une ville quelconque dans une
autre, de sorte que les gouverneurs de toutes les villes de la Méso-
potamie se trouvaient parfois réunis ensemble dans un même lieu,
à propos de l'exil.
Dès lors il n'y eut plus de salut d'aucune part; mais partout le
pillage, la méchanceté, l'iniquité, l'impiété, toutes les actions mau-
vaises, les calomnies, les injustices, les vengeances des hommes
les uns contre les autres : non seulement des étrangers, mais des
familiers. Le frère tendait des embûches à son frère; celui-ci
livrait celui-là.
Il établit un Persan à Marda pour y ramener les fugitifs et y
percevoir le tribut. Là, plus qu'en itout autre lieu, la population
106 CHRONIQUE
m
s'était enfuie, et la région entière était occupée par les Arabes, car
les Syriens avaient fui devant eux.
Cet homme s'appelait Kbalil Ibn Zâdân \ lifit subir beaucoup de
maux aux Arabes. On ne trouverait pas son pareil, ni avant, ni
après lui, pour son animosi té contre les Arabes. Il expédia quelques
émirs dans toutes les villes. Si on apprenait qu'un homme, ou son
père, ou son grand-père avait été à Marda, môme quarante ou
cinquante ans auparavant, on l'arrachait de sa maison, [1 26] de son
village, de son pays, et on le reconduisait dans cette ville. Avec cet
homme le présent n'était point accepté, la persuasion était sans
effet; bien peu échappaient. De la sorte, il rassembla dans cette
région une si grande multitude qu'il n'y avait pas un lieu, pas un
village, pas une maison qui ne fût remplie et ne regorgeât d'habi-
tants. Il fît passer les Arabes d'une région dans une autre et prit
tout ce qu'ils avaient. Il remplit leurs terres et leurs maisons de
Syriens, et fit semer leurs blés par ces derniers. Il s'empara de
ceux d'entre eux qui étaient riches et usa sans pitié à leur égard
de tourments et de supplices de tout genre. Il faisait venir l'un
d'entre eux, faisait passer le rasoir sur ses cheveux et sur sa barbe,
lui faisait une couronne de pâte, la lui mettait sur la tète et le
faisait exposer au soleil. Il lui jetait ensuite de l'huile sur la tète
de manière à ce qu'elle coulât peu à peu sur ses yeux, et ainsi sa
tête était saisie de vives douleurs. Puis il le serrait dans des entraves,
aux cuisses, aux doigts, aux bras, et il lui mettait sur les yeux des
noix de fer^ Il usait ainsi sans pitié à leur égard des tourments,
et il en fit périr de la sorte un grand nombre. Les autres s'enfuirent
et passèrent d'un lieu dans un autre.
A propos des autres maux qui eurent lieu dans toutes les villes,
nous appellerons ici le grand Joël, qui les a vus d'avance. Lui-
même vous les racontera* : « Écoutez ceci, vieillards, et prêtez
l'oreille, vous tous habitants de la terre. Quelque chose de
semblable est-il arrivé de votre temps ou du temps de vos pères?
Racontez-le à vos enfants, et vos enfants à leurs enfants, et leurs
enfants à une autre génération. La sauterelle ailée a mangé le reste
de la chenille, le bruchus a mangé le reste de la sauterelle ailée^ et
la nielle a mangé le reste du bruchus. » [127]
Le prophète a vu le temps présent, il a parlé des maux qui
devaient venir maintenant sur les hommes. Ses paroles reçurent
2. Cf. ci-dessous, p. 143.
3. JosL, I, 2-4.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 107
ainsi en réalité leur accomplissement. Quiconque avait échappé au
çauphi était saisi par le décimateur, quiconque avait échappé au
décimateur était pris par celui qui recherchait les fugitifs, qui-
conque échappait à 1 exil était saisi par les brigands.
Les paysans surtout étaient cruels à Tégard de ceux qu'ils
dépouillaient en toute occasion et de toute façon. Et comme les
gouverneurs chargés des fugitifs qui remplissaient toute la contrée,
craignaient de paraître devant Tautorité, eux-mêmes, ces gouver-
neurs iniques, saisissaient, dépouillaient tous ceux qu'ils voyaient,
et prenaient leur bien, ou encore ils les conduisaient et les livraient
au gouverneur [chargé] des fugitifs de leur région. De sorte que
personne n'échappa à Tiin des maux ; car chacun était pris par l'un
ou l'autre [de ces gouverneurs].
Ceux-ci ne se préoccupaient pas beaucoup du départ des exilés.
Mais, quand ils avaient dépouillé quelqu'un, [nu] comme les
doigts, ils s'éloignaient de lui quelque peu afin de lui permettre de
s'enfuir pour qu'il n'allât pas avec eux et ne les accusât pas d'avoir
volé son bien. Et s'ils le saisissaient de nouveau, ils se montraient
encore plus cruels à son égard que la première fois.
Cette calamité sévissait également dans toutes les régions de la
Mésopotamie.
Le prince défendit aussi que quelqu'un, soit Arabe, soit Syrien,
moissonnât.
Il défendit de moissonner ou de battre le blé avant son entrée
en Mésopotamie, parce qu'il voulait voir par lui-même toute la
récolte.Or, cette année-là, il y avait partout abondance de froment. .
Quand il fut arrivé et eut tout examiné, après avoir fait subir
toute sorte de maux à *Abbas, il établit d'autres gouverneurs pour
percevoir le zaqàt, c'efii-k-direle sadaqat al-mâl \ et les envoya
dans ces pays.
Dès que [ces gouverneurs] eurent reçu cet ordre, ils l'appli-
quèrent rigoureusement, sans pitié. Ils entraient dans les champs
des Arabes, et tout ce qu'ils y trouvaient, soit aux Arabes, soit aux
Syriens, ils l'inscrivaient. [128] Ils n'inscrivaient pas les pommes,
les meules, les gerbes de froment et d'orge selon la réalité, mais, s'il
y en avait cent s^ibê, ils en inscrivaient trois cents. Ainsi, rien de
ce qui était aux Syriens ou aux Arabes dans les propriétés de ces
derniers, ne fut omis dans le recensement : ni jardin, ni champ
ensemencé, ni bête de somme. Ils allaient ensuite à la ville et
1« fjW ÎÏJUd îlS^^I "" Aumône légale ; dime, impôt sur le reoenu»
108 CHRONIQUE
exigeaient le tribut de ces choses. Beaucoup d'entre les Arabes,
après avoir vendu leur froment, leurs champs, leur âne, s'ils en
possédaient un, n'avaient pas encore trouvé la somme qu'on leur
demandait, car on avait inscrit à un homme tant de champs pro-
duisant une récolte de tant de gribè; on lui avait inscrit des champs
bien remplis, alors qu'il n'avait pas récolté plus de cinq gribè.
Les Arabes subissaient ainsi des épreuves plus cruelles que
celles des Svriens.
Quant à ceux-ci, l'émir [préposé àj la capitation leur ordonna
de se réunir. Il prit un répondant pour chaque village et les laissa
libres d'aller battre leur blé.
Des émirs y des scribes, des banquiers, des chefs de district,
des préfets.
Avant de passer au delà de Nisibe, le prince ordonna que tout
émir, notaire, changeur, chef de district ou préfet, qui avait été en
fonctions du temps de ^Abbas, descendit près de lui avec les notables
du pays. Y aurait- il eu dans un village vingt préfets, tous auraient
dû descendre avec leurs livres [de comptes]. Les gouverneurs qui
avaient été accusés descendirent ainsi près de lui à Nisibe. Il les
enchaîna et les emmena avec lui. Les notaires et les changeurs s'en
allèrent aussi avec lui. Ils restituèrent et furent réduits à manger
leur propre chair sans pouvoir obtenir leur délivrance. [129]
Ils restèrent longtemps en cet endroit, mais ils ne furent point
inquiétés, car ils remontèrent sans sa permission. Ils ne furent pas
non plus inquiétés après son départ.
Après avoir fait ces choses en Mésopotamie, il s'attaqua à
Callinice.
Isaie dit à son sujet* : <( Il a déposé ses bagages à Makmas ; il a
passé Beit Baîtan; Rama a été saisie de frayeur, et Gabaath de
Saûl a pris la fuite. »
Celui-ci s'attaqua à Callinice et passa 'dans la région occidentale
pour aller à Jérusalem. Il l'agita, la renversa, la terrifia, la dévasta
encore plus que la Mésopotamie. Il fit selon ce que Daniel prophé-
tisa de l'Antéchrist lui-même. Il convertit le temple en mosquée,
car le peu qui restait de celui de Salomon devint une mosquée pour
les Arabes. Il prit une femme Il répara les raines de Jéru-
salem. Il s'attaqua aux hommes, prit leur bien et leur bétail, surtout
1. l8., X, 28.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 109
les baffles. Il n'en laissa volontairement aucun à qui que ce fût.
Quand il eut causé là toute sorte de maux comme dans la Mésopo-
tamie, il revint à l'entrée de l'hiver en Mésopotamie pour y séjourner
et continuer sa destruction.
Avant son retour d'Occident, il établit pour percevoir la capita-
lion un Persan nommé Abou *Oun\ et d'autres gouverneurs pour
percevoir d'autres impôts. De là l'origine des maux. De même que
des bétes féroces qui s'attaquent à un cadavre chacune par un côté,
ainsi, cinq gouverneurs, quelquefois six ou sept, et même jusqu'à
dix, entraient le même jour dans un village, etchacun d'eux tiraillait
de son côté les habitants de ce village qui ne parvenaient à s*échapper
et n'évitaient la mort qu'au moyen de dépenses considérables. Il
arrivait parfois que, [130] quand ces premiers étaient partis,
d'autres venaient en cet endroit, et alors il n'y avait plus moyen
d'éviter leurs exactions.
Et que dirai-je maintenant sinon la parole du prophète* : (( Je
serai pour eux comme un lion, comme un ours, comme un léopard
sur la route de l'Assyrie. Je les dévorerai comme un lion. La bête
sauvage les mettra en pièces. »
Si quelqu'un appelle ceux-ci bêtes sauvages, il ne les calomnie
pas, car ils étaient plus méchants que les oiseaux de proie et que
les bêtes sauvages.
Le même prophète dit encore *:« Le vent du Seigneur viendra de
l'Orient, il montera du désert, il desséchera ses fontaines et tarira
ses sources. Lui-même pillera le trésor de tous ses objets précieux.
Périsse Samario qui a exaspéré son Dieu! » — Un autre pro-
phète dit* : « Réveillez- vous, hommes ivres; pleurez, hurlez, vous
tous buveurs de vin, car le vin est banni de votre bouche, parce
qu'une nation forte et innombrable est montée sur mon pays. Ses
dents sont comme les dents d'un lion et ses molaires comme celles
d'un lionceau. )) Tu vois comment les prophètes appellent ce peuple
méchant : [ils le nomment] bête féroce. « Elle a fait de ma vigne un
désert; et mon figuier, elle l'a renversé et étendu par terre: ses
rameaux sont devenus blancs.' »
En vérité le vin a passé loin de ceux qui travaillent la vigne.
Aussi commencèrent-ils à fuir de village en village, mais ils
n'étaient pas sauvés de la sorte. Dès qu'ils avaient échappé à l'un.
1. û/^ y\
2. Os., xm, 8.
3. 08.9 ziii, 15 ; XIV, 1.
4. Jeu., I, 5-6.
5. JOBL, I, 7.
110 CHRONIQUE
un autre les saisissait et les dépouillait. S'ils échappaient à ces
gouverneurs scélérats, les chefs du village dans lequel ils se réfu-
giaient les livraient, et remplissaient eux-mêmes l'office des voleurs
et des brigands. Celui qui s*y distinguait et qui était désigné comme
chef et comme guide, celui-là était le chef d'une caverne de brigands.
Lorsque des malheureux allaient pour se cacher dans ce village,
il leur creusait lui-même une fosse de toute manière. Tous les maux
découlaient de lui, [131] et sur les proches etsur les éloignés, et
sur ceux de la maison et sur ceux du dehors.
Tous les chefs de village se conduisaient ainsi. — « Tes grands
sont infidèles et compagnons de voleurs. Tous aiment les présents et
poursuivent les récompenses. Us ne rendent pas justice aux orphe-
lins, ils n'ont point pitié des veuves\ » Le jugement de Dieu n'était
pas placé devant leurs yeux.
Et si les prophètes attestent les choses que nous avons vues et
touchées de nos mains, qui parmi ceux qui aiment Dieu nous
blâmera de les avoir consignées dans un livre, afin qu'elles soient
connues des générations qui viendront après nous? — Il est écrit*:
« Interroge ton père et il t'instruira,» et* : « Apprenez-le à vos fils,
et les fils de ceux-ci à une autre génération. »
De ce que les hommes ne mirent à violer les sépultures.
Les maux se multiplièrent, l'un poussant l'autre, l'aile contre
l'aile, la main dans la main. Un cri lamentable s'élevait de toute
part. Personne d'entre les vivants ne pensait pouvoir échappera
cette grande calamité qui dépouilla ceux qui jouissaient de la vie
corporelle aussi bien que ceux qui étaient réduits en poussière.
Ceux qui avaient l'amour du vol et l'intention de piller les tom-
beaux purent maintenant accomplir leur désir.
Or, comme ce vase de péché, ce fils de perdition, cet avocat du
diable, celui qui s'élève contre tout ce qui est divin et respectable,
celui qui tire son origine et sa race de la tribu maudite appartenant
au peuple qui voulut lapider Moïse, Mousa Ibn Mouç*ab n'était
pas encore parti, nous éprouvâmes à cette époque un accroissement
de maux, parce que nous avons péché.
Jusqu'alors, à l'exception des pauvres de la région inférieure et
1. Is., I, 23-24.
2. Deut,, XXXII» 7.
3. Joël, i, 3.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 111
de la foule des étrangers qui se trouvaient dans ce pays, les hommes
n'avaient pas beaucoup souffert. Il les opprima, les ruina, [132]
les fit périr en cette année. Ils prirent leurs enfants à leur cou
et se mirent à errer de village en village.
En cette année, nous reçûmes de contrées éloignées la nouvelle
lamentable que dans certains lieux les hommes avaient violé les
tombeaux et en avaient retiré de Targent et de l'or. Il ne nous sem-
blait pas croyable, à cause de Ténormité de la chose, que les
hommes pussent faire cela à Tégard des morts, et bien que qui-
conque venait rapportât le fait, disant qu'ils en retiraient de
l'or, nous ne voulions pas croire que cela fût vrai. Mais la choçe
ne tarda pas à être manifeste à nos yeux, dans nos contrées, sur
nos pères et nos frères qui étaient morts auparavant. Nous rappor-
terons ici la chose en son temps, telle qu'elle fut.
De Parc de Noire- Seigneur qui apparut retourné^ et de la verge
blanche qui apparut au milieu du ciel, dirigée vers la courbure
de Varc, à la manière d'une flèche.
En cette année encore, au mois de yar [mai], apparut dans le
ciel cet arc qui se voit constamment dans les nues. Mais sa cour-
bure était tournée en bas et ses extrémités vers le haut, et il ressem-
blait à un arc tendu pour le combat par la main d'un homme,
manifestant la menace et la colère contre les habitants de la terre.
II apparut un saint jour de dimanche, vers les trois heures du
jour, comme l'ont affirmé des vieillards honorables qui l'ont vu les
premiers. Si quelqu'un ne veut pas croire cela, qu'il cherche dans
les observations antérieures, et il trouvera la môme chose. Elles
attestent, en effet, les choses qui eurent lieu.
Ensuite apparut comme une verge blanche. Elle se montra dans
la partie occidentale [133] du ciel et s'avança jusqu'à ce que son
sommet touchât le milieu du ciel à l'Orient. Sa grosseur était celle
d'une corde. Ce signe fut aperçu par beaucoup de gens\ car il se
leva pendant des jours nombreux. Ou disait bien des choses à son
sujet. Les uns disaient que c'était une verge de colère, les autres
que c'était un des nuages qui étaient montés dans le ciel aupara-
vant. Les sages et les hommes craignant Dieu, en voyant ce signe,
fuient remplis d'une grande frayeur : car ils reconnurent qu'il
1. Le texte porte, évidemment par erreur : « Ce signe ne fut pas aperçu,
car il se leva...»*
112 CHRONIQUE
était causé par Les péchés et rempli de menaces de colère. Les
insensés n*y firent point attention. « Le sa{;e voit au loin : Tinsensé
ne voit pas même à ses pieds V Les yeux du sage sont à sa tète :
rinsensé marche dans les ténèbres '. »
La direction de cette verge allait vers le milieu de Tare tendu.
Elle en montra la signification et ne tarda pas à faire voir ce que
Dieu avait voulu indiquer en renvoyant. Quelqu'un dira peut-être
que Dieu n'a ni arc ni flèche? Que celui-là écoute ce que dit le
Psalmiste* : (( Dieu sera exalté; il lancera tout à coup contre eux
des flèches ; leurs langues perdront leur force ; quiconque les verra
sera saisi de crainte, tous les hommes seront pris de frayeur. » 11
dit encore' : « Il a lancé ses flèches, et il les a dispersés. »
Les hommes furent dispersés : ils devinrent errants en tous
lieux; les champs furent dévastés, les campagnes furent pillées; le
peuple s'en alla de pays en pays.
D'un autre signe qui apparut cette même année du côté du Nord.
Un autre signe apparut du côté du Nord. Son aspect [134] attes-
tait la menace et la colère du Seigneur contre nous. Il apparut
au temps de la moisson et occupait toute la partie septentrionale,
depuis l'extrémité orientale jusqu'à l'extrémité occidentale. Tel
était son aspect : une verge rouge, une verte, une noire et une
jaune. Il montait du bas en haut : quand une verge descendait
l'autre montait. Quand on l'observait, il subissait soixante-dix
changements.
Pour les sages, c'étiiit un signe de menace. On a dit bien des
choses à son sujet. Les uns lui donnaient une signification de
sang, les autres une autre. Quant à moi, je dirai : « Qui connaît les
œuvres du Seigneur? » — « Je donnerai des signés dans le soleil et
des prodiges sur la terre*. »
De la manière dont fut payé Vimpôt de capitation^
et de V emprisonnement dans une église.
Comme on demandait à chacun plus qu'il ne pouvait donner,
1. Cf. JoB, xxxiz, 29.
2. Ecclés.t II, 14.
3. Ps. Lxiv, 7-9.
4. Pa, xviii, 15.
5. Act. Apoat.y II, 19.
DK DKNYS DK TELI-MAHRK 113
Témir prit les répondants et répartit entre eux [les sommes deman-
dées] autant qu'il put à chacun également. Ceux-ci les répartirent
à leur tour entre leurs villages.
Comme les gouverneurs établis par *Abbas n'étaient pas encore
destitués, et que le principe de tous les maux^ n'était pas encore
venu, ils ne commirent pas d'injustice, ne dépassèrent pas les
limites de l'équité et demandèrent dans le pays la somme fixée.
Comme l'affaire n'avait pas réussi*, on fit une nouvelle répar-
tition entre les répondants; mais cela ne suffit pas non plus. Et
pourtant ces garants pillèrent les pauvres, les orphelins, les veuves
qui étaient dans leurs villages. Ils n'épargnèrent point les orphelins
et n'eurent point pitié des veuves. Ils ne firent point cela par ordre
de l'autorité, mais d'eux-mêmes. (( L'âne sauvage est la proie du
lion dans le désert, et le pauvre celle du riche'. » De même pour
ceux-ci. [135] La plupart d'entre eux étaient pris dans cette tem-
pête et ces ténèbres qui couvraient la terre, et les malheureux ne
savaient pas que dans peu de temps ils seraient victimes de la
fureur. Ils s'empressèrent de vendre le mobilier, le bétail, les
objets des pauvres de leur village ; ils remplirent leurs maisons,
ils devinrent riches comme ils le désiraient, car on leur donnait
pour les rachats et les intérêts sans ménagement, en sorte qu'ils
étaient sur le point de posséder, selon leur désir, les enfants des
pauvres comme esclaves et comme servantes. Ils ne savaient pas,
les malheureux, que la fin des impies c'est la ruine.
Us donnaient en froment, pour un dinar cinquante gribè, ou
même soixanU% et quelques-uns soixante-dix. A quiconque présen-
tait un zouz, ils souscrivaient la quantité qu'il voulait. Ils donnaient
du vin, pour un dinar cinquante kailtè, quelques-uns soixante,
soixante-dix ou même quatre-vingts. Au marché, le froment se
vendait trente ou trente-cinq (jribè pour un dinar, et monta jusqu'à
quarante; le vin dans les mêmes proportions; un agneau, un zouz;
une chèvre, un zouz; une vache, cinq zouz; un âne, quatre zouz;
et toutes choses étaient bon marché.
Comme l'affaire languissait et ne réussissait pas, l'émir rassembla
les habitants de l'endroit. Cet émir éUiit un homme détestable,
impie et inique. Il ne se laissait flatter par personne, non plus que
les satellites qu'il envoyait dans le district. II rassembla les habi-
tants de l'endroit et les renferma tous dans une grande église.
1. Moasa Ibn Mouç^ab.
2. C'est-à-dire : la somme demandée n'avait pas été atteinte.
3. Errli., XIII, 23.
8
114 CHRONIQUE
De V emprisonnement dans V église.
Quand un héraut proclama l'ordre de se rassembler dans l'église,
des satellites pleins d'ardeur* sortirent et enfermèrent quiconque
était soupçonné d'avoir quelques zouz.
Que dirai-je, sinon la parole du prophète*? « ODieu 1 les gentils
sont entrés dans ton héritage. Ils ont souillé ton saint temple. Ils ont
fait [136] de ton temple saint un lieu d'ordures'. Ils ont livré les
cadavres de tes serviteurs aux bètes, les cadavres et la chair des
justes au déchirement du poignard et de la lance, leurs pieds aux
entraves, leurs mains aux suspensions, leurs doigts aux anneaux.»
On rassembla tous les hommes libres et même les femmes dont
les maris étaient éloignés ou momentanément absents à cause de
cette persécution. On tira celles-ci de leurs maisons. On les en-
traîna, on les fit descendre dans les rues, et on les renferma dans
cette église. Des femmes qui n'avaient jamais paru sur la rue
furent contraintes de descendre et furent placées sans pudeur au
milieu des hommes. Ils firent de môme à l'égard des femmes
arabes.
Tous les Arabes indistinctement furent contraints de descendre.
Si quelqu'un était absent, ils emmenaient ses femmes ou ses filles.
Ils s'emparaient successivement de chaque village. Ou bien ils
prenaient une caution et emmenaient les habitants; ou bien ils les
tuaient, soit en les frappant, soit à l'aide des entraves aux pieds et
aux doigts.
L'iniquité audacieuse s'éleva et s'assit sur le siège sublime qui est
en face de la table du sanctuaire divin. Ils poussèrent l'audace
jusqu'à monter sur la table sainte, pour faire leur prière qui irrite
le Seigneur, et ils foulaient de leurs pieds impurs cette auguste
table. Dans le sanctuaire même, ils lavaient les souillures de leurs
membres, et ils y commettaient beaucoup d'autres impuretés. Au
milieu de l'église, tout ce peuple, hommes et femmes, déposaient
leurs excréments, sans pudeur, en présence les uns des autres.
Ils restcTcnt ainsi trois jours et trois nuits dans cette église. Il
s'éleva du milieu d'elle une clameur douloureuse, et au lieu de la
fumée odoriférante des parfums de choix, s'éleva l'odeur de la pu-
1. LittéralemeDt : « respirant le feu. »
2. Cf. Pè. Lxxix, 1-2.
3. Littéralement : « des latrines. »
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 115
tréfaction, avec la clameur douloureuse de ceux qui y étaient
enfermés.
Poussés par la nécessité, ils se jetèrent sur les biens des églises
et des monastères, de sorte que même les églises éloignées, bien
qu'on n'y sentît point Todeur infecte, eurent à souffrir de cette pro-
fanation [137] dont avait été victime la grande église de la ville,
maîtresse de toutes celles de la contrée; car elles furent dépouillées
par les habitants, de leurs biens, de leur mobilier, de leurs vases
sacrés qui furent mis en gage entre les mains des païens.
« Je sortirai de ma maison, car les prêtres ont souillé les choses
saintes et profané la loi ' . — Qu'ai-je besoin de la multitude de
vos victimes? Je suis rassasié des holocaustes des béliers et de la
graisse des animaux gras. Le sang des veaux, des agneaux et des
boucs : je n'en veux pas. Lorsque vous êtes venus devant ma face,
qui a demandé ces choses de vos mains, pour que vous fouliez aux
pieds mes parvis? Ne continuez pas à m'offrir de vains sacrifices.
L'encens m'est en abomination. A la néoménie et au sabbat, vous
vous rassemblerez. Mais je ne puis supporter l'iniquité de vos
réunions. Vos néoménies et vos fêtes : mon âme les déteste. Elles
me sont devenues à charge. Lorsque vous étendrez les mains, je
détournerai mes yeux de vous ; et si vous multipliez les prières, je
ne vous écouterai pas. Vos mains sont pleines de sang*. )) En
voyant avec les yeux de lesprit la malice de nos nombreux
péchés, le prophète a dit ces choses, a Maintenant il n'y aura plus
de délai pour mes paroles, dit le Seigneur. J'ai dit, et je fais*. »
Le gouverneur usait envers eux de toute sorte de supplices et de
tourments ; il opprimait, selon son bon plaisir, Arabes et Syriens,
marchands et boutiquiers. C'est pourquoi il n'y avait plus en ces
jours sur le marché, ni vendeur ni acheteur ; sur les routes, ni
allant ni venant, parce que les portes de la ville étaient fermées ^
Quand les hommes qui craignent Dieu virent toutes les souillures
que commettaient ces impudiques au milieu du saint temple, ils
s'adonnèrent à une profonde douleur, crièrent vers le Seigneur et
dirent: « Pourquoi, Seigneur, nous as-tuainsi oubliés et ta colère s'est-
elle appesantie sur le troupeau de ta bergerie? Souviens-toi, Seigneur,
[138J de ton Église que tu as rachetée au prix du sang précieux de
ton Fils unique, que tu as sauvée par ta passion vivifiante. Tes
1. SopH., m. 4.
2. I8., I, 11-15.
3. EzECH.. XII, 28.
4. Traduction douteuse, du moius d'après la ponctuation qui est celle
du ms.
116 CHRONIQUE
ennemis se sont enorgueillis au milieu de ton Église. Ils ont abattu
à coups de hache^ comme le bois d'une forêt, ses portes et ses mon-
tants, et ils ont souillé sur la terre le tabernacle de ton nom en
disant : Nous les détruirons tous ensemble sur la terre ; nous ferons
disparaître de la terre toutes les fêtes de Dieu. Jusqu'à quand, 6
Dieu, seras-tu maudit par tes ennemis, et ton nom sera-t-il }»our
toujours un objet de haine? Pourquoi as-tu retiré ta main droite
m
du milieu de ton Eglise^? Pourquoi, Seigneur, ta fureur s'est-elle
enflammée contre ton peuple? [pourquoi] as-tu répudié ton héri-
tage? [pourquoi] nous as-lu livrés aux mains des Gentils? [pour-
quoi] ceux qui nous haïssent dominent-ils sur nous? [pourquoi]
nos ennemis nous oppriment-ils et servons-nous sous leur puis-
sance'? » Et le Seigneur de son côté leur dit: « Parce que bien des
fois je vous ai délivrés, et vous m'avez exaspéré par vos œuvres*. »
Lorsqu'ils eurent opprimé tout le monde la somme totale fut
réunie, après que les paysans eurent emprunté dans le voisinage,
de ceux même qui pouvaient prêter même un dinar, car ils ne
consentaient point à sortir pour aller se faire payer dans les
villages. Ainsi le gouverneur dépouilla le pays, puis il se rendit
auprès de Témir des croyants, à Nisibe
C'est à son retour d'Occident qu'il avait sévi de nouveau contre
toutes les églises des villes. Celle d'Édesse eut à souffrir plus que
toutes les autres et perdit ses biens.
Pour nous, nous dirons avec le prophète * : « Et par tout cela la
fureur du Seigneur n'a pas été détournée de nous, mais il a de
nouveau étendu sa main. »
De rimposteur qui parut dans la Mésopotamie^
en Pan 1081 (769-770).
Nous nous sommes proposé de tout raconter et d'en laisser le
souvenir à ceux qui viendront après nous dans le monde, [139)
afin qu'en ayant le souvenir du poids qui a accablé leurs devan-
ciers, ils prennent garde à eux et n'en soient opprimés.
(( L'insensé est frappé et le sage se corrige'. » — Qu'ils observent
donc les maux qui ont fondu sur leurs ancêtreset qu'ils s'en éloignent,
car chaque jour amène avec lui son mal. Notre-Seigueur a donné
1. Cf. Ps, Lxxix, 1, 3-7, 9, 10.
2. Cf. P.*». cvi, 40-42.
3. Cf. Ps, cvi, 43.
4. Cf. Is., y, 25.
5. Cf. Proc, XIX, 25.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 117
ce précepte à ses Apôtres* : «Gardez-vous des faux prophètes qui
viennent à vous sous des peaux de brebis. Ils en séduiront beaucoup,
dit-il, et même les élus si c'était possible. » Et encore* : « Veillez à
ce que personne ne vous trompe. Beaucoup viendront en mon nom.
Si quelqu'un vous dit : Voici que le Christ est ici, ou : Il est là; n'y
allez point Beaucoup viendront pour [vous] tromper. Si on vous
dit : 11 est dans le désert ; ne sortez pas. S'ils vous disent : Il est dans
la chambre; n'entrez pas. » Le Christ lui-même nous a dévoilé
toutes ces fraudes, les prophètes nous ont prophétisé, les Apôtres
nous ont crié dans les oreilles, comme une trompette, la venue de
rimposteur et des faux prophètes qui doivent le précéder. Nous
n'avons écouté ni les prophètes, ni Notre-Seigneur, ni les Apôtres,
mais nous avons clos nos yeux, nous avons fermé nos oreilles,
nous avons enfoui notre cœur dans la fosse de l'erreur, pour ne pas
voir de nos yeux, ni entendre de nos oreilles, ni comprendre dans
notre intelligence les paroles de la sainte Écriture. Nous les avons
oubliées et nous avons recherché notre bon plaisir.
Celui que Daniel appelle signe de destruction, messie de men-
songe, apôtre du fils de perdition, nous l'avons vu. Nous avons
touché de nos mains l'Antéchrist. Nous avons palpé celui dont il
est écrit « qu'il viendra à la fin des temps ». Un de ses envoyés
s'est manifesté de nos jours, et tout ce qu'il fera lui-même quand il
viendra, son disciple nous l'a fait connaître de fait, et non plus en
paroles.
Or, à tout endroit dangereux et redoutable où il y a danger de
périr, les sages placent un certain signe afin que ceux qui viennent
et qui ne savent pas, en voyant ce signe, [140] comprennent dans
leur intelligence l'avertissement qu'il proclame. Il leur apprend ce
qui s'est passé antérieurement dans cet endroit. Et nous main-
tenant, nous plaçons ici les choses qui sont arrivées dans le temps
présent afin que, s'il y a lieu, vous vous gardiez vous-mêmes de
ce cruel qui couvre de miel son fiel amer.
En ce temps donc, survint un homme de la région de Tagrit, du
village de Beit Rama. Étant resté sans père ni mère, à l'âge adulte,
il eut le désir d'embrasser la vie chaste du monachisme. Il partit
et s'en alla au saint monastère de Mar Mattaï, dans la région de
Mossoul. Après qu'il y eut passé deux ou trois ans, le Malin
l'excita à retourner à son premier vomissement'. Comme il n'avait
1. Matth., vil, 15; xxiv, 24
2. Mattii., XXIV, 23, 26.
3. Cf. Proo.^ XXVI, 11.
118 CHRONIQUE
pas encore dissipé ce qui lui revenait de ses parents, ainsi que
Judas, il le séduisit par l'amour des pauvres, des étrangers, des
malheureux, des affligés^ et par beaucoup d'autres choses. Mais au
lieu de ses belles promesses, il finit par lui procurer, comme à
celui-ci, la strangulation.
Étant donc retourné à sa maison, au lieu de s'occuper des œuvres
du monachisme, du soin des pauvres et des affligés, il imita les
jeunes gens de son âge, et tout ce qu'ils faisaient, il le faisait avec
eux. Au lieu de distribuer son bien aux pauvres, il le dissipa dans
la luxure, vivant avec prodigalité au milieu des débauches. A
la fin, il tourna au paganisme et apostasia. Quand il eut dissipé
toute sa fortune en vivant ainsi prodigalement, quand il eut tout
consacré à ses débauches et qu'il fut ruiné, il revint à lui-mèmeet
se dit: « Malheureux que je suis I Qu'ai-je fait de moi-même ! » et
il partit pour aller au désert de Singara* près d'un illustre solitaire
qui se trouvait là. Celui-ci l'ayant admis près de lui, il s'adonna
aux plus grands et plus durs labeurs. 1 141] Il appliqua son corps
au jeûne et à de nombreuses prières. Bien qu'il se fût déjà livré à
ces œuvres l'espace d'environ cinq ans, au point que sa chair était
émaciée, qu'il était devenu comme un Éthiopien et que tout son
visage était changé par l'ardeur du soleil, alors même le démon ne
cessa de le tourmenter. Il commença à se montrer à lui sous l'aspect
d'anges qui exaltaient ses labeurs et lui faisaient connaître les choses
futures. Saint Mar Zo*ara en entendant cela, lui dit: « Mon fils,
prends garde aux ruses du séducteur. Toutes ces choses viennent
du démon. » Le vénérable Zo*ara était en effet à cette époque le
supérieur des moines de cet endroit. Le vénérable lui disait cons-
tamment de ne pas faire attention à ces choses, de les mépriser
toutes, parce que toutes venaient du Mauvais. Le moine cepen-
dant ne récouta point, mais il s'y laissa prendre, et entraîna
des hommes à sa suite. Il disait : « Ceci et cela aura lieu. Un tel
fera telle chose. Aujourd'hui, les hommes de tel endroit vien-
dront me trouver. » C'est un fait connu des sages qu'il n'est pas
difficile au démon, lorsqu'il a suggéré à quelqu'un de faire une
chose que celui-ci fera réellement, de manifester extérieurement
son dessein sur cet homme. H ne dit pas des choses qui n'arrivent
pas, mais des choses qui arrivent par son conseil. Il est appelé
trompeur parce qu'il fait connaître les choses secrètes. Il est écrit
que le trompeur manifeste les secrets. N'est-il pas vrai que si un
homme est déjà en route, et si un envoyé rapide vient, et qu'il dise :
1. Cf. ci-dessus p. 88, n. 1.
DE DENYS DE TEI.L-MAHRÉ 119
<( Un tel viendra aujourd'hui à tel endroit, » il ne manifeste pas
des choses futures, mais des choses qui s'accomplissent actuelle-
ment? Ainsi ce malheureux fut induit en erreur, fut trompé et
entraîné dans l'iniquité par les visions diaboliques. Un peuple
nombreux commença à errer à sa suite, car il tomba dans l'erreur
et la démence.
En apprenant ces choses, et en voyant qu'il méprisait les conseils
qu'on lui donnait, qu'il se mettait môme à dénigrer les religieux en
disant : (c Ils sont jaloux de moi, » [142] le bienheureux Mar Zo^ara
le saisit et le frappa, le chassa de là et lui défendit, sous peine
d'anathème, d'habiter dans toute la région de Mossoul. Il sortit
donc de ce pays et vint en Mésopotamie, dans la région de Dara.
11 y avait dans cette région de Dara un grand et important village
renfermant une nombreuse population. Les habitants de ce village
étaient des hommes simples, des travailleurs plus laborieux que
tous ceux des environs. Ils étaient fidèles plus que tous ceux de
leur contrée; ils étaient très attachés aux moines et honoraient leurs
prêtres comme des anges. Comme ces gens étaient éloignés de toute
perfidie mondaine et s'occupaient uniquement de leur travail, le
démon dirigea son artisan vers un tel peuple. Quand il entra dans
ce village et qu'ils le virent couvert d'un vêtement pauvre, le corps
desséché et noirci, ils le reçurent comme un ange. Il se mit à leur
dire qu'il était envoyé par Dieu pour leur annoncer que leur village
était sur le point d'être renversé et enseveli sous la terre, que la terre
le recouvrirait et qu'il ne serait plus jamais habité. Les habitants
le reçurent dans leur simplicité, et écoutèrent dans l'innocence de
leur cœur tout ce qu'il leur dit. Le nom de ce village était Hani,
dans le Tour 'Abdin. Il leur disait constamment : « Faites pénitence,
priez, jeûnez, avant que la terre n'ouvre sa bouche et ne vous
engloutisse. Car la mesure de vos péchés est comble, votre iniquité
est plus grande que celle de Sodome ou de Gomorrhe, vous n'avez
plus qu'à attendre le jugement de Dieu, sans miséricorde. » Ce
peuple simple, en entendant [cela] et en voyant le miel dans lequel
était mélangé le poison, ne reconnut point, à cause delà douceur du
miel, l'amertume du venin mortel. Ils n'écoutèrent ni Notre-Sei-
gneur, ni les prophètes, ni les Apôtres, ni leurs évoques. A cause de
ces paroles : « Jeûnez et priez, » ils ne reconnurent pas [143] la ruse
du Malin. A quiconque leur disait : « Craignez Dieu, cet homme est
un imposteur, «ils répondaient : a Que dit-il de mal? Il ne dit autre
chose que: Jeûnez et priez. » Ils ne voulurent écouter personne,
mais ils errèrent à sa suite et entraînèrent dans l'erreur toute la
contrée. Ils s'adonnèrent aux lamentations et aux larmes, ils aban-
120 CHRONIQUE
donnèrent leur travail et laissèrent leurs champs et leurs vignes
incultes pour s'appliquer à la prière.
Bientôt ils commencèrent à dire de cet homme qu'il faisait toute
sorte de prodiges comme Notre-Seigneur. Ses envoyés, c'est-à-dire
les démons, allèrent répandre sa renommée dans toute la Méso-
potamie. La contrée septentrionale fut troublée, de même que le
Sud avec l'Orient et l'Occident. Tout le monde se trompait complè
tement à son sujet. Lorsqu'une caravane venait de quelque côté et
en rencontrait une autre qui s'en retournait d'auprès de lui, ceux
qui venaient demandaient à ceux qui s'en allaient : « Comment
avez-vous trouvé cet homme? » Ceux-ci disaient : « On ne connaît
rien de comparable dans tout Tu ni vers à ce que fait cet homme. »
Ils montraient leurs membres et disaient: « Celui-ci était paralysé,
celui-là avait le bras desséché, celui-ci était lépreux, celui-ci
aveugle, et maintenant, comme vous voyez, nous sommes tous sans
infirmité ni maladie. Voyez nos yeux ouverts, nos mains souples,
nos pieds guéris. Ne vous refusez pas à nous [croire], mais soyez
affermis dans votre foi, et allez près de lui. Tout ce que vous
demanderez vous l'obtiendrez de lui. » Et ainsi, ils continuaient
leur route et s'en allaient près de lui. [Les démons] allaient ainsi
au-devant de toutes les caravanes qui venaient vers lui et attes-
taient : « Nous l'avons vu de nos propres yeux. Il chasse les
démons; il ouvre les yeux des aveugles, fait entendre les sourds et
marcher les paralytiques. » A d'autres ils disaient : « Nous
l'avons vu, nous, ressusciter un mort, et il a fait toutes sortes de
prodiges en notre présence. » [144]
Sois sûr, lecteur ou auditeur, que ceux qui apparaissaient aux
hommes se rendant en cet endroit, qui se rencontraient avec eux en
grand nombre sur leurs ânes, leurs mulets, leurs chevaux, et qui
montraient leurs membres guéris par lui, n'étaient pas des hommes,
mais bien des démons. Sachons aussi, d'après cela, que jamais on
ne vit un homme qui eût recouvré la santé auprès de lui.
[Les démons] apparaissaient à d'autres et leur disaient : « Nous
sommes des anges. Nous sommes enchaînés par la prière de Mar
Marouta, — car ils l'appelaient Marouta, — s'il nous laisse faire,
et nous amènerons le grillon et la sauterelle. » A d'autres ils
apparaissaient et disaient: « Les dragons^ viendront sur la terre
et ne laisseront personne vivant, si Mar Marouta nous laisse
faire. »
Les démons rebelles ne cessaient de faire entendre de semblables
1. Littéralement: « Les serpents ailés. »
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 121
propos dans toute la Mésopotamie. Et dès lors il n'y eut plus
d'interruption sur les routes qui conduisaient à cet endroit.
Comprends, ô sage, que lorsque le fils de perdition viendra, il
n'agira pas de suite par lui même, mais ses ministres iront ainsi
publier sa renommée par toute la terre; ils se montreront corpo-
rellement à chacun et crieront: « Un tel était paralysé, un tel
aveugle, un tel lépreux, et celui-ci les a guéris. «
Ils se faisaient eux-mêmes morts, paralytiques, lépreux, aveugles
et infirmes de toute façon et venaient près de lui. Dès qu'il com-
mandait à un paralytique de marcher, il marchait, et celui qui
était comme réellement paralysé se mettait à marcher. Les mal-
heureux qui avaient abandonné les Livres saints et allaient à sa
suite ne savaient pas que ceux-ci étaient des démons, et qu'aucun
des hommes qui vinrent le trouver ne fut jamais guéri par lui ; à
moins qu'il ne fût frappé par le Malin, et alors, lorsque le démon
\e quittait, il paraissait guéri.
Ils disaient : « Parce que tu n'as pas la foi, tu n'es pas guéri.
Nous avons vu ces choses et nous les attestons. Chacun de ceux que
nous avons [145] vus revenir d'auprès de lui, à qui l'on deman-
dait : Es-tu guéri? disait: Je suis guéri. »
Il ne disait jamais rien de plus que: » Si tu as la foi, dans
quarante jours tu seras guéri. » Et sous cette condition d'attendre
la guérison pendant quarante jours, il les renvoyait.
Ainsi tous les pays se mettaient en mouvement et venaient vers
lui. On lui apportait des billets, avec de Tor, de l'argent, des objets
précieux. Il faisait des aumônes, de longues prières, puis se levait
et aspergeait le peuple de cendre, en disant: {< Que Dieu soit
apaisé! » Il se tenait sur un siège élevé comme un évêque, bien
qu'il eût seulement reçu l'ordre du diaconat. 11 est prescrit par les
canons apostoliques que le prêtre ne soit bénit que par son confrère
prêtre ou par l'évêque, et qu'il ne reçoive la bénédiction que de
ceux ci. Cet audacieux, non seulement bénissait, mais il faisait
même le signe de la croix et imposait la main sur la tête des prê-
tres. Il faisait aussi l'huile delà prière', lors môme que plusieurs
prêtres se trouvaient réunis près de lui, et la leur donnait. Il faisait
l'huile de cette manière : il récitait dessus une prière, puis il cra-
chait dedans et la consacrait par son crachat.
Un évêque ou un moine ne pouvait aller là, ni dire quelque chose,
sans s'exposer à être tué par les habitants de ce village qui disaient :
1. Oleum quo Syri mooophysitae inflrmos et catechumetios infantesque
acte bapiismum uugunt. » T/ies. syr,, coi. 2240.
122 CHRONIQUE
(( Vous êtes jaloux de lui. )> Saint Mar Cyriaque, évéque de
l'endroit, voyant que son troupeau était détenu captif parle Malin,
qu'ils n'écoutaient point ses paroles et voulaient même le mettre à
mort, se rendit près du vénérable patriarche David et lui fit
connaître tout cela.
Le vénérable David, [**6] en apprenant ces choses, fit enlever le
séducteur et l'enferma dans la prison de Qarran. Cela ne mit pas
fin à ses impostures, car beaucoup de gens venaient le trouver
dans la prison et cet impie faisait de l'huile et la leur donnait
après ravoir consacrée par ses crachats.
Nous omettons plusieurs faits et nous passons à d'autres choses,
car nous voulons faire connaître les années de calamité que le
pays a souffertes.
De la première année de calamité qui fui Van 1084 {7 7 2-7 73)*
Et d* abord des scribes, des gouverneurs y des changeurs •
Quand le roi revint de la région de Jérusalem, il fit saisir ^Abbas,
le dépouilla de tout ce qu'il avait et mit à sa place Mousa Ibn
Mouç'ab, dont nous avons parlé plus haut. Il livra à ce dernier les
gouverneurs, les scribes, les changeurs qui avaient été en fonctions
du temps de *Abbas, pour qu'il leur fît rendre compte : puis il
descendit à Bagdad.
Ce tyran, ayant reçu cet ordre, fit amener quiconque avait été
gouverneur, scribe ou changeur du temps de *Abbas. Comme il
n'était pas encore parti de Mossoul, il les fit descendre à Balad* et
les fit emprisonner dans cette ville avec un gros boulet de fer. Or,
il ne leur fit point rendre compte et ne fit point d'enquête dans le
pays pour savoir combien ils avaient pris. Mais cet homme rusé
dans le mal fit venir près de lui, de chacune des villes, des hommes
traîtres et avares qui n'avaient point Dieu devant les yeux, des
hommes tels que le fils de perdition s'en choisira, des calomnia-
teurs semblables à lui. 11 les honorait en paroles et en œuvres et leur
promettait de grandes choses, comme Satan en promet à ceux qui
marchent [147] à sa suite et auxquels il procure, après tout, une
fin déplorable et l'enfer. Par ses paroles il les trompait tous, et
ils lui faisaient connaître qui était de leur ville : soit notaire, soit
gouverneur, soit changeur, ce qu'il possédait et ce qu'il ne possé-
dait pas, quelles étaient ses richesses, ses maisons, ses propriétés.
1. Balad, sur le Tigre, à environ 32 kilomètres au sud de Mossoul.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 123
Il fut ainsi renseigné sur chacun et éclairé sur leurs biens. Les
traîtres n'obtinrent pas de lui une brillante récompense, mais Dieu
les livra entre les mains de Timpie qu'ils chérissaient, et celui-ci
les maltraita plus que personne autre.
Ce tyran tint donc les fonctionnaires qui avaient été sous les
ordres de *Abbas enfermés pendant cinq ou six mois, jusqu'à ce
qu'il eût élé renseigné sur leurs actions par ces impies qu'il avait
choisis. Lorsqu'il ne reçut plus de dénonciation d'aucun pa,ys, il
les fit sortir un à un, et selon ce qu'il avait appris des calomnia-
teurs, il taxait sans pitié chacun d'eux pour une somme d'or qu'ils
devaient lui donner; les uns : deux mille [dinars], les autres quatre,
les autres dix, les autres quinze, les autres vingt, les autres trente,
les autres quarante. Il les taxait ainsi non parce qu'ils étaient
débiteurs [de ces sommes], mais pour satisfaire son avarice et sa
rage. Il torturait les pieds et les mains de chacun d'eux, jusqu'à ce
qu'il eût reçu la somme pour laquelle il avait taxé cet individu.
Et quand celui-ci avait consenti, il le renvoyait enchaîné à sa ville
avec un cavalier et des répondants, pour en rapporter cette somme.
Il ordonna ensuite uux censeurs d'aller inscrire tout ce qui leur
restait.
Cet homme pervers, voyant que le roi l'exaltait et ajoutait encore
aux honneurs dont il l'avait précédemment comblé, et sachant que
ce roi se complaisait plus dans la destruction que dans la paix,
rugit comme un lion [148] en présence de sa proie. Il commença à
pressurer la contrée, comme autrefois Pharaon les enfants d'Israël.
Il ordonna d'abord aux censeurs de recenser leurs pays. Ces cen-
seurs apprirent près de lui à être avares, et lui-même ne donna pas
l'ordre de faire le recensement par un sentiment de bienveillance,
mais par avarice, et pour se faire une réputation par un nouveau
ta'dil. Cela est manifeste d'après ce qui arriva ensuite, c'est-à-
dire que celui qui se trouvait imposé davantage devait payer selon
le nouveau recensement, celui qui se trouvait moins imposé devait
payer selon l'ancien. Les censeurs eux-mêmes demandaient ouver-
tement, sans pudeur et sans crainte, des présents et des dons.
Ils recensèrent ainsi le pays et ne laissèrent rien autre chose
que les nombreuses ruines causées par leur brigandage et leur
avarice.
Des stigmatineuni et des marques.
Il envoya aussi avec les censeurs des stigmatiseurs et des
marques pour que, sur l'ordre des premiers, ceux-ci marqus^ssent
124 CHRONIQUE
sur quiconque serait pris le nom de sa ville et de son village, afin
qu'il fût ensuite reconduit à son village et à son pays. Ils s'appli*
quèrent moins à cela qu'à satisfaire leur avarice. Non seulement
ils imprimaient ces marques, mais ils surajoutèrent d*eux-mèmes
beaucoup d'autres choses. Le stigmatiseur saisissait tout d'abord
les notables d'un endroit, et leur disait : (( Que chacun conduise
les siens à la ville et que personne ne sorte ; vous êtes respon-
sables. » Quand ces notables avaient conduit tous ceux de leur
village, [le stigmatiseur] les marquait. Sur la main droite il ins-
crivait le nom de la ville et sur la gauche : « Mésopotamie. » Il
suspendait au cou de chacun deux médailles dont Tune portait le
nom de la ville et l'autre celui du district. Il percevait dès le prin-
cipe un zouz pour chaque groupe de trois hommes. [149] Il ins-
crivait aussi le nom de l'individu, sa ressemblance, son portrait,
de quel village et de quel district il était. Cela troubla fortement
les gens, car on s'empara de beaucoup d'étrangers, et quel que
fût le lieu qu'ils indiquassent, on les marquait du nom de l'endroit
où parfois ils n'étaient jamais entrés. Et si ce recensement eût
été achevé, il eût causé plus de mal que tous les précédents.
Le marqueur, voyant que son œuvre n'était pas complète, sortit
dans le pays et s'empara de tous les allants et venants. IPpar-
courut la région plus de vingt fois et ne s'arrêta que quand il
eût pris tous les habitants et que personne ne lui eut échappé.
Et alors, comme disent le prophète Daniel et l'apôtre Jean* :
<( Tous les hommes reçurent le signe de cette bête sur leurs mains,
sur leur poitrine et leur dos. »
Des décimateurs.
Il envoya d'autres gouverneurs pour la dîme, et ceux-ci trou-
blèrent de nouveau la contrée. Étant entrés dans les villes, ils
passaient dans une boutique pour voir ce qui s'y trouvait. Quand
un homme pauvre avait pour cent zouz [de marchandises], ils en
inscrivaient cinq cents; s'il en avait pour mille, ils en inscrivaient
cinq mille. Ils passèrent dans les maisons des Syriens et des
Arabes, et partout où il y avait du froment, de l'orge, ou d'autres
choses de même nature, ils les consignèrent. Sans même regarder,
ils inscrivaient : tant de milliers pour un tell Ils exigeaient un
griba par dix gribè. On était d'accord avec eux à Bagdad.
1. Cf. Apœ., XIX, 20.
DE PENYS DE TELL-MAHRÉ 125
Si cela eût continué, la contrée eût été ruinée» car souvent
[150] ils inscrivaient dix mille grihè à quelqu*un qui n*en possé-
dait pas vingt; car ces calomniateurs iniques dont nous avons
parlé plus haut avaient été leurs maîtres dans le mal.
Mousa lui-même les faisait appeler constamment, et ils descen-
daient près de lui pour le renseigner sur ce qu'il y avait dans la
ville de chacun d'eux. Dès lors, les hommes comblaient le décima-
teur de leur ville de présents et d'honneurs afin de lui fermer la
bouche.
A cause de cette manière de faire des décimateurs, et aussi à
cause des délateurs, les pauvres furent complètement ruinés et
encore à peine purent-ils détourner ce fléau.
Dès lors, ils sortirent sur les routes et les passages, et ils
dépouillèrent quiconque allait ou venait. Ils se plaçaient en
embuscade la nuit sur les routes, comme des voleurs, et prenaient
le bien des hommes qui fuyaient pour éviter la dîme ou le çauphi.
u Nous sommes, disaient-ils, les décimateurs. »
Comme un mal incalculable commençait à ravager tout le pays,
et qu'il n'y avait plus ni allant ni venant sur les routes, les
hommes descendirent se plaindre à Mousa. Celui-ci défendit de
saisir quelqu'un en dehors de la place publique; mais à peine
cessèrent-ils alors leurs méfaits.
Du çauphi.
Toute pousse qui croit après ses voisines est moins bonne que
les premières. Or, ces rejetons s'élevaient d'une racine mauvaise et
amère, d'une racine de colère. C'est pourquoi il est écrit : « Leurs
plantations viennent d'un mauvais plant. » Et encore : » La racine
de tous les maux, c'est l'avarice \ — L'avare n'est jamais rassa-
sié». » S'il possédait tout l'univers, il désirerait encore posséder ce
qu'il ne voit pas. De même que l'enfer et le démon [151] ne sont
jamais rassasiés, ainsi ce fils de l'enfer et du démon n'était pas
rassasié de tous les hommes, de leurs vignes, de leur bétail, de leurs
champs. Ils travaillaient pour lui, et cela ne lui suffisait pas. Il
exerça son avarice sur les routes, les montagnes, les eaux qui coulent
dans les fleuves, et jusque sur les morts. Il remua de leur place et
dispersa, comme le fumier à la face de la terre, les ossements de ceux
qui reposaient dans les tombeaux depuis deux ou trois mille ans.
1. / riVn., Tî. 10.
2. Cf. EccL, V, y.
126 CHRONIQUE
V
Malheur à toi, Seôll de même que tu n'es pas rassasié des
cadavres que chaque jour tu recueilles dans ton sein, de même
ceux que tu as engendrés et qui sont tiens ne sont jamais rassasiés,
jusqu'à ce que la mort ferme leur palais glouton.
Quand ceux qui avaient été préposés au çauphi arrivèrent, ils
occupèrent les places publiques et les rues, et arrêtèrent tous les
passants. Ils s'emparèrent aussi des rivières, [occupèrent] les gués'
pour empêcher de passer, et [interdirent] aux pêcheurs de pêcher
du poisson. Us mesurèrent au cordeau les places publiques du
nord au sud et de l'orient à l'occident : quarante coudées d'un côté
et quarante coudées de l'autre côté. Ils envahirent beaucoup de
maisons, de boutiques, de cours; ils confisquèrent toute boutique
qu'ils ne trouvèrent point inscrite dans l'ancien recensement et
contraignirent les habitants à évacuer leurs demeures.
Et après que ce principe de tous les maux eut ainsi beaucoup
fait souffrir les uns et les autres, la calamité cessa à peine. Ils
mesurèrent le mur de la ville et s'emparèrent des tours et de son
circuit, afin de satisfaire en toute manière leur cupidité et leur
avarice. Ils envoyèrent un héraut annoncer : « Que quiconque veut
louer une boutique ou une tour aille trouver l'émir du çauphi. »
Ils causèrent beaucoup de dommages aux propriétaires de celles-ci,
et à peine revint-il à un homme quelque chose [152] de son bien.
Ils s'emparèrent, en outre, de tous les entrepôts où se faisait le
commerce extérieur avec le pays.
Comme beaucoup de gens vivaient de la pêche du poisson des
rivières et en vendaient pour payer le tribut odieux qui leur était
imposé, un héraut fut envoyé [pour annoncer] : « Que quiconque
pécherait du poisson dans la rivière, ou placerait dedans des en-
gins (?) ou des nasses (?) sans la permission du çauphi, serait puni
de mort. )) Les hommes furent ainsi empêchés de pêcher. Et si on
parvenait à saisir un homme qui introduisît du poisson ou qui
jetât le filet, ils le frappaient de coups jusqu'à le faire mourir et
prenaient son bien. Ils exigeaient de celui qui voulait pêcher la
moitié de ce qu'il pourrait prendre. Alors que la pêche était ainsi
partout prohibée, des envoyés vinrent pour exiger des pécheurs
l'impôt dont ils étaient frappés. Ceux-ci l'imputèrent aux cam-
pagnes situées sur le fleuve. La même chose eut lieu sur toutes
les rivières. On savait où et combien chacun prenait, car ils occu-
paient les barques des passages \ et on prélevait la moitié du
produit.
i
1. Peut être faudrait-il traduire : passeurs.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 127
Dès lors ce fut l'angoisse pour tous et de tous côtés. Quiconque
échappait à Ja dime était pris par le gauphi, et parfois tous les deux
saisissaient un homme en même temps que ceux qui recherchaient
les fugitifs et ne laissaient de repos à personne.
De ceux qui recherchaient les fugitifs et du mal quUls faisaient,
«
Cette racinede persécution^ produisit un rejeton dans lequel, plus
que dans tous les précédents, se trouvait un poison mortel et
pernicieux.
Il établit sur toute la Mésopotamie un gouverneur chargé de faire
reconduire chacun à son pays. Quand celui-ci reçut cet ordre, il se
diâposa à causer tous les maux. [153] Il se choisit des hommes
impies qu'on peut appeler sans les calomnier bêtes féroces et oiseaux
de proie. Il les choisit et les envoya dans les villes. Il statua aussi
combien d'or chacun lui rapporterait de chaque ville. Il établissait
beaucoup de gouverneurs qu'il envoyait dans les villes de la Mésopo-
tamie. Il en faisait un pour chaque ville et les envoyait dans toutes
les villes, de sorte que dans un seul jour ou une seule semaine dix
gouverneurs entraient dans la même ville à propos de l'exiP.
Us s*attaquaient aux hommes comme des bêtes féroces, les déchi-
raient sans pitiéy vendaient tout ce qu'ils possédaient ou le gardaient
pour leur récompense.
Ils les faisaient entrer et les enfermaient dans les maisons jusqu'à
ce qu'ils périssent de faim. Beaucoup mouraient de faim, de froid
et des coups dont ils les accablaient afin de leur faire donner dos
zouz; car tout ce que possédaient ces pauvres gens ne suffisait pas
pour assouvir la cupidité de cet oiseau de proie qui s'était abattu
sur eux. Us ne se contentaient pas de cela, mais ils s'attaquaient
même aux habitants du pays, alléguant comme prétexte : u Quel-
qu'un des nôtres est chez vous. »
Leurs exactions et leurs dépenses s'élevaient au delà de ce
qu'ils percevaient pour la capitation et l'impôt. Quand quelqu'un
entrait dans un village ou dans une campagne, il y trouvait plus de
1. Mousa.
2. NoQs traduisons littéralement cette tautologie dont le sens qui a*est pas
très clair parait ôtre celui-ci : A chaque gouTerueur était attribuée une
ville qu'il devait repeupler en y ramenant ceux qui s'étaient enfuis. Pour
cela, il parcourait toutes les autres villes, afin de rechercher les fugitifs, et
tous ce prétexte commettait toutes sortes d'exactions, non seulement sur les
fogitifs, mais même sur les habitants du pays.
128 CHRONIQUE
quatre ou cinq gouverneurs. Si un homme s'enfuyait d'un village
pour aller dans un autre, aBn d'échapper, quelle que fût la route
par laquelle il s'en allât, il tombait entre les mains soitde celui qui
recherchait les captifs» soit de ceux préposés à la capitation, soit des
voleurs, car dès lors ceux-ci pillaient ouvertement et non plus
seulement la nuit. Et s'il échappait à ceux-ci, les paysans eux-
mêmes [154] lui faisaient subir tous les maux, sans craindre Dieu.
C'est maintenant qu'il faut dire avec le prophète Moïse ^ : « Un feu
s'est allumé par ma fureur, et il brûlera en bas jusqu'aux*enfers.
Il dévorera la terre et ses produits, et il brûlera les fondements des
montagnes. J'assemblerai sur eux des maux. J'exciterai contre eux
les dents des bètes férocesainsi que le venin des serpents qui rampent
sur la poussière. Au dehors le glaive les ravagera : et au dedans
l'épouvante. » Crois-tu que le prophète parle des bètes féroces et
des serpents qui appartiennent à la race des animaux ou des vola-
tiles? Non; mais il appelle ainsi ceux qui n'ont d'humain que
l'apparence, puisque toute la malice de l'aspic, de la béte sauvage
et de l'oiseau de proie se trouve dans leurs habitudes. En sorte que
le philosophe dit : « Je vois l'homme, mais je ne vois pas l'huma-
nité. )) Il voyait en effet l'image d'un homme. En ne voyant pas la
conduite d'un homme, mais bien celle d'une bote sauvage et d'un
oiseau de proie, le prophète surajoute encore et dit : « le venin des
serpents.))
Sache, 6 homme judicieux, que toutes ces choses se trouvaient
en eux, principalement une fureur qu'on ne pouvait calmer, mais
qui était comme le feu. Us n'avaient point de pitié, mais ils étaient
comme des loups dévorants blessés par un trait.
Les gouverneurs de la contrée étaient de ces chiens muets, qui
ne peuvent aboyer et se font les complices des voleurs. Ils leur
donnaient la main pour tous les maux et toutes les iniquités, et si
un pauvre dont le bien avait été volé venait se plaindre à eux. il
n'obtenaitaucun soulagement, car ils étaient assourdis par l'avarice,
et incapables de rectitude, parce qu'ils étaient sortis des voies de la
justice. Ils s'ingéniaient à saisir tout ce qu'ils rencontraient et
ravissaient le bien des pauvres qu'ils pillaient. [155]
Nous ferons aussi connaître les maux qui accablèrent les Arabes •
car personne n'échappa à la calamité qui survint à cette époque, à
cause de nos nombreux péchés.
1. Deut., xxxii, ii2-''24.
DK DENYS DE TKLF.-MAHRK 129
Du gottcerneur prépocé au sadâqat al-niâl des Arabes,
Toutes les habitudes d'un loup rapace sont pleines de fureur:
de même, toutes les tendances et toutes les démarches de celui-ci
étaient pleines d'oppression et de fureur.
Il établit donc un gouverneur pour le sadâqat al-mâl des Arabes.
Celui-ci fit de leurs personnes et de leurs propriétés un recense-
ment analogue à celui qu'on avait fait pour les Syriens. Il inscrivit
leurs champs, leur bétail, les produits de toute nature appartenant
à chacun d'eux. Si quelqu'un possédait un jardin de légumes, de
lin, ou môme de pois chiches, on l'inscrivait.
Comme rien de toi ne se trouvait dans leurs lois ou dans les
constitutions de leurs premiers rois, cette chose leur parut mépri-
sable et ils ne s'en préoccupèrent pas.
Quand il eut achevé d'inscrire tout leur bien, il s'arrêta, compta,
et fixa le montant de l'impôt. Il estima lacre à vingt-quatre
zouz. 11 fixa la dîme à percevoir des chèvres, des moutons, des
bœufs et des autres produits au taux élevé qui lui plut. De même
pour le blé. Il ne leur laissa rii^n sans le recenser : ni les abeilles,
ni les pigeons, ni les poules. Et s'il se trouvait dans les terres d'un
Arabe un champ ensemencé de pois chiches, ils l'inscrivaient
comme un champ de froment ou d'orge, ou comme jardin.
Quand ils eurent réglé l'impôt, et taxé chacun selon son bien,
alors arrivèrent des gens de 'Aqoula et de Boçra, plus méchants que
la vipère, des gens violents, impies, sans miséricorde, qui ne
craignaient point le jugement de Dieu, qui ne respectaient point
les vieillards, [156] n'avaient point pi lié des veuves et dépouillaienl
les orphelins. De telles gens vinrent percevoir Timpôt. Dès lors on ne
voyait plus qu'arrestation et emprisonnement d'hommes honorables
et de vieillards. Ils les accablaient de coups et de tourments de tous
genres. Ils suspendaient à une corde, par un bras, des hommes
lourds et corpulents, jusqu'à ce qu'ils fussent près de mourir.
En théorie, ils devaient prendre le dixième; mais [de fait] quand
les Arabes vendaient tout ce qu'ils possédaient, ils ne parvenaient
pas à réunir ce qu'on leur demandait. Ils essayaient de leur per-
suader de prendre suivant la loi établie par Mohammed, leur chef et
législateur, et par les premiers rois, c'est- à-dire de prendre à chacun
selon ce qu'il possédait, du blé à celui qui avait du blé, du bétail à
celui qui avait du bétail. Mais ils n'y consentaient point et leur
disaient: « Allez- vous-en. Vendez votre bien comme vous l'en-
tendrez, et donnez-nous de Tor. »
9
130 CHRONIQUK
En vérité ici le méchant fut puni par le méchant. Il y a une
parole profane qui dit que les maléfices sont vaincus par les malé-
fices, et les drogues^ par d*autres drogues qui sont plus amères et
plus violentes que les aspics.
Ces Arabes pénétraient, comme lever dans le bois, au milieu de
ces malheureux paysans, et prenaient leurs terres» leurs maisons,
leurs semences et leur bétail, de sorte qu'ils étaient sur le point de les
prendre eux-mêmes ainsi que leurs enfants, comme esclaves; en tout
ce qu'ils possédaient, ces paysans travaillaient pour eux comme
des esclaves. Ils ne trouvaient aucune sécurité près du serpent
tortueux, c'est-à-dire près de Mousa Ibn Mouç*ab, qui mit en œuvre
toutes ses ruses pour les perdre.
On n'entendait parler de tous côtés que de coups et de cruels
supplices, [157] et parfois, de plus, les Arabes firent périr les
paysans qui habitaient dans leurs terres, car ils les imposaient et
les forçaient à payer avec eux, jusqu'à ce qu'ils les eussent ruinés et
qu'ils se fussent emparés de tout ce qu'ils possédaient. Ils s'en-
fuirent de leurs demeures. Comme c*était le début de la calamité
et le commencement de la dévastation, et qu'il y avait encore des
ressources suffisantes, ils ne furent pas absolument réduits à périr;
mais ces gouverneurs pervers ne se rassasiaient pas non plus. Ils
estimèrent un acre à vingt-quatre zouz; trente bœufs pour une génisse
de choix, et chaque génisse à douze zouz; quarante bœufs pour
une vache, et chaque vache à vingt-quatre zouz, alors qu'au marché
elle n'en valait pas quatre ; ils taxèrent chaque ruche d abeilles à
un zouz.
Leur malice ne s'en tint pas là et ne cessa pas pour cela. Ils
taxèrent tous les autres revenus, un à un, selon leur gré.
Comme ils traitaient les habitants sans pitié et sans respect pour
les vieillards et les hommes honorables qui étaient parmi eux,
quelques-uns descendirent près de Mousa pour se plaindre et les
accuser. Celui-ci leur fit remise de douze mille [dinars]. Mais
comme il est écrit : « Le méchant ne peut devenir bon*; et si
par hasard il devient bon, c'est parce qu'il s'oublie, * ainsi celui-ci
s'oublia, en faisant le bien; mais il rentra en lui-même et leur
réclama de nouveau ces douze mille [dinars]. C'est chose difficile,
en effet, que le fiel devienne doux, et que les épines produisent des
dattes.
Et parce que toute cette sordide fureur qui fondit sur les hommes
1. Litt. : Les tbériaques.
2. Cf. J?cc^., 1,15.
DE DENYS DE TELL-MAHRf: 131
dans la perception de la capîtation a duré longtemps, que per-
sonne, mes frères, ne blâme Técrivain s'il passe sous silence le
récit de la plupart des maux qui s'abattirent sur nous; [158] car,
si tous les hommes devenaient chroniqueurs, si tout le bois était
changé en calâmes, et tout le vin en encre, ils resteraient encore en
deçà de la fin des maux qui accablèrent la région, et ne suffiraient
pas pour écrire et raconter ce qui arriva dans la contrée.
Nous passons donc maintenant à d'autres choses, afin d'en laisser
quelque souvenir à ceux qui viendront après nous dans le monde.
De ce signe qui s^était montré précédemment dans la région
du Nord et apparut de nouveau en cette année.
Dieu parla autrefois par ses prophètes à la nation rebelle; à la
fin il a parlé par son Fils chéri à tous les enfants d'Adam ^ ; et
maintenant à nous, enfants de colère, qui ayant les paroles des
prophètes, les promesses que le Sauveur a faites à son Église, les
avertissements des Apôtres, avons endurci nos cœurs, clos nos
yeux, fermé nos oreilles, pour ne point voir de nos yeux, ni entendre
de nos oreilles, ni comprendre dans nos cœurs les paroles vivi-
fiantes de noire Sauveur, afin de nous convertir de notre malice et
de vivre, il nous a montré dans le ciel des signes qui manifestaient
ses menaces contre le peuple incrédule qui les voyait. Il attestait
aux hommes prudents la grandeur de notre malice et la colère de
sa justice qui nous menaçait.
Le signe qui était apparu l'année précédente dans la région
.septentrionale apparut de nouveau cette année, au mois de Haziran
[juin], un vendredi ; car, pendant les trois années consécutives où il
se montra, il apparut un vendredi. 11 s'étendait depuis l'Orient
jusqu'à l'Occident. Lorsqu'on se mettait à l'observer, il prenait
divers aspects; quand un rayoù rouge disparaissait il s'en levait
un vert, [159] quand le vert disparaissait le jaune se levait, quand
celui-ci disparaissait, le noir se levait.
Il signifiait que la terre n'aurait pas qu'une calamité à supporter,
mais qu'elles se succéderaient les unes aux autres, comme il nous
arriva réellement.
L'aspect de ce signe était tel qu'il a été indiqué plus haut'.
1. Cf. Hebr., i, 1, 2.
2. Cf. page 112.
133 CHRONIQUK
De la perception de V impôt de capitation en cette première
année de calamité.
<( O mon peuple, entre dans tes chambres, ferme tes portes sur
toi et sur tes enfants, et reste tranquille jusqu'à ce que mon indi-
gnation soit passée \ » Le même prophète dit encore': « Ne crains
pas Assur, 6 mon peuple, lorsqu'il te frappera de son bâton ; car
encore un peu, et ma fureur sera achevée. » Et, en considi'rant
d'un œil prophétique ce temps malheureux, la ruine du peuple,
des prêtres, du temple saint, et la disparition de la joie parmi les
hommes, un autre prophète s'écrie et dit* : « Révélez- vous de sacs,
tressaillez et lamentez-vous, ministres de l'autel; entrez, couchez
sur les sacs, ministres de mon Dieu; car le sacrifice et la libation
ont disparu de la maison de votre Dieu. Sanctifiez le jeûne, appslez
l'assemblée; que les anciens et que tous les habitxints de la terre se
réunissent dans la maison du Seigneur votre Dieu; criez vers lui
et dites : Ah, ah, jour ! Car le jour du Seigneur est proche et la
dévastation de Dieu viendra. »
Voici que devant nos yeux les mets ont disparu de la maison
de notre Dieu, ainsi que la joie et l'allégresse. La joie et l'allé-
gresse ont disparu d'entre les hommes; les dimanches et les fêtes
ont cessé; le sacrifice et la libation n'ont plus lieu sur le saint
autel; nos fêtes ont été changées en deuil, notre joie en tristesse,
notre allégresse en angoisse « En ce jour, dit Isaïe', le Seigneur
humiliera les plus nobles des filles de Sion [160] et le Seigneur
mettra leurs formes à découvert. » Au jour indiqué, le Seigneur
enlèvera la gloire des filles de la sainte Église, et aux femmes
nobles leurs vêtements, leurs ornements, leurs couronnes, les dia-
dèmes de leurs cheveux, les parures de leurs fronts, les ornements
de leurs visages, leurs pendants d'oreilles, leurs colliers, leurs bra-
celets de toute sorte, leurs soieries, leurs tuniques, leurs voiles, leurs
vêtements fins, leur pourpre, leurs robes, leurs étoffes violettes et
écarlates et toute la parure de leurs ornements. Et elles auront du
vinaigre au lieu d'un parfum suave, au lieu de ceinture des chaînes,
au lieu d'une chevelure frisée lacal vitie, au lieu d'étoffes violettes la
1. Is., XXVI, 20.
g. Cf. I8., X, 24-23.
3. JoKL, I, 13-15.
4. Cf. le., m, 17-24.
DE DKNYS DE TELL-MAHRÉ 133
bareei des haillons. Elles circuleront avec leurs filles de village en
village, de maison en maison, affamées, dépouillées, languissantes.
Venons-en maintenant à l'époque [indiquée] et montrons ce qui
s'est passé.
D*abord survint un gouverneur pour percevoir la capitation. Il
proclama la paix et dit : « Restez en paix et ne craignez point. Je
viens percevoir le nouveau cens et je ne prendrai pas un district
pour an autre, ni un village pour un autre, ni un homme pour un
autre. » Ils pensèrent que la vérité était sur sa langue. Ils le
crurent et ils restèrent. « Ses paroles sont plus douces que le miel
et ce sont des dards * . »
Or, il prit la capitation et la fit percevoir de chacun dans son ^
village. Il leur envoya de nombreux gouverneurs, et établit dans
chaque village deux ou trois préfets qui établirent à leur tour un
intendant par dix hommes, et deux chefs de district pour chaque
district, avec plusieurs auxiliaires. Ainsi ils sortirent comme des
loups dévorants qui tombent sur un troupeau de moutons. Les
routes étaient pleines de courriers qui allaient et venaient, rapides
comme Téclair. De sorte que s*il y avait 1 161] dans un village dix ou
vingt exacteurs, ou bien il fallait leur donner ce qu'ils deman-
daient, ou bien ils éventraient les sacsetprenaientce qu'ils voulaient:
et il n'y avait personne pour leur en demander compte. Ils pillèrent
et dépouillèrent les veuves et les orphelins. Ils emmenèrent tout le
bétail et le vendirent. Les paysans eux-mêmes maltraitèrent les
pauvres qui se trouvaient parmi eux.
On paya le premier tiers' : et il n'était pas encore soldé com-
plètement lorsque arriva un autre gouverneur qui congédia le pre-
mier et demanda le second tiers. Mais celui qui avait exifi:^ et
fait payer le premier tiers, demandait audacieusement et sans
pudeur à être indemnisé de ses dépenses. Il perçut ainsi et s'en
alla « comme le vent qui va et ne revient pas' », alors qu'on
croyait à son retour. Si quelqu'un dit que dans [la perception de]
ce premier tiers, les envoyés perçurent un autre tiers [par leurs
exactions], il ne se trompe pas; sans parler du brigandage du gou-
verneur, des chefs de district et des préfets.
1. Cf. Ps. LV, 21.
2. La perception de l'impôt était, àcequllsemble, répartie en trois termes.
3. Cf. ÉzKcH., I, li.
134 CHRONIQUE
Du second gouverneur.
Celui-ci fut un homme rusé et astucieux, rapace, avare, compa-
gnon des voleurs, de sorte que manifestement et sans pudeur,
il était avide de prendre le bien des gens. Quand quelqu'un venait
le trouver pour obtenir justice, il s'attribuait et prenait tout ce
qu*il faisait rendre au voleur. Ses paroles étaient alléchantes
comme le miel, et à la fin elles étaient pires que Tabsinthe et le
fiel. Il se choisit pour courir devant lui, des hommes qui avaient
^ banni la crainte de Dieu de devant leurs yeux, et les envoya
comme des loups, dans le pays. [162]
Il prescrivit aux préfets de percevoir d*abord la part de Témir
quand ils feraient la perception. Quand les chefs de district et les
gouverneurs entraient dans un village, ils saisissaient le préfet de
Tendroit et lui faisaient apporter tout ce qu*il avait perçu. Ils
perçaient le sac et en prenaient ce qu'ils voulaient en disant :
« Ceci est la part de Témir. » Ils frappaient sans pitié des hommes
honorables et des vieillards aux cheveux blancs. On n'entendait
plus dès lors de tous côtés qu'un cri lamentable.
Il prêtait aussi la main à tous les gouverneurs chargés de
rechercher les fugitifs : car il était complice de leur brigandage. 11
les envoya jusqu'aux frontières extrêmes et les chargea [de per-
cevoir] un triple ou un quadruple droit de capitation. 11 s'ingénia
à faire subir au peuple de Dieu toutes sortes de maux cruels.
Les grands de la ville eux-mêmes lui donnaient la main, parce
qu'il leur promettait de grandes choses. Partout il exigeait le tribut
pour lui-même et non pour le trésor royal.
Les maux se multiplièrent sur la contrée : l'exil, les exacteurs
qui réclamaient ce qui était dû par un homme mort depuis vingt
ans, et prenaient sans miséricorde plusieurs fois le même impôt;
bien des maux encore, [tels que] les taxes exagérées, et d'autres
qu'il est impossible d'éuumérer à cause de leur grande multitude.
Cet homme était enclin au mal. On n'avait pas encore perçu le
premier et le second tiers, quand ce pervers fît faire un état de
la totalité du pays des Arabes et des Syriens. Personne n'en eut
connaissance, excepté quelques-uns de ceux qui étaient aussi
pervers que lui, et qui participaient à ses rapines. Il écrivit dans
ce livre : « Nous nous contentons dans notre bonne volonté décent
vingt mille [dinars]. Nous n'admettons ni privilège, ni absence, ni
réclamation (?) » Il écrivit aussi dans ce même livre [163] le nom
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 135
et le bien de chaque chef de village, et il envoya le livre au prin-
cipe de tous les maux, à Ibn Mouç'ab. Je suppose que tout ce mal
provenait de ce principe : car tous les gouverneurs qu'il avait
établis faisaient la même chose.
Le gouverneur reçut un ordre lui prescrivant de descendre,
avec les notables du pays, près de Mousa. Il rassembla donc
les notables et les envoya près de celui-ci. 11 conclut en même
temps un pacte avec ceux de la ville qui descendaient, leur promet-
tant de belles choses pour qu'ils fissent son éloge en présence de
Mousa, quand ils seraient descendus. 11 leur donna même les frais
du voyage. Mais ce dessein n'échappa pas aux habitants de la cam-
pagne et dès lors ils devinrent mutuellement adversaires et enne-
mis. Et ainsi pendant toute la route, ils se disputèrent entre eux;
car les habitants de la ville l'aimaient et ceux de la campagne en
demandaient un autre. A la fin, le parti des paysans l'emporta sur
celui des citadins, surtout quand ceux-ci eurent appris le mal qui
les menaçait par cet état de la fortune qu'il avait dressé et envoyé
à Ibn Mouç^ab. Ils cessèrent de le demander et en amenèrent un
autre qui fit avec eux une convention pour soixante-dix mille
[dinars] et se mit en route.
Du troisième gouverneur.
Celui-ci fut le complément de la trinité de colère. Il fut plus
mauvais que ses compagnons : car il était poussé sur une racine
mauvaise où il avait puisé la force et l'habileté pour tous les maux.
£t s'il n'ajouta point aux maux causés par ses prédécesseurs, il ne
les diminua en rien, il fut, comme ses compagnons, voleur et
associé de voleurs. Il fit subir aux pauvres toute sorte de maux
et de calamités. [164] Il s'empara de leur bien et fit vendre tout ce
qu'ils possédaient. Il répandit l'injustice sur beaucoup de gens.
Car ils s'emparaient d*un pauvre et le faisaient périr par divers
supplices. Quand ils savaient qu'il ne pouvait rien donner parce
qu'il ne possédait rien, cesgouverneursqui étaient des juges iniques,
lui disaient : « Sors sur la place publique, observe quelqu'un que
tu saches posséder quelque chose et dis : J'ai déposé mon bien chez
cet homme, ou encore : Il est mon débiteur. » Et ce malheureux,
opprimé à droite et à gauche, par devant et par derrière, en haut et
en bas, était poussé par la crainte de Dieu à ne pas porter un témoi-
gnage inique contre cet homme, et il était empêché de s'en abstenir
par les supplices que lui infligeaient ces juges impies. Et alors il
136 CHRONIQUE
prenait Dieu à témoin qu*il était contraint de faire ces choses, et que
ce n'était pas de sa propre volonté qu'il était conduit à porter un
témoignage inique contre ceux qu'il n'avait jamais vus ou qu'il
ne connaissait pas. Et que dire à ce sujet, si ce n est qu'il préférait
le mal au bien et le mensonge aux paroles de justice; et qu'en vérité
ces juges aimaient ceux qui tiennent des discours mensongers, que
les langues trompeuses leur étaient plus agréables que celles qui
disent la vérité, que tous prononçaient l'injustice, que leurs mains
trempaient dans toutes les œuvres iniques? S'il se trouvait uu
homme qui ne connaissait pas et ne pratiquait pas Timpiété, ils lui
enseignaient toute sorte de voies détestables.
Cet impie alla dans toutes les villes montrant bien qu'il avait
pris racine sur Mousa. Il réunit toutes les chèvres, les moutons,
les bœufs, tout le bien des pauvres gens. Il vendait deux
chèvres pleines pour un zouz, deux ou trois brebis pour un zouz,
cinq boucs pour un zouz, un âne pour deux zouz, un bœuf de
labour pour trois zouz, une vache [165] forte et prête à mettre bas
pour trois ou quatre zouz. Le froment s'étiolait et périssait dans les
champs à cause de la sécheresse dont nous parlerons. Les hommes
se tendaient mutuellement des embûches. Toutes les langues étaient
remplies de fausseté, tous marchaient dans le mensonge.
Jérémie contemplait ces choses d'un œil prophétique lorsqu'il
disait^ . a Que rhonime se garde de son voisin, qu'il ne se fie
aucunement à son frère, car tout frère cherche à supplanter [son
frère], tout ami marche dans la fraude. L'homme trompe son pro-
chain ; ils ne disent point la vérité, ils ont dressé leur langue à dire
le mensonge, et pour cela ils sont surexcités et fatigués, m
Parce qu'ils étaient réunis pour la fraude et y persistaient, à
cause de leur iniquité, ils ne connurent point le Seigneur. Tous
étaient fourbes, tous étaient pleins de perversité; tous couraient
dans le mal; il n'y avait personne qui fit le bien. Ils enterré tous
ensemble. Ils ont été répudiés, car leurs chefs allaient de malice
en malice et couraient d'iniquité en iniquité. Ils dépouillaient et
pillaient les pauvres qui étaient parmi eux comme des agneaux tom-
bés au milieu des loups; ils leur firent subir toute sorte de maux
et vendirent leur bien qui suffit à peine pour payer la capitaiion,
sans parler des autres caliimiiés qu'ils eurent à souffrir : [de la part]
de ceux qui recherchaient les exilés, de ceux qui enlevaient le
K^tail ', [des préposés] à la dîme, au çauphi, au ta'dil. Quiconque
1. JÉR., IX, 4-5.
^' JaJ «4 ^^ Jo^l yt» ^^<^^s où l*on attache les bestiaux, étabUt. Ce s6oa
DE DENYS DE TEl.L-MAHRÉ 137
se trouvait plus imposé par le nouveau taMil devait payer selon le
nouveau; celui qui se trouvait moins imposé devait payer selon
l'ancien. De sorte que de tous côtés c'était loppression et l'amertume.
De la concention * de celle année»
Nous irons de maux en maux. Celui qui échappera à Tun sera
saisi [166] par un autre pire que le premier. Les exacteurs, persua-
dés que personne ne leur en demanderait compte, taillaient et impo-
saient les gens sans pitié ni miséricorde. Les chefs des villages
étaient eux-mêmes compagnons des voleurs et pires que ceux-ci.
Ils avaient recueilli les soixante-dix mille [dinars]*, mais ils
exigèrent sans pitié trois fois autant. Ils disaient : « Tel village est
ruiné et ne peut être imposé, » et ils demandaient de nouveau ce
qu'ils avaient tiré de ce village, et le dévoraient de concert avec les
chefs.
Quand ils sortirent pour percevoir le tribut, après avoir statué
ce qui incombait à chacun, tous les pauvres furent livrés au
pillage. Ils prirent le bien des riches qui se trouvait dans leurs
campagaes, et il ne resta rien à aucun d'entre eux. S'il se trouvait
que quelqu'un possédant du béiail était d'un autre village, ils ne
lui laissaient rien, prenaient et vendaient tout.
Ils se jetèrent aussi sur les passants. 1 Is saisissaient quiconque al-
lait ou venait, prenaient son bétail et son bien et le vendaient. Sept
brigands sortaient ensemble et formaient une troupe à Tinstar de
l'émir. Ils prenaient ouvertement le bien de tous ceux qu'ils ren-
contraient, en disant : « N'ous exigeons ta contribution. » — Dès
lors on n'entendait plus de toute part que le cri des lamentations.
Si quelqu'un s'enfuyait du village, ils ledépouillaientsur la roule. S'il
échappait sans être dépouillé sur la route, le village memeoù ilcou-
raitchercher un refuge remplissait àson égard l'office des brigands,
des assassins, des détrousseurs de chemins. Si quelqu'un sortait
dans le désert, les voleurs arrivaient à sa rencontre comme des
lions; s'il circulait dans le pays habité, il en trouvait d'autres
semblables à des loups. S'il entrait dans un village, les paysans le
mordaient comme des serpents; s'il allait près des notables pour
trouver du secours, [167] ils remplissaient vis-à-vis de lui l'office de
parait iadiqiiô par ce qu*on dit plus bas de reiilèvemeot du bétail. C(r,
p. 194.
1. C'est-à-dire : la fixation de l'impôt.
2. Cf. ci-dessus, p. lo5.
138 CHRONIQUE
scorpions, et le dépouillaient. Le préfet * le traitait trois fois plus
mal que le gouverneur ou le voleur, il exigeait trois fois plus
qu'il ne devait. On disait à Tautorité' : « Cet homme doit tant, »
et on le frappait à mort en disant : « Paie. » Et personne ne
demandait compte au préfet de son brigandage.
De misérables gens d'entre les Arabes et les Syriens sortaient
dans les environs de la ville, sur les routes ou dans les moulins,
et s'emparaient des pauvres. Ils leur disaient : « Venez, voici que
l'émir vous demande. Venez payer votre contribution. » Et ils
dépouillaient et dévalisaient complètement tout le monde. Chacun
s'enfuyait des environs de la ville comme d'une fosse pleine de
serpents.
Les pauvres eurent encore à souffrir d'une autre calamité.
Quand étaient venus les marqueurs, ils s'étaient enfuis et avaient
cherché un refuge près des préfets et des chefs de district, et comme
ils craignaient les exacteurs et ceux qui recherchaient les
exilés, ils leur demandèrent à se mettre sous leur protection. Or,
quand eut lieu la répartition, les préfets les imposèrent et remplirent
à leur égard l'office des exacteurs et de ceux qui recherchaient les
exilés. Quelqu'un qui n'était jamais entré dans le village était taxé
pour trente ou quarante [dinars].
A Édesse, plus que dans toute autre ville, les notables eurent à
souffrir de cette répartition. On avait établi sur eux un homme cruel
nommé Razin. Quand il avait pris et jugé un pauvre qu'il savait ne
rien posséder, il le faisait accompagner de deux gardes et lui disait:
« Sors sur la place publique, cherche quelqu'un et dis-lui : Réponds
pour moi ; puis prends la fuite. » Celui-ci consentait à cela, des-
cendaitsur la place et abordait quelqu'un. Alors [les gardes] le lais-
saients'enfuirets'emparaientderhomme; et[168] sansque celui-ci
eûtditun mot, ils l'entraînaientetleconduisaient àTémir. « Tu as
répondu pour celui-là, disaient-ils, donne ce qu'il doit. » L'autre
1. Ce mot parait désigner en divers passages les cheiks des villages, mais
il semble qu'il s'agit ici du collecteur local des impôts.
2 . C'est-à-dire, à ce qu'il semble, au chef de l'escouade de soldats mise &
la disposition du collecteur d'impôts comme cela se pratique encore' actuel-
lement en Turquie. J'ai été témoin, en 189;!, de faits de ce genre k Gifné,
en Palestine. Un paysan qui faisait difficulté de solder la somme qu'on exi-
geait de lui fut saisi sur l'ordre du fermier des impôts par trois soldats. L'un
le tenait par la barbe, l'autre par les pieds et le troisième le frappait violem-
ment sur le dos, jusqu'à ce que le malheureux se décidât à aller emprunter
à un taux exorbitant, chez un juif du voisinage, la somme demandée, qui
dépassait de beaucoup, m'assurait une personne digne de foi, la totalité de
sa récolte très médiocre en cette année.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 139
jurait : a Je n*ai pas répondu pour lui ; je ne le connais pas même. »
Mais ils lui mettaient des entraves aux pieds au point que ses
jambes étaient brisées, et ne le lâchaient pas avant qu'il eût apporté
la somme fixée.
« 11 arrivera en ce jour du sacrifice du Seigneur que je visiterai les
princes, les Bis des rois» et tous ceux qui se couvrent de vêtements
étrangers. Je visiterai en ce jour-là tous les pillards et les voleurs
qui remplissaient leurs celliers de rapine et de fraude \ » Voilà ce
que nous a appris le prophète Sophonie qui parle « du jour du
sacrifice du Seigneur ». Quel est le jour du sacrifice du Seigneur»
sinon celui de la sainte Passion de notre Sauveur, époque à laquelle
toutes les années de calamité nous accablaient de maux, au point
que les fêles étaient converties en deuil? Et quels princes, quels fils
de rois, quels voleurs, quels pillards remplissaient leurs maisons
par la fraude et le pillage des pauvres, des orphelins et des veuves
plus que les Édesséniens? Maintenant les choses écrites ont été ac-
complies. Leur sagesse et leur intelligence a péri ; ils ont recherché
une seule chose avec leur sagesse et ne l'ont pjis trouvée. « Je per-
drai la sagesse* des sages et je ferai disparaître leur prudence '.
Alors leur bien sera livré à la déprédation, et leurs demeures à la
destruction. Ils bâtiront des maisons et ne les habiteront point; ils
planteront des vignes et ne boiront pas de vin. Le jour du Seigneur
est proche, il s'avance rapidement. Jour amer et cruel, jour de
colère, de lamentation, d'angoisse, de calamité, de ruine, de ténè-
bres, d'obscurité, sur les villes fortes et les retraites élevées. Les
hommes seront opprimés et ils marcheront comme des aveugles,
car ils ont péché contre le Seigneur *. f 169] — Cela leur arrivera à
cause de leur orgueil *. » Tout cela est arrivé ; rien n'a été atténué.
Le monde entier ne suffirait pas à écrire les nombreux maux que
les pauvres ont eu à supporter. Leurs exactions ne connaissaient
ni commencement ni fin, et ils n'étaient point rassasiés du butin
qu'ils avaient pillé.
Sur son ordre, tout le peuple fut rassemblé et enfermé dans une
église de la ville.
1. SOPHON., I, 8, 9.
?. I^ texte porte : « sottise » mais par transposition fautire du eao. Cf. la
rotace du texte syriaoue.
1. SOPHON., I, 8, 9.
?. I^e texte porte : « ,_
protace du texte syriaque.
3. Cf. la., XXIX, 14 ; / Cor.^ i, 19.
4. SoPHON., I, 13. 15, 17.
5. SoPHON., II, 10.
140 CHRONIQUE
De V emprisonnement dans une égliêe qui eut lieu en cette année.
(( Jérusalem a commis le péché, c'est pourquoi elle a été trans-
formée; tous ceux qui Thonoraient l'ont méprisée, parce qu'ils ont
▼u son ignominie; elle a gémi et tourné ses regards en arrière.
L'oppresseur a étendu la main sur tous ses objets précieux; elle a
vu les nations entrer dans ton sanctuaire, alors que tu avais prescrit
qu'elles n'entrassent pas dans rassemblée. Le Seigneur a oublié son
sanctuaire, il a répudié son autel, il a livré aux mains de l'ennemi
les murs de ses tours. Celui-ci a élevé la voix dans la maison du
Seigneur comme en un jour de fête ; il a arraché sa tente, comme
un jardin ; il a détruit ses solennités. Le Seigneur a fait disparaître
de Sion ses fêtes et ses dimanches (sic) ; il a répudié dans l'ardeur
de sa colère le roi et les prêtres \ »
Qu'il vienne maintenant, le prophète Jérémie, et qu'il considère
de ses yeux toutes les choses qu'il a prophétisées : elles ont reçu
de fait leur accomplissement.
Quand l'inique gouverneur* leur ordonna de se rassembler et
décréta que quiconque cacherait un homme serait puni de mort,
des satellites sortirent pour réunir tout le peuple de la ville.
Ils firent des perquisitions dans les maisons et contraignirent tout
le monde d entrer dans Téglise : riches et pauvres. Si le maître de
la maison étaitabseut. ils faisaient descendre sa famille. S'ils Irou-
vaientun homme caché, ils le tuaient en le frappant [170] ainsi que
le maitre de la maison dans laquelle il était caché, et ils vendaient
tout ce qu'il possédait. Ainsi ils furent tous enfermés, Arabes et
Syriens, depuis le plus petit jusqu'au plus grand. Ces impies mon-
tèrent et siégèrent au milieu du sanctuaire. Ils s'emparèrent de
quiconque avait la réputation de posséder une obole et la lui
enlevèrent. [Ces malheureux] obéraient même leur bien et celui de
leurs femmes, pour payer ce qu'ils ne devaient pas; car on leur
disait : « Tu dois payer pour tel village. »
L'iniquité a levé la tète parce que la vérité a péri. Le mensonge
s'étale au grand jour parce que la justice n'est plus. Il fit donc subir
aux hommes tous les maux. Il vendit tout ce qu'ils possédaient et
s'en attribua le prix. Ils souillèrent l'intérieur de l'église, parce que
tous, hommes et femmes, y déposèrent leurs excréments, car ils y
restèrent trois jours et trois nuits. Ils la dévastèrent, et il s'éleva
1. Thron., i. 8,10; ii, 7,6.
2. Razin.
DE DKNYS DE TELL-MAHRK 141
d'elle une odeur de putréfaction au lieu du parfum agréable. C'est
ici que lesgentih sont entrés dans Théritage de Dieu, qu'ils ont
souillé le templesîiint,qu*ils ont converti en latrines l'église saiule\
Les marchands et ceux qui avaient fourni la somme totale
demandèrent aux paysans de leur écrire une reconnaissance; mais
aucun ny consentit. Les premiers se plaignirent vivement au gou-
verneur inique qui dit aux paysans : « Écrivez-leur, si vous voulez. »
Et ainsi ceux qui voulurent bien écrivirent, et ceux qui ne voulurent
pas n'écrivirent pas. D'ailleurs, ce qui fut écrit ne servit à rien,
car il parut un édit et un héraut publia : « Que personne n'ait à
payer, que personne n*ait à réclamer une dette ancienne ou
récente. »
Alors les marchands et les habitanfs de la ville qui avaient été
traités injustement descendirent près de Mousa Ibn Mouç'ab pour
se plaindre de Tinjustico dont ils avaient été victimes. Mais ils
étaient à^ns l'erreur et l'aberration de l'esprit : car ils demandaient
justice à un homme inique, et ils pensaient que tout cela ne venait
pas de celui-ci. Non seulement il neleur rendit pas leur bien, [171 J
mais il s'emporta contre le gouverneur parce qu'il n'avait pas
demandé trois fois plus.
Ibn Mouc'ab descendit près du roi à Bagdad. Tout le peuple de la
région de Mossoul et de la Mésopotamie se réunit pour descendre
à sa suite près du roi. Ils étaient là des milliers et des myriades,
qui se lamentèrent et déplorèrent devant le prince, pendant plus
de cinq ou six mois, l'injustice dont ils avaient été victimes de la
part d Ibn Mouç^ab. Personne ne trouva de secours, mais ils furent
pris du mal des entrailles et de diverses maladies, et il n'en re-
monta pas la moitié. Ils revinrent de là sans avoir fait autre chose
que du mal à eux-mêmes et à leurs contrées. (( Quand le roi est
inique, tous ses ministres sont iniques*. )>
Des dioers supplices que les hommes eurent à subir à cette époque.
Ce n'est pas une folie que de placer cela dans ce récit lamentable.
Peut-être ceux qui viendront après nous, en voyant notre châli ment,
craindront-ils le Seigneur? Il est écrit: (( L*insensé est puni et le
sage se corrige*. — Voici que je nourrirai ce peuple d'absinthe, et
l.Cf. Ps. LXXIX, 1
2. Cf. Proo., x.\ix, U.
3. Cf. Prœ,, XIX, *5.
142 CHRONIQUE
je lui donnerai à boire des eauxamères ; je les disperserai au milieu
de nations qu'ils ne connaissaient point \ • — En vérité (( il a placé
la tribulation sur nos épaules * » par le moyen des bâtons avec les-
quels ils frappaient des coups nombreux et mortels. — Il a fait
monter un homme sur notre tète'. Les hommes cruels ont exercé
leur cruauté sur notre dos> ils ont prolongé leur iniquités Les
Assyriens sont venus sur nous portant dans leurs mains la verge de
colère et des lances solides avec lesquelles ils donnent les coups du
Seigneur ^ Les prophètes ont annoncé ces choses d'avance, et nous,
nous en avons vu la réalisation sous nos yeux, nous Tavoiis touchée
de nos mains, sentie sur notre corps. Maintenant nous n^en avons
plus Taudition, mais bien la sensation. [172j
D*abord ils se fabriquaient des bois larges de quatre doigts et
plats des deux côtés, puis ils étendaient un homme le visage
contre terre, et ils se plaçaient un sur sa tête, un autre sur ses pieds,
tandis qu'un troisième frappait sans pitié sur ses cuisses, comme
sur une peau. Et alors fut accomplie [cette prophétie]: « Ils ont
placé la tribulation sur nos épaules, » et celle-ci : a Tu as fait monter
des hommes sur notre tèteV »
En second lieu, ils apportaient deux bâtons, les serraient d*un
bout avec des fers, et les appliquaient aux cuisses d'un individu, un
par dessus et Tautre par-dessous, puis un homme robuste se
plaçait à l'autre extrémité, jusqu'à ce que les cuisses fussent
brisées. Et ainsi fut accomplie [cette parole] : « Il a placé mes
pieds dans des entraves'. »
En troisième lieu, ils les suspendaient par les bras, jusqu'à ce
que leurs membres se disloquassent, et môme les femmes par leurs
mamelles, jusqu'à ce qu'elles s'arrachassent.
En quatrième lieu, ils les dépouillaient de leurs vêtements, les
chargeaient de pierres et les plongeaient ainsi dans la neige et dans
la glace. Ils versaient aussi sur eux de l'eau froide jusqu'à ce qu'ils
devinssent inertes et tombassent la face contre terre.
Cinquièmement, ils prenaient cinq bois, ils les fendaient tous
par un bout, faisaient entrer dans cette fente les doigts de quel-
qu'un, et serraient l'autre bout jusqu'à ce que les deux parties
1. JÉRÉM., IX, 15,16.
2. Pa. Lxvi, 10.
3. Cf. P8. LXVI, 11.
4. Cf. Ps. cxxviii, 3.
D. \jI t 18., X, D.
6. P«. LXXVI, 10, 11.
7. Cf. JoB, xxxj, 27.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 143
fussent réanies et les doigts brisés. Ils prenaient aussi deux
planches qu'ils liatient ensemble par un bout et les plaç<Lient une
sous les reins, l'autre sur le ventre, puis un homme se tenait
sur l'autre bout jusqu'à ce que les côtes fussent brisées et les
entrailles sur le point de sortir.
Ils fabriquaient des entraves pour les bras et pour chaque
membre. Ils aiguisaient des roseaux et les faisaient entrer sous les
ongles. Ils faisaient des sortes de boulettes qu'ils plaçaient dans la
cavité oculaire [173] jusqu'à ce que les yeux fussent sur le point de
sortir. Ils les faisaient se tenir pieds nus et sans vêtement dans la
neige et dans l'eau jusqu'à ce qu'ils devinssent pâles comme des
morts. Ils tournoyaient de gros bâtons et les frappaient sans pitié
tandis qu'ils étaient étendus à terre. Pour eux, les fouets étaient
inutiles, et la prison n'était pas nécessaire.
« Des princes ont été suspendus par les mains, » dit le prophète\
Qu'il vienne et qu'il voie ici les princes suspendus. Et non
seulement cela, mais suspendus entre ciel et terre, tandis que les uns
les frappent à coups de gros bâtous, et les autres leur mettent des
entraves aux pieds.
Us n'attendaient pas qu'ils aient fini d'infliger un supplice pour
passer à un autre. Et (( ils grinçaient des dents et battaient des
mains*. )) Ils voulaient accumuler à la fois tous les genres de supplices
sur leurs corps. Ils les jetaient nus dans la neige; ils rassemblaient de
grosses pierres qu'ils plaçaient sur leur dos jusqu'à ce que leurs
entrailles crevassent, que leurs côtes et leur épine dorsale fussent
brisées. Ils chauffaient le bain au point de le rendre brûlant comme
le feu, ils le remplissaient de fumée et les y enfermaient nus;
puis ils amenaient des chats qu'ils jetaient au milieu d'eux, et
comme ces chats se brûlaient, ils se jetaient sur eux et les déchi-
raient avec leurs ongles. Ils les enfermaient dans des chambres
obscures où ne pénétrait jamais un seul rayon de lumière.
11 est écrit dans l'Écriture': «J'amènerai sur toi, même les
fléaux qui ne sont pas indiqués dans ce livre. »
Ils accablaient les pauvres gens de tous ces tourments et
de tous ces supplices, à l'occasion de l'impôt.
Si cette calamité n'avait été universelle, comprenant, mêlés
ensemble, des chrétiens et des païens, des juifs [174] et des sama-
ritains, des adorateurs du feu et du soleil, des mages et des musul-
1. Thren,, v, 12.
8. Cf. Thren., ii, 17, 15.
3. Deut,, xxvxii, 61.
1-14 CHRONIQL'K
mans, des sabéens et des manichéens, les dieux et les déesses ne se
seraient ils pas glorifiés de cette persécution amère? Mais Taflaire
n'avait rien à voir avec la foi, et ne touchait pas plus celui qui
adore au levant que celui qui adore au couchîint. Le nom de l'ado-
ration du Sud^ disparut avec celui de [l'adoration] du Nord*. Si les
chrétiens avaient éié seuls l'objet de cette persécution, je pourrais,
à bon droit, glorifier les martyres de notre époque plus que tous
les martyres précédents : car la mort rapide par le glaive est plus
douce que les tourments prolongés qui ne finissent pas. — « Je n'ai
jamais vu, dit saint Basile, quelqu'un conduit en prison ou au
supplice à cause de sa pauvreté. » Qu'il vienne maintenant et
qu'il en voie dos milliers et des myrades : Arabes et Syriens,
coupables et innocents, pauvres et riches, tous indistinctement.
Un calice d'amertume et une nourriture de colère étaient préparés
pour tous les hommes également; pour les grands et les petits,
pour les riches et les pauvres, comme dit le prophète'. Le riche
mangeait continuellement l'amertume, parce qu'ils prenaient injus-
tement ce qu'il possédait et que ses os étaient brisés par les coups;
le pauvre, parce qu'ils exigeaient de lui ce qu'il ne possédait pas,
qu'il ne pouvait emprunter et que p:;rsonne ne le faisait travailler
dans Sun champ ou sa vigne. C'est pourquoi ils man;çèrent Tabsiuthe
et burent des eaux amèros. « Il leur donna l'absinthe pour nourri-
ture*. ))
Que personne ne pense, mes frères, que j'ai exiigéré ici, mais
qu'on sache que tous les calâmes et tout le papier de Tunivers ne
suffiraient pas pour écrire les maux qui de notre temps ont accablé
les hommes. Qu'on ne nous blâme pas non plus de les avoir dimi-
nués, car nous sommes incapables de penser à tout, et ces cala-
mités ne sont pas arrivées dans une seule ville. [175]
De la sécheresse et de la famine qui eurent lieu en cette année;
et de rinoasion du peuple méridional et oriental dans la contrée
du Nord.
Les prophètes nous crient comme des trompes, et proclament
continuellement à nos oreilles, comme des trompettes : que nous
nous convertissions au Seigneur et que nous le recherchions. Et
1. L'islamisme.
t. Le cbrislianisrae.
3. Cf. Ji^R., XXV, 15.
4. Cf. JÉRÉM., XX, 15.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 145
nous, comme des pierres, nous avons endurci notre cœur, nous
avons clos nos yeux et fermé nos oreilles pour ne pas marcher
dans les voies du Seigneur, mais selon notre gré. Chacun de nous
aime ce qui lui plaît et non ce qui est agréable au Seigneur. — Il
est écrit dans le prophète^ : « Ainsi, dit le Seigneur, parce que ma
maison est déserte tandis que chacun de vous court à la sienne, à
cause de vous, les cieux ont été empêchés de donner la rosée et la
terre de donner ses fruits. J'ai appelé la ruine sur la terre, sur les
montagnes, sur le froment, sur le vin, sur Thuile, sur tout ce que
produit la terre, sur les hommes, sur les animaux, sur tout le
travail de vos mains. Vous considérez l'abondance, et vous intro-
duirez peu de chose dans votre maison : J'ai soufflé dessus. — Vous
sèmerez et vous ne moissonnerez point'. »
Toutes ces choses sont arrivées de notre temps.
La pluie qui avait coutume de tomber en hiver a été retenue au
ciel, et il n'y a point eu d'humidité. Aucune semence ne germa et
ce qui germa se dessécha : surtout dans la contrée méridionale et
orientale, et dans tout le désert. Il n'y eut que peu de chose dans
les vallées des montagnes.
Et ainsi toutes les confessions sortaient en procession pour faire
des Rogations ; et toute langue, toute nation criait [vers DieuJ, d'un
même accord, dans cette grande affliction. Les hommes, voyant que
la pluie ne tombait pas, devinrent sans pitié et ne voulurent plus
faire sortir leur blé, pas même pour le vendre. C'est pourquoi l'ache-
teur commença à venir le chercher. De là les pauvres tombèrent
dans une immense misère. [176] Aussi ceux qui avaient accumulé
du blé depuis longtemps se réjouirent-ils et tressaillirent-ils d'allé-
gresse, ceux contre lesquels le prophète s'indigne quand il dit* :
« Écoutez, vous qui méprisez le pauvre et faites défaillir le malheu-
reux de la terre, disant: Quand le mois sera passé nous vendrons
notre froment, quand le sabbat sera passé nous ouvrirons les gre-
niers, nous diminuerons les mesures, nous augmenterons les prix,
nous vendrons aux pauvres et aux malheureux les rebuts du blé.
Le Seigneur, la Force de Jacob, a juré : Non certes, je n'oublierai
jamais toutes leurs œuvres ; je convertirai leurs fêtes en deuil et tous
leurs cantiques en lamentations. »
Ceux donc qui possédaient du froment, sachant que le ciel était
fermé, serrèrent leurs mains et ne vendirent point de blé ; ils atten-
1. Aor.És, I. 9, 10, IL
2. MicH.. VI, 15.
3. Amos, vm, 4-7, 10.
10
146 CHRONIQUE
dirent que les hommes fussent malheureux et opprimés. L'autorité
ordonna que tout peuple et toute nation sortit en procession pour
faire des Rogations. Peut-ôtre, se disait-on, le Seigneur voudra-t il
être clément envers nous et nous ouvrir la porte de ses misé-
ricordes. Ainsi donc, les chrétiens sortirent ayant leurs évêques à
leur tète, les Juifs avec leurs trompettes, et les Arabes pareillement.
Or, il plut au Seigneur d'avoir pitié de nous. Il y eut de la pluie
et de la récolte en certains lieux. Comme dit le prophète Auios* :
« Je vous ai refusé la pluie lorsqu'il restait encore trois mois
jusqu'à la moisson; j'ai fait aussi pleuvoir sur unecité et pas surune
autre ; la pluie descendra sur une partie, et l'autre partie sur la-
quelle elle ne descendra pas se desséchera. Deux, trois villes se
réuniront en une seule ville. »
A Mossoul,ce fléau sévit et toute la récolte se dessécha; il en fut
de même à rOrient et au Midi, et, comme de plus ces contrées
avaient été désolées par la méchanceté d'Ibn Mouç'ab, les habi-
tants les abandonnèrent et se répandirent dans cette région septen-
trionale. Les Taglibites, les Ma'déens montèrent tous avec leurs
troupeaux, leurs chameaux, leurs familles, et tout leur bien; ils
remplirent la région et la dévastèrent tellement qu'il ne resta plus
rien [177] pour la pâture des bêtes. La terre était comme si on l'avait
balayée avec un balai. A cause de cela, tout le bétail de la région
septentrionale périt dans l'hiver suivant. Les campagnes et les
villes étaient ravagées. Entre autres, dans la province de Mossoul :
Beit Garmai, Ilaza, Marga, Konisapor*, Dasen^ Qoqâ*, Salah,
et plusieurs autres lieux que les habitants des campagnes abandon-
nèrent pour monter dans les pays du Nord, de sorte que là les
hommes n'avaient pas la place de se promener dans les villes ni
dans les campagnes et que la famine était sur le point d'arriver à
cause de leur grand nombre.
Ainsi fut accompli sur eux ce qui est écrit : « J'enverrai après
eux la famine, la captivité et la peste '. » Toutes ces choses vinrent
avec eux et après eux. Nous raconterons en son temps la calamité
qui les atteignit par la maladie, la captivité et la peste qui vint
sur eux.
1. Amos, IV, 7-8.
2. Cf. Hoffmann, Ausidge aus syrischen Akten persicher Mârtyref\
p. 189. — Bibt. or., III, 739.
S. AssBMANi a lu le nom avec un rià et transcrit Reaan (Bîbl, or., II, 114).
Sur Dasin ou Dasen, cf. Hoffmann, Ausiuge, etc., p. 202 sqq.
4. Ville différente de Koka, près de Séleucie. Cf. BibL or,. II, 114.
5. JEU., xxix, 17.
DE DENYS DB TELL-MAHRÉ 147
L'an 1084 (772-773), moururent saint Paul, évêque de Tagrit,
Zeinan* de Kerroa et Jonas de Beit Nouhadra. — A cause de leur
mécontentement contre David, ces villes ne voulurent pas recevoir
d'autres évèques de sa part. Elles restèrent ainsi sans évêque en
attendant la sortie de prison de Georges.
Cette année-là, le roi ordonna de faire un mur autour de ^Aqoula.
Ce fameux scélérat tomba dans l'avarice. « Or, l'amour de l'ar-
gent est la racine de tous les maux*. » II ne lui sufBsait pas des
hommes, des vignes, des terres, des animaux, des bestiaux, des
montagnes pour se procurer de l'or et de l'argent, mais il usait
constamment d'artifices vis-à-vis de tout le monde, surtout pour
empêcher qu'il ne sortit un zouz de chez lui. [178] Quand il ordonna
la construction du mur de *Aqoula,il usa de ruse avec les habitants
de la ville ; il expédia des hommes chargés de mesurer la maison de
chacun d'eux: sa longueur, sa largeur, sa hauteur, et d'envoyer le
maître de cette maison bâtir une pareille longueur, largeur et
hauteur du mur : toute la dépense devait incomber au propriétaire
de la maison. Il fit ainsi entourer toute la ville de ^Aqoula d'un
mur élevé et solide, sans dépenser une obole.
De la profanation des tombeaux que commirent les hommes en
déterrant et jetant les ossements qu'ils renfermaient à la face
de la terre.
Les maux se multiplièrent, ils se poussaient l'un l'autre, l'aile
contre l'aile, la main dans la main. La tribulation s*aggrava outre
mesure sur tous les hommes. On vendait tout ce qu'ils possédaient,
on leur en prenait le prix, et ils ne savaient que faire, car on les
persécutait pour les obliger à rapporter et à livrer des biens que ni
leurs pères ni eux-mêmes n'avaient jamais possédés.
Cette oppression s'étendit sur toute race ; elle atteignit même les
animaux, les oiseaux, les poissons de la mer. A cause de Tiniquité
de leurs princes, les hommes devinrent si audacieux qu'ils en
arrivèrent à une grande et terrible impiété.
Us sejetèrent sur les tombeaux où des morts gisaient depuis long-
temps; ils les retournèrent, remuèrent, retirèrent leurs ossements
de leur place et les répandirent comme le fumier à la surface de
la terre.
1. 11 faut probablement lire Zachée. Cf. ci-dessus, p. 60.
2. I TlMOTH., VI, 10.
148 CHRONIQUE
Tout ce que nous avions appris de loin à ce sujet, est arrivé chez
nous ; nous constatons maintenant de nos yeux et non par ouï-
dire que les hommes dispersent à la face de la terre les ossemeflts
de ceux qui dorment et reposent dans les tombeaux depuis les temps
antérieurs à la venue du Christ, et qu'ils s'empressent d'en retirer
de l'or et de l'argent. [179] Ils renversaient ainsi des sépulcres
dont quelques-uns renfermaient plus de cinq cents cadavres, et ils
en jetaient les ossements au dehors. En maints endroits, il y avait des
tombeaux anciens au-dessus desquels le sol était nivelé et qu'on ne
connaissait pas. Satan les leur indiqua. Et ainsi ils creusèrent;
ils retirèrent et dispersèrent les ossements qui s'y trouvaient. Or,
des vieillards nés dans le pays disaient avec serment : « Nous
n'avons jamais entendu dire par nos pères, et nous n'avons jamais
su qu'il y avait des tombeaux en ces endroits. »
Ceci donnait à comprendre aux sages que Satan dirigeait ces
hommes et les leur faisait trouver. Ce môme Satan, afin de les
pousser tous dans cette impiété, répandait de tous côtés la nouvelle
que tel village avait trouvé de l'or et de l'argent pour une somme
de tant de milliers [de zouz], tel individu tant de bijoux.
Les sages n'ignorent pas que dans un sépulcre où il y a un
millier d'hommes. Il a dû entrer avec quelques-uns d'entre eux, à
cause de la grande mortalité ou par l'inattention des ensevelisseurs,
des bracelets ou des boucles d'oreilles, ou des monnaies dans les
ceintures. Parmi un millier il peut s'en trouver plus ou moins. Kt il
arriva aussi qu'on trouva un bracelet en cuivre et que Satan le fit
passer pour de l'or, et non pas pour petit, mais pour grand et mer-
veilleux, et il proclamait cela dans la contrée; s'il était de fer, il le
faisait passer pour de l'argent, afin d'exciter tout le monde à ren-
verser les tombeaux.
Et par toutes ces calamités que supportèrent les hommes, les
bètes des champs, les oiseaux du ciel, les poissons de la mer, les
arbres et tout ce qui est sur la terre, et même ceux qui étaient sous
la terre, « la colère du Seigneur ne fut pas détournée, mais il
étendit de nouveau sa main* I »
En cette même année, on se révolta contre le patrice [180] delà
Grande-Arménie et on le tua par le glaive. On dit que cet homme
avait plus de cent mille esclaves. On prit aussi tout son bien que
Ton fit conduire au roi.
1. Is., IX, 21.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 149
Des maux qui se multiplièrent sur la terre par suite des faux
témoignages; du mensonge; des débiteurs et des créanciers;
des délations^ et de la miséricorde de Dieu qui supporte avec
patience nos provocations.
Il ne faut pas omettre les choses que nous plaçons dans ce triste
chapitre, car ceux qui viendront après nous, en voyant les nom-
breux écueils sur lesquels nous sommes tombés, et quelles afilic
lions nous avons supportées à cause de notre malice, s*en éloi-
gneront peut-être, et n'iront pas comme nous en dehors des chemins
et des sentiers battus ; et les bêtes féroces ne les environneront
pas, comme il nous est arrivé à nous-mêmes.
Ce n'est pas parce que Dieu avait besoin de la miséricorde
d'Abraham, qu'il lui révéla les crimes que les Sodomites commet-
taient sur les voyageurs étrangers ; mais pour montrer à ses enfants
les choses mauvaises qui l'irritent et attirent sa colère sur ceux qui
les font. Il est écrit dans le livre de la Loi^ : « Cacherai-je à mon
serviteur Abraham ce que j'ai l'intention de faire? » Et encore :
(( Parce que je sais qu'il commandera à ses enfants et aux enfants
de ses enfants de marcher après lui dans les voies du Seigneur, et
de faire le jugement et la justice. La clameur de Sodome et de
Goraorrhe est montée devant moi ; leurs péchés se sont beaucoup
aggravés. » Est-ce que Dieu a fait connaître leurs péchés à Abraham
pour faire miséricorde à Sodome? C'était pour qu'il les fit con-
naître à ses enfants en leur disant: « Éloignez- vous de ces choses. ))
David dit de même à son fils' : « Connais le Dieu [181] de tes
pères; sers-le; car si tu Tabandonnes, il t'abandonnera tout à fait. »
C'est ce qui nous est arrivé. Lorsque nous sommes sortis de la
voie de la justice, personne ne l'a senti ; mais lorsque Dieu a retiré
sa main de nous, toutes les créatures l'ont senti avec nous : les
animaux, les bêtes, les poissons de la mer, les oiseaux du ciel ;
même les morts dans leurs tombeaux, môme les pierres et le bois
ont souffert avec nous.
Il est écrit* : « Aime le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de
toute ton âme, et ton prochain comme toi-même, m Ayant ces deux
commandements qui renferment la loi et les prophètes*, et toute la
1. Gen.^ XVIII, 17-îiîO.
2. Cf. /C^ron., XXVIII. 9.
3. Cf. Matth., XXII, 37, 39.
4. Cf. Matth., XXII, 40.
150 CHRONIQUE
vigueur de la Nouvelle Alliance, nous avons fait le contraire dans
toute notre conduite.
Et encore' : « Tu ne tueras point. Tu ne voleras point. Tune
feras point de faux témoignages. Honore ton père et ta mère. Tu
ne convoiteras pas ce qui est à ton voisin. Tu ne donneras point
tjn argent à usure. Tu ne prendras pas le présent qui aveugle les
yeux des sages. Tu n'étendras pas ta main avec le coupable pour
lui servir de faux témoin. Tu ne frauderas pas le jugement du
pauvre. Tu ne seras pas adultère. » Or, toutes ces choses nous
ne les avons pas seulement apprises par ouï- dire, mais nous les
avons nous-mêmes pleinement commises. C'est pourquoi les
hommes ne doivent pas accuser le Seigneur à cause des cala-
mités qui sont venues sur nous. Sachons qu'il ne nous a pas
même traités selon nos péchés, et exaltons ses miséricordes sans
mesure et sans limite, qui supportent patiemment nos injures et
les iniquités que nos mains ont opérées, à cause desquelles la
colère viendra sur les enfants désobéissants.
Fut-il un péché dans le monde qui ne se commette chez
nous? La lutte fratricide de Caïn*, la voici chez nous. La sodomie
est chez nous tout entière. Le mensonge, l'inimitié, le murmure
des Israélites, la tyrannie : les voilà au milieu de nous. Les rapines,
le pillage, les meurtres, les faux témoignages, tous les maux delà
maison de Julien : les voilà avec nous.
Nous voulons rapporter toutes ces choses [182] une à une, afin
que nos enfants, comprenant notre châtiment, ne fassent pas
comme nous avons fait, de peur que cette verge amère ne les
atteigne aussi.
D*ahord des faux témoignages qui eurent lieu parmi nous.
Il est écrit* : « Les œuvres des hommes ne sont pas passées par
ma bouche. » Et encore* : « Quiconque calomniait son prochain en
secret, je le faisais périr. »
Notre but, ô frères, n'est pas de vous exposer les indignités des
actions des hommes, ou leurs calomnies, mais nous voulons vous
montrer quelles furent les causes de cette calamité, afin que vous
1. Cf. Ex., x.\, 12-17; Deut., v, 16-21.
2. Cf. Gen., iv.
3. Ps. xvu, 4.
4. Ps. c, 5.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 151
VOUS en écartiez : « car la foi a disparu de la terre et rhomme
parle à son prochain avec des lèvres trompeuses \ ))
Quand un homme avait un procès avec son voisin, il allait dans
la place publique et appelait quelqu'un : « Hé, maître un tell
témoignes-tu en ma faveur? » Celui-ci, lui laissant à peine achever
sa parole, répondait brusquement et disait : « Par la parole de
Dieu, je suis d'accord avec toi. — De quoi s'agit-il? » Et il avait
juré avant de connaître la question.
Ce n'étaient pas seulement les païens qui faisaient cela, mais
aussi les chrétiens et des hommes âgés. En toute cause, quelle
qu*elle fût, si quelqu'un voulait, pour un zouz, il achetait des faux
témoins autant qu'il en désirait. Ils ne plaçaient point le jugement
de Dieu devant leurs yeux, mais en un instant ils faisaient dispa-
raître le pauvre de la tefte.
Des débiteurs et des créanciers ; du mensonge,
« Voici que tous vous avez parlé injustement, et vos mains son
souillées d'injustice. La malice remplit leur bouche. Sous sa langue
sont la fourberie et la ruse : l'iniquité et la fraude V ))
(( Ne donne point ton argent à usure, et ne prends pas d'intérêt
[183] à ton prochain. Si tu prêtes de l'argent parmi mon peuple au
pauvre qui est avec toi, tu ne seras point un créancier pour lui et
tu ne lui prendras point d'intérêt ^ »
Et David dit* : « ...celui qui n'a pas donné son argent à usure; qui
fait un serment à son prochain et ne le trompe pas. »
Toutes ces choses n'existent plus chez nous.
Les hommes des campagnes,opprimés par des exactions cruelles,
venaient dans les villes et apportaient des présents à ceux qui
prêtaient à usure. Ceux-ci, en les voyant, leur disaient : « Sois le
bienvenu i> et avec des paroles bienveillantes ils ajoutaient : (( Je te
donnerai tout ce dont tu as besoin. N'aie pas de souci ; tant que
je vivrai, je te donnerai; tu n'auras besoin de personne. Je ne
te demande pas de témoin, ni de caution, ni de gage : je ne
demande ni intérêt ni rachat*. Prends, et quand la récolte seraren-
1. Ps. XII, 2-3.
2. Ps. Lviii, 2; X, 7.
3. Cf. Léc,^ XXV, 37.
4. P8. XV, 5. 4.
5. C'est-à-dire, d'après le contexte, une promesse de rembourser en
nature .
152 CHRONIQUE
irée, tu me rapporteras mon bien ou tu me donneras du froment ou
du vin» au cours de cette époque. Va maintenant, et reviens dans
quelques jours. » Cet affligé ayant entendu ces paroles consolantes
s'en retournait en grande liesse à sa maison et se réjouissait, car il
ignorait que Satan ne permettrait pas à Tautre d'accomplir ce qui
était sorti de sa bouche : « Ses paroles sont plus douces que le miel ,
et elles sont des dards^ : à leur suite sont des fiels amers. »
Ce malheureux, confiant dans les paroles consolantes par les-
quelles l'usurier l'avait rassuré, n'était plus tourmenté pour courir
ramasser de l'argent pour l'impôt de capitation. ïl demeurait tran-
quille dans sa maison jusqu'à l'arrivée des exacteurs. Dès que
ceux-ci le surprenaient, il leur disait :-(( Attendez moi un peu, je
vais vous l'apporter, » et il s'en allait en hâte chez celui qui lui
avait fait espérer qu'il lelui donnerait. « Veuille, seigneur, lui disait-
il, me donner ce que je te demande, afin qu'ils ne frappent pas du
fouet. » Celui-ci lui répondait : « Attends-moi un peu, » et, ou bien
il le laissait et s'en allait, ou bien il se moquait de lui en paroles,
[184] en lui disant: « Va aujourd'hui, et reviens demain matin.Pour
le moment je n'ai pas suffisamment pour toi. » Il agissait de la sorte
avec lui pendant plusieurs jours; et quand celui-ci en était affligé
jusqu'à la mort, après qu'il avait fait intervenir de nombreux inter-
cesseurs, l'autre se contentait de lui dire : « Je ne te donne pas
parce que je n'ai pas de quoi te donner, » ou bien il lui disait:
« J'exige de toi un écrit. » — « Je le fais, » disait-il ; et quand l'écrit
était fait, il le renvoyait encore avec des paroles et lui disait: « Va
ce soir, et reviens demain matin. »
Et quand ceux-ci revenaient de bon matin, il leur disait: « Je ne
vous donne pas, si vous ne me donnez un gage. » Quand ils lui
avaient donné le gage, il ajoutait: « Combien me donnez-vous
d'intérêt pour cet argent? Et pour le rachat, combien me donnerez-
vous de blé? car je ne le prends pas au prix courant. »
A cause de leur embarras, ils lui en accordaient autant que sa
bouche demandait*. Ils lui donnaient aussi un écrit; et il h'ur
demandait ensuite des cautions. Et ainsi, démentant toutes les
paroles qu'il leur avait données au commencement, il leur prenait
des gages, ils lui donnaient un écrit et souscrivaient des intérêts, il
exigeait un rachat et demandait des cautions.
A peine les avait-il secourus en leur donnant, que non seulement
ils embrassaient ses mains, mais ils léchaient la plante de ses
1. Cf. P^. Lv, 22.
2. Littéralemeni : Autant qu'il ouvrait sa bouche et demandait.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 153
pieds, en disant: « Si d'ici tant de jours nous ne te rapportons pas
ton bien, nous sommes débiteurs de tout ce qui est noté dans cet
écrit. »
El alors ils s'en allaient promptement, vendaient leur bien, et
rassemblaient leur argent; mais, quand ils le prenaient et allaient
pour payer et se libérer dignement, Satan, cet ennemi de tout
bien, venait et commençait à les attaquer violemment par ses
suggestions : m Comment donnes-tu cet argent maintenant? On
viendra le demander et tu n'auras rien à donner, puisque tu
as vendu tout ton bien. Celui-là n'en manque pas, il ne peut te
faire du mal ; d'ailleurs ton gage [185] reste auprès de lui, et si
tu le reprends lu devras le placer chez un autre, il vaut donc mieux
qu'il reste chez lui. »
Tels étaient les conseils pernicieux que conseillait le diable aux
débiteurs, de peur qu'ils ne tinssent leur parole, qu'ils n'inspi-
rassent confiance au créancier, et qu'ensuite celui-ci ne les sou-
lageât. Il les portait à lui rendre les mensonges dont il s'était
servi vis-à-vis d'eux.
Ces conseils iniques venaient également de la conseillère, fille
de celle d'Adam ; et alors s'accomplit dans le temps présent [la
parole du prophète] : t Des femmes ont dominé sur nous*. » Ce
sont elles qui gouvernaient les hommes. Elles conseillaient :
« Fais telle ou telle chose, » et le mari disait: « Tu m'as bien
conseillé; » car ces hommes ne considéraient pas les promesses et
les serments faits au nom de Dieu, ni ce qui leur arriverait, c'est-à-
dire que quand ils demanderaient de nouveau on ne leur donne-
rait plus; mais le conseil de Satan et de leurs femmes leur plaisait
avant tout-
Il arrivait même que quand l'un d'entre eux tenait son argent
dans sa main, et que le créancier le pressait [en disant] : « Kends-
moi mon bien, » parce que Satan était dans son cœur il refusait
énergiquement [en disant] : « Je n'ai rien » On l'emprisonnait,
on le frappait du fouet, et il ne rendait pas! C'est à de telles gens
que s'adresse le Psalmiste quand il dit* : < L'impie emprunte et ne
rend pas. d
Au lieu que l'emprunteur ailleàla porte du préteur, celui-ci vient
lui-même à la porte de son débiteur et le supplie ; et s'il arrive que
la moitié de la créance soit payée, il s'estime très heureux.
Ainsi, chez tout homme, le mensonge dominait complètement.
1. Ip., III. 12.
2. Pa.xxxvii, 21.
154 CHRONIQUE
De la délation; de V oppression; du pillage réciproque
et des faux témoignages.
Quand les habitants du pays venaient solder le tribut, ils for-
maient [186] des attroupements comme ceux de Caîpbe. Ils cir-
culaient dans les villes et s'informaient du lieu où se trouvait un
homme possédant quelque chose en réserve : soit du blé, soit du
vin, soit des objets mobiliers. Puis ils allaient trouver l'émir et lai
disaient : « Un tel doit payer une part de notre tribut. Il possède
telle chose, chez un tel, et depuis tant d'années il n'a pas payé le tri-
but. » L'émir donnait alors cet ordre: « Allez, vendez son bien. »
Si cet homme ou si quelque autre personne voulait s'opposer à
eux, le gouverneur demandait [aux premiers] : « Avez-vous des té-
moins contre lui? » Il en venait alors d'entre ceux de leur village
qui témoignaient contre lui, bien qu'ils ne l'eussent jamais vu.
Et ainsi, tandis qu'il se lamentait, ils faisaient vendre tout ce qu'il
possédait et ne lui permettaient pas même d'approcher de son bien.
Les uns lui disaient : « Tu nous as répondu pour un tel; » les autres
disaient : « Tu as dans notre village une vigne, ou un jardin, ou
un champ d'oliviers, et depuis tant d'années tu n'as pas payé ton
tribut, » et bien que celui-ci jurât : « Je ne suis jamais entré dans
votre village ; je n'ai pas de jardin chez vous, » les autres cependant
ne le relâchaient pas avant d'avoir fait vendre tout ce qu'il possé-
dait. Le gouverneur lui-même les dirigeait dans cette voie.
Pour cette raison, les hommes craignaient de paraître dans les
rues, mais ils n'échappaient pas ainsi à ces scélérats; car ceux-ci
les recherchaient, et quand l'un d'eux avait surpris quelqu'un, il
lui disait : « Donne-moi tant, ou je te conduis à l'émir. »
De la sorte, cette affaire était devenue un commerce très lucratif
pour beaucoup d'hommes de la ville. Aussi remplirent-ils leurs
maisons de rapine et de fraude.
C'est à leur sujet que le prophète Michée dit, lui qui reprenait
les rois en face^ : « Le saint a disparu de la terre, et il n'y a pas un
juste parmi les hommes; tous tendent des pièges; l'homme fait
une chasse à mort à son frère. Leurs mains sont préparées pour
[187] le mal et ils ne font pas le bien. Le prince demande : Donne;
le juge dit : Apporte des présents; le grand expose ses désirs. Ils
ont rejeté leur bonne nature comme un morceau d'étoffe rongé par
1. MicH., VII, 2-3.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 155
la teigne. » Et encore* : « Ne vous fiez pointa vos proches, ne
vous confiez point en vos amis. »
Et David dit' : « Us ont aiguisé leur langue comme un glaive, leur
discours comme un trait, pour le lancer en cachette contre Tinno-
cent; ils le lancent furtivement et ils ne sont pas vus; ils ont formé
des projets, ils ont caché leurs embûches, estimant que le Seigneur
ne voit pas ! » Il dit encore d'eux* : « Ils reviendront au soir» ils
aboieront comme des chiens et parcourront la ville. — Ils ont pré-
féré les malédictions aux bénédictions. Ils ont revêtu les malédic-
tions comme une armure. Elles ont pénétré chez eux comme de
Teau, dans leurs os comme de Thuile. »
Or, ces rapines et ces pillages étaient commis dans la ville par
ces chiens enragés, paysans et citadins. Leurs bouches étaient
ouvertes comme des sépulcres infects. De sorte que quand un de
ces pauvres qu'ils avaient saisi leur avait échappé, d'autres le
prenaient aussitôt, et après ceux-ci, d'autres encore.
Isaïe a dit d eux* : « Comment la cité fidèle est-elle devenue une
prostituée? Elle fut pleine de jugement et de justice : et mainte-
nant [elle est pleine] de meurtriers. Ton argent a été méprisé, tes
aubergistes ont mélangé l'eau, tes princes sont infidèles, tous sont
des compagnons de voleurs. »
Et il dit de nouveau* : « Des railleurs domineront sur eux; dans
le peuple, l'homme tombera sur l'homme, chacun sur son voisin ;
les jeunes gens se soulèveront contre les vieillards, les plébéiens
contre les nobles. » — « Ses grands sont au milieu d'elle comme
des lions rugissants, et ses juges comme des loups du soir, ses pro-
phètes sont des libertins •. » — «Malheur à ceux qui songent à
l'iniquité, qui font le mal sur leur lit, et se lèvent de bon matin pour
faire ce qu'ils ont médité. Ils élèvent les mains vers le Seigneur,
et ils convoitent des champs et des maisons qu'ils prennent
de force! [188] et ils oppriment les hommesM ») Michée a dit
ces choses à propos de ces pillards et de ces scélérats, et il ajoute ■ :
M Ses riches sont pleins d'iniquité, ses habitants disent des men-
songes, leur langue est frauduleuse dans leur bouche. Moi, j'ai
1. Micfi. VII, 5.
2. P«. LXiv, 3-7.
3. P8. Lix, 6; cix, 17.
4. Is., I. 21-23.
5. Is.. m, 4, 5.
6. SopH., ui, 3-5.
7. MicH., Il, 1, 2.
8. MiCH., VI, 12-15.
156 CHRONIQUE
commencé à te frapper et je te ruinerai à cause de tes péchés. Tu
mangeras et tu ne seras pas rassasié, et la dyssenterie sera au
milieu de toi. Tu saisiras et ne délivreras pas; et ce que tu auras
délivré, je le livrerai au glaive. Tu sèmeras et ne moissonneras
pas. Tu presseras l'olive et tu ne t'oindras pas d'huile.Tu presseras
le vin et tu n'en boiras pas. »
Quelle est celle d'entre ces choses qui ne nous est pas survenue?
Où sont Thuile, le blé et le vin, dont vivent les travailleurs?
Mais les pillards eux-mêmes furent atteints par le fléau plus
cruellement que n'importe qui.
La première année, les pauvres de la région inférieure et les
étrangers périrent, comme nous l'avons indiqué plus haut; la
seconde, ceux qui habitaient au-dessus des premiers ; la troisième,
ceux qui étaient au-dessus de ceux-ci ; la quatrième eniin, ces
hommes rapaces et pillards périrent eux-mêmes et il ne leur resta
rien, soit de leur bien, soit de ce qu'ils avaient pillé et rassemblé.
Ces choses, d'autres semblables et de pires encore que celles
prédites par les prophètes, furent opérées et accomplies par les
hommes les uns à l'égard des autres.
Les campagnards surtout les multiplièrent.
Les citadins et les marchands commencèrent à mal faire, car ils
s'empressèrent d'achoter le bien des campagnards: leurs vignes,
leurs champs, tout leur travail; mais ils n'en jouirent pas long-
temps, car les paysans se tournèrent contre eux. et si l'un de ces
citadins avait dans quelqu'un de leurs villages du vin ou du fro-
ment, ils l'emportaient pour le vendre ou le manger.
Or, le gouverneur prêtait la main à tous ces méfaits et ne punis-
sait personne.
Quant aux marchands, les paysans ne se contentaient pas de les
piller et de prendre leur bien. Ils les saisissaient et les conduisaient
au gouverneur en disant: « Tout [le fruit de] notre travail a été
enlevé par cet homme, ordonne-lui de payer [189] pour le village. »
Et le gouverneur l'opprimait jusqu'à ce qu'il le fît disparaître de
sur la terre, et il prenait tout ce qu'il possédait, aussi bien ce qu'il
avait pillé que ce qu'il n'avait pas pillé.
Les riches s'enfuyaient devant les paysans comme un troupeau
devant les loups, et ils se cachaient, abandonnant les vignes et
tout ce qu'ils leur avaient pris.
Il arrivait aussi parfois que des hommes allaient loyalement
acheter du vin au pressoir [des paysans]. Ceux-ci allaient alors
porter plainte à l'émir. Si le vin se trouvait encore dans leur
village, le gouverneur faisait mettre les scellés dessus; s'il était
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 157
déjà introduit dans la ville, il s'en emparait. Ainsi, et le vin et son
prix étaient perdus.
Quand bien même nous multiplierions le récit des maux qui
sont arrivés ou que les hommes se sont fait mutuellement, nous
resterions toujours en deçà de la totalité; car il est impossible à
quelqu'un de les écrire à cause de leur grand nombre. Mais ce peu
suffit aux sages.
Disons à ce sujet, avec le prophète Jérémie* : « Mon peuple est
devenu insensé, il ne méconnaît pas, dit le Seigneur. Ce sont des
enfants stupides, il n'y en a point de sages ; car ils sont habiles pour
le mal et ils ignorent le bien. J'ai regardé la lerre : c'est le tohu-
bohu. En vérité, tous ont brisé le joug et coupé les liens. A cause
de cela le lion les brisera, les loups du soir les déchireront, le
léopard se mettra en embuscade sur leurs villages et quiconque en
sortira sera broyé ; car leurs fautes se sont aggravées, leurs péchés
se sont multipliés. Ils ont exhibé leur malice comme les Sodo-
mites '. ))
De la deuxième année de calamité, qui fut Van 1085 (774-775),
Comme nous avons écrit et fait connaître plus haut les calamités
cruelles, [190] les rapines commises sans pitié par les adminis-
trateurs établis dans le pays pour le ^adàqat al mal des Arabes,
le çauphi, la dime, l'exil et beaucoup d'autres causes que nous
avons indiquées ci-dessus, il n'est pas nécessaire de répéter ici aux
hommes prudents, car ils le comprennent, que cette année ajouta
avec beaucoup d'intensité ses malheurs à tous ceux de la précé-
dente et de la suivante; et cela non seulement du côté de la terre
et des hommes, mais du côté du ciel et du Seigneur.
L'intendant du çauphi demandait impitoyablement deux pour
un; les décimateurs se précipitaient sur les passagers comm(3 des
chiens ennigés et dépouillaient sans pitié les allants et venants;
ceux qui recherchaient les fugitifs, plus avides que les vautours
qui guettent la chute des cadavres, attendaient ardemment que les
hommes tombassent entre leurs mains. Ils tiraillaient les pauvres
comme des vautours autour d'un cadavre.
Que dirai je du renversement des sépulcres, sinon ce que disait
Jérémie qui nous a prédit la violation des tombeaux et la dispersion
1. Jerem., IV, 22,23; v, 5, 6.
i. Cf. Is., m, 9.
158 CHRONIQUE
des ossements comme le fumier à la face de la terre, sans qu'il y
ait quelqu'un pour les recueillir?
Il est écrit ^ : « En ce temps-là, dit le Seigneur, on jettera les os
des rois de Juda, et les os de leurs princes elles os de leurs prêtres,
et les os des prophètes, et les os des habitants de Jérusalem,
hors de leurs sépulcres. On les exposera au soleil, à la lune et à
toute la milice céleste qu'ils ont aimés et servis, auxquels ils se
sont attachés, qu'ils ont consultés et adorés. On ne les recueillera
pas, on ne les ensevelira pas, mais ils seront comme un fumier à la
face de la terre. »
Ces choses ont eu lieu de notre temps, et nous les avons signalées
plus haut. Cependant cette année dépassa en fait de maux toutes
celles qui l'ont précédée ou suivie, surtout par la violation des tom-
beaux. Et Jéréniie dit aussi de [191] ceux qui vivent en ce temps ' :
(( Ils choisiront la mort plutôt que la vie, tous ceux qui sont restés
de cette race méchante, dans tous les lieux où je les ai dispersés. »
Et de nouveau Jérémie dit* : « Les cadavres de ce peuple seront en
pâture aux bêtes de la terre, aux oiseaux du ciel et, il n'y aura
personne qui les chasse. Et je ferai cesser, dans les villes de Juda
et dans les places de Jérusalem, la voix de la joie et de l'allégresse,
la voix du fiancé et la voix de la fiancée, parce que toute la terre
sera désolée. » Toutes ces choses ont reçu leur accomplissement.
Les cadavres des hommes furent jetés en pâture aux bêtes du
désert et aux oiseaux du ciel; car [le prophète] assimile ce peuple
sans Dieu aux animaux et aux oiseaux immondes.
Le bruit de la joie du fiancé et de la fiancée a cessé, car ceux
mêmes qui étaient mariés ont rejeté leurs femmes et leur ont fait
le libelle de répudiation à cause de la multitude des calamités. « A
cause de la multitude des iniquités, l'afleclion de plusieurs se
refroidira*, w
Il n'est pas nécessaire que nous racontions ces choses à nou-
veau. Nous passerons dessus d'un pas rapide; nous nous tour-
nerons vers l'accroissement des maux que cette année a surajoutés
aux autres [et nous parlerons] de l'hiver rude, du froid rigoureux,
du défaut de pâturage, de la diminution du fourrage(?) pour les
animaux domestiques, de la mortalité de tout le bétail, de la famine,
des maladies cruelles, de la peste qui consumait les hommes et les
1. JÉRÉM., VIII, 1, 2.
2. Ibid., 3.
3. JÉRéM., vil. 33, 34.
4. Matth., XXIV, 12.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 159
bètes comme des sauterelles; dé* la violence que les habitants des
villages exerçaient les uns sur les autres, du pillage des hommes,
des meurtres commis à cause du manque de pain, de Tintereeption
des routes, de la nécessité où furent les chrétiens de manger de la
viande pendant les jours de jeûne, et même des cadavres, par
défaut de pain.
Telles sont les choses dont je parlerai, que je raconterai, que
j'écrirai pour ceux qui viendront après nous. [192]
Uahord de V hiver rigoureux; de la mortalité du bétail, des
animaux et des oiseaux , et des cents dolents qui eurent lieu en
cet hiver.
Il est écrit* : « Je transformerai vos étés en hiver. » Cela en
réalité est arrivé dans le monde cette année-là.
Cette année-là, la récolte du vin fut abondante parce que Dieu
voulait faire respirer le pauvre et mettre un frein à l'avarice de
ces juges dont la bouche était béante. De môme que des sépulcres
ouverts qui ne sont pas rassasiés des cadavres qu'on leur porte
chaque jour, les gouverneurs de la province, en ce temps-là,
n'étaient pas rassasiés des récoltes que toute la contrée leur por-
tait. Or, Dieu donna de son riche trésor des récoltes abondantes
pour fermer leurs bouches sordides et procurer du soulagement aux
pauvres gens, en attendant que vienne pour eux le jour de la ven-
geance, que leurs péchés soient à leur comble et que la mesure
de leurs iniquités soit remplie.
Mais l'hiver commença dès le mois de Tesri I^^ (octobre), et unç
neige abondante surprit les vignes avec leurs raisins. Elle resta
longtemps. Les ouvriers entraient dans les vignes pour ramasser
les raisins tandis que la neige les recouvrait. A cause de la rigueur
du grand froid qui sévissait, leurs grains tombaient tous à terre
et se perdaient dans la neige. Le froid et la neige se prolon-
gèrent, car la pluie ordinaire ne tomba pas depuis Te§ri I*"^ (oc-
tobre) jusqu'au commencement de Haziran (juin). Pendant tout
ce temps c'était un jour de la neige, un autre des vents à fendre les
montagnes, avec de la gelée et un froid rigoureux.
Dieu voulut ainsi en cette année exercer sa fureur sur la contrée,
de toutes parts, du ciel, de la terre, des quatre vents des cieux : du
1. Cf. Zach., XIV, 6 (îj.
160 CHRONIQUE
ciel, par la neige et les fortes gelées; fl93] de la terre, en dessous
par un froid à fendre les rochers, et à la surface par les grands
maux que les hommes se firent les uns aux autres et qu'on ne peut
énumérer à cause de leur multitude.
De la destruction du bétail et des animaux, qui survint en
cette année; du manque de fourrage pour la nourriture des
animaux.
Il y eut une grande sécheresse, ainsi que nous l'avons dit plus
haut, et les tribus des Taglibites et des MaMéens s'assemblèrent
avec leurs troupeaux, leurs chameaux, leurs familles et envahirent
la région septentrionale.
Ils envahirent également la contrée du sud et la dévastèrent. Ils
achetèrent tous les grains et les firent descendre dans la région
inférieure. Tous les pâturages de l'extérieur furent occupés, et la
terre fut balayée comme avec un balai. La litière et la nourriture
étaient en petite quantité. Comme il n'y avait pas de pâturages au
dehors, et peu de récoltes seulement à l'intérieur, tout le bétail des
pâturages et des étables périt : les moutons, les chèvres, le gros
bétail.
Quand un propriétaire faisait sortir ses animaux pour les con-
duire au pâturage, ils ne trouvaient pas à manger, car il n'y avait
autre chose que la poussière : pas même une feuille dans les arbres
qui n'eût été consumée par la chaleur. Les animaux qui vivent
dehors avaient mangé ce que l'on ramasse pour ceux qui vivent
dans les étables ; et ensuite ils périrent les uns et les autres, car l'hi-
ver se prolongea longtemps et le froid fut rigoureux. Au dehors
[régnait] le froid : au dedans la famine. C'est pourquoi tout le
bétail de la région septentrionale périt : les troupeaux, les bœufs,
les chevaux, les ânes De sorte que les campagnes étaient infec-
tées de leurs cadavres en putréfaction, au point de répandre une
odeur fétide plus que des tombeaux. [194J
Du vent violent qui eut lieu en cette année.
De plus, il y eut un vent violent et véhément, tel qu'on n'avait
jamais vu son pareil de notre temps ou du temps de nos pères. Il
fit périr beaucoup de gens. Le menu bétail, les gros animaux, les
volatiles furent détruits par ce vent. II déracina beaucoup de
DE DENYS DK TELL-MAHRK 161
seraeuccs; il souleva la poussière de la terre en tourbillons sem-
blables à ceux produits par la neige.
Il sévit deux jours de suite, entre Noël et TÉpiphanie, et ensuite
le treize de Sebat (février), premier dimanche de carême, et le
lundi suivant. Comme la terre était soulevée par la gelée et qu'il
n'y avait point d'humidité, toutes les semences furent déracinées
dans les terrains sablonneux et dans les terres maigres, et elles se
desséchèrent. Les ténèbres et Tobscurité furent causées par les
nuages de poussière. Tous les volatiles périrent, surtout les pigeons.
On ne sait ce qui leur arriva : ni s'ils s'avancèrent, poussés par le
vent, ni s'ils tombèrent dans le désert et périrent de froid. Toujours
est-il qu'ils périrent ainsi que les oiseaux de passage \ et un très
petit nombre d'entre eux seulement résistii. Les animaux domes-
tiques, aussi bien que les animaux sauvages, périrent.
«
De la grêle qui tomba cette année-là,
•
Il tomba aussi cette année-là une grêle telle qu'on n'en a jamais
vu de nos jours. Elle était grosse comme des cailloux et il y en
avait de toute forme. Elle avait des arêtes (?) au nombre de deux,
trois ou quatre, aiguës comme un glaive. Elle brisa les arbres et
les vignes, et elle déracina les semailles. Toutes les tuiles qui cou-
vraient les maisons furent brisées. [195] Cette grêle causa de nom-
breux ravages à cause des grands cyclones qui eurent lieu en
même temps.
Le vent qui poussait la neige en nua^':es enlevait les eaux tom-
bées sur la terre et les faisait monter contre celles qui descendaient
du ciel, en sorte qu'il semblait à ceux qui les voyaient que la
terre elle-même les élevait et les projetait directement à la face
des cieux.
Du. retour dans la contrée de Mousa Ibn Mouç^ab; des gouver-
neurs qu'il établit y et des maux que les hommes eurent à souffrir
de leur part.
Comme nous l'avons dit plus haut, lorsque l'année de ce per-
vers, qui éuiit l'année précédente, fut achevée tous les [habitants]
des contrées de la Mésopotamie et de Mossoul s'assemblèrent et
1. Traduciion douteuse. Voir la préface du texte syriaque.
11
l
162 CHRONIQUE
descendirent^ pour se plaindre des maux qu'il leur infligeait.
Mais ils se trompèrent en pensant que la justice résidait auprès
d*un homme inique et ami des voleurs.
Au lieu de trouver le bien qu'ils espéraient, ils ne firent qu'ex-
citer sur eux sa malice. Non seulement il ne les écouta pas, mais
il réunit toutes les pétitions que les pauvres gens lui avaient fait
parvenir pour se plaindre de leurs maux, et il les remit à Mousa. Il
le combla d'honneurs et lui donna le pas sur tous ses grands. Il lui
prescrivit d'établir des gouverneurs choisis parmi eux mêmes;
cha«(ue ville devait ellc-môme en fournir un.
Quand il eut reçu cet ordre, il revint en fureur, rugissant
comme un lion sur sa proie. De même qu'une bête sauvage ajoute
à ses premiers méfaits lorsqu'elle parvient à s'échapper du piège
où elle était tombée, ainsi cet homme redoubla de malice lorsque
le roi l'eut soutenu par sa parole.
Dieu lui-môme lui tendit fa main, comme dit Jérémie" : « Prends
de ma main ce calice de vin de fureur, et tu en feras boire [196] à
toutes les nations vers lesquelles je t'enverrai. Elles boiront, elles
seront troublées et tomberont en défaillance en présence du glaive que
j'enverrai parmi elles. Et je pris le calice de la main du Seigneur,
et j'en fis boire à toutes les nations vers lesquelles le Seigneur m'a
envoyé. » — Il dit encore*^ : « Buvez, enivrez-vous, chancelez et
tombez; vous ne vous relèverez pas à la face du glaive que j'en-
verrai parmi vous. » — Et il dit de nouveau* : « Vous serez
exempts de châtiment? Vous n'en serez pas exempts. Car j'appelle
le glaive sur tous les habiuints de la terre, dit le Seigneur. D'en
haut le Seigneur rugira; et du lieu de sa sainteté il fera entendre
sa voix et rugira contre sa demeure. Le cri de celui qui foule : aïe,
aïe, retentira contre tous les habitants de la terre. Le bruit en est
parvenu jusqu'aux extrémités de la terre, car le Seigneur entre en.
jugement avec tous les habitants de la terre. »
En vérité, le Seigneur est entré en jugement avec tous les habi-
tants de la terre, en cette année; car il n'y eut aucun peuple, aucun
royaume qui fût en paix, mais tous pareillement furent saisis par
la calamité, tous burent le calice de la main du Seigneur 1
Les Perses furent excités et se soulevèrent parce qu'on ne leur
donnait rien; les Arabes furent écrasés par les exactions; les Juifs^
1. Près du khalife. Cf. ci-dessus, page 141.
ÎU. JÉR., XXV, 15-17.
3. Jkh., XXV, 27.
4. Ji-:ii.,xxv, 29-31.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 163
les Chrétiens et avec eux les Égyptiens, les Arméniens, les Sin-
dhiens et tous lespeuples furent accablés d'un lourd impôt.
Ceci montre déjà qu'ils ont bu à ce calice. — « Tu as fait voir à
ton peuple des choses dures; tu leur as fait boire un vin troublé\ ))
Le territoire des Romains ne fut pas exempt de cette cruelle
affliction. Mais, comme ceux de nos nations, leurs chefs tombèrent
également dans Ta varice; car la potion d'un môme calice est [pré-
parée] pour tous les peuples. — « J'ai rassasié le misérable de pré-
férence à l'homme noble*. »
Habacuc a ditencore* : « Bois, toi aussi, [197] ettombeen défail-
lance. Le calice de la droite du Seigneur t'environnera; l'opprobre
cachera ta gloire. Car l'iniquité du Liban te couvrira: le ravage
des animaux t'épouvantera, à cause du sang de Thomme, de l'ini-
quité du pays, de la ville, et de tous ses habitants. » Le prophète
montre que le premier calice que la terre et ses habitants burent
l'année précédente venait des mains du Seigneur, quand il enseigne
et dit: <( Le calice de la droite du Seigneur te couvrira; et l'op-
probre effacera ta gloire. »
a Voici que je place dans Sion un écueil, une pierre d'achoppe-
ment : quiconque tombera sur elle sera brisé; et celui sur qui elle
tombera sera écrasé*. — » Cela se réalisadans Mousa. Ceux qui le
recevaient attiraient sur eux la colère, et ceux qui ne le recevaient
pas, le glaive. De tous côtés [surgissaient] les maux.
Il revint, comme nous l'avons dit plus haut, et le Seigneur posa
des écueils à tous les peuples par son intermédiaire, et il les accabla
par le froid, la gelée, la neige, la glace, en sorte qu'ils ne pouvaient
sortir pour fuir en sa présence, à cause do la grande violence du
froid. Si l'un d'eux parvenait à s'enfuir, il revenait promptement,
sans que personne courût après lui, et avec autant d'empressement
que celui qui l'instant d'auparavant était en prison, et s'en va à sa
demeure.
Le prophète ne nous a pas dissimulé cela, mais il dit^ : « Si tu
places ton refuge en haut, je te ferai descendre de là; si tu le places
en bas, même dans les enfers, je te ferai monter de là, et je te
livrerai entre les mains de ceux qui recherchent ta vie. )) Et
encore : « Il le foulera aux pieds comme la boue des places publi-
1. P«. LX, 3.
8. Habac, 11,15.
3. Habac, II, 16.
4. Cf. la., VIII, 14; xxviii, 16.
5. Cf. Abd., 4; JéR., xxzviii, 16; Amos, ix. 2.
164 CHRONIQUE
ques, comme le fumier à la face de la terre, et il n'y aura personne
pour le délivrer. »
Le Seigneuna prophétisé ce qui devait nous arriver. Quand ce
[Mousa] revint, il rugit comme un lion sur sa proie. Il chercha
et trouva des hommes violents et sans pitié, qu'il établit gouver-
neurs [198J dans leurs propres villes. Cela surtout fut nuisible
pour les pauvres gens, car ils ne pouvaient pas tromper [le gouver-
neur] qui était originaire de Tendroit et pour qui rien n'étaitcaché.
Ceux-ci, à leur tour, choisirent les notables de la ville et de la con-
trée et se les associèrent. Dès lors ils se livrèrent ouvertement au
brigandage : eux et le gouverneur; et personne ne leur en deman-
dait compte.
Les pauvres furent profondément affligés, leurs mains faiblirent,
leur cœur défaillit, leurs reins furent brisés en apprenant l'arrivée
de ce scélérat, et leur espoir s'évanouit. « Parce que la frayeur
qu'ils redoutaient leur est arrivée, ce qu'ils appréhendaient leur
est arrivé. N'onl-ils pas dissimulé? X'ont-ils pas gardé le silence?
Ne sont-ils pas restés dans le repos? Cependant l'indignation est
venue, » comme dit Job\
Il les établit donc gouverneurs: un pour chaque village. Avec
cet homme, il y en avait beaucoup d'autres. Leurs exactions sur-
passaient l'impôt de capitation qu'ils percevaient : car c'étaient
des voleurs, des brigands, des détrousseurs de grands chemins.
Il choisit ces hommes-là pour les établir juges I — H est écrit':
« Quand les rois sont iniques, tous leurs ministres sont iniques.»
Ainsi donc ils commettaient leurs exactions sur les pauvres gens
avec une grande violence, des coups et des châtiments cruels. Ils
recevaient pour récompense plus de la moitié de ce qu'ils avaient
extorqué, et ensuite ils revenaient de nouveau prendre un certain
nombre de zouz, pour leur peine. Ils les forçaient à vendre leur
bien pour en faire leur proie. Ils le vendaient, et ceux-ci le pre-
naient pour leur récompense. Ils remplirent ainsi leurs maisons
du bien des orphelins et des veuves, et vendirent leurs chèvres,
leurs bœufs et tout ce qu'ils possédaient. Parfois l'un d'entre
eux se rendait dans un lieu qui ne possédait rien. Il commençait
par exiger sa récompense, et ensuite il opprimait les habitants
et vendait leur bien. Aurait-on trouvé un homme plus criminel?
Les chefs de district [199] et les préfets étaient complices de cette
impiété. C'étaient eux surtout qui pratiquaient le brigandage.
1. JoD, m, 24-25.
2. Pror,, XXIX, 12.
DE DENYS DE TELL-MAHRK 165
« Tes princes sont infidèles et compagnons de voleurs \)) Ils exi-
geaient de ces malheureux avec duret<^ un ou deux tiers'; ils ne
connaissaient ni commencement ni (in. Ils ne faisaient point
savoir ce qu'ils enlevaient ; on ignorait ce qu'ils arrachaient ou
ce qu'ils abandonnaient. Ils agissaient comme des voleurs, des
brigands, des détrousseurs de grands chemins. Ils s'emparaient
des notables et des hommes libres du pays et vendaient leur bé-
tail avec tout ce qu'ils possédaient: ils les faisaient périr et les fai-
saient disparaître de la face de la terre. Il ne leur suffisait pas de
prendre tout ce qu'ils possédaient, ils exigeaient même d'eux ce
qu'ils ne possédaient pas.
Il établit des intendants pour les nombreux impôts du ^addqat
almâl des Arabes, et ceux-ci les réclamèrent plusieurs fois. Ils
firent payer les tributs anciens (?). A quiconque était imposé
pour dix zouz, ils en demandèrent trente et parfois quarante. Ils
créaient de leur propre chef des contributions extérieures (?) qu'ils
imposaient au pays, en dehors des villes, sur les passants et sur
les routes. Il arriva qu'ils en frappaient les étrangers établis dans
le pays et qu'ils les réclamaient des néophytes musulmans aussi
bien que des chrétiens; car ils ne se préoccupaient pas de l'intérêt
de l'islamisme, mais bien de satisfaire leur cupidité et leur avarice,
lis fixaient et imposaient sans pitié les taxes au pays et aux
champs des Arabes, sans connaître Tiniportance des récoltes.
Tels étaient le fondement et la base des maux. Les gouverneurs
y ajoutèrent ensuite, et les chefs de district pareillement, enfin les
courriers et les préfets les aggravèrent de nouveau. Et ainsi, en eux
tous, dominaient sans pitié le brigandage, la fraude et l'injustice.
Le prophète Isaïe parle de ces gens quand il dit*: « Malheur
à moi! les prévaricateurs ont prévariqué; les prévaricateurs ont
prévariqué de la prévarication: La crainte, la fosse, le lacet sont
pour toi, [200| ô habitant de la terre I Quiconque fuira à la voix de la
crainte, tombera dans la fosse, et quiconque remontera du milieu
de la fosse sera saisi par le lacet. Les cataractes du ciel se sont
ouvertes et les fondements de la terre sont ébranlés. Par le déchi-
rement sera déchirée la terre; par l'ébranlement sera ébranlée la
terre; parle chancellement chancellera la terre comme [un homme]
ivre; elle sera enlevée comme une tente. Son iniquité l'accablera,
et elle tombera, et elle ne se relèvera plus, m
1. Is , 1. 2:^.
2. Deux termes de l'impôt. Cf. ci-des<us, page 133.
3. Is., XXIV, 16-2ÎO.
166 CHRONIQUE
Ils pratiquèrent Tiniquité sans pudeur. La terre fut agitée et
ébranlée, et les hommes s'en allèrent de village en village, d*un
lieu dans le lieu voisin. Leur iniquité s'aggrava, « et la terre fut
dévastée, et sa face fut dénudée, et la loi a péri ; car Tesclave est
devenu comme son maître, le prêtre est comme le peuple, celui qui
emprunte est plus dur que celui qui prête, le débiteur plus [dur]
que le créancier^ ».
Isaïe dit aussi à leur propos': a Voici que le Seigneur dévastera
la terre, et il la mettra à nu; il affligera sa face et il dispersera ses
habitants, et [comme] sera le peuple, ainsi [sera] le prêtre; [comme]
l'esclavo, ainsi son maître; [comme] la servante, ainsi sa maîtresse;
[comme] le préteur, ainsi celui qui emprunte; [comme] l'acheteur,
ainsi le vendeur; [comme] le débiteur, ainsi le créancier. Parla
dévastation sera dévastée la terre, par le pillage elle sera pillée,
car le Seigneur a parlé. L'univers a pleuré, s'est dissous, s'est
affaibli. La terre est devenue semblable à ses habitants. La loi est
devenue vaine, les préceptes bons ont été changés en préceptes
mauvais, les prescriptions de la justice éternelle ont été trans-
formées» en iniquité, en impiété, en brigandage. Satan a dit aux
démons : a Ahl voici que mon œil les voit.» Il a dit à ses mi-
nistres: « Poursuivez-le et saisissez- le. »
Personne ne se révoltera, personne n'échappera à l'impiété
petite ou grande. Il a tendu son filet et tous les enfants d'Adam se
sont pris dedans. Sa main est comme un nid dans lequel sont
rassemblés tous les peuples. Personne, ni évêque, ni prêtre, ni juge,
n'est exempt de péché, ou de calomnie, ou de rapine, ou de [201]
dénonciation, ou d'injure, ou de malédiction, ou de haine, ou de
murmure, ou de brigandage, ou d'adultère, ou de violation des
sépultures. Toutes les semences du diable sont maintenant semées
dans tous les hommes. Chacun s'efforce de mal faire selon son
rang et son pouvoir.
En voyant ces choses, le prophète a dit': « A cause de cela la
terre siégera dans le deuil, et ses habitants seront coupables. La
moisson s'est lamentée, la vigne a langui. Ceux qui se réjouis-
saient de cœur ont sangloté. La joie et les cymbales ont cessé; le
bruit de ceux qui se livraient à l'allégresse s est calmé, le son
joyeux de la harpe est devenu muet. Ils ne boiront pas le vin au
milieu des chants. Toute liqueur est devenue amère pour ceux qui
1. Cf. Is., .\xiv, 2.
2. Is., XXIV, 1-5.
3. Is., XXIV, 6-11.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 167
la boivent. Le village a été pillé; tous les celliers ont été fermés.
Il y aura une clameur sur la place publique au sujet du vin. »
La joie a passé, la danse a cessé : au lieu d'elles ce sont la déso-
lation, la misère, les amertumes.
Ces choses ne sont pas venues jusqu'à nous par la renommée,
mais nous les voyons devant nos yeux.
Les hommes se firent mutuellement tous les maux. Ils osèrent
s'attaquer aux moines, aux reclus, aux stylites; ils en firent des-
cendre plusieurs de leurs colonnes, ils en firent sortir de leurs cel-
lules de réclusion. Les moinesqui vivaient chastement et saintement
dans les pieuses congrégations des monastères eurent principale-
ment à soufîrir l'oppression, la persécution, les coups violents, à
propos des exactions de ces juges. Que celui qui lit sache et com-
prenne que jamais on n'a vu dans le monde persécution plus vio-
lente que celle de cette année. Si elle n'avait èUS mêlée, de sorte que
tous les peuples furent opprimés et eurent à en souffrir plus que de
toutes les précédentes, j'aurais à glorifier les martyres d'aujourd'hui.
Si quelqu'un possédait quelque chose et voulait fuir, i) était
emprisonné comme dans des liens, jusqu'à C(» qu'il fût dépouillé de
tout et qu'il ne lui restât plus rien. Dès qu'il était spolié de tout, il
pouvait s'enfuir, mais tant qu'il avait quelque chose [202] il ne le
pouvait. S'il prenait la fuite, la route elle-même le dépouillait. S'il
arrivait qu'il déposât quelque chose dans la terre, l'endroit même
le dénonçait : « Voici le bien d'un tel; venez, prenez le. » S'il
confiait son dépôt à quelqu'un, celui-ci se faisait son spoliateur et
lui prenait son bien au lieu des voleurs et des brigands.
A ce propos le prophète Abdias dit': « Si tu t'élèves comme l'aigle,
et si tu poses ton nid parmi les astres, je- t'en ferai descendre, dit le
Seigneur. » Et il dit encore*: « Comment ont-ils fouillé Ésau, et
fureté dans les choses qu'il avait cachées? » — Il fallait voir com-
ment ce qui avait été caché par quelqu'un était promptement mis
au jour.
Osée dit aussi ^: (( A cause de la grandeur de l'iniquité, la
démence a prévalu ; » et encore* : « La démence est dans la maison
de Dieu, m La démence s'est multipliée parmi tous les hommes avec
l'iniquité, le mensonge, les acceptions de personne.
« Mon peuple m'a méprisé et ne m'a pas connu. Ce sont des fils
1. Abd., 4.
2. /hifi., 6.
3. OsÉB, IX, 7.
4. Ibid., 8.
168 CHRONIQUE
insensés, intelligents pour le mal et ignorant le bien. J'ai considéré
la terre: et c'était \e tohu-bohu, » dit saint Jérémie*. Toute la
terre fut un véritable tohu-bohu ; les t«mèbres du péché et de l'ini-
quité ont couvert sa face.
Tout le bétail de lacontrée fut vendu. Les marchands de bestiaux
devinrent plus nombreux que les étoiles du ciel, comme nous dit le
prophète Nahum*. [On vendait] deux ou trois chèvres pleines pour
un zouz. autant de brebis ou un bœuf pour un zouz,un âne pour un
zouz, un mulet pour dix zouz. Tout ce qui restait de IVpizoo-
tie s'en allait au vent. Leurs objets précieux et magnifiques qui
avaient été pillés par les juges, étaient aussi vendus pour rien. Un
objet qui valait vingt ou trente zouz, s'en allait pour deux ou trois.
Quand la contrée fut ainsi anéantie, on était à l'approche des
saints jours du carême, et on entrait dans les semaines appelées
(( de joie» [203] et que nous n'appellerons pas, nous, « de joie »
mais d'amertume, de tristesse, d'angoisse ; car alors la calamité fut
plus grande que dans tout le reste de l'année.
Le fléau se prolongea ainsi pendant tout le saint carême jus-
qu'après le dimanche « nouveau* ». Il n'y eut ni fête ni dimanche:
on ne fit point les prières qu'on avait coutume de faire pendant les
jours du carême et des Rameaux, même les dimanches. Les chré-
tiens arrachèrent tous les ustensiles (?) * de fer ou de bois de leurs mai-
sons et les vendirent; ils en arrachèrent les portes et les vendirent,
attendant un temps meilleur ; enfin ils arrachèrent même les
solives de leurs maisons et les vendirent, puis ils abandonnèrent
les ruines de leurs demeures et s'en allèrent dénudés, errant de
village en village, d'un lieu dans un autre. C'est ici qu'il faut dire
avec le prophète Jérémie* :is Le peuple a mangé de l'absinthe, il a
bu des eaux araères ; ils ont été dispersés parmi des nations incon-
nues à eux et à leurs pères. Le glaive a été envoyé à leur suite jus-
qu'à ce qu'ils fussent consumés. » Isaïe dit aussi : * « Ils seront
comme des daims en fuite, comme un troupeau de chèvres qui n'ont
personne pour les rassembler. Chacun retournera vers son peuple,
et l'homme s'enfuira vers son pays. » Et encore': « Leurs maisons
seront remplies de gémissements; les démons y bondiront; les
1. JKI1>, IV» M>v~<wû •
2. Nahum, m, 16.
3. l'remier dimanche après Pâques, dans le rite syrien.
4. 11 faut peut-<''lre lire réhcuta, au lieu de réqcata que porte le msc.
5. JÊK., IX, 15-16.
6. I8., xiii. 14.
7. /6t^., 21-2i.
DE DENYS DE TEI.L-MAHRÉ 169
autruches s*y installeront. Les sirènes chanteront dans leurs pa-
lais, elles chacals dans leurs édifices voluptueux. ))
Nous ne devons pas seulement dire que « le sacrifice et la liba-
tion sont bannis de la maison du Seigneur^ » mais que les livres
liturgiques (?) des églises ont été arrachés et vendus, que le reste a
été brûlé dans le feu, que leurs vases sacrés ont été détruits. Les
vignes ont été dévastées ; la vendange a pleuré'. Les champs ont
produit des épines et des ronces ; les figuiers se sont desséchés ;
les oliviers furent détruits; les grenadiers, les dattiers, les pom-
miers, et tous les arbres ont péri. C'est pourquoi la joie a disparu
de parmi les hommes ; les travailleurs se sont enfuis et leurs mai-
sons sont devenues la demeure des bètes sauvages. [204J
De la calamité qu eurent à subir les habitants des campagnes par
suite de la déprédation, et des maux causés par le /ait des
paysans eux-mêmes.
Nous n'avons pas voulu non plus laisser cela en dehors de ce
récit lamentable plein d'angoisse et de cruelle douleur.
Déjà j'ai dit plus haut que l'établissement de gouverneurs origi-
naires du pays fut plus nuisible que tous les maux antérieurs et
postérieurs. Comme si sa propre rapacité ne suffisait pas, [chaque
gouverneur] se choisitcommeauxiliaires les gens les plus vils et les
I plus misérables qui ne laissèrent pas m*îme un clou dans la mu-
j raille sans l'enlever, car ils étaient rapaces comme les loups du
soir. Ils ne possédaient rien, et là ils acquirent des richesses par
, leur brigandage avec la complicité de leur gouverneur. Ceux qui
I jusqu'alors avaient été assassins, détrousseurs dechemins, ivrognes,
1 impudiijues, tendeurs d'embûches pendant la nuit, crocheteurs de
maisons, sont aujourd'hui juges! — Voyez, mes frères, l'œuvre des
péchés, et entre les mains de qui ils jettent ceux qui les commettent.
Ainsi qu'il est dit : Le méchant sera vengé par le méchant. —
Voici entre les mains de qui nos péchés nous ont jetés, et ce que
furent pour nous ces exacteurs avares et impitoyables.
En percevant Timpôt de capitalion et beaucoup d'autres, ils
en exigeaient plusieurs fois le montant. Ils vendaient tout ce que
possédaient les hommes et ils en prenaient [le prix]. Non seulement
1. Joël, 1,9.
2. Cf. Is., XXIV, 7.
170 CHRONIQUE
ils exigeaient dans un lieu l'impôt qui était dû, mais plusieurs
fois le même impôt. Il n'y avait ni commencement, ni milieu, ni
fin fà leurs exactions]. Ils tombaient et se jetaient sur les pays en
disant : (( La part de tel village est de tant; il reste tant de milliers
[de dinars à payer]. » Et ils allaient Timposer de nouveau. Quand
par la violence ils avaient obtenu la somme, ils recommençaient à
l'exiger. Personne n'osait prendre la parole, car lout le monde
craignait d'être surtaxé par le juge. Ils s'emparaient des notables
et les pressuraient [205] sans pitié : au point qu'ils en firent périr
et en détruisirent plusieurs.
Les paysans eux-mêmes donnèrent la main aux malfaiteurs. Ils
s'attaquaient aux hommes, enlevaient et vendaient tout ce qu'ils
possédaient. Ils disaient, en mentant : « Tu as dans notre pays
une vigne, ou un jardin, un bois, un champ d'oliviers, » ou : « Tu
as répondu pour quoiqu'un, » ou : « Tu es soumis chez nous à la
cipitation, et voici tant d'années que tu n'as pas payé le tribut.
Paie maintenant que nous ^sommes gênés. »
Pour de tels ou de semblables motifs, les paysans saisissaient
les hommes pauvres et les pillaient. Le juge lui-même leur appie-
nait à agir ainsi, il leur prêtait la main et ne leur demandait pas
compte de ce qu'ils faisaient. Ils tombaient sur un passant, s'en
emparaient, suscitaient contre lui de faux témoins [qui disaient]:
(( Celui-ci est solidaire de notre tribut. » Il affirmait avec serment :
(( Jamais je n'ai vu ces hommes, ni eux ne m'ont vu. » Ceux-ci
disaient : « Il est solidaire de notre tribut. » Et il se trouvait parmi
eux des faux témoins qu'ils produisaient contre lui. Ainsi ils veu-
daient son bétail, son bien et tout ce qu'il possédait. Ils circulaient
dans les villes comme des chiens qui flairent par terre les traces
de leurs maîtres, des animaux ou des troupeaux. Ils s'informaient
de ceux qui avaient quelque dépôt : soit du froment, soit du fer'
soit toute autre marchandise, et ils s'en emparaient. 11 fallait les
voir circuler dans les villes, par troupes, épiant un homme et
disant : (» Un tel est des nôtres. » Celui qui échappait à l'un était
saisi par d'autres, qui le conduisaient chez d'autres encore. S'il
arrivait qu'il eût caché quelque chose, soit dans la terre, soit chez
quelqu'un, l'endroit même le criait, comme une femme enceinte
saisie par les douleurs de l'enfantement. C'est dans ces circons-
tances ou dans des circonstances semblables ou dans des circons-
tances analogues que les hommes passèrent les saints jours du
carême.
Venons-en maintenant aux autres maux que les [206] villageois
se firent entre eux.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 171
« Ils iront de violence en violence \ » Et nous, nous irons de
maux en maux. « Car les excréments [succèdent] aux excréments,
et le vomissement au vomissement *. — Et après une nouvelle,
viendra une autre nouvelle '. »
De Famertume que les hommes éprouvèrent par suite de la con-
vention; et du pillage que les villageois exercèrent les uns
contre les autres^
Puisque « le Seigneur causa la destruction et le retranchement
sur toute la terre* », on put voir ici la destruction de toute chose.
Et la colère du Seigneur ne s'éloigna pas encore de nous, parce
que nous n'avons pas cessé de conimoUre de nombreux péchés;
mais de jour en jour nous ajoutons à nos fautes, comme un homme
qui s'est imposé une charge considéra))le et qui, au lieu de l'alléger,
y ajoute au contraire. Le Seigneur s'est quelque peu indigné : et
nous, nous avons continué à mal faire. A propos de cela, Jérémie
crie vers nous en disant* : « Ainsi dit le Seigneur : quand môme
Moïse et Samuel se tiendraient devant moi, mon ame ne pencherait
pas vers ce peuple. Chasse-les de devant ma face. Qu'ils s'en
aillent. Et s'ils te disent: Où irons-nous? Dis-leur: Ainsi dit le
Seigneur: A la mort celui qui [est destiné] à la mort, au glaive
celui qui [est destiné] au glaive, à la famine celui qui [est destiné]
à la famine, à la captivité celui qui [est destiné] à la captivité.
J'enverrai sur eux quatre fléaux, dit le Seigneur : le glaive pour
tuer, les chiens pour déchirer, les oiseaux du ciel et les bêtes de
la terre pour dévorer et détruire. » Maintenant le Seigneur nous
a chassés de sa présence; et ni Toblation, ni IVxpialion, ni les
hommes justes qui sont parmi nous, n'ont pu réconcilier le Sei-
gneur avec nous. Mais il a dévasté la contrée. Les hommes sor-
tirent de leurs maisons, des chiens tombèrent sur eux pour les
déchirer, des oiseaux pour les dévorer sans pitié. Et même [ces
gens] étaient pires que les chiens et les oiseaux, car ceux-ci,
[2071 quand ils ont mangé et sont rassasiés, cessent de déchirer.
En dehors de cela, [l'animal] ne dévore pas, ne broie pas, ne piétine
pas ce qui reste. Ces bêtes rapaces au contraire ont dévoré : elles se
1. Pb. lxxxiv, 7.
t. I8., XWIII, 10.
3. Jér., li, 46.
4. Is., X. 23.
5. JEU.. XV, 1-4.'
172 CHRONIQUE
sont rassasiées, et ont emporté dans leurs demeures ce qui restait.
Ce n'est pas assez de tous les maux que nous avons racontés.
Il faut encore y ajouter ceux-ci. Lorsque l'impôt de capitation était
déjà presque entièrement soldé, un homme cruel nommé* ,
celui-là m^me dont nous avons parlé plus haut, fut envoyé dans
le pays. Il vint à Amida, à Arzoun et à Maipherkat. A Amida,
parmi les gens du pays se trouvaient des hommes méprisables et
avares qui Arzoun, à Maipherkat
[Le texte a^t trop mutilé en ce pa.^.^at/e, pour qu'il soit possible de le res-
tituer acer. certitude et d'en donner une traduction littérale. Le sens cepen-
dant ftaralt suffisamment : Cet indicidu commit dans ces cilles, et surtout
à Amida, arec la complicité du goueerneur et des gens du pays^ toute
sorte d'iniquités. Il exigea trois fois plu.^ qu'il n'était dû pour Vimp(tt; les
paurreK, It-s étrangers, et princijm.lement les marchands ^furent les cictimes
de ses exactions.]
. . . .[208] Quand les pauvres virent que ce brigandage manifeste
ne cessait pas, que [ces exacteurs] n'avaient ni honte, ni crainte de
Dieu, que ce principe de tous les maux no leur 'demandait pas
compte des méfaits qi^'ils commettaient perpétuellement dans la
contrée, ils se révoltèrent. « Nous avons donné, disaient-ils, pour
nous et pour nos voisins ; nous avons payé notre impôt et celui
qui n'était pas dû par nous. Quand donc seront-ils rassasiés de notre
chair? Nous ne donnerons plus rien, Ciir nous ne savons où prendre
de quoi leur donner. ))
Quand le gouverneur entendit cela, il frappa des mains, grinça
des dents et, comme un lion, devint avide de sang. Il rassembla
contre eux tous les brigands et les assassins de la ville. Il envoya
son lieutenant, et avec lui des hommes criminels et sanguinaires,
les notables du pays, des paysans scélérats et sans pitié. Celui-ci
réunit parmi les campagnards une troupe nombreuse armée de
lances et de frondes et s'avança contre eux. Les paysans de leur
côté firent beaucoup de mal à tous les assassins et à tous les
voleurs qui se trouvaient parmi eux, et ils firent subir à leurs
frères des maux tels que la langue est impuissante à les narrer.
Or, le lieu qui s'était révolté se trouvait dans les montagnes et
dans la région septentrionale. Il s'appelait Toutis. Le peuple était
composé de Syriens et d'Ourtéens qui se partageaient la région,
c'est-à-dire l'Arménie 1V«. Il y avait dans cette région un endroit
1. Razin. Cf. ci-dessus, p. 138, el ci-dessous, p. 175.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 173
qui fournissait du plorab, de Targent et d'autres minerais de fer.
A cause de la grande calamité qui s'était emparée de toute la terre,
des hommes se rassemblèrent en si grand nombre dans ce lieu où
il y avait du plomb, que l'endroit devint un vaste camp et que le
roi y établit même un gouverneur. De tous lieux les hommes se
réunirent en cet endroit et y creusèrent des fosses grandes et pro-
fondes pour chercher le plomb. [209]
Or, l'armée des paysans se dirigea vers le lieu que nous avons
désigné. Ils voulaient leur imposer la contribution. Mais les gou-
verneurs persans ne voulurent pas y consentir. « La plupart
d'entre eux, disaient-ils, sont de votre pays; ils paient le tribut et
l'impôt. » Ceux-ci ne se laissèrent pas convaincre; ils se dispo-
sèrent à se battre avec acharnement et à piller tout ce qui appar-
tenait aux autres. Les Perses donnèrent l'ordre à ceux qui habi-
taient le camp de se préparer à les combattre et à les empêcher
d'entrer près d'eux, s'ils ne voulaient pas être massacrés.
Quand ceux qui n'étaient pas du camp fondirent sur eux et com-
mencèrent à les tuer, tous ceux qui travaillaient le plomb prirent
la fuite en présence du glaive. Comme on était encore en hiver,
il y avait dans cette région une neige épaisse ; la glace s'était
même fixée sur l'orifice des fosses, et les excavations qui étaient
remplies d'eau à cause des neiges ne se reconnaissaient pas. Beau-
coup d'hommes tombèrent en fuyant dans ces fossés et la plupart
d'entre eux furent suffoqués et périrent ensevelis sous la glace au
fond de ces excavations. Ils en tuèrent aussi beaucoup par le
glaive; ils ne leur firent point grâce et les dépouillèrent. Ils
pillèrent tout le camp.
Que le prophète Jérémie vienne donc en personne et qu'il dise à
ce propos* : « Tous nos ennemis ont ouvert leur bouche contre nous.
Nous sommes dans la crainte, l'effroi, la fosse et la ruine. Mes
yeux ont laissé couler des ruisseaux d'eau à cause du brisement
de la fîlle de mon peuple. Mes ennemis, sans motif, m'ont pris à la
chasse. Ma vie est tombée dans la fosse. Ils ont jeté sur moi des
pierres. Les eaux ont débordé au-dessus de ma tête. » Qu'il ajoute
encore ce qui fut dit par un autre' : « Celui qui fuira à la voix de
l'effroi tombera dans la fosse; celui qui s'échappera de la fosse
tombera sous le glaive; celui qui évitera le glaive tombera dans la
captivité. )) Rien de tout cela n'a manqué ici. [210] Les chrétiens
n'eurent pas même pitié de leurs compagnons q ui avaient été suffoqués
1. Thren.^ m. 49-54.
t. lâ., XXIV, 18.
174 CHRONIQUE
OU tués, et ne les retirèrent pas pour les enSevelir. Si par hasard ils
en reliraient un, c'était pour le dépouiller de ses vêtements, et ils
l'abandonnaient nu à rorifice de la fosse.
Quant aux maux qu'ils firent dans cette contrée, il conviendrait
de n'en point parler, d'abord parce que peut-être personne ne
nous croira, à cause de leur malice; ensuite de peur que les païens
n'en aient connaissance et ne disent que les chrétiens ne craignent
point Dieu, puisque leurs œuvres sont pires que celles des mages.
Cependant, afin de faire connaître quelles sont les causes qui ont
amené sur nous cotte calamité, pour que ceux qui verront nos
œuvres prennent garde à eux, et aussi afin de montrer les miséri-
cordes de Dieu qui supporte avec patience nos provocations et la
multitude de nos malices, nous en dirons quelque chose.
Ils s'avancèrent donc sur eux, et à cause de la neige abondante
qui se trouvait sur la terre, ils ne purent s'enfuir. Et s'il arrivait
qu'ils s'enfuissent, les autres allaient sur leurs traces, les trou-
vaient et les jetaient dans la neige, eux, leurs biens, leurs
femmes, leurs enfants. Ceux-ci tremblaient et devenaient pâles
comme le sel, à cause de la rigueur du froid. Et au lieu d'avoir
pitié d'eux, ils dépouillaient les hommes, les femmes, les enfants,
et les laissaient nus, sans vêtement ni chaussures. Ils leur enle-
vaient même leurs caleçons et ne craignaient pas de découvrir la
nature. Ils commettaient même sans honte des impudicités sur
leurs femmes et leurs filles, en présence les uns des autres. Le
scélérat qui était à leur tête statua que tout ce qu'un homme saisi-
rait appartiendrait à cet homme. En sorte que lui-même et ces
brigands qui *s'étaient adjoints à lui et étaient venus avec lui,
purent satisfaire et accomplir leur convoitise et leur rage.
Les paysans et leurs chefs étaient plus durs que les [211] païens
et n'eurent pas la moindre pitié pour leurs frères. Ils firent subir
leur malice à ceux qui étaient respectables aux yeux de tous. Ces
détrousseurs de grands chemins détruisirent tous les objets à
l'usage des hommes; ils consumèrent par le feu ceux qui étaient
en bois, brisèrent ceux de terre, prirent pour eux-mêmes ceux
d'airain ou de fer. Ils ne laissèrent ni lit, ni porte, ni vase,
ni bassin, sans le détruire par le feu. Ils brisèrent les amphores,
les outres, les marmites, les cruches. Ils burent du vin qui
s'y trouvait autant qu'ils purent, et répandirent le reste à la
surface de la terre. S'il arrivait qu'un récipient fût enfoncé dans
le sol et qu'ils ne pussent le briser, l'un deux, saisissant sa
lance, en perforait le fond, et le vin s'écoulait au sein de la terre.
Ils firent de même pour le miel : ils en mangèrent tant qu'ils
DE DENYS DE TELI -MAHRÉ 175
purent et répandirent le reste sur la terre. Ils brisèrent les ruches
des abeilles et les plongèrent dans l'eau, de sorte qu'elles périrent
toutes. Us eurent Taudace de faire cela par le conseil de Satan qui
leur traça la voie pour en venir à être pires que les païens qui se
trouvaient parmi eux. Ils osèrent manger de la viande et du fro-
mage pendant les saints jours du carême et firent beaucoup
d'autres actions pernicieuses. En sorte que quand le bruit do ce
qu'ils avaient fait à leurs frères arriva jusqu'à nous, nous fûmes
plongés dans une grande douleur, dans les pleurs et dans une pro-
fonde angoisse, et nous nous étonnâmes en voyant jusqu'à quel
point le Mauvais séduit les hommes.
Ils osèrent même s'attaquer à l'église qu'ils dépouillèrent; ils
enlevèrent ses livres et tous les objets du culte sacré. Comme ils
avaient renfermé leurs femmes dans les églises, les païens y
entraient eux-mêmes et usaient d'elles au milieu des temples. C'est
ici qu'il fautpleureravec Jérémieet dire* : [212] « Sion, — c'est-à-
dire la sainte Église, — a perdu sa beauté. Ses prêtres sont humi
liés, et elle-même est plongée dans ramertume. L'ennemi s'est
levé, l'oppresseur a porté la main sur toutes ses choses précieuses.
Elle a vu entrer dans ton sanctuaire les Gentils que tu avais défendu
de laisser entrer dans ton assemblée. » Et encore * : « Ils ont
humilié les femmes de Sion. ))
Ces calamités eurent lieu dans cette région. Ils emmenèrent les
hommes enchaînés comme des assassins, rassemblèrent tout leur
bétail et le conduisirent avec eux. Ils parcoururent ainsi de nom-
breux villages, chassant les paysans, pillant et entraînant les
habitants.
Razin passa à Arzoun et à Maipherkat, et quand il vit le bri-
gandage dès gouverneurs de ces villes, il les condamna à de grands
tourments et à de violents supplices; au point qu'ils furent ron-
gés de vermine et moururent'. Il brisa leurs mains et leurs pieds
dans des entraves, et il enleva tout ce qu'ils avaient pillé.
Dieu les livra aux mains de ce cruel scélérat, et toutes les souil-
lures qu'ils avaient commises retombèrent sur eux-mêmes. On
disait d'eux qu'ils s'emparaient dans les rues des jeunes imberbes
elles souillaient. Les scribes et les changeurs impies, qui étaient
chrétiens, faisaient prendre et amener des jeunes filles qu'ils
souillaient, aussi bien les filles du peuple que les filles des no-
1. Thren,, i, 6, 4, 9, 10.
2. Thren., v, 2.
3. Cf. Aet., xir, 23.
176 CHRONIQUE
tables. En vérité, ils n'avaient point de honte, et ne connaissaient
point de réserve, ceux qui osèrent s*attiiquer aux fiancées du Christ.
Dieu les livra aux mains d'un plus méchant qu'eux-mêmes. « Le
méchant tire vengeance du méchant, et le Seigneur d'eux deux. »
Celui ci donc, ayant vu leurs œuvres mauvaises, les fit venir,
leur perça les narines et leur mit un frein, comme aux chameaux;
il [213] leur fit un trou au front, y suspendit des tablettes' et leur
fit attacher des chîdnes par lesquelles on les tirait. Celui il
le livrait au valet pour qu'il le tournât en dérision sur la place
publique. Il les jeta ensuite en prison. Il ne leur donnait du pain
que pour leur conserver la vie. Il s'élevait de toute part de la mai-
son dans laquelle ils étaient enfermés une odeur de putréfaction pire
que celle d'un tombeau. J'ai noté quelques-unes de ces choses afin
qu'en les voyant les chefs placent Dieu en face de leur conscience,
qu'ils n'agissent pas selon leur gré et contrairement à l'honnêteté;
et aussi afin qu'ils sachent qu'il y a une loi, même pour celui qui
fait la loi, et qu'ils comprennent que le prince qui se conduit d'une
manière déréglée perd promptement et rapidement le titre de
prince, qui fait sa gloire, et reçoit en échange celui de tyran, qui
est plein d'insanités; ce qui est le commencement de la démence.
De la famine qui sévit sur les hommes; de la cruelle maladie
et de la grande peste gui survinrent en cette année.
Il est écrit dans le prophète* : « Voici que je nourrirai ce peuple
d'absinthe, et je lui ferai boire des eaux amères ; et je le disper-
serai parmi des nations qu'il n'a point connues. J'enverrai après
eux la faim, la peste, la captivité et le glaive. »
Toutes les choses prédites par le prophète arrivèrent; et non pas
moindres, mais bien plutôt pires. Il y eut une grande affliction
dans les pays du Sud, à cause de la sécheresse dont nous avons
parlé plus haut. Toute la contrée méridionale et orientale fut sou-
levée par la cruauté et la persécution de Mousa Ibn Mouç*ab.
Leurs habitants envahirent la Mésopotamie. Les villages et les
villes, les maisons et les champs en furent remplis: au point qu'on
ne pouvait circuler ou se fixer quelque part à cause d'eux. Cela
aggrava l'affliction qui pesait sur [214] les pauvres et les ouvriers
de la Mésopotamie, car personne ne leur donnait de salaire, personne
1. En guise de jougs.
2. JÉRÉM., IX, 15, 16; cf. xxiii,15;xxiv, 10.
DE DExNYS DE TELL-MAHRÉ 177
n'employait un seul d'entre eux. Si quelqu'un offrait de travailler
au prix de sa seule nourriture, il s'en trouvait parmi eux, autant
qu'on voulait, qui consentaient à travailler, alors même qu'on ne
leur donnait pas le pain suffisant. Ils circulaient autour des mai-
sons, hommes et femmes, enfants et vieillards, tout le jour sans
cesser ; quand ils apercevaient quelque part une porte ouverte,
trente ou quarante d'entre eux s'y précipitaient à la fois. Au
commencement, tout le monde leur faisait l'aumône. Mais quand
la foule de ces pauvres, de ces étrangers, de ces affamés, se
fut accrue outre mesure, on cessa de leur donner ; car les
habitants craignaient de manquer eux-mêmes et de devenir
plus malheureux que ceux-ci, et de plus, le gouverneur, par la
fraude et le vol, avait enlevé tout le froment des propriétaires et
l'avait fait vendre. Les pauvres eux-mêmes ne furent pas exempts
de péché. Parmi eux, des jeunes gens valides se firent des vête-
ments comme pour des lépreux, des infirmes, des aveugles, et
avec une audace sans pudeur, ils circulaient courbés comme des
infirmes et ils se jetaient sur celui qui ne leur donnait pas et le
frappaient à mort. Un individu ne s'éloignait pas d'une porte avant
d'avoir obtenu ce qu'il demandait. A cause de leurs imprécations,
les hommes avaient peur d'ouvrir leurs portes. Les scélérats qui
agissaient de la sorte descendaient ensuite au marché vendre le
pain qu'ils avaient mendié et s'acheter de la viande et du vin. De
sorte que les hommes, voyant cela, cessèrent de nouveau de
secourir les pauvres ; mais ils tombèrent dans une grande
affliction, car les scélérats dépourvus d'humanité qui faisaient ces
choses et considéraient cela comme un métier, [21 5J attaquèrent
les maisons, les moulins et tous les endroits. Les habitants des
diverses contrées de la Mésopotamie se réunirent et gagnèrent les
villes à cause de la famine. Tout leur bien était vendu et personne
ne voulait leur prêter. Ils mangèrent de la viande et du laitage
pendant tout le carême. A cause du vil prix du bétail, partout on
leur donnait de la viande tant qu'ils voulaient. En certains lieux
cette famine s'aggrava sur les indigènes, à cause de la multitude
des étrangers, au point qu'ils s'attaquèrent aux cadavres des
morts.
Les étrangers qui avaient abandonné leur pays à cause de la
famine, pour ne pas y périr, étaient précédés, accompagnés et
suivis, partout oii ils allaient et venaient, du glaive et de la
peste.
Ils mangèrent l'amertume, ils burent le fiel, ils furent dispersés
au milieu des nations qu'ils ne connaissaient point. [Dieu] envoya
12
178 CHRONIQUE
après eux le glaive, la captivité, la famine et la peste, jusqu'à ce
qu'ils fussent consumés*.
Ils furent plongés dans cette* affliction tout le temps de Thi ver.
Quand les jours un peu plus chauds arrivèrent et qu'on eommeuça
à apercevoir de l'herbe, ils se précipitèrent sur la verdure * des
champs et s'en rassasièrent à la manière des bêtes. Ils en re-
cueillaient qu'ils apportaient au marché et qu'ils vendaient pour
s'acheter du pain. Leur couleur était celle de l'herbe verte. Ils
n'en étîiient point rassasiés, comme le sont les bestiaux.
En eux fut accompli ce que dit le prophète': « Tu mangeras et
n'en seras point rassasié ; car lu dyssenterie sera au milieu de toi. »
Il en fut ainsi maintenant. Ceux-ci mangeaient et n'étaient point
rassasiés. Us tombèrent tous dans la maladie des entrailles ; les
portiques, les marchés, le devant des boutiques, les tours, les édi-
fices, tous les lieux étaient remplis par eux.
Ensuite plusieurs maladies diverses s'emparèrent d'eux: [216]
les ulcères, les pustules, le mal du ventre, le mal des yeux, la fièvre,
sans parler d\iutre.s maladies comme les dartres et la rougeole* et
plusieurs autres qu'on ne connaît pas. Les hémorrhoïdes et l'hydro-
pisie furent très fréquentes.
Nous entendîmes dire qu'il y avait à Mossoul une maladie
dans laquelle la tète de ceux qui en étaient atteints se tuméfiait,
puis ils tombaient promplement et mouraient, au point qu'on ne
suffisait pas à les ensevelir. Nous regardions cela comme une fable;
mais la chose ne tarda pas à arriver chez nous. Ce mal se répandit
peu à peu dans les villes de la région inférieure et arriva jusqu'à
nous. Voici comment la chose se passait. 11 s'emparait d'abord du
sommet de la tête, puis il progressait peu à peu et descendait jus-
qu'au cœur qu'il saisissait. Alors l'esprit était troublé; l'éclat des
yeux disparaissait, l'individu perdait connaissance et demeurait
immobile comme un mort. Il restait ainsi de longs jours privé de
toute connaissance humaine. Si l'homme qui était frappé de ce mal
1. Cf. JÉKKM., XXIV, 10.
S. Le mot signifie propreniont U'gumcs ; mais il semble qu'on doive lui
donner ici uu sens plus large.
3. MicH., VI, 14.
4. Ces deux expressions rendent approximativement le texte. Le mot
(armsa ( = Oipjio; ) signifie lupin, et le mol ijardin signifie léoftar^ (ou
tjrainst ei particulièrement f/rains de grenade). Il s'agit donc en premier lieu
d'une maladie qui tachetait la peau; peut-être les dartres ou la variole.
Quant au nom de la seconde maladie, le ms. porte Oar samô qu'il faudrait
peut-être orriger eu bur 80uina<ju, livi. le Jits de la rougeur, c'est-à-dire
la rougeole.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 179
ne faisait pas son testament dès le premier ou le second jour, il ne
lui était plus possible ensuite de le faire. S'il arrivait qu'après
quelque temps il retrouvât ses sens et l'usage de la parole, il s'é-
veillait comme d'un profond sommeil, ne sachant pas même s'il
avait été malade, et, si la faiblesse de son corps le lui permettait, il
se levait.
Cernai s'emparait du même individu plus de cinq ou six fois. Il
y en avait qui succombaient dès la première ou la seconde attaque,
mais il y en avait aussi qui frappés plus de cinq fois étaient en-
core repris par le mal. Sur beaucoup de ceux qui étaient atteints,
il poussait des bubons blancs qui se desséchaient après un jour où
deux, puis des rougeurs qui disparaissaient aussi, et alors appa-
raissaient des taches livides. Et quand on avait supporté toute cette
infirmité [217] pendant longtemps et qu'on se croyait sur le point de
recouvrer la santé, on était pris par le ventre. Celui qui échappait à
ce mal était saisi par les pustules et les dartres(?) . On trouvait quatre
ou cinq individus qui gisaient dans un même lieu, ayant chacun une
maladie différente: car la maladie de Tun ne ressemblait pas à celle
des autres. On en trouvait qui souffraient des pustules, du ventre,
des bubons, des hémorrhoïdes, de ce mal qui trouble le cœur :
toutes ces maladies se trouvaient à la fois sur le même individu. Et
après avoir souffert tout cela il tombait mort; car la faim et la soif
le torturaient plus vivement que ces maladies. Ils gisaient dans les
portiques, les édifices, les églises, les tours, les marchés : ils étaient
étendus sur le fumier, accablés de diverses maladies. D'autres,
poussés par la faim, circulaient dans les villes. Ils se tenaient près
d'une porte jusqu'à dix, vingt ou trente à la fois, affligés les uns de
pustules, les autres d'ulcères, les uns souffrant du ventre, les
autres d'autres maladies. Et tandis que ces calamités tombaient sur
leurs corps, la cruelle afQiction de la faim et de la soif les obligeait
à se traîner sur les mains et les pieds pour demander du pain de
tous côtés, alors que ceux mêmes qui étaient disposés à faire l'au-
mône ne suffisaient pas à donner à ceux qui venaient à leurs portes.
A cause de la multitude de ceux qui allaient dans les maisons, ceux
qui gisaient dans les rues étaient opprimés par la faim et la soif.
« Ils seront jetés sur les rues de Jérusalem par le glaive, la famine
et la peste, et il n'y aura personne pour les ensevelir, eux, leurs
femmes et leurs enfants. [218] Je répandrai sur eux leur propre
malice. Si tu sors dans les champs, voici des tués par le glaive ;
si tu entres dans le village, voici des exténués de faim\ »
1. Jkrém., XIV, 16, 13.
180 CHRONIQUE
Celte maladie s'abattit sur les villes, et les habitants commen-
cèrent à succomber comme des sauterelles. On redoutait d'y entrer
par crainte tant de Tautorilé que des maladies et de la peste. Ils
se jetèrent sur les hommes, attaquèrent les roules et détroussèrent
les passants. Us se jetaient sur eux, les pillaient, les dépouillaient,
les tuaient, non pas tant pour courir après l'or ou l'argent que pour
avoir du pain ; de sorte que beaucoup d'hommes furent tués parce
que l'un d'eux portait et conduisait aux siens de la farine ou du
froment. Pour un gephûa ou cinq'...., ils versaient sans pitié le
sang d'un homme.
Des contrées entières osèrent envahir et piller d'autres contrées,
couper les routes et dévaliser les passants. La couleur de ces gens,
quand ils abandonnaient leur pays, était comme celle de l'herbe
verte. Ils allaient vendre le fruit de leur travail pour s'acheter du
pain; ils en mangeaient sans mesure et bientôt tombaient aux portes
de la mort. Parfois, tandis que l'un d'entre eux tenait le pain dans
sa main et mangeait, il devenait noir comme un sac, se repliait en
arrière, tombait et rendait l'âme. Cela arriva à beaucoup d'entre eux.
Ils commencèrent à mourir en si grand nombre que les hommes ne
pouvaient suffire à les ensevelir pendant tout le jour.
Dieu n'abandonna pas les pauvres. Sa bonté et sa miséricorde
s'étendit sur eux. Ils furent saisis et tombèrent les premiers dans
cette maladie, au point que les rues et tous les lieux en étaient infec-
tés. Ainsi à ce moment où les hommes possédaient encore quelque
chose, [219] chacun prenait soin d'eux selon ses moyens. Ceux
d'enlre eux qui mouraient étaient ensevelis avec grand honneur.
Les habitimts apportaient des cercueils et des linceuls dont ils les
revêtaient ; ils les accompagnaient et les déposaient dans leurs
propres tombeaux, au milieu des offices et des psaumes, comme il
convient à des chrétiens. Ils rassemblèrent aussi ceux qui étaient
frappés et gisaient dans les rues, accablés par la maladie, la faim
et la soif; ils les firent entrer dans un grand édifice, où ilsétablirent
quelqu'un pour prendre soin d'eux. Chacun selon sa force les
prenait et les transportait. Mais quand la calamité envahit le pays,
tous furent également dans le besoin. Ceux qui avaient été riches
étaient devenus des mendiants. « Ceux qui se nourrissaient déli-
cieusement sont maintenant étendus dans les rues ; ceux qui ont
grandi dans la pourpre dorment maintenant sur les immon-
dices*.»
1. Le nom de la mesure est omis dans le msc.
'^, Thren., iv, 5.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 181
Le même prophète Jérémie ajoute' : « Leur face est devenue
plus noire que des charbons; ils n'ont pas été reconnus sur les
places publiques; leur peau s'est attachée à leurs os, elle s'est
desséchée et est devenue comme du bois. Plus heureux ceux qui
ont été tués par le glaive que ceux qui sont morts de faim; parce
qu'ils ont été consumés, comme ceux qui ont été frappés et sont
étendus dans les champs. ))
Ainsi en était-il de ceux qui furent atteints par ces maladies; car
ils furent enlevés des rues et ensevelis. Le fléau s'empara des sei-
gneurs des villes, et ils tombèrent tous à la fois, grands et petits,
enfants et vieillards, jeunes gens et jeunes filles. De sorte que si
vous entriez dans vingt maisons, à peine trouviez-vous un homme
qui pût donner de l'eau à son voisin. Tous gisaient comme morts,
incapables de discerner le bien du mal.
De même qu'on a dit plus haut qu'il n'y avait pas une maison dans
laquelle il n'y eût des morts, de mêni^ici on peut dire qu'il n'y avait
pas de maison, [220] pas même une seule, dans laquelle il n'y
eut des malades. Et on peut ajouter avec Jérémie* : « La langue
de Tenfant à la mamelle s'est attachée à son palais par la soif; les
petits enfants ont demandé du pain, et il n'y avait personne pour
le rompre et le leur donner. »
En effet, s'il restait dans une maison une ou deux personnes qui
ne fussent pas frappées de maladie, elles gisaient étendues par la
faim qui les faisait souffrir plus que ceux qui étaient malades; car
il n'y avait personne pour leur faire et leur cuire du pain. Ceux
qui gisaient étendus par les diverses maladies, souffraient^ eux
aussi, de la faim et de la soif; car les gens étaient trop affaiblis pour
pouvoir se lever et donner de l'eau aux autre?.
Le fléau s'aggrava et la peste commença à sévir parmi eux : de
sorte qu'on enterrait en un seul jour deux ou trois personnes de la
mérae maison. On emportait à la fois dans un même cercueil la
mère et sa fîUe, le père et son fils, ou les deux frères ensemble.
Deux frères étaient enterrés en même temps, l'un d'un côté de la
ville, l'autre de l'autre côté; on apportait leurs cercueils, on les
réunissait ensemble, on les conduisait au tombeau et on les plaçait
Tun sur l'autre; et souvent, au même moment, il arrivfiit que leurs
parents rendaient le dernier soupir.
Le mal s'appesantit sur les notables et les chefs de famille.
Tous les prêtres de l'église d'Amida succombèrent dans cette peste.
1. T/iren., i\\ 8, 9
2. T/tren.j iv, 4.
182 CHRONIQUE
Le fléau commença à se répandre peu à peu et à sortir des ville
pour envahir leurs environs. Il tomba sur les campagnes; et comme
il avait fait dans les villes, ainsi fit-il à Textérieur.
Ici fut accomplie la parole d*Isa!e* : « Tu as bu de la main du
Seigneur le calice de sa colère ; tu as bu et épuisé le calice du
tremblement. De tous les fils que tu as mis au monde il n*en est pas
qui te soutienne; de tous les fils qu'elle a élevés il n'en est pas qui
prenne sa main. Deux maux sont tombés sur toi : qui s'attristera
sur toi? Le pillage et la destruction, la faim et le glaive : qui te
consolera? Tes fils [221] ont été jetés par terre. Ils dorment dans
tous les carrefours, semblables à la bette fanée, pleins de l'indi-
gnation du Seigneur et de la réprimande de ton Dieu. »
La couleur de tous les hommes qui échappèrent à cette maladie
était, en effet, celle de la bette fanée parla gelée. Ils étaient tous
chauves, de sorte que le moine et le prêtre ne se distinguaient que
par leurs vêtements. On ne pouvait distinguer un prêtre d'un
séculier: car ils étaient également rasés. La vue et l'ouïe s'afiFaibli-
rent et ne reprirent leur force que longtemps après. Tant que l'été
dura, cette maladie s'aggrava.
Quand arriva l'époque de la moisson dans le Beit*Arabayê, tout
le peuple de la contrée septentrionale, même les étrangers, s'as-
sembla pour descendre moissonner, au seul prix de leur pain.
Les femmes et les serviteurs descendirent aussi. C'est l'habitude
chez ce peuple du Nord que les jeunes gens descendent moissonner ;
mais à cette époque, les vieillards et les serviteurs, les femmes et
les enfants descendirent, à cause de la grande calamité qui pesait
alors sur eux.
Lors donc qu'ils furent descendus et eurent mangé du pain à
satiété, tous tombèrent dans diverses maladies. En sorte que les
routes et les chemins, les hauteurs et les bas fonds en étaient
remplis; à la ville, à la campagne, partout, ils tombaient comme la
sauterelle.
Ils n'avaient d'autre salaire que le pain nécessaire à chacun
d'eux. Beaucoup, dit-on, s'en allaient dans les champs, et dès qu'ils
avaient mangé et étaient rassasiés, ils tombaient morts. De sorte
qu'il en sortait vingt et en rentrait cinq. Quand les propriétaires
de la moisson apprirent cela, ils ne laissèrent plus entrer dans leurs
champs que ceux qui avaient bonne mine et étaient valides. Ils
leur donnaient pour salaire cinq oboles par jour, ou tout au plus[222]
dix. Ainsi, les hommes firent moissonner leur moisson qui était
l, l8., Li, 17-20.
DE DENYS DE TEl.L-MAHRK 183
abondante, sans pitié pour les forces de ces malheureux; et ils ne
leur donnaient pas même du pain sec à satiété, non pas à cause de
la disette, mais parce qu'ils avaient niauvais vouloir.
Nous ferons aussi connaître les maux causés par les hommes, et
la violation des sépultures et [la spoliation] des défunts.
De la violation des tombeaux et de la spoliation des défunts.
Le prophète Jérémie nous aprédit le renversement des tombeaux.
Il a parlé de la dispersion de leurs ossements comme le fumier à
la face de la terre, sans personne pour les recueillir. « En ce temps-
là, dit le Seigneur, on jettera les os des rois de Juda, et les os de
ses princes, et les os de ses prêtres, et les os des prophètes, et les os
des habitants de Jérusalem hors de leurs sépulcres; on les exposera
au soleil, à la lune, à toute la milice céleste, qu'ils ont
aimés, servis, suivis, recherchés et adorés. Ils ne seront point
recueillis ni ensevelis ; comme un fumier, ils seront sur la face
de la terre \ »
Satan s'est attaqué vivement à nous, à cause de nos péchés, qui
sont plus nombreux que les siècles, les temps et les non;ibres
nombreux, et qui ont fait que nous avons subi cela.
Ils retournèrent les hommes et jetèrent sans pitié leurs ossements
hors des tombeaux. Comme un homme tire une pierre de la maison
et la jette dehors: ainsi liraient-ils et jetaient-ils leurs ossements
hors de leurs tombeaux. Ils ne se préoccupaient point de les remettre
en place quand ils avaient satisfait sur eux leur rage et leur ava-
rice. S'il se trouvait des hommes vertueux et craignant Dieu pour
les blâmer à cause de cette malice, de cette iniquité, [223] de cette
impiété, ils disaient: « Quel mal faisons-nous? » ou bien: « Où
prendre pour donner [l'impôt] ? » Lorsqu'on leur demandait :
« Trouvez-vous quelque chose ? n ils répondaient aussitôt, d'accord
avec les paroles de Satan leur père et leur chef : « Nous trouvons. »
Et quand on en interrogeait un : « Toi-même, qu'as-tu trouvé? » il
disait : « Moi, je n'ai encore rien trouvé; mais un tel a trouvé tant
et t^int de pendants d*oreilIes, de ceintures, de colliers d or ; et dans
tel village on a retiré tant d'or ou d'argent. » Satan leur apprenait
à dire ces paroles futiles, pour leur honte. Kt quand on interro-
geait celui que l'on prétendait avoir fait une découverte, sa trouvaille
184 CHRONIQUE
était ou un pendant d'oreille en cuivre ou une ceinture de fer.
Telles étaient leurs découvertes; mais Satan, au moyen de ses
ouvriers, les proclamait des merveilles par milliers et par myriades,
afin que tout le monde s'associât à lui dans cette impiété. Il leur
donna pour récompense le feu de Tenfer.
Comme les générations fidèles des temps passés lui avaient
résisté et qu'il n'avait pu exercer ses desseins sur elles pendant leur
vie, ses ministres le satisfirent et accomplirent maintenant ses
désirs en dispersant leurs ossements. L'ennemi de tout bien se
joua de nous et de nos ancêtres: de ceux-ci, parce que leurs
ossements furent dispersés; de nous, parce que nous accomplîmes
nous-mêmes cette œuvre.
De même que ceux-là avaient succombé à divers fléaux : de
même diverses maladies tombèrent sur les hommes, et la parole
de l'Écriture disant que quand les tombeaux sont ouverts, de nom-
breuses pestes envahissent les villes, s'accomplit.
Par suite de la grande liberté que les hommes avaient prise de
violer les sépulcres, ils en vinrent à spolier même les morts que
l'on ensevelissait actuellement. Au point que quand les ensevelis-
seurs enterraient un mort et retournaient [224] chercher son voisin,
lorsqu'ils revenaient, le premier était déjà dépouillé. Ils retournaient
de même les fosses des Arabes et des Juifs. Quand ils avaient
spolié un mort,il l'enterraient de nouveau pour qu'on ne s'en aperçût
pas, ou ils l'abandonnaient nu, étendu sur sa face, et s'en allaient.
Aussi, dès que les gens s'aperçurent de cela, soit parce qu'ils sur-
prirent quelques-uns des violateurs de sépultures, soit parce qu'ils
trouvèrent les objets des défunts chez eux, ils ne laissèrent plus le
mort qui venait d'être enseveli sans gardien, ni jour ni nuit,
jusqu'à ce qu*il tombât en putréfaction. Us couvraient de chaux,
jusqu'à ce qu'ils fussent dévorés par la teigne, les vêlements précieux
dans lesquels il était enveloppé, et les imbibaient d'huile de cèdre.
Pour ce motif, il y avait de nombreux veilleurs au milieu des
cimetières des Syriens, des Arabes et des Juifs ; car ils n'abandon-
naient pas un mort sans gardien avant qu'il tombât en pourriture
et en putréfaction. Ces scélérats et ces voleurs n'épargnaient pas
même un pauvre qui avait été enseveli avec une chemise usée ou
un lambeau de vêtement.
Nous trouvons mention dans le prophète de la violation des
sépultures, mais non pas de la spoliation des morts. Mais nous
autres, nous avons surpassé par nos impiétés et nos iniquités tous
les maux mentionnés et non mentionnés dans les Écritures. Con-
fessons donc la bonté incommensurable et incompréhensible du
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 185
Seigneur vis-à-vis de ses enfants égarés, qui supporte nos provoca-
tions et la grandeur de notre malice.
De la destruction causée par la peste, et des hèles féroces
qui sortirent ensuite.
Après que nous fûmes tombés dans toute cette impiété et dans
toutes les iniquités détestables : dans le mensonge, dans la rapine,
dans le pillage mutuel, dans la calomnie, dans la médisance [225] et
le brigandage, dans l'adultère, dans le vol, dans lefaux témoignage,
dans l'assassinat, dans les dénonciations réciproques , les maux com-
mencèrent à nous environner de toutes parts. Nous n'avons pas fait
pénitence et nous ne nous sommes pas tournés vers le Seigneur,
niais nous avons remué de leur plîice les morts qui dormaient; alors,
le Seigneur se tourna vers nos œuvres. Dieu nous abandonna et
tous les maux se réunirent contre nous, comme dit le prophète^ :
« J'assemblerai sur eux tous les maux ; je les livrerai en proie à mes
traits; ils périront de faim, ils seront livrés à l'esprit du mal. Je les
livrerai à l'oiseau de proie, et j'exciterai contre eux la bôie féroce.
Le glaive les ravagera au dehors; au dedans, la frayeur. » —
Isaïe a dit aussi* : « Il sera en môme temps abandonné aux oiseaux
des montagnes et aux bêtes de la terre : et les oiseaux se rassem-
bleront autour de lui, et les bètes de la terre s'irriteront contre
lui. >) — llabacuc a dit': « Tu seras rassasié de mépris au lieu de
gloire. Bois, toi aussi, et sois assoupi. Le calice de la droite du
Seigneur t'environnera et le mépris couvrira ta gloire; car l'iniquité
du Liban te couvrira, et le ravage des animaux t'étourdira à
cause du sang de l'homme et du ravage de la contrée, de la ville et
de ses habitants. » — Saint Jérémie dit encore* : « Chasse-les de
ma présence, et qu'ils s'en aillent. Que s'ils te disent : Où irons-
nous? tu leur diras: Voici ce que dit le Seigneur : A la mort celui
qui [est destiné] à la mort; au glaive celui qui [est destiné] au
glaive; à la famine celui qui [est destiné] à la famine; à la
captivité celui qui [est destiné] à la captivité. J'enverrai sur eux, dit
le Seigneur, quatre fléaux: le glaive pour tuer, les chiens pour
déchirer, les oiseaux du ciel et les botes de la terre pour dévorer et
mettre en pièces; et je les livrerai au tremblement. » Et de nouveau
1. Oeui,, XXXII, 23-33.
t. Ig., xviii, 6.
3. Hab., Il, 16, 17.
4. JÉR,, XV, 1-4.
186 CHRONIQUE
il dit* : « Si tu sors dans les champs, voici des tués par le glaive;
si tu entres dans le village, voici des morts de faim. »
Lorsque les maux se furent multipliés à cause du gouverneur, de
la disette, de la famine, de la peste, des diverses maladies [226] qui
fondirent sur les hommes, ceux-ci abandonnèrent leurs maisons
et allèrent se fixer dans les montagnes et les vallées. Là, ils péris-
saient comme la sauterelle, de la faim, de la peste, du froid, et ils
étaient dévorés par les oiseaux et les animaux, sans personne pour
les ensevelir.
Cette peste s'appesantit su ries contrées inférieures et désola toute
cette région. De sorte que des cours où il y avait eu quarante ou
cinquante personnes restèrent sans un seul habitant. A Mossoul, on
sortait de la ville plus de mille cercueils par jour. Dans la région
de Nisibe, plusieurs villages qui étaient devenus importants furent
totalement ruinés. Tous les grands d<^ la contrée moururent. Cette
peste fit surtout périr les prêtres des villes et des campagnes. Dans
Je monastère de Qartamin, quatre-vingt-quinze hommes périrent de
cette peste, surtout les notables; dans le monastère de MarÇaliba*,
tous les supérieurs moururent. Les champs, les villages, les
grandes cours des villes restèrent déserts.
Après cette peste [on vit] certains animaux, eflFrayants et
terribles, qui n'avaient peur de rien. Ils ne s'enfuyaient pas devant
les hommes et n'avaient pas peur d'eux; ils en firent périr un grand
nombre. Ils ressemblaient quelque peu à des loups, mais ils en
différaient en ce que leur museau était petit et long; ils avaient de
grandes oreilles comme les chevaux. Le poil qui était sur leur
épine dorsale ressemblait à des soies de porc; il était long et
redressé en haut. Ces animaux firent de grands ravages parmi les
hommes dans le Tour *Abdin. On disait qu'ils avaient dévoré dans
un certain village plus de cent personnes, et dans beaucoup d'autres,
vingt, quarante, cinquante. [227] Les hommes ne pouvaient
rien contre eux, et ils n'avaient point peur. Si par hasard quelques
hommes en poursuivaient un, ils ne l'effrayaient aucunement et
l'animal ne s'enfuyait point devant eux, mais il se retournaitcontre
ceux-ci qui lâchaient leurs armes; il sautait sur eux et les mettait
en pièces. Ils entraient dans les maisons et les cours, enlevaient les
enfants' et sortaient sans que personne leur résistât. Ils montaient
1. Jén., XIV. 18.
2. Ou couvent de la Croix. Il y a plusieurs mona.stôres de ce nom. L'un
d'eux, — probablement celui dont il est ici que^^iion, — se trouvait près de
Hah. dans le Tour *Abdin. Cf. Bar Hiaiit., (.hmn. ercles., II, 522; I,56î*, u.
'.i. Dans le sens du laiin /mer.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ ' 187
la nuit sur les terrasses, enlevaient les enfants de leur litet descen.
daient sans que personne pût s'y opposer. Les chiens eux-mêmes
n'aboyaient point contre eux. De sorte que, pour ce motif, la contrée
subit une épreuve amère et plus dure que toutes celles qu'elle avait
supportées. Deux ou trois hommes ne pouvaient circuler ensemble.
On ne voyait plus de bétail dans le pays, car tout avait été dévoré.
Quand, en effet, l'un de ces animaux envahissait un troupeau de
chèvres ou de moulons, il en enlevait plusieurs.
Et que dire à propos de ce cruel fléau, si ce n'est qu'il nous fut
envoyé par Dieu? Car il est manifeste pour tout le monde qu'ils
avaient reçu de Dieu cette force, puisque ni les chiens, ni les
hommes ne pouvaient nuire à un seul d'entre eux.
Il a dit : m J'assemblerai sur eux tous les niaux\ » Voici les
châtiments impitoyables du tribut, de la fuite d'un lieu dans un
autre. Voici encore la famine, la peste, les diverses maladies.
Voici la rapine, le pillage que se font mutuellement des pays
voisins. Non seulement tout le bétail a péri cette année, mais voici
les oiseaux de proie qui, partout, dévorent les cadavres des hommes
qui gisent sans sépulture. Et avec tout cela, voici encore les botes
féroces !
Ces animaux passèrent dans l'Arzanène et firent de grands ra-
vages dans chaque village, [228] ainsi que dans la contrée de Mai-
pherkat, et sur le mont Çahia. A Amida, ils causèrent quelques
dommages.
« Et par tout cela la colère du Seigneur n'a pas été détournée de
nous; mais il a de nouveau étendu sa main*. » Cependant, s'il n'a
pas écarté sa verge, c'est que nous ne nous sommes pas écartés
nous-mêmes de nos œuvres détestables, mais nous y avons ajouté,
et nous les avons plusieurs fois doublées. De sorte que nos méfaits
se sont succédé sans interruption, et le Seigneur a de nouveau
étendu sa main pour nous corriger.
[// manque ici un ou plusieurs feuillets dans le manuscrit.]
Ils s'emparaient aussi des Arabes et des Syriens à propos des
héritages etles vexaient cruellement et amèrement. Ils n'admettaient
point la parenté selon ce qui est écrit dans la loi des rois ; ni qu'on
établit d'héritiers, excepté le fils [qui pouvait faire héritier] son
père, le père son fils, loncle son neveu, et le neveu son oncle.
1. D€ut., .\xxii, 23.
%. Is., V, 25.
188 CHRONIQUE
On échappait avec difficulté à ces bétes féroces. Le prophète
Joël dit, en efïet^ : « Ses dents sont comme les dents d'un lion, et ses
molaires comme les molaires d'un lionceau. Il a réduit ma vigne
en un désert; il a arraché mon figuier, Ta jeté par terre, Ta décor-
tiqué, et ses rameaux sont devenus blancs. »
Ici, il arriva que ce que il enleva, et ce qui resta fut
extorqué par Témir préposé aux héritages. Il dépouilla les hommes,
et leurs rejetons blanchirent dénués de tout.
Sixièmement : de la mort de Vémir d^Amida; du livre qui aoait
été rédigé ; du soulagement qui en résulta pour les notable» du
pays qui étaient emprisonnés.
Le temps nous fait défaut pour raconter les maux qui survinrent
à Amida en cette année, car elle souffrit alors de cette calamité
plus que toutes les autres villes. [229] Mais comme latribulation
n'est encore qu'au début et n'a pas pris fin, je parlerai du commen-
cement de ce fléau.
Nous amènerons saint Isaïe, — car il a vu d'avance ces maux
et il est plus éloquent que nous, — et avec lui son collègue Jéréipie,
afin que « le discours soit confirmé par la bouche de deux
témoins*».
(( La ville a été remplie de clameurs, la cité fortifiée a été rem-
plie de cris. Ceux des tiens qui ont été tués ne sont pas tués par le
glaive, ni morts au combat. Tous tes princes ont fui ensemble ce
fléau, et ils ont été enchaînés. Ceux qui s'êuient rassemblés au
milieu de toi ont été garrottés, le reste s'est enfui au loin. A cause
de cela j'ai dit: Laissez-moi pleurer amèrement la dévastation
de la fille de mon peuple; car c'est un jour de pleurs, de clameurs,
de piétinement, de lamentation. Et le Seigneur des armées [vous]
invitera en ce jour-là à pleurer, à gémir, à raser [vos] cheveux, à
revêtir le sac'. » Survienne encore le prophète Jérémie [dont les
paroles mieux que celles d'aucun autre] expriment la douleur et la
lamentation. « Je succombe à ma douleur, mon cœur est triste en
moi-même. Voici la voix de la fille de mon peuple qui s'élève d'une
terre lointaine. Je suis contristé à cause du brisement de la fille de
mon peuple, et la stupeur s'est emparée de moi, car la guérison de
1. Joël, i, 6. 7.
2. Oeut.. xix, 15.
'S, Is., XXII, 2-5, 1*3
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 189
la fille de mon peuple n'est pas parfaite. Qui donnera à ma tôte
do Teau et à mes yeux une fontaine de larmes, et je pleurerai jour
et nuit sur le brisement de la fille de mon peuple? Qui me laissera
dans le désert, dans une cabane de voyageur, et j'abandonnerai
mon peuple, et je me retirerai d'eux, car tous sont adultères, et
une assemblée de menteurs? Ils ont lancé leurs langues comme
avec un arc; ils se sont fortifiés sur la terre par le mensonge et
non par la fidélité, parce qu'ils ont passé d'un mal à un autre mal
et qu'ils n'ont pas connu le Seigneur'. »
Ces maux et de pires encore se multiplièrent en cette année à
Amida, ville de laMésopotamie,[230]parlefait de cet émir indigne
et despote qui y était venu.
Or, il arriva qu'un gouverneur, originaire de Callinice et nommé
Mabdoui, s'y rendit. C'était un homme impie, avare, qui ne se
préoccupait point de Dieu dans ses actions. Ainsi ce Mabdoui
dans
[ici commence le cerso du feuillet qui se trouce avtucllcinent le dernier
dans le manuscrit, et qui parait lui acoir serci de coucerture. Beaucoup de
mots se troucent ainsi en partie ejfacùs et le texte n'ql/'ro plus de sens
suiei. On reconnaît cependant que l'auteur parlait des maux que cet indioidu
Ht souffrir aux hommes, principalement aux paueres, aux ceuees et aux
orphelins, dans la cille et la région d' Amida, sur le mont Aisouma [cf. ci-
dessus, p. 60, n. h), et à Samosate, Selon son usage, Denys reproduit ici
de longues citations des prophètes.]
[Il manque ici un ou plusieurs feuillets dans le manuscrit
les hommes ne pouvaientpas passer ni approcher des envi •
rons de cette maison, à cause de la forte odeur de putréfaction qui
en sortait et se répandait très loin. Si quelqu'un était contraint
d'aller jusque-là, parce que quelqu'un des siens s'y trouvait, il
était incommodé par cette odeur pendant un jour ou deux.
Ici nous devons dire avec le prophète Isaïe* : « De même qu'on
rassemble les œufs abandonnés, ils ont rassemblé tout le pays; et
il ne s'est trouvé personne qui remuât l'aile, qui ouvrît la bouche
1 JÉR., VIII, 18, 21,22; ix, 1-3.
2. Is., X, 14.
190 CHRONIQl'K
OU qui murmurât. » Les Arabes et les Syriens, [231] les grands et
les petits, les maîtres du pays et les étrangers furent rassemblés
sans qu'il y eût quelqu'un pour remuer l'aile, ouvrir la bouche et
parler.
Que le prophète David vienne donc aussi, qu'il voie le temple
saint souillé et devenu un lieu d'ordures, comme le temple de
Baal détruit par Gédéon\ et qu'il dise* : « 0 Dieu! les Gentils
sont entrés dans ton héritage; ils ont souillé ton saint temple. Ils
ont fait de ton église sainte un lieu d'ordures, et il s'élève du
milieu d'elle une odeur de putréfaction, ku lieu du parfum
agréable. »
Isaïe a dit' : (( A cause de cela la terre sera dans la désolation et
tous ses habitants seront coupables. La terre a pleuré, et elle est
demeurée dans le deuil; l'univers a pleuré et s'est dissous ; car
toutes les tables ont été remplies de vomissements et d'excré-
ments, sans laisser de vide. » Le prophète leur a dit, parlant au
nom du Seigneur* : a Je leur ai dit : Voici mon repos : soula-
gez ceux qui sont fatigués; et tel est mon apaisement. Et ils n'ont
pas voulu écouter. — Et telle fut la parole du Seigneur vers eux :
Excréments sur excréments et excréments sur excréments ; vomis-
sement sur vomissement et vomissement sur vomissement. »
On pouvait voir ici leurs excréments et leurs vomissements,
leurs tables de toutes parts couvertes d'excréments.
Quelles larmes, quelle douleur peuvent suffire lorsqu'on voit
des hommes nobles et délicats prendre leur pain dans leurs mains
pour manger et, devant eux, le fumier accumulé sur le fumier;
alors que d'autres auparavant étaient sortis à cause de la répu-
gnance de cet endroitl
A propos de ces choses le prophète Joël dit et s'écrie* : w Prêtres,
ceignez-vous et pleurez; hurlez, ministres de l'autel; entrez, cou-
chez-vous dans les sacs, ministres de mon Dieu; » non (f parce
que la libation et le sacrifice ont disparu, » mais parce que
réglise fut rejetée et abandonnée par le Seigneur aux mains des
étrangers ! [232j
Alors que tous les hommes étaient plongés dans cette grande
affliction, cet impie prit le livre écrit au commencement de
l'année, sous forme de ta'dil. Quiconque n'y était pas inscrit ou
1. Cf. Jud., VI. 32.
2. Ps. LXXIX, 1.
3. Is., XXIV, 6, 4; xxviii, 8.
4. Ib., xxviii, 12, 13.
5. Joël, \,V..
DE DENYS DE TELL-MAHRK 191
n*était pas marqué sur les mains, fut fr<ippé d*une amende de
quaranle-huil zouz, qui était portée h soixante, ou de trente-cinq,
ou de vingt-cinq ou de quinze. 11 en fit ainsi sortir beaucoup; mais
les pauvres et les indigents restèrent en prison et eurent à souffrir
de la faim et de cette odeur de putréfaction.
11 saisit les notables à la place de leurs enfants, de leurs frères,
de leurs parents qui n'étaient pas inscrits sur ce livre détaillé, et il
les frappa d'amendes. Il s'empara aussi de ceux qui étaient inscrits,
et leur causa des dommages considérables. Il choisit des hommes
débauchés et ivrognes et se les associa. Ceux-ci dénonçaient petits
et grands; ils les recherchaient et les lui amenaient. De la sorte
personne n'échappa sans qu'il l'eut obligé à payer, soit pour lui-
même, soit pour ses parents, ou sans qu'il lui eût cherché que-
relle.
11 s'empara de nouveau des habiuints de la contrée et les força à
traiter avec lui ; et à ce sujet il y eut beaucoup de contestations.
11 frappa leurs chefs jusqu'à les faire mourir; il dépouilla et pilla
chacun selon son bon plaisir, sans que personne le blàmat ou lui
demandât : « Que fais-tu? » La fidélité ou la véracité ne se trouvait
chez aucun d'eux. Ils saisirent, en effet, les habitants de la ville et
firent un traité avec eux relativement à leurs enfants et à leurs
parents moyennant deux mille [dinars]. Quand ils les eurent reçus,
ils ne cessèrent pas de mal faire, mais ils leur infligèrent des amendes,
lis leur suscitaient des difHcultés de tout genre. Ils sortaient sur
les routes et les chemins, et quand ils s'emparaient des usuriers (?)
ou de ceux qui ne l'étaient pas, ils les dépouillaient également et
leur enlevaient tout ce qu'ils avaient. [233]
Dieu, dans sa miséricorde, fit que cette calamité eût lieu au mois
de yar [mai] ; dès lors les hommes se cachaient dans les montagnes,
comme des colombes dans les anfractuosités. Il n'y eut plus sur les
routes ni allant ni venant, car cette persécution s'étendait en tous
lieux. Les hommes périssaient de faim et craignaient d'entrer dans
unevilleouun village. Si parfois quelques-uns d'entre eux avaient
quelque chose à vendre pour s'acheter du pain, ils amenaient avec
eux leurs femmes, et dès qu'ils approchaient de la ville, ils en-
voyaient celles-ci dans la cité, tandis qu'eux-mêmes restaient
cachés dans les moissons, mourant de faim, attendant [le retour de]
celles qu'ils avaient envoyées, les uns deux jours, les autres trois,
les autres quatre, ou même d'un dimanche à l'autre; ils se tenaient
dissimulés, comme des colombes, dans les tombeaux et les récoltes,
torturés par la faim; et parfois quand [la femme] revenait, c'était
en vain qu'elle avait fait son acquisition. C'est maintenant que
192 CHRONIQUE
nous pouvons dire : « Au dehors siégera le glaive et la famine, el
à rintérieur la crainte ^ »
Cette fureur s'appesantit aussi sur les habitants de Téla, d'Édesse,
de IJarran. — Le prophète dit, en effet' : « C'est la malédiction
qui sort sur la face de toute la terre. »
Quand ce fléau cruel arriva sur les habitants de Nisibe, voyant
qu'on les taxait sans miséricorde, qu'on s'emparait de tout allant
ou venant, qu'on se jetait sans pitié sur les campagnes, les notables
du pays s'assemblèrent et descendirent trouver Mousa. Ils essayèrent
de lui persuader de faire une convention avec eux, mais il ne le
voulut pas. Ils lui demandèrent de racheter les contributions exté-
rieures que leur avaient infligées ses envoyés, et qu'au moins ces
chiens rapaccs ne pussent entrer dans leur pays. Il ne leur accorda
pas cela; mais il s'empara d'eux,^ [234] les jeta en prison, à
Mossoul, et les fît charger de chaînes. Il jura sur sa personne que
tant qu'il tiendrait le pouvoir ils ne sortiraient pas de là. Beau-
coup de gens intercédèrent pour eux, mais il ne les écouta point.
Ils restèrent en prison jusqu'à ce que le Seigneur les délivrât et
que ce tyran reçût le châtiment qui lui était dû.
Il est temps maintenant de nous détourner de cette calamité
pour nous tourner vers un autre fléau.
•
Dixièmement : des émirs préposés à la dîme, et des émirs
préposés au çauphi.
Je parlerai du serpent qui naquit de cette vipère, et des fruits
détestables qu'elle répandit sur nous.
Ceux que cette vipère envoyait dans le pays étaient plus mau-
vais que le serpent. Ils vinrent, entrèrent dans la ville et firent
recenser sans pitié tout ce qui appartenait aux habitants. Si un
homme n'avait ni froment ni orge, mais en achetait au marché
pour manger, ils lui en inscrivaient mille gribè, à un autre deux
mille, à un autre cinq, à un autre dix, et jusqu'à quarante ou cin-
quante mille gribè. Sans entrer dans la maison de chacun pour
voir ce qu'il y avait, ils inscrivaient ce que le diable leur suggérait.
Ils firent de même à l'égard des boutiquiers, des grainetiers, des
marchands d'huile, des négociants de toute sorte qui étaient dans
le bazar. Ils les [taxaient] sans pitié et leur réclamaient l'impôt. De
1. Cf. Deut., XXXII, 25.
2. Zaciiar., V, 3.
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 193
sorte que si Tun d'eux vendait tout ce qu'il y avait dans sa bou-
tique, il n'obtenait pas plus de la moitié de ce qu'on lui demandait.
Et, tandis que les hommes subissaient cette grande oppression à
cause de l'impôt, du décimateur, de la capitation, le çauphi faisait
de son côté autant de mal qu'il pouvait, saisissant et pillant tous
ceux qui entraient ou sortaient. [235]
C'est ici que nous pouvons dire : « Tout ce qu'a laissé la saute-
relle ailée, le bruchus l'a mangé, et tout ce qui a échappé à celui-ci,
la nielle Ta dévoré ^)) Ainsi tout ce que la capitation a laissé,
l'usurier (?) l'a enlevé, tout ce que l'usurier (?) a laissé a été pris par
le décimateur, et tout ce qui a échappé à celui-ci a été pris par le
çauphi. — « Quiconque échappera à la voix de la frayeur tombera
dans la fosse, et quiconque remontera de la fosse tombera dans le
Blet, et quiconque se délivrera du filet sera dévoré par la bête
féroce'. »
Du second émir préposé aux étables*.
Quand Khalil Ibn Zadân, l'émir des étables dont nous avons
parlé plus haut S mourut, Abou *Oun ' prit sa place. Les gouverneurs
établis par Ibn Mousa s'opposèrent aux siens et les chassèrent de la
ville. Alors vint un Persan envoyé par le roi, homme violent, dur,
sanguinaire, qui troubla tout le pays. Tous les Arabes de la contrée
eurent à souffrir de sa part, car il se mit à faire ce que les Persans
n'avaient pas coutume de faire.
L'usage des Persans à l'origine était d'emprisonner longtemps
sans miséricorde. Celui-ci se mit à tuer en frappant, et même à
crucifier. Une grande calamité s'empara des Syriens, partout où il
alla, tant à cause du logement des bêtes de somme que des dé-
penses causées par sa troupe; car ils logeaient chez les habitants et
toute leur nourriture ainsi que celle de leurs bêtes de somme était
aux frais de ceux-ci.
Le prophète a dit*: t Tous viennent au butin. » Avant d'aller
imposer une ville, il envoyait en avant un courrier préparer un
endroit et y remiser les bêtes de somme. Cet envoyé arrivait à la
1. JOBL, X, 4.
2. l8.,xxiv, 18.
3. Cf. ci-dessus, p. 136.
4. Cf. page 106.
5. Probablement le môme persounage déjà mentionné plus haut, p. 109.
6. HAB.f I, 9.
13
l
194 CHRONIQUE
ville vingt jours d'avance et commettait toute sorte de maux el de
déprédations. [236] Il sortait [avec ses soldats] sur les routes et les
campagnes, et ils saisissaient les mulets et les chevaux, emmenaient
même les colons et les enfermaient dans des maisons ou des cours.
Ils relâchaient quiconque leur donnait deux zouz par mulet ou par
cheval, et s'emparaient de son voisin. Ils allaient aussi sur les
routes et dans les khans, au dehors de la ville, pour s'emparer des
ânes des pauvres. Ils leur prenaient un zouz par âne et les relâ-
chaient. Ils sortaient aussi dans la contrée et exigeaient des
hommes qu'ils amenassent leurs bêtes de somme. Quand ils les
avaient amenées, ils se mettaient à leur demander des zouz : deux
zouz par mulet, un zouz par âne. Ils emmenaient les bêtes de
somme de tous ceux qui ne les leur donnaient pas. Ils emmenèrent
de la sorte beaucoup de bêtes de somme, prises dans le pays, sur
les routes, au marché, et ils les enfermèrent dans des cours. Les
hommes avaient ainsi beaucoup à souffrir à cause de leurs dépenses
et de celles de leurs bêtes de somme, et lorsque nombreux,
lui-même arrivait. On prenait aussi les bêles de somme des
marchands et des passants. On saisit ainsi beaucoup d'animaux
appartenant aux pauvres, pendant des jours et des mois nombreux,
et on no les relâcha point avant qu'ils eussent vendu tout ce qu'ils
possédaient pour subvenir à leurs dépenses. On ne voulut leur
laisser ni leur donner quoi que ce soit. — L'Écriture dit* : « Ils sont
plus empressés que les loups du soir; ils voleront comme un aigle
affamé vers sa nourriture; » et encore': « Tous viennent au butin. »
Disons aussi quelque chose au sujet de cet homme lui-môme.
Quand on entendait parler de lui dans la contrée, la frayeur et le
tremblement s'emparaient de tout le monde. Il commença à frapper
sans pitié, à tuer et même à crucifier. Dans chaque ville où il
entrait, il faisait crucifier deux, trois ou cinq personnes, et les
hommes tremblaient en sa présence. [237] Ils disaient qu'il ne
faisait périr que [les voleurs], les assassins, les détrousseurs de grands
chemins; or, nous avons appris pour la plupart, mais aussi
des Messaliens qu'on appelle zélateurs, mendiants et ey/TTa».'.
1. Hab., I, 8.
2. Ibid., 9.
3. « Haeretici isti saeciilo.iv, in Mesopotamia exorti, et inde per Syriam
dilatait, toti in oratioaes intenti cetera negligebant, et, abjectis, propter fal-
sam evangelii interpretationem. bonis fortuuae, otlosi errabant per vicos et
plaieas, viris promiscue cum muUeribus dormientibus. » lia editores Chron.
eccles. Bar Hkdraei, I, col. 573, n. 2, ex s. Ëpipbanio (Haeres. lxxx) et
Theodorelo (Hacret, fab. iv,ll).
DE DENYS DE TELL-MAHRÉ 195
Il traversa toutes les villes de la région inférieure de la Mésopo-
tamie, frappant, tuant, crueiliant, et parvint à Amida.
II y resta longtemps et y fit crucifier quatre hommes ; puis il
passa à Maipherkat, et de là il revint à Amida où il se fixa. Et
lorsque
[Le reste manque dans le manuscrit.]
TABLE DES NOMS PROPRES
Aaron l'Interprète, 9.
Aba, év. d'Amida, 58, 60, 61,70,
85, 86, 90, 96.
*Abbas (= 'Ali), 8, 9, 39, 40.
*Abbas. frère de Yézid III, 30.
^Abbas, émir de Mésopotamie,
70, 72, 74, 80-82, 89, 99, 100,
105, 107, 108, 113, 122, 123.
*Abbas, générai, 14.
*Abd al-Aziz, 30.
* Abdallah (I") Ibn Mohammed
(=:Al-Saffah),55, 62, 97.
^Abdallah (II) Ibn Mohammed
(= Al-Mansour), 55, 58, 62,
75, 67, 97, 99.
'Abdallah (III) (= Al-Ma'moim\
XV. — V. Ma'moun.
•Abdallah al-Batal, 25.
•Abdallah Ibn*Ali,62.
'Abdallah Ibn Merwan, 45.
'Abdallah Ibn Tahir, xvi-xix.
'Abdallah Ibn Zobaïri, 9.
[Ibn] 'Abdallah. —V. Djarrah.
'Abd el-Malik, 9, 10, 18, 30.
Abdias, 167.
Aboubeckr, 5, 6.
Abou Djaffar, 97.
Aboulabbas al-Saffah, 55. — V.
'Abdallah I" Ibn Mohammed.
Aboulwalid, 8.
Abou MousIim, 62.
Abou 'Oun, 109, 193.
Abourin, 18.
Abraham, xxxiii, 1, 149.
Abraham, an ti patriarche, xi,
XII, XIV, XVI, XVII, XX, XXIÎ.
Adabin, 6.
Adam, 131, 153, 166.
Adam Ibn Yézid, 92.
Afrique, 75.
'Aïn al-Djarr, 'Aïn Gara, 40.
Ainswoxth, 60.
AiSouma, 60, 189.
'Aki, 46, 57.
'AxpoUoc, 25.
Alains, 21, 72.
Alep, X, 7, 23, 59.
Alexandre, xxx, 1, 22, 84.
Alexandrie, xviii, xxiv, 58, 84.
'Ali, XVI, XVII.
'Ali, 8. — V. 'Abbas.
[Ibn]'Ali.V. Saleh et 'Abdallah.
Amanus (mt), 12.
Amida, x, xxx, 4, 5, 1, 11, 14,
18-20, 29, 41, 48-50, 58, 60,
61,65,70,72,74,82,85,86,
90, 92, 96, 172, 181, 187-189,
194, 195.
Amos, 52, 67, 146.
'Ananites, xx.
TABLE DES NOMS PROPRES
197
Ânastase II, empereur, 11.
Anastase l'Éthiopien, 65, 66.
Anastase, moine, xxx.
Anath, 100.
Ancienne (égl.) d'Édesse, 9, 23.
Ani, 74.
Anikia (couv. de), xxiii.
Anne, 24.
Antéchrist, 108, 117.
Anti-Liban, 40.
Aniioche, xiv, xvi, xviii, xxiii,
XXIV, XXXIV, 3, 8-12j 21, 41,
58, 59, 70, 83, 84.
Antonin, 19.
Antonin le Rhéteur, xix.
Anzeta, 56. — V. Hanazit.
Anzitène, 49.
•Aouph, 48, 49.
'Aph§in, XXIV.
Aphtonius (couv. de Bar), ix,
XII.
Apsimare (Tibère-), 11.
*Aqoula, *Aqouléens, 4, 44, 55,
72, 129, 147.
[Beit] *Arabayé, 182.
Arabes, 4, etc.
Arade, 7.
Aradzani, 12.
Aram, Araméens, 10, 92, 94.
[Beit] Aramoyé, 26.
Arbèie, 45.
Ardebil, 23.
Arménie, Arméniens, xxxiv,
6, 7, 23, 39, 51 , 54 56, 75, 77,
80,89,101, 102,163.
Arménie (Grande-), 74, 148.
Arménie 1V«, 56, 103, 172.
Arsacides, 74.
[Beit] Ar§am, xxxi.
Arsame, Arsamosate, 89.
Arsanias (fl.), 12, 89.
Arsidonie, 91.
Ârtabas, 24, 25.
Arzanène, 58, 85, 187.
Arzoun, 49, 92, 172, 175.
As, 6.
[Ibn] Asa*ad,72.
Asie, 1, 3, 7.
Asie-Mineure, 36.
Asmosat, Aâmou§at, 89.
Assemani, ix-xi, xx, xxix,xxxii,
XXXIV, 3, 4, 7-11, 17, 18, 23,
24, 27, 28, 30, 57-60, 64, 72,
90, 96, 99, 102, 146.
Assur, Assyrie, Assyriens, 1, 2,
8, 43, 74, 79, 100, 109, 132,
141.
Athanase I®', patr., 3, 4, 7.
Athanase II, patr., 10.
Athanase III, patr., 21, 41.
Athanase Sandalaja, 41, 58, 59.
Athanase (couv. de Mar), 61, 85.
[Ibn al-]Athir, 6.
*Atliq, 27, 28.
Al-Aaiz (* Abdallah), 30.
Baal, 190.
Baalbeck, xxv, 40.
Ba*altan, 60.
Babylone, xx, 27,
Bagdad, xiv, xvii, xx, xxiii,
XXIV, xxvii, 44, 87, 122, 124,
141.
[Beit] Baïtan, 100, 108.
Balad, xxiii, 4, 122.
[Beit] Bala§, 23, 24.
Balat, 49.
Balik, IX, 28.
;
L
198
DENYS DE TELL-MAHRÉ
Balissus, 23.
Balthazar, 97.
Bar Bahloul, 90.
Barbalissus, 23.
.Bar Hébréus, ix, x, xiii, xvi,
XXI, XXIV, XXVII-XXIX, XXXIV,
3, 4,711,21, 22,24,28,31,
41. 44, 58-60, 72, 92, 186.
Baronius, 4, 7.
Barraya. — V. Goubba.
Basan, 75.
Basile (st), 144.
Basile, maphrian, xii, xv.
Basile (= Lazare), xx.
BaëmourikSy xxiii.
[Al-]Batal(*Abdallah).25.
Batna-Saroug, 7, 9. V. Saroug.
Bedjan, xxvi.
Behnam (Mar), xxvi.
Beit *Arabayé; — Aramoyé; —
Arsam ; — Baitan ; — Bala§ ;
— Garmai ; — Kéwila ; —
Ma'ada; — Nouhadra; — Qi-
douna ; — Rama ; — Sammar ;
Tahoumê; — Zabé. — V. le
deuxième vocable.
Belahdori, 6.
Bélier. 63.
Beni-Hasem, 39.
Bernsteîn, 30.
Besmé — V. Tell-Besm6.
Béthanie, 16.
Bezold, XXX.
Biniaie, xxiii.
Bir Koum, xxin.
Bithvnie, 36.
Bizona (couv. de), xiii.
[Ibn] Boctari, 49.
Boçra, 129.
Boraïka, 46, 49, 55.
Bsammyrites, xxiii.
Budge, XXX.
Byamitea^ Byrmades, xxiii.
Byzance, 4. V. Constantinople.
Çabib. — V. Çalih.
Çabya (mt), 49, 56, 187.
Caïn, 150.
Caïphe, 154.
Çaliba (couv. de Mar), 186.
Çalih Ibn Çabih, 55.
Callinice, ix, xii-xvii, xxviii, 24,
28.58,60,61,64,70,82,99,
101, 108, 189.
Camp des Perses, xviii.
Cappadoce, 4, 13, 24, 36, 67.
Cardos (mts), 71.
Caspiennes (Portes), 21.
Castrum/erreum, 24.
Caucase, 21,23.
Cedrenus, 6.
Cellarius, 89.
Césarée de Cappadoce, 24, 77.
Césarée de Palestine, 6.
Cbalcédoine, 43.
Chaldéens, 45.
Chypre, 7.
Cilicie, xxvii, 36.
Circésium, xv, 23, 60.
Çofa, 9.
Coluc, 18.
Constant II, 8, 9.
Constantin P', xxx, xxxi, xxxin,
1.
Constantin (Héraclius-), 8.
Constantin (= Constant II),
8,9.
Constantin III Pogonat, 9, 11.
TABLE DES NOMS PROPRES
199
Constantin IV Copronyme, 24,
25, 28, 55, 56.
Constantin, général, 24.
Constantin, év. d*Ëdesse, 18, 41.
Constantin, év. de Samosate, 41,
58, 60, 61, 70, 90.
Constantinople,xxvn, 12,24,84*
Cosme, év. d'Amida, 18, 19, 41.
Covaic, X.
Croix (couv. de la), 186.
Cureton, xxxi.
Cyriaque, patr. d'Antioche, xi.
Cyriaque, év. d'Amida, 4, 5.
Cyriaque, év. de Dara (?), 122.
Cyriaque, év. d'Édesse, 7 9.
Cyriaque, év. du Tour *Abdin,
60, 122 {?).
Cyrrhus, xi, xiv, xvii.
Cyrus, 30.
[Bar] Dadai. — V. Jean.
Dahaq, 42.
Daiçan, 29.
Dakoum. — V. Tell-Dakoum.
Damas, xvi, xxin, xxiv, 40, 41.
Daniel, prophète, 108, 117, 124.
Daniel, év. d'Édesse, 9.
Daniel, moine, xxiii.
Daniel, juif, xx.
Dara, xv, xxvni, xxix, 6, 18,
20, 55, 58, 60, 70, 87-90, 120,
122, 147.
Dasen, 146.
David, psalmiste, 149, 151, 155,
190.
David, maphrian, xxvii.
David, év. de Dara, antipatriar-
che, 58,60,68,87-90, 122,147,
David, juif, xx.
Denha I*', patr., xv.
Denys de Tell-Mahré, ix, x, etc.
Denys (!«>•), év. de Harran, 58,
60, 86. 90.
Denys (II), év. de Harran, 90.
Deyrik, 58.
Derbend, 21.
Diarbekir, 7. — V. Amida.
DjaflFar, 97.
Djarrah Ibn * Abdallah, 22.
Djézireh, 6.
Djor (Porte de), 21.
Dovin, 6.
Dozy, 45, 103.
Duchesne, 1.
Duval,3, 6-8, 11, 18,29.
Édesse, x, xviii, xix, 1, 3, 4,6-9,
11,14,15,18, 29, 30,41,49,
58,60,61,64-66.72,90, 116,
138, 192.
Édesse (montagne d'), 6i.
Egypte, Égyptiens, xvii-xix,
xxni-xxvi, 8, 26, 43, 52, 75,
84.
Elias, patr. d'Antioche, 11, 14,
Is. 21.
Elias, év. d'Édesse, 90.
Elias, év. de Singar, 60.
Éiie, prophète, 19.
Elisée, 21.
Éioul, village, 47.
Émèse, 41, 60.
Kphèse, XXXI, 1.
Erzeroum, 82. — V. Qaliqala.
Ésaù, 167.
Esdras, 49.
Etienne, fils de Paul, 48, 49, 55.
Etienne, év. de Ilaboura, 60, 90.
200
DENYS DE TELL-MAHRÉ
Euphrate, xv, 4, 7, 12, 23, 24,
26, 28, 40. 44, 45, 59, 60, 74.
Eusèbe, XXX, 1.
Eusebona (couv. d'), xvi.
Eutal, Eutélius, xxx, 86.
Eutbonius, xii.
Eutychius, xxiii.
Eù^rJ'cai, 194.
Eve, 00.
Ezéchias, 75.
Gaba, 100.
Gabaath deSaul, 100, 108.
Gabita, 6.
Gabriel; év. d'Édesse, 11.
Galatie, 36.
[•Aïn] Gara, 40.
Gamach, 74.
[Beil] Garraaï, 146.
Garperd, 74.
Géants, 95.
Gédéon, 190.
Geizer, xxxi.
Georges, patr.d'Antioche, 59-61,
64, 68, 70. 83-89, 147.
Georges, chorév. d'Amida, xxx.
Georges, préfet,4 .
Georges, moi ne, 96.
Gifné, 138.
Girah, 22.
Goeje (de), 6.
Goubba-Barraya, xi, xiv, xvi.
Gomorrhe, 119, 149. i
Graffin, xxxiv. |
Grégoire, patr. d'Antioche, x. \
Grégoire, 49. I
Grégoire de Naziance (si), xix.
Guidi, xxx, XXXII, xxxiv, 24, 60.
Gutscbmid, xxxi.
Habacuc, 45, 163, 185.
Habib, général, 8.
Habib, év. d'Édesse, 11, 14-16,
18.
Habib (couv. de Mar), 58, 85.
Habil (couv. de Mar). 15.
Haboura (11.), xv, 60.
Haboura, 60, 61, 63, 90.
Hadjadj, 30.
Hagar, 10.
H ah, 186.
Haïbari, 42.
llallier, xxxiv.
H ara, 49.
Harab, 84.
Harbaz, 86.
Harew, 84.
Hanazif, 49, 56.
Hani, 24.
Hani, 86, 119.
Harourites, 27, 42, 46.
Harran, 4, 14, 18.30,41,42,49,
55, 58-60, 68, 69, 86, 87, 89,
90, 99, 103, 122, 192.
llasem, 39.
Hassan Ibn Qa'ataba, 72.
Hassen, 8.
Hasya, Hassieh, xv.
Haza, 146.
Hazro, 48.
Héli,71.
Héliopolis, XXV.
Héraclée, x.
Héraclius, 4-6, 8, 96.
Hérat, 84.
Hesmi (couv.), 50.
Hiérapolis, 7.
Hini, 86.
Hins-Maslainah, ix.
TABLE DES NOMS PROPRES
201
Hirla Naamensis, 4.
Hisam, 18, 22-24, 27-30, 32, 39,
40, 75, 97.
Hoffmann, ix, 58, 60, 146, 147.
Homs, XVI.
Hossain, 8.
[Ibn] Houbeïra, 45.
Huns, 21.
Ibérie, Ibériens, 21, 49.
Ibn [Les noms commençant
par Ibn sont placés sous le
vocable qui suit ce mot].
Ibrahim, 30, 40.
Inde, 75.
Iraq *Arabi, 24.
Isaac, patr. d'Antioche, 58, 59.
Isaac de Ninive, xxvi.
Isaî (Jessé), 91.
Isaîe, 40, 108, 132, 155, 166, 168,
182, 185, 188-190.
Israël, Israélites, 26, 27, 123.
Izala(mt), 42.
Jacob, 145.
Jacques, patr. d'Alex., xvni.
Jacques d'Édesse, x, 1, 4, 7, 9.
Jacques le Juif, 4.
Jané, év. de Téla, 90.
Jean (st), apôtre, 124.
Jean I*»", patr. d'AntiochC; 7.
Jean II, patr. d'Antioche,41, 58.
JeanIII,patr.d'Antioche,xxviH.
Jean, év. des Arabes, 4, 7.
Jean d'Asie, xxxi, xxxii, 1, 3, 7.
Jean, év. de Callinice, 61, 64,
70, 83-85.
Jean,év. de Dara, xxviii, xxix.
Jean-Baptiste (égl. de St-), 7.
Jean Bar Apbtonius, ix, xii.
Jean Bar Dadaï, 47-49, 55, 56.
Jean, moine, xv.
Jean, moine, 60.
Jérémie, xxv, 31, 32, 39, 56,
136, 140, 157, 158, 162. 168,
171. 173, 175, 181,183,185,
188.
Jérusalem, 4, 31, 32, 100, 101,
108,122,140.158,179, 183.
Job, 76. 164.
Joël, 44, 106, 188, 190.
Jonas, 4.
Jonas, év. de Beit-Nouhadra,
60. 147.
Joseph, xxv.
Joseph, patr. d'Alexandrie, xxiv.
Josèphe (Flavius), xxx.
Josué le Stylite, xxxi, 49, 90.
Juda, 158. 183-
Judas Iscariote, 58, 97, 118.
Jules Africain, xxx.
Julien I®', patr. d'Antioche, x, 3.
Julien II, patr. d'Antioche, 10,
11.
Julien, 150.
Justin II, XXXI, xxxii, 1.
Justinien I«^ 1.
Justinien (= Justin II), 3, 11.
Justinien II, 11.
Justinien IV (inconnu), 3.
Kaisoum, x-xii, xxiii.
Kepher Touta, xv, 101.
Kermé, 60, 147.
[Beit] Kéwila, 71.
Khalil Ibn Zadan, 106, 193.
Kharpert, 74.
Khazares, 21, 23, 72. 99.
202
DENYS DE TELL-MAHRK
Khoraçan, 43, 62, 84.
Koka, 146.
KoniSapor, 146.
Kosroès 11^ 3.
Koufa, 44.
Koufites, 72.
Kouâan, 56, 57, 102.
Kousanites, 72.
Land, xxxii, 7, 26, 60.
Langlois, 23.
Lazare, 16.
Lazare (couv. de Mar), 50.
Lazare Bar Sabhtha, év. de
Bagdad, xx, xxi, xxxiii.
Lazare, périodeute, xxx.
Lazare, juge, xxiii.
Lazare, esclave, xxii.
Lebeau, 10.
Lée, xxxiv.
Léon (ÏIÏ), 12-14, 24, 25, 28.
Léonce, 11.
Lequien, xxiii.
Liban, Isf, 40, 163, 185.
Lycaonie, 36.
Lysinie, 36.
[Beit] Ma'ada, 49, 50.
Mabdoul, 189.
Maboug, 7, 43, 59.
MaMéens. 146. 160.
Maipherkat, 41, 46-49, 55, 58,
59.92,172,175,187,195.
Makmas, 100, 108.
McVmoun (al-), xv, xvii, xx-xxiv,
xxvii.
Manichéens, 68-70.
Mansour (al-), 55, 97.— V. *Abd-
allah.
Maraq, 28, 29.
Marga, 30, 60, 146.
Marda. — V. Mardin.
Mardas, 18.
Mardin, xi, 26, 58, 60, 70, 90,
101, 105, 106.
Marie (couv. de Ste-)» xxix.
Marouta, 120.
Mars (planète), 63.
Martin (P.), xxxii, xxxiv.
Marwan. — V. Merwan.
Masé (n.i, 62.
MaSka (Bar ). — V. Sévère.
Masius, 62.
Maslamah, 11-14, 21, 23, 34.
Masrita (Tell-), 42.
Mattaï (couv. de Mar), xii, xxvi,
97. 117.
Matthieu (st), xxvi.
Matthieu, év. d'Alep, 7.
Maures, 75, 99.
Maurice, 3.
Maurice, 3, 4.
Maupocpopot, 43.
Maurus (mt), 12.
Mèdes, Médie, 72, 75, 99.
Méditerranée, xviii.
Mélèce, patr., 84.
Mélik Ibn Sébib, 25.
Mélik Ibn Touf, 80.
Mélitène, 12, 25, 55, 67, 80.
Mère de Dieu (égl. de la), 43.
Mère de Dieu (couv. de la), 64.
Merwan I»"*, 9.
Merwan (il) Ibn Mohammed,
23, 39-42. 45. 56, 75, 97.
[Ibn] Merwan. — V. ^Abdallah.
Mésopotamie, x-xii, xiv, xviii,
XXVI, XXIX, 6, 8, 15, 26, 28.
30, 40-42, 46, 56, 58, 61-64.
TABLE DES NOMS PROPRES
203
67, 68, 70, 80, 82-84, 87, 89,
92, 98-103, 107-109, 116, 119-
121, 124, 127, 141, 161, 176,
177, 189, 194.
Messaliens, 194.
MessouadU 45.
Michée, 67, 154, 155.
Michel le Grand, 23.
Mikaël, patr. d^Âlex., 58.
Migas (= Miles), 50.
Miles (couv. de Mar), 50.
Mo'awia I®^, 7, 8.
Mo*awia II, 9.
Mohammed, 4, 39, 129.
Mohammed Ibn Tahir, xvi-xix.
Moïse, 26, 30, 52, 110, 128, 171.
MoSSOUly XV, XXIII, XXVI, XXVII,
28,40,45.55,60,72,88, 91-
93, 97, 100, 117, 119, 122,
141, 146, 161, 178, 186,192.
[Ibn] Mouç'ab. — V. Mousa.
Mourad-tchaï, 12, 74, 89.
Mousa Ibn Mouç'ab, 91, 92, 100,
110, 113, 122, 125, 127, 130.
135. 136, 141, 146, 161-164,
176, 192, 193.
Moutaçiim [al-], xxvii.
Moyse, év. de Nisîbe, xxix.
Naham, 44, 168.
Narsès, général, 3.
Narsanbad, Narsibadié, 92.
Nasr, 24.
Nectaire, patr., 84.
Néocésarée, 24.
Nil, xviii, XXVI.
Ninive, xxvi, 1, 62.
Ninus, 1.
Nirba-Barzi, 30.
Nisibe, xv, xix, xxvii, xxix, 11,
28, 45, 72. 101, 108, 116. 186,
192.
No*aim Ibn Thabit, 40.
Noé, 71.
Noeldeke, 49, 84.
Nonus, archidiacre, xix.
[Beil] Nouhadra, 60, 147.
Nubie, xxvii.
Nubiens, 75.
•Omar (h^^), 6, 7, 10, 18.
*Omar(II), 13, 14.17.
Ophni, 71.
Opsicium, 24.
Osée, 167.
'Otman, khalife, 7, 8.
*Otman, émir, xv.
Ourtéens, 49, 51,54,57, 172.
'OubeidalUh Ibn Boctari, 49.
'Gubeidallah Ibn as-Sari, xvn.
Palestine, 4, 36, 138.
Paphiagonie, 24.
PaSpasat, village, 47.
Paul (st), apôtre, 70.
Paul, év. de Tagrit, 60, 90, 147.
Paul, arménien, 48, 55.
Payne Sraith, xxxi, 61.
Pelozonium, 24, 25.
Perse, 75.
Phalkat, 26.
Pharaon. 123.
Philiponos, xix.
Philippique, empereur, 11.
Philoxène, év. de Bagdad, xx.
Philoxène, év. de Nisibe, xix,
XX, XXVII.
Phinées, 71.
Phis, village, 46, 47.
204
DENYS DE TELL-MAHRÉ
Phocas, empereur, 3-5.
Phrygie, 25.
Pierre, patr. d*Anlioche, 3.
Pilier (monastère du), xiii.
Pockoke, XXIII.
Pont, 24.
Portes Caspiennes, 21.
Porte de Fer, 21.
Porte des Turcs, 21, 22, 39.
Procope, hist.,7, 8.
Procope, général, 8.
Putiphar, xxv.
[Ibn] Qa*ataba. — V. Hassan.
Qaliqala, 80, 82.
Qaliu,, général, 28.
Qaiouq, 18.
Qamah, 74, 75, 96, 102.
Qarqaphta (couv. de), 61, 84.
Qartamin (couv. de), xi, 41, 58,
61, 90, 186.
Qatara (couv. de), 49.
Qen-Nésré (couv . de) , ix-xiii, x v,
xxviii, 59, 60.
[Boit] Qidouna, 64.
Qoqâ, 146.
Qoré, village, 30.
Qoré Ibn Thabit, 46.
Qoulab, village, 46, 47.
Qoubé (couv. de), 50.
Rabsacès, 75.
Radad, 80.
[Er-]Rakkah, ix, 28.
Rama, 100, 108.
[Beit] Rama. 117.
Razin, 138, 140, 172. 175.
Renaudot, xviii, xxiv, 58.
ReSmat (couv. de), 50.
Rhodes, xxv.
Ri§an, 61.
Ri§*aîn, xx.
Ritter, x.
Roboam, 57.
Romains, 4, etc.
Rome, 84.
Rouge (mer), 36.
Sabas, év. d'Amida, 41.
[Bar] Sabhtha, 20. — V. Lazare.
Sabinus, év. de Téla, 90.
Sachau, 12.
Sacy (de), xvii,
[Al-]Saflfah. — V. •Abdallah.
Sagistan, 84.
Saint-Martin, xxxiv, 6, 21, 56,
57, 71, 74, 82, 86, 89.
Salah, 146.
Saleh Ibn •Ali, 55.
Salem, 55.
Salomon, 108.
Salqat jfl.)» 81.
[Beit] Sammar, 26.
Samarie, 109.
Samosate, x, 41, 58. 60, 61,70,
90, 189.
Samuel, 30, 171.
Sandalaja. — V. Athanase.
Sanin, Sanoun (couv.), 50.
Saqsaqi, 42.
[Ibn as-jSari, xvii.
Saroug, xxviii, 7, 9, 10, 70.
Saturne (planète), 63.
Saùl, 100, 108.
Scété, xxix.
Scythes, 90.
[Ibn] Sébib, 25.
Séleucie-Ctésiphon, 26, 146,
TABLE DES NOMS PROPRES
205
Sénad, 72.
Sennacbérib, 75.
Sergius, général, 74.
Sergouna, év. de Mardin, 58,
60, 70, 90.
Sergouna, év. de Tell-Besmé,
85.
Sévère le Grand, patr. d'Antio-
che, XVIII.
Sévère Bar Maâka, patr., 9, 10.
Sévère (I«r)^ ^y. d'Amida, 41.
Sévère (II), év. d'Amida, 41, 58,
70, 85.
Sévère, év. d'Édesse, 3, 7.
Siegfried, xxxi.
Siffin, 9.
Sigara, Singara, 28, 60, 118.
Silas (couv. de Mar), xxviii, 10,
11.
Siméon (st) le Stylite, xvi.
Siméon , anti patriarche , xvi ,
xvii, XX vu.
Siméon de Beit-Ar5am, xxxi.
Siméon, év. d'Édesse, 7, 64-66.
Siméon, év. de Harran, 4, 14,
18, 41.
Sindh, Sindhiens, 72, 75, 99.
Sion(= Jérusalem), 56, 100, 132,
163.
XxtpToc, 29.
Socrate, hist., xxxi, 1.
Sodome, 19, 71, 119,149.
Soliman, 1, 13,40.
Soliman Ibn Hisam, 24.
Sophène. 26, 74, 102.
Sophonie, 139.
Souda, 47.
Suniiœj 4.
Synada, 25.
Syrie, x, xii,xv,xvi, xxiii, xxvii,
8, 14, 51, 54, 77, 80.
Taalabenses (=Taglibites), 4.
Taglibites, 146, 160.
Tagrit, xii, xv, xxi, xxin, xxvi,
xxvii, 8, 60, 88, 90, 117, 147.
[Ibn] Tahir. — V. ^Abdallah et
Mohammed.
[Beit] Tahoumé, 71.
Tanis, xvni, xix.
Tarmel, 20.
Tarmil-Raba, 20.
Taurus (mt), 49.
Téla, 11,18,49,90,192.
Téléda, xv.
Tell-Be§mé, 58, 85.
Tell-Dakoum, 19, 72, 86.
Tell-Mahré, ix, xlii.
Tell-Maârila, 42.
Tell el-Menahir, xlii.
Térek, 21.
Thabit Ibn No*aïm, 40.
[Ibn] Thabit (No'aïm), 40.
[Ibn] Thabit (Qoré), 46.
Théodore, patr. d'Antioche, 8, 9.
Théodore, év. de Cailinice, xiv.
Théodore, év. d'Édesse, xix.
Théodore, év. de Kaisoum, xii.
Théodore, fils de Merwan, 4.
Théodore, frère d'Héraclius, 6.
Théodore le Reddounien, 7.
Théodose, 13.
Théodose le Jeune, xxx, 1.
Théodose, fils de Maurice, 3.
Théodote, é v. d'Amida, 11,14,18.
Théophanes, 3, 5, 6, 8-10, 18,
23-25, 29, 43, 55, 72, 74.
Théophylacte, 3.
206
DENYS DK TELL-MAHRÉ
Thilaticomum, 19.
Thomas, maphrian, xxvii.
Thomas, év. d'Amida, 5, 7, 11.
Thomas d'Héraclée, x.
Thomas, archidiacre, 96.
Thomas le Stylite, 11, 18.
Thomas (égl. de Mar), 59.
Tibériade, xx.
Tibère-César, 3.
Tibère-Apsimare, 11.
Tiflis, 21.
Tigre, xxiii, 28. 29, 51, 60. 71,
72,82, 122.
Ti§pa. 49.
Timothée, patr. d'Alex., 84.
Timothée, év. d'Édesse, 58, 60,
61, 64.
[Ibn] Touf (Mélik), 80.
TouDou, 13.
Tour'Abdin, 60, 72, 119. 186.
Toutis. 172.
Tripoli de Syrie, 8.
Tuch, 62.
Tullberg, xxix, xxxi, xxxiii.
Turcs, 21-23, 39, 72.
Turquie, 138.
Tyane, 13.
Tzour (Porte de), 21.
Valentin, patrice, 6.
[Ibn] Wahab, 67.
Walid (1^0, 10, 11.
Walid(II), 30,39,40.
Weil, XV, XXIV, XXVII, 22, 25,
30, 40, 42, 45, 62, 101.
Wright, X, XIX, xx, xxvik-xxxii,
1, 3, 11, 28, 49.
Wûstenfeld, xvii, xxiv.
Yâdh, 6.
Yakoul, 6, 28, 42, 45.
Yiikoub, 42.
Yaqoub (couv. de Mar), xiii, xx.
Yézid Ibn Mo*awia, 8.
Yézid (!«'•), 9.
Yézid (II), 17, 18.
Yézid (III), 30. 40. 41.
[Ibn] Yézid (Adam), 92.
Zab, 45, 60.
[Beit] Zabé, 45.
Zacharie, év. d'Édesse, 66, 90.
Zachée, év. de Kerma, 60. 147.
Zachée (couv. de Mar). xiv,
XXVIII.
[Ibn] Zadan. — V. Khalil.
Zaïd, 90.
Zaïd (forteresse de), 74.
Zaita. Zeita, 23.
Zeinan, év. de Kerma, 147.
Zeitoun, 23.
Zo*ara(Mar), 118, 119.
Zo*ara (église de Mar). 7.
Zo*ara, moine, 97.
Zobaïri, 9.
Zohaïr, 28.
Zouqenin (couv. de), x, xxx, 7,
41. 54, 58, 65. 85, 86, 90.
Zozime, 23.
CHAL0N-8UR-8A0NB, IMP. FRANÇAISE lîT ORIENTALE DE L. MARCEAU.
CHRONIQUE
DE
DÈNYS DE TELL MAHRÉ
QUATRIÈME PARTIE
PUBLIEE ET TRADUITE PAR
J..B. CHABOT
TEXTE SYRIAQUE
PARIS
LIBRAIRIE EMILE BOUILLON, ÉDITEUR
6*7, RUE DE RICHELIEU, AD PREMIER
1895
PREFACE.
Dans rintroduction que nous avons mise en tète de
notre traduction française de cet ouvrage nous avons
parlé de la vie et des œuvres de Denys de Tell Mahré,
et nous avons donné une description sommaire du ma-
nuscrit GLXII de la bibliothèque Vaticane, d'après lequel
nous publions le texte de cet auleur.
Il nous reste, pour compléter notre travail, à faire
ici quelques observations de détail qui concernent plus
particulièrement le texte syriaque de la Chronique.
I
Le ras., avons-nous dit, se compose présentement
de 17/1 feuillets. La quatrième section de la Chronique,
précédée de la préface mise par Denys en tête de la
partie originale de son œuvre, commence au verso du
fol. isâ et occupe la fin du codex (^).
Mais le volume présente plusieurs défectuosités. La
foliation actuelle , que nous reproduisons en marge de
notre édition, est moderne et ne correspond nulle-
ment à Tétat primitif du ms. Celui-ci était composé de
cahiers de huit et de dix feuillets. Cette divergence ne
(»)
Jasquau fol. isa, le manuscrit est un palimpseste copte, ce qui
rend ]a lecture des premières parties de notre Chronique assez difficile.
A
mraiveaiK jiATiosiAfci.
permet pas de déterminer avec certitude combien de
pages ont disparu. Les cahiers sont numérotés au pre-
mier feuiliet. ^
Au fol. i3â commence le cahier 16 [a«]. Le ms.
peut donc avoir perdu, dans la partie qui précède, jus-
qu'à dix-huit feuillets. Le cahier 16 a huit feuillets
seulement et paraît complet. Le texte du moins n'in-
dique pas de lacune.
Le fol. 1/10 est marqué ^ [^9] y ce qui donne à
entendre que deux cahiers entiers []L et «mu], soit de
3a à lio pages, ont disparu. Jai omis de noter cette
lacune dans le texte [p. ^]. Elle avait d'abord échappé
à mon attention, le fol. 189 terminant régulièrement
un chapitre et le fol. i/io en commençant un autre.
Le foL i5o a est marqué Jb [21]; mais c'est là une
erreur due à la simple transposition d'un cahier. La
signature^ [20] se retrouve au fol. 160. J'ai rétabli le
texte dans son ordre naturel. Il était d'ailleurs indiqué
en dehors de la pagination, par la citation biblique
terminant le fol. iSg, dernier du cahier âi, qui se
trouve brusquement coupée au milieu d'une phrase et
continue au fol. 170, premier du cahier «£kd [ââ]. Cf.
pp. o^niD, w-i-o, *aoi.
Le cahier «£kd , actuellement le dernier du ms. , ne
comprend plus que cinq feuillets [170-17/1], encore
n est-il pas certain que les trois derniers lui appar-
tiennent. Les fol. 170 et 171 étaient bien les deux
premiers de ce cahier; mais les trois autres appartenaient
peut-être au cahier suivant. Denys a annoncé qu'il par-
lerait de trois années de calamités. Le récit des mal-
m
heurs de ia première et de la deuxième année occupe ,
pour chacune , environ dix feuillets. [Cf. pp. o:»jd , ^a^].
Il est à croire que le cahier «^o ne suffisait pas pour la
narration de la fin des calamités de la deuxième et de
toutes celles de la troisième année [1086 des Grecs],
à laquelle sarrètait la Chronique. Une phrase de la
page ^i [1. 1-3] donne à entendre que le récit se rap-r
porte à cette dernière année. 11 est certain en tous cas que
le fol. 17Û doit se lire avant les fol. 172-178. L'énumé-
ration des titres de chapitres [)J^A.t li^UA., p. i^j»), 17;
et |4-«a^t Jl ">>■• , p. «i^f, 7] ne peut laisser aucun
doute à cet égard. Nous avons donc cru devoir rétablir
Tordre primitif dans notre édition (^).
Mais en aucun endroit nous ne nous sommes permis
de transposer le texte pour rétablir l'ordre chronologique
comme la fait Assemani dans son analyse (^).
II
Wnght écrivait il y a une dizaine d années qu on ne
pourrait apprécier comme il convient le mérite de Denys
qu'après la publication de sa Chronique ^^K
^'^ Je pense qa*ii y a encore au fol. 167 a ^ une l^re transposition
due à une erreur de copiste qui a probablement introduit dans ie texte
deux notes marginales en intervertissant leur ordre respectif. Notre édi-
tion [p. wf, 1. i5-9o] suit exactement le texte, mais il semble quil
serait plus naturel de lire, I. i5 : »i»Hf ^f a^oi M^Uf olwt
^0 «»|o. ^AÎh, et de reporter les mots .md^UL ^t MJtoo à la ligne 19
après |f«» l^^ot, ou mieux encore à la ligne 90 après ||f^.
(*^ Voir rintroduction qui pré^de notre traduction française , p. xxxiv.
'^^^ Syrtac Literature, \'* édition. Eneyclop. BriUmn., XXII, SAS.
ceux surtout dans lesquels plusieurs des lettres dont
nous venons de parler sont groupées ensemble, ne saurait
être absolument garantie. Nous signalerons en particulier
les suivants :
JUifo&bid [lL9 7, i3, 19] peut aussi se lire JU«ic£^3
et JLio^^kd ou JL^icûkd. — J^.*:^.» [^ a] pourrait ma-
tériellement n'être autre chose que radjectif indéfini
). Le contexte toutefois exige un nom propre. —
[<ma, â/i] doit évidemment être corrigé en v^*.
[Cf.^ 16, ao; )ftdO 28]. — Le nom de l'évêque de Téla
yo* [jUD 10, 17] pourrait se lire ^^^ (chez notre auteur
pour Mi^oj). J'ai préféré, après Âssémani, la première
lecture qui n est pas insolite. (Cf. BibL or., I, Û67). —
yâi [yi^Ao q4] et ^1 [t%^ ilx] désignent probablement
le même personnage, et il faut adopter Tune ou l'autre
leçon pour les deux passages, «^di doit être préféré, car
la lecture ^1 est incertaine, d'après Tétiit du ms. en
cet endroit.
L'écriture au verso du fol. i56 est en grande partie
effacée. Nous avons reproduit [ pp. li - oi] ce qu'on en
peut lire et nous avons restitué de notre mieux, d'après
leurs vestiges, un certain nombre de mots. Ces resti-
tutions sont placées entre deux traits verticaux, 1 1 .
Quant au verso du fol. 17/1, actuellement le dernier
du manuscrit, il est presque entièrement illisible. Nous
avons dd nous borner à en résumer le sens d'après ce
qu'on en peut déchiffrer ["^i].
Puisque je parle de l'état matériel du manuscrit, je
ferai encore observer qu'il n'a point les alinéas que j'ai
cru utile d'introduire dans le texte.
Vil
Gomme Ta vait déjà fait remarquer TuUberg, les points
diacritiques et les signes de ponctuation ont été, pour
la plupart, ajoutés postérieurement et d'une manière
irrégulière. A mesure qu'on avance, ces signes de-
viennent déplus en plus rares, et, vers la fin du volume,
on n'en rencontre presque plus aucun. Nous n'avons
pas cru devoir en tenir compte habituellement, et nous
avons ponctué le teite d'après le sens de la phrase.
L'usage du ribbui n'est pas moins inconstant que celui
du point diacritique. Nous l'avons partout ajouté sur
les noms de nombre, lorsqu'il ne s'y trouvait pas.
Nous avons voulu toutefois donner un spécimen de
la ponctuation du manuscrit. Jusqu'à la page o, 1. la,
notre texte reproduit exactement tous les signes qui se
trouvent dans ce dernier.
Le quadruple point final [♦] ne sert pas seulement,
dans le manuscrit original, à marquer la fin des phrases,
mais aussi à mettre en évidence les noms propres (voir
les exemples que nous avons conservés, pp. qlo i-3;
ohd âi-a/i) et les passages bibliques dont il marque
parfois le commencement et la fin.
Le ms., ainsi que je l'ai déjà insinué, porte un certain
nombre de corrections postérieures. Les unes sont dans
le texte même. Elles paraissent être de la main d'Assé-
mani. L'addition du o final après la 3® pers. masc. plur.
du parfait (cf. ci-après, p. x) en constitue la majeure
partie. Je les ai toutes introduites dans mon texte en les
plaçant entre crochets, et je les ai conservées alpins même
qu'elles ne semblaient pas justifiées, comme par exemple :
B.
--!-»•( VIII )•«
On trouve aussi, ajoutées à la «marge, un certain
nombre d additions, qui paraissent être de la main du
copiste lui-même. Ce sont le plus souvent des mots omis
dans le texte et que nous avons insérés à leurs places
respectives en les plaçant entre parenthèses ().
Ënfm nous avons dd quelquefois, pour compléter le
sens, ajouter de nous-même certains motsW que nous
avons placés entre doubles crochets [()] pour les dis-
tinguer des corrections d'Assémani [], et des additions
marginales ().
IV
Sans vouloir transformer cette préface en un commen-
taire philologique, je me crois cependant obligé de
donner quelques explications sur certains mots et de
signaler quelques-unes des nombreuses fautes de co-
piste et des non moins nombreuses anomalies dont j'ai
parlé plus haut.
On peut faire remarquer tout d'abord que l'auteur
n'observe pas une orthographe constante pour les mêmes
mots. Ainsi il écrit indifféremment «^| [y»«o aa] et
^^1 [aA> 6);.tt..jïul|[aA>/i]et.mjL|[jL»i6]; iUw^
[l i] et UL-^fo» [o lo]; ^^Ti [U!LO 16, ao] et ^^^^^^^^
[«^ 10]; JLttTod et JLro^ [[] ^^' ^^1^ IIo-^jd et
llo.^ [^^ 3, 16]; 1;^ [^ 23] et )^)li [h 5];
)wi-^ et);--^ [.^ 1, i/i]; HJb et )w> [^^^^ 5, 6];
^*) Le titre a également été ajouté par nous. Dans le manuscrit le
texte de ia préface fiiit suite h la troisième partie de la Chronique sans
aucune interruption.
jvirtxin et JL^dIoo [id 5, 7 ] ;'^«£»f oao^^md) et «moWMuoaa)
[^ 7, i3];»Uaô][|ît'99] et uoei^ad [o 9]; )La.iw
[^ i3] etjla^fo^ [jbo 1]; l2i^ et iJbSfe., plur.
et ^^«âi^ [01 10, 11]; lu^l [^li^ 1] et h >»v
- ?
[j^kjD i5], et peut-être );m| [jl» 18], piur.- Jliç
et JLi«.oo| [f^9 8]; etc.
Dans les noms ^transcrits du grec, l'emploi du o et
du *• est aussi très inconstant, comme d'ailleurs chez
tousTlesT auteurs. On trouve indifféremment les formes
JJÇifim?») , idoi^AftAd) et plus souvent Jl9inm>ff») ; .mniN^ ,
■mn^iVf» ["^^9 â] et >ffKiniVg> [im.^ 1 1], etc.
Il faut attribuer à des fautes de copiste des leçons
telles que : J^^^aL [t 19] pour J^^^aI); JL
[ou» âo] pour JLidofi; *»o»adoo» [«^m^ i3] pour
^eio^doo*; "^^ [-*^ 23] pour JU; odi^^ [cia« 5]
pour«oo;^Ld; ^t^i^ [*^ ?] P^^^ \f^r^f^9 ^/rtvnm
[)Ld 6] pour ^Nom; |J(<mm»j [f^ 7] pour i^»|lMll^; etc.
De même, «m^^ao [oj 8] pour «fiâ^.,00 (voir la note,
traduct.,p. 5o),'^^[*ao 19,^^* gjpour '^^, y^^)
[m 16] pour J^»^), s'expliquent facilement par la con-
fusion des lettres s^,^ et^. Par une confusion ana-
logue, au lieu de : K««^[<^9 20] le manuscrit porte
JKC^. La leçon ?—l) [* 2 1] pour j-jl) vient aussi pro-
bablement d'une faute du copiste; son texte devait
porter ^L). — De même (L^ [«i 21] paraît une faute
pour ^^Wiâo. Cependant on trouve encore ^Xi^v» [A« 6],
qui prêtait moins à la confusion.
Je ne sais s'il faut ranger dans la môme catégorie les
formes telles que &.*LJLJ^^^ [c» 16] pour K«|K«J^m.
Peut-être faut-il y voir une simple transposition de la
lettre ), analogue à celle du o qui esl constante dans
certains mots, comme ho^û^ [h a, "^^ sA, ^i 19,
33; etc.] pour |^a^; |l^a^ [X^i» 33] pour iLâ^;
l^o) [^'fittj» 10] pour IjCh^; Ko^ [f^^^ ^^] pouf
CL^oo; li^oo [«£kd9 13] pour Ho^&i»; etc.
J'ai cru reconnaître une transposition semblable dans
le mot )J^j>ol [o^tO 3o] qui aurait été ainsi écrit pour
iLoDi; mais il est très possible quil y ait là simplement
une faute du copiste pour l^^oi (cf. â^t ai), «jai^tf
[ciK U], pour «^i^d^ n est pas absolument insolite.
On trouve aussi le •• transposé presque constamment
dans lloi^^aooi [tt 3/1 etc.], pour )U,i,^ ^oi; et on a
Notre auteur affectionne, en général, la suppression
des lettres quiescentes. Ainsi on trouve :
o^L) []Li5,o»ûi6]de préférence à o«S^L|; 1)^1)
[^i 33] de préférence à L;m)1|; jXéJBoi\ [oA 5] pour
yx^iùiU; di^LI [^^Aid 5] pour oi^fL). Dans les noms,
il préfère ^ioi [hi 1] à ^uoL; Jxim» [s^ 1] à Jb
|L^ [.^^jD 33] à lU^; pi^A [^i iti] à piLift; )
[o^y» ^9] ^ IwâLjLJ. On trouve aussi y| [pi 3] pour ^|.
hu^ [c^ 16] pour Jlii^JLd; ^Jld [o. 1] pour f||d, etc.
On peut encore observer que l'emploi de la forme
Pe^al, quand elle répond au sens passif, est préféré à
celui des formes Ethpeel ou Ethpaal; par exemple :
l^M [Jiro 13] de préférence à ^^ooL), JK^f^.*. [jL» 19,
«£» 8, s^o 17] de préférence à JS^d^J^u^f; etc.
L'absence du o et du •* quiescents est constante aux
3°^* pers. masc. et fém. plur. du parfait. Cette manière
d'écrire est d'ailleurs fréquente chez tous les écrivains
antérieurs à Jacques d'Ëdesse, et le texte de notre auteur
montre que les règles tracées par ce grammairien n'ont
pas été reçues de sitôt, même parmi les Jacobites. On
trouve donc^JD , c»J^j>, |u»,^^iid, etc., pour o^^ ou
C^^, odKû ou J^k^ , Qâofid ou yâou», etc. Cette même
suppression a Heu à Timpératif. Ainsi on rencontre
ooJto [%JD 17] pour odoKû. Les lettres quiescentes,
le o surtout, ont été très souvent ajoutées sur le ms.
par une main postérieure, comme je Tai indiqué.
Par une étrange bizarrerie, la Supers, masc. sing. du
parfait présente précisément la forme du pluriel. Notre
auteur écrit â^J», o^, etc., pour'^uD, 2^, etc. Cette
particularité orthographique, qui avait déjà été remar-
quée dans la Chronique de Jomé le StyUte^^\ ddit s'expliquer
par la contraction du pronom personnel 00» avec la
' forme verbale; ainsi â^J» est pourM'^uD, o^ pour
cei «^ (Cf. R. DuvAL, Gram. syr., p. 390, 365).
La suppression du o a aussi lieu constamment à
l'imparfait de tous les verbes V-waw. On trouve ainsi
^oc^lU [^^ 17; jbjD 1/1] pour ^oi^ojL»; ^Ui^ [^^^"^ ^]
pour ^fOMNi; ^JSaQj[Ji£o 7] pour ^loâoj; ^Qaaaj[Ji^ â]
pour ^oàoooj; ^0.^^*-^ [o(^ 10] pour ^o^qaj, etc. Ces
anomalies engendrent parfois quelque confusion : ainsi,
dans le dernier cas, sans l'emploi du^ devant le ré-
**^ Comme ia Chronique de Josuë a été précisément conservée dans
la troisième partie de la Chronique de Denys de Tell Maliré, et que son
texte n'existe dans aucun autre ms. que celui dont nous nous servons
pour la présente publication , on peut toujours se demander si ces formes
appartiennent bien h Josué , on si elles ne sont pas plutôt le fait de
Denys ou du copiste qui a transcrit les œuvres de ce dernier.
•!•*( XII )•«— — ~-.
ginie, on aurait pu croire qu'on avait affaire à l'im-
parfait du verbe J^^, qui se construit de préférence
avec ''^.
Cette étrange orthographe est même appliquée à
rimpératif. Ainsi, on a ^dL [«^tt^ 18] pour ^odoL;
^OàOi [«^>A^ 18, 2&] pour >^0)-
11 en est de même du «* dans les verbes de cette caté-
gorie. On trouve ^am^j [^^ 18; 01 9] pour ^ottbiAj;
^1 [oMiD ^4] pour ^^>«A.|; ^>>nmJS^ [d^jD 19] pour
^^*vi..flplJtoD. Je ne crois pas qu'il faille voir une suppres-
sion analogue dans les formes telles que ^^âa*. et
i:">^^ [^^uD 9, i3, lyjpour ^^,^>^> et^^,.,Nii , ;.^
[ui 6] pour w^, suppression qui donnerait au par-
ticipe passif *la forme de l'actif; mais il faut plutôt y
reconnaître une confusion dans l'emploi de ces deux
participes.
De même qu'à la 3^ pers. féin. plur. du parfait, le «
final est ordinairement supprimé, et ceci est particuliè-
rement choquant, dans le suffixe fém. sing. de la 9* pers.
«Ad, qui ne se dislingue plus alors du masc. ^. On trouve
ainsi «*d [^i 9] pour w^a-d; «^^^^^-m [^9 â3] pour
y^^y.^; ^ [^9 2*i] pour «*r2^, etc.
D'ailleurs notre auteur ne semble pas avoir apporté
beaucoup de soin dans l'emploi des suffixes. On trouve
assez fréquemment le masculin pour le féminin et réci-
proquement (^). Ainsi on a ^ooC^ [1 \n i> 11, .m x» 7,
ad9 17] pour ^oi^; ^o^A^ [odf 18] pour ^oo^; ^oo»d
^'^ Le uoui pi-opre du fleuve X^^>a? est considën^ par notre auteur,
contrairement ë l'usage, comme un féminin [u, 7, etc.].
--♦-••( XIII )>ti'
[Uo 17] pour ôiâ^j^jL, elc.
Ces eiteniples étaient même un peu plus nombreux
que ceux que l'on trouvera; car les ayant considérés,
dans les premières pages, comme des fautes de copiste,
je les ai quelquefois corrigés; mais ils se sont présentés
ensuite en si grand nombre que j'ai dû finir par y recon-
naître une des nombreuses bizarreries de l'orthographe
de Denys.
Au sujet des suHixes je ferai encore remarquer la
façon anormale dont ils sont joints au nom ou au verbe.
Ainsi le texte porte: o^i^ [t ^^] P^^^ ^^H^; «^oioiâ^
[«2^ 17] pour ^oici,i^i; ««oio^^ [o^ i3, 18, «^ 10]
pour «*o»a«J^..i^; 0M09) [ [> B] pour oiouof); *«ô«of«) [«^ 1 9
o^, ^9 1 o] pour ««ooM^I, et par suite o»of«) [«^^9] de
préférence à «»o»ouf«); ô^>^^ [%^b 21] pour
^o»lf««» [«^^d^ 1] pour ^oom?|m. On trouve même ^oil;;^
[«A09 10]; l'auteur aurait-il voulu écrire ^bo^^?
Voici encore des contractions qui se rencontrent chez
notre auteur : ^«1^;;^ [y»«o 28] pour ^ »» "^v '^-^9
|;.^po [^^ 10] pour )t^) -5A>. — Il faut probable-
ment en reconnaître une dans le mot ). \>ft>» [o^ 12]
que j'ai traduit par «t baptistère tî , parce que j'avais cru
y voir, d'après le contexte, une leçon fautive pour ^.^i^
|«âo^; mais le nom de lieu )«^^ ^.^i^ se retrouvant plus
loin [oM 2/1], il faut maintenir la leçon du manuscrit
et traduire Beit Maada. Cette contraction l.j^'tt.d pour
Ifk^ Jt^.^ représente la forme arabe que Ion retrouv(»
également dans IffoioL» [^j» 1] et Iftoo^od [jbjD ik]
XIV
pour |f?oiaj JS-i^. Il faut également reconnaître une
contraction du même genre dans «tâOAdt [c^o s] qui
est pour ydOAd'^L, forme que notre auteur emploie de
préférence à Jbamd^^JL. — o^^» [}^ 5] parait être
pour o»^£o.
La suppression du •* dans des formes telles que :
^K« [^i s/i] pour ^JS^, )«.tf| [i^i iq] pour
h .» m) , ^L«a [«M^»^ 11] pour ^K*^, semble in-
admissible et parait devoir être imputée à la négligence
du scribe.
Dans bien des cas l'assimilation du L et du t est ex-
primée dans Torthographe comme elle Tétait dans la
prononciation. Ainsi on a :^^^^L [«^* 16] pour'^^fL;
^^«iM«ij; ^â^M*Jfr^ [<^^jp 17] pour ^â^M*^^^; ^oo^A^
[io 17] pour ^oii-.?Aj; <w!l [JLo 19] pour (wtU;^??l
[^-e 5] pour^a^LI; etc.
On trouve aussi dans les verbes des permutations
entre les lettres de même organe, par exemple : «.^^Kto
[a«9 16] pour 4.ài.LKfto, q^nL^uo) [im^ s/i, ouj» i3]
pour QS^^<^l9 et quelques autres. — oaa^jbI [m:^ 19]
est pour fludJ^i^o).
Ces permutations se rencontrent encore dans les
noms, surtout entre les lettres quiescentes , par exemple :
lL»JLi [o^ ai] pour JL*j; ^iiiâ [y^ lU] pour ^1^;
{90*0 [a, 2i] pour luJLo, etc. On en rencontre éga-
lement entre d'autres consonnes, comme dans : l^^^
[d^jD 11] pour JL^«)^.
D'après cette dernière orthographe, je suis porté à
croire que l;»^^^ [oiâo^ 9 , 1 3 , 1 5 ; itej» 3 , etc.] n'est
XV
peut-être pas, comme je Tavais cru, pour l^^^oia^»,
mais pour lu^^au» (=> ji^oa») qui a le même sens.
Vu la propension de Fauteur à supprimer les lettres
quiescentes, l'addition de lettres épenthétiques a lieu
de surprendre. On trouve cependant : JliLlt [jtfiu» 21]
pour JLdff ; "^^..A^IL [«««6 10: ^ 6] à côté de^^^^^^^lL;
«•«^ [^^ is] pour ««Ij; lA^Jli [^^ 3; ^ 5] pour
llli, etc. Cette dernière leçon serait peut-être à ranger
parmi les fautes de copiste. On rencontre encore JLrLdii
[d^ 1] pour l'\'\fi etc.
Je pourrais multiplier ces exemples d'anomalies,
d'erreurs ou de particularités. Il me suflSra d'en avoir
signalé quelques-uns. Je n'ai point eu le dessein de
donner une liste complète des irrégularités que pré-
sente le texte de notre auteur; mais j'ai tenu à en citer
un bon nombre dans chaque catégorie, afin que le lec-
teur soit bien persuadé que les formes anormales qu'il
rencontrera dans ce volume ne sont point dues à des
erreurs typographiques. Elles ont d'ailleurs été signalées,
pour la plupart, dans le texte même, à l'aide d'un asté-
risque qui indique que telle est bien la leçon du manu-
scrit.
Gomme on le voit par un simple examen, presque
toutes les irrégularités ont pour raison fondamentale
que l'auteur se conformait pour l'orthographe à la pro-
nonciation beaucoup plus qu'aux règles de la gram-
maire ou de l'étymologie. Je ne pense pas qu'on puisse
en rendre compte suffisamment par l'hypothèse que
notre manuscrit aurait été écrit sous la dictée par un
scribe inexpérimenté.
' lt«( XVI )•« —
Une autre particularité du style de Denys consiste
dans l'emploi assez fréquent de mots arabes. Il était
naturel qu'il conservât en syriaque la forme des noms
propres, comme -^, jj^ [i B]; ula-,^^- [v^ 6];
|Xi:kaj,|Mi [o^^ 7]; %dQE^, ^^[h 1 1]) 6^ d'autres dont
la transcription est indiquée dans les notes de notre
traduction; on comprend encore qu'il se soit servi des
termes techniques comme : )ba^, JJs. [s^ 8, etc.];
wâo«, jj^[iAAx5,6, i3;s^j0 22;)Lrud 3;^ 1 5, etc.];
)lâ^,jJL^ [o^AiD û; jla^ 5, 7, 10, etc.];'^ûc£Ss •ô?^
JLIIaj.x^ [jla^ âa; ou^ k, 7]; ^f, »l^yi [jLrud Qi];
JI^;a>, ^;^[<Hmx)i7;<i^f i8];|U>, JU [f^ 18, etc.];
GÎMo, aIU [y»« 3] etc.; mais à côté de ces mots il en
emploie d'autres dont l'usage montre la grande in-
fluence que l'arabe avait déjà exercée sur la langue
vulgaire, par exemple : Im^o^, JvI^ [^7^ ^ ^^ ^^' ?]'
.^, ^L [^ 6, 8; fc. 5 j; JL^;;-., iiy; [oî^ 17]; ;oM,
py6[l îi, ù; fc. 11]; )?JL3,;t3^ [.^ i3],etc.
Il faut encore, semble-t-il, rapprocher de l'arabe le
verbe «aA^ (t cacher, se cachera [om si; JLjd 7;"^^ 22;
^«ftid A; ^^9 9, etc.] que j'avais d'abord considéré
comme une faute pour JL^. Je suis porté à croire que
ce n'est pas l'équivalent normal de la racine (j*JUo, mais
bien la transcription directe du verbe ^^Sio qui entre
autres sens a celui de cr fuir dans un pays éloigné -n , signi-
fication assez voisine de a se cachera.
Il faut probablement aussi chercher une origine
- > H«( XVII )•«—
arabe au mot )J^.M^ qui se trouve deux fois ainsi dis-
tinctement écrit [)-o 17, <^rô 5]. La forme syriaque
à laquelle on pourrait songer est )k^, que Bar Bah-
loul donne comme équivalent de Jj!^ == s plur. Jj^\ ,
cr tribus nomades 1); mais le contexte parait s'opposer à
celte restitution. J'avais cru y reconnaître un dérivé,
correct ou incorrect, de la racine ^U^ «ravoir besoin t),
signifiant a les choses nécessaires m , et dans le cas pré-
sent [U^^jd^ )Km^] (t les choses nécessaires aux animaux,
le fourrage n ; mais on devrait alors plutôt trouver )J^^».
En somme, ce n est peut -être qu'une faute du copiste
pour IJK^Lm», forme insolite que l'auteur aurait pu em-
ployer dans le sens de crce qui fait vivrez les animaux.
Le mot i«»diM [^^ni^ 17, o^miis âs, etc.] ne doit
évidemment pas être rattaché à la racine syriaque ««^^
ff fendre t) , mais bien à l'arabe ^^ cr se réconcilier, faire
la paix, régler les conditions de la contribution de
guerre *».
Le mot Jli«A [ouj» i/i, Jiko 7 , etc.] que nous avons
ordinairement traduit par cr acre -n , et quelquefois sim-
plement par ff champ Tî, n'est encore autre chose que
l'arabe ytSi, mesure de superficie qui signifie propre-
ment (Tce qu'une paire de bœufs peut labourer en un
jour 75.
VI
Encore quelques observations de détail, et nous en
aurons fini avec cette préface déjà trop longue.
Les divers noms d'insectes [p. ^— w-^j] et de ma-
ladies [p. «£», /Uf — a*f] donnés par l'auteur, mérite-
raient d'èlre l'objet d'une attention particulière. Mal*
heureusement le contexte n indique guère le sens précis
qu'il convient de leur attribuer, et nous croyons inutile
de citer ici les explications que le lecteur trouvera faci-
lement sous chacun de ces noms dans le Thésaurus de
P. Smith, ou mieux encore dans l'édition de Bar Bahloui
de R. Duval. Parmi les noms de maladies, nous avons
essayé d'expliquer les mots JI^am^L [ouf a], ^!;A [^i 3 ,
)Uf 3] et Qâofidud [a«9 â] qui est peut-être une faute
pour JLoADOJBo V» (voir trad., p. 178, n. h).
Il en est de même des divers noms d'impôts, la plu-
part empruntés à l'arabe, et dont on pourrait peut-être
déterminer le sens plus précis en les comparant aux
données des auteurs musulmans. Parmi ces noms, il en
est un qui nous a particulièrement embarrassé et que
nous avons traduit diversement, selon le contexte. C'est
le mot l^jxm^ qu'Assémani avait pris pour un nom
propre [iud us, voir trad., p. 90, n. A], et qui ne paraît
pas toujours employé avec la même valeur [crkmj» ih\
Wû^ i&, 16; 2^i ââ; oS^9 &, etc.]. Je suis persuadé
qu'il doit se rattacher à la racine arabe kJuw .
Je ne sais trop dans quelle série d'anomalies il con-
viendrait de placer le mot k^\k^^ [.^^^ ^ ^] ^^^ ^ ^^^
corrigé postérieurement sur le manuscrit en )A^|J^^^ .
On ne voit même pas bien le sens de cette dernière
forme. C'est peut-être simplement un adverbe dérivé de
L«^ ou de !«-•, (c récemment 7) ou cr joyeusement t) (?)
Le mot ^t;a«Adt [?r^ i&] ne semble pas moins
étrange. J'ai songé h le décomposer en |;d M^:id|, et à
traduire (ries mouches du déserta; mais en réfléchissant
XIX
aux nombreux emprunts faits par Dcnys à ia Bible,
je crois qu'il faut y reconnaître une allusion ou un
emprunt au livre I des Rois, v, 3 {Vulg.y III, iv, â3)
oii le texte hébreu porte o^o^axonaïa. Ce passage a
dailleurs lui-même beaucoup exercé la sagacité des
commentateurs. De toutes leurs opinions, il semble
qu on doive préférer celle qui veut y voir le désignation
des er oiseaux de passage v , par opposition aux oiseaux
domestiques, ou tout au moins, des oiseaux qui vivent
dans une certaine liberté, comme les pigeons, par oppo-
sition aux volatiles nourris dans les basses-cours.
iLooi [^ 6] semble être une faute du copiste pour
ILodj [cf. Ui 3]. — Le mot ^o>» iSs.jp [^^ so] qui
n'offre pas de sens, me parait être une altération d'un
dérivé quelconque de la racine ««â^^, et désigne proba-
blement les livres liturgiques [cf. JLt ao].
La forme V^oa* [JLd 5,9] parait singulière. Si elle
ne se rencontrait plusieurs fois, on pourrait songer à y
voir une faute du copiste pour UaoA*. Il faut sans doute
la rattacher à l'arabe Jjiâ.
La lecture du mot ^ooNao^*? [oi^ii^ ââ] est douteuse;
d'après le manuscrit on pourrait aussi lire ^ooM^ii^?. —
Mais par contre, celle de )l>» oy niv» [«ju» 7, yi*vix> 1 1 ;
cf. *î^ 3.] qui se rencontre ici, je crois, pour la pre-
mière fois, est absolument certaine. Il en est de même
de liuti^ [oik a, etc.]; celte leçon est constante dans
le ms. , et c'est par inadvertance qu'il m'est arrivé une
fois ou deux d'imprimer luti^.
Le texte biblique auquel le passage de notre auteur
17-18, fait allusion (Is., xxix, lû; cf. I CoB.y 1,
19) porte bien liw^oAxDcr sages T^; mais dans notre ms.,
par suite de la transposition du o (voir les exemples
cités plus haut), on lit liLd^iîrd, forme qui, si elle était
admise, signifierait plutôt cr insensés tî*
J'ai traduit le verbe w*a., dont l'usage est assez fré-
quent chez notre auteur [^^^ 6, ^^^i 7, Jbi 10, etc.],
par «r rassembler. Tî Le plus souvent j'aurais pu lui con-
server le sens «d'être opprimée, mais dans un passage
[•A^f 7] il ne paraît pas susceptible d'un sens autre que
celui de «r réunir, rassemblent, sens qui s'adapte bien à
tous les cas de son emploi. Ce sens explique d'ailleui's la
formation du mot |w*a. ct troupeau t.
Le mot Ji'is.v» qui sert à désigner les empereure aussi
bien que les khalifes, a été littéralement traduit par
crroiTï, mais le lecteur ne saurait se méprendre sur les
divers sens qu'il convient de donner à ce mot, selon
le cas.
Je rappellerai enfin que, pour l'intelligence d'un cer-
tain nombre de passages, il faut se souvenir que Denys
se sert du mot JLL^ pour désigner les Omiades et leurs
partisans, par opposition à JL^^d qui désigne les Âlfbas-
sides.
Nous n'avons point la prétention de croire que notre
travail soit exempt de tout reproche; mais, en raison
même des diQicultés que nous avons exposées plus haut,
nous pensons pouvoir compter sur la bienveillance de
nos lecteurs pour excuser les fautes qui ont pu échapper
à notre attention.
J.-B. Chabot.
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[// manque ici un ou pbaieurs feuillet» dans le manuscrit.]
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[// manque ici un ou plusieurs feuilieU dans le numuscrit. ]
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